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Ma mère venait me voir fort rarement : malgré ce que nous étions l’une à l’autre, nous ne nous tenions presque plus. Je ne pouvais être alors un objet d’ambition : mon bien paraissait trop médiocre pour faire un mariage brillant. Je n’étais donc qu’une grande fille, propre seulement à déparer une mère et à la vieillir. Mes dispositions n’étaient pas plus favorables : ce que mon père m’avait dit ne me sortait point de la tête.

La conduite de ma mère ne le justifiait que trop. Ses liaisons avec le marquis de N…, dont je ne pouvais plus être le prétexte, commencèrent à faire du bruit dans le monde. Elle avait formé apparemment le dessein de l’épouser, dès qu’elle avait espéré de devenir libre. Quand le temps d’exécuter son projet fut venu, elle me tint de ces sortes de discours vagues qui ne signifient rien, et qui mettent pourtant en droit de vous dire : Je vous l’avais dit.

J’appris, à quelques jours de là, que le mariage était fait. Mon tuteur eut ordre de m’en instruire. Cet homme, qui avait eu son éducation chez mon père, et qui y avait fait une espèce de fortune, m’aimait comme si j’eusse été sa fille, et s’affligeait d’un événement qui, selon lui, me faisait grand tort. Mon insensibilité le consola, et surtout la ferme résolution où je lui parus de rester dans mon couvent. Hélas ! elle ne me coûtait guère. Quel lieu plus agréable que celui où je voyais ce que j’aimais !

Le mariage de ma mère, qui ne me touchait pas pour moi, me toucha cependant par un autre endroit ; il me rappelait la mort de mon père ; ce père qui m’aimait si tendrement, l’avais-je assez pleuré ? Je me reprochais, et je reprochais à Barbasan d’avoir trop tôt