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L’unique enfant de M. et de Mme Necker naquit le 22 avril 1766. Les derniers mois qui précédèrent sa naissance furent remplis pour sa mère de souffrances inexprimables et de sombres pressentimens. Elle croyait ne pas survivre à cette épreuve et se désespérait à la pensée de laisser seuls au monde un mari qu’elle adorait et un enfant sans appui. Aussi, dans cette pensée, se préoccupait-elle d’assurer à son enfant les bienfaits d’une éducation chrétienne, et les soins d’une femme qui pût lui tenir lieu de mère. Parmi les personnes avec lesquelles Mme Necker était entrée en relation dès son arrivée à Paris, se trouvait la femme du banquier Vernet dans la maison duquel M. Necker avait fait ses débuts. M. Vernet, appartenait à une très ancienne famille de Genève, et il était proche parent du pasteur Jacob Vernet que ses démêlés avec Voltaire ont rendu célèbre <ref> Ce fut dans cette même famille Vernet que le petit-fils de Mme Necker, le baron Auguste de Staël, trouva en 1827 la compagne de sa vie, a la tendresse de laquelle il fat enlevé au bout de quelques mois de mariage, et qui est morte elle-même le 11 décembre 1876, après être toujours demeurée fidèle à son nom et à sa mémoire.</ref>. Ce fut probablement le souvenir de l’appui prêté à son mari par M. Vernet qui encouragea Mme Necker à s’adresser à Mme Vernet pour lui demander de servir de marraine et au besoin de mère à l’enfant dont elle attendait la naissance. Dans cette pensée, elle lui adressa la lettre suivante :
L’unique enfant de M. et de Mme Necker naquit le 22 avril 1766. Les derniers mois qui précédèrent sa naissance furent remplis pour sa mère de souffrances inexprimables et de sombres pressentimens. Elle croyait ne pas survivre à cette épreuve et se désespérait à la pensée de laisser seuls au monde un mari qu’elle adorait et un enfant sans appui. Aussi, dans cette pensée, se préoccupait-elle d’assurer à son enfant les bienfaits d’une éducation chrétienne, et les soins d’une femme qui pût lui tenir lieu de mère. Parmi les personnes avec lesquelles Mme Necker était entrée en relation dès son arrivée à Paris, se trouvait la femme du banquier Vernet dans la maison duquel M. Necker avait fait ses débuts. M. Vernet, appartenait à une très ancienne famille de Genève, et il était proche parent du pasteur Jacob Vernet que ses démêlés avec Voltaire ont rendu célèbre <ref> Ce fut dans cette même famille Vernet que le petit-fils de Mme Necker, le baron Auguste de Staël, trouva en 1827 la compagne de sa vie, a la tendresse de laquelle il fat enlevé au bout de quelques mois de mariage, et qui est morte elle-même le 11 décembre 1876, après être toujours demeurée fidèle à son nom et à sa mémoire.</ref>. Ce fut probablement le souvenir de l’appui prêté à son mari par M. Vernet qui encouragea Mme Necker à s’adresser à Mme Vernet pour lui demander de servir de marraine et au besoin de mère à l’enfant dont elle attendait la naissance. Dans cette pensée, elle lui adressa la lettre suivante :




Mon terme approche, madame, et ce terme est quelquefois celui de la vie. Sans m’arrêter à cette idée, que mon attachement pour mon mari rendroit effrayante, je crois cependant que je puis accorder quelques précautions à mes devoirs et à ma tranquilité. La tendresse maternelle est inquiète. Est-il rien de plus propre à lui procurer le repos que de lui substituer les soins de la vertu la plus pure et la plus attentive ? C’est un bonheur que je me flatte d’obtenir si vous daignez être la maraine de notre enfant conjointement avec M. Vernet et M. Necker <ref> M. Louis Necker, frère de Jacques Necker, et connu plus tard sous le nom de Necker de Germani.</ref>. Si je meurs, cet enfant ne sera pas sans mère ; mon âme sera tranquille à cet égard, et j’aurai rempli mes devoirs envers lui dans toute leur étendue. Si Dieu me conserve la vie, vos vertus nous serviront de modèle ; vous dirigerez la mère, et elle mettra ses soins à rendre son enfant digne de votre amitié. Tels sont, madame, les motifs qui nous ont déterminés à vous faire cette proposition, nous les avons pris
Mon terme approche, madame, et ce terme est quelquefois celui de la vie. Sans m’arrêter à cette idée, que mon attachement pour mon mari rendroit effrayante, je crois cependant que je puis accorder quelques précautions à mes devoirs et à ma tranquilité. La tendresse maternelle est inquiète. Est-il rien de plus propre à lui procurer le repos que de lui substituer les soins de la vertu la plus pure et la plus attentive ? C’est un bonheur que je me flatte d’obtenir si vous daignez être la maraine de notre enfant conjointement avec M. Vernet et M. Necker <ref> M. Louis Necker, frère de Jacques Necker, et connu plus tard sous le nom de Necker de Germani.</ref>. Si je meurs, cet enfant ne sera pas sans mère ; mon âme sera tranquille à cet égard, et j’aurai rempli mes devoirs envers lui dans toute leur étendue. Si Dieu me conserve la vie, vos vertus nous serviront de modèle ; vous dirigerez la mère, et elle mettra ses soins à rendre son enfant digne de votre amitié. Tels sont, madame, les motifs qui nous ont déterminés à vous faire cette proposition, nous les avons pris