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n’en a pas un. A-t-il dit un mot de sa Clémentine ?
n’en a pas un. A-t-il dit un mot de sa Clémentine ?
Ne faites point la folle, a repris ma tante, vous
Ne faites point la folle, a repris ma tante, vous
êtes ordi-
êtes ordinairement plus raisonnable. Plus
raisonnable, ai-je répliqué. Ah ! Madame, le cœur
de Sir Charles est au plus un cœur divisé. Jamais
le mien n’avoit été à l’épreuve jusqu’à ce moment.
Je ne vous cache aucun de mes foibles, chère miladi.
Ma tante m’a fait entrer, Sir Charles est venu
au-devant de moi ; et de l’air le plus engageant, il
m’a menée vers un fauteuil qui se trouvoit vacant
entre ma tante et ma grand’mère. Il n’a point
remarqué mon émotion, et j’en ai eu plus de facilité
à me remettre ; d’autant plus même que de son côté
il sembloit être aussi dans quelque petite confusion.
Cependant il s’est assis ; et sa voix se fortifiant
à mesure qu’il parloit, il nous a tenu ce discours.
Jamais, mesdames, on ne s’est trouvé dans une
situation plus singulière que la mienne. Vous en
connoissez le fond ; vous savez quels ont été mes
embarras, du côté d’une famille que je dois toujours
respecter, du côté d’une personne à qui je dois,
pour toute ma vie, la plus parfaite admiration :
et vous, madame (en s’adressant à ma grand’mère),
vous avez eu la bonté de me faire connoître qu’à
mille témoignages d’une vraie grandeur d’ame,
Miss Byron
joint celui de prendre un tendre intérêt au sort
d’une femme, qui est la Miss Byron d’Italie. Je
ne fais point d’excuse pour cette comparaison :
mon cœur, j’ose le dire (en s’adressant à moi),
égale le vôtre, mademoiselle, pour la franchise et
la bonne foi.
Ma grand’mère a répondu pour moi qu’il n’avoit pas
besoin d’excuses, et que nous rendions tous justice
au mérite de la dame italienne. Il a repris.
Dans une situation si extraordinaire, quoique ce
que j’ai à dire puisse être recueilli de mon
histoire, et quoique vous m’ayez fait la grâce
d’approuver les vues qui me font aspirer à l’estime
de Miss Byron, il me semble que je dois à sa
délicatesse et à la vôtre une sincère exposition de
l’état de mon cœur : je vais m’expliquer avec toute
la bonne foi qui convient dans les traités de cette
nature, comme dans ceux qui se concluent
solennellement entre les nations.
Je ne suis pas insensible à la beauté ; mais jusqu’à
présent la beauté seule n’a eu de pouvoir que sur
mes yeux, par le plaisir dont on ne peut
naturellement se défendre à la vue de cette
perfection. Si mon cœur n’avoit pas été comme hors
de ses atteintes, permettez-moi cette expression,
et si j’avois été maître de moi-même, Miss Byron,
dès la première fois que je l’ai vue,
ne m’auroit pas laissé d’autre choix. Mais l’honneur
que j’eus de converser avec elle, me fit observer
dans son ame et dans sa conduite, cette véritable
dignité, cette délicatesse, cette noble franchise
que j’ai toujours regardé comme les qualités
distinctives de son sexe : quoique je ne les eusse
jamais trouvées au même degré que dans une seule
femme. J’éprouvai bientôt que mon admiration