« Le Romantisme et l’éditeur Renduel (RDDM) » : différence entre les versions

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<div class="text">{{journal|[[Revue des Deux Mondes]], décembre 1895|[[Adolphe Jullien]]|Le Romantisme et l’éditeur Renduel}}
 
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:Redis-nous cette guerre,
:Les livres faits naguère
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:De Renduel !
 
Théodore de Banville. - ''Aube romantique''.</small>
 
 
 
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Et ce duel entre « deux poètes » n'eut pas lieu, pas plus que celui dont Hugo, précédemment, avait été menacé par Vigny. Voici dans quelles circonstances : Buloz, en ce temps-là, traitait fort bien l'auteur d'Eloa et donnait volontiers des extraits de ses nouveaux ouvrages, mais il se gardait d'en faire autant pour Hugo. Celui-ci se plaignait un jour en termes peu flatteurs pour Vigny, qu'il semblait rejeter au dernier rang; alors, Buloz lui expliqua avec sa rudesse habituelle les motifs de la réserve qu'il gardait à son égard : s'il ne publiait jamais de fragment de ses ouvrages, lui dit-il tout net, c'est qu'il était assuré de recevoir le lendemain une quittance à solder, et qu'il n'avait pas l'habitude de payer les services qu'il rendait. Cette conversation aurait dû rester secrète; mais le monde littéraire est aussi bavard que curieux. Finalement, les propos désobligeans d'Hugo revinrent à Vigny, qui, en sa qualité d'ancien officier, voulut en tirer réparation par les armes; mais cette ferraillade aurait été extravagante, et les témoins, dont Renduel, traînèrent si bien les choses en longueur que Vigny finit par se calmer, sans avoir seulement égratigné son détracteur (8).
 
Je reviens à Juliette. Elle était, paraît-il, d'une beauté accomplie, et Gautier a tracé d'elle, clansdans l'ancien Figaro, un brillant portrait qui finissait ainsi : « Le col, les épaules, les bras sont d'une perfection tout antique chez mademoiselle Juliette; elle pourrait inspirer dignement les sculpteurs, et être admise au concours de beauté avec les jeunes Athéniennes qui laissaient tomber leurs voiles devant Praxitèle méditant sa Vénus. » Sa principale création fut la princesse Negroni, de Lucrèce Borgia, et Théophile assure qu'elle y jeta « le plus vif rayonnement ». Hugo, de son côté, termine ainsi ses remerciemens aux acteurs : « Certains personnages du second ordre sont représentés à la Porte-Saint-Martin par des acteurs qui sont du premier ordre et qui se tiennent avec une grâce, une loyauté et un goût parfaits dans le demi-jour de leurs rôles. L'auteur les en remercie ici. Parmi ceux-ci, le public a vivement distingué mademoiselle Juliette. On ne peut guère dire que la princesse Negroni soit un rôle : c'est, en quelque sorte, une apparition. C'est une figure belle, jeune et fatale, qui passe, soulevant aussi son coin du voile sombre qui couvre l'Italie au seizième siècle. Mademoiselle Juliette a jeté sur cette figure un éclat extraordinaire. Elle n'avait que peu de mots à dire, elle y a mis beaucoup de pensée. Il ne faut à cette jeune actrice qu'une occasion pour révéler puissamment au public un talent plein d'âme, de passion et de vérité.
 
Quelques mois après, Hugo confiait à Mlle Juliette le rôle important de Jane dans Marie Tudor; mais cette fois la comédienne fut tellement inférieure à sa tâche qu'elle dut, sous prétexte d'indisposition, céder le personnage à Mlle Ida, et cela dès le second soir : « L'actrice qui remplissait le rôle de Jane, écrit méchamment la Revue de Paris, l'a cédé, ce qui l'a beaucoup indisposée, à Mlle Ida... » Mais l'auteur consola sa bien-aimée de cette déconvenue en proclamant pour les âges futurs « qu'elle avait montré dans ce rôle un talent plein d'avenir, un talent souple, gracieux, vrai, tout à la fois pathétique et charmant, intelligent et naïf. »