« Pensées philosophiques/Addition aux Pensées philosophiques » : différence entre les versions

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Toute action vertueuse est accompagne de satisfaction intrieure ; toute action criminelle, de remords ; or l'esprit avoue, sans honte et sans remords, sa rpugnance pour telles et telles propositions ; il n'y a donc ni vertu ni crime, soit les croire, soit les rejeter. 14. S'il faut encore une grce pour bien faire, quoi a servi la mort de Jsus¡ÝChrist ? 15. S'il y a cent mille damns pour un sauv, le diable a toujours l'avantage, sans avoir abandonn son fils la mort. 16. Le dieu des chrtiens est un pre qui fait grand cas de ses pommes, et fort peu de ses enfants. 17. tez la crainte de l'enfer un chrtien, et vous lui terez sa croyance. 18.
 
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Une religion vraie, intressant tous les hommes dans tous les temps et dans tous les lieux, a d tre ternelle, universelle et vidente ; aucune n'a ces trois caractres. Toutes sont donc trois fois dmontres fausses. 19. Les faits dont quelques hommes seulement peuvent tre tmoins sont insuffisants pour dmontrer une religion qui doit tre galement crue par tout le monde. 20. Les faits dont on appuie les religions sont anciens et merveilleux, c'est¡Ý¡Ýdire les plus suspects qu'il est possible, pour prouver la chose la plus incroyable. 21. Prouver l'vangile par un miracle, c'est prouver une absurdit par une chose contre nature. 22. Mais que Dieu fera¡Ýt¡Ýil ceux qui n'ont pas entendu parler de son fils ? Punira¡Ýt¡Ýil des sourds de n'avoir pas entendu ?
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23. Que fera¡Ýt¡Ýil ceux qui, ayant entendu parler de sa religion, n'ont pu la concevoir ? Punira¡Ýt¡Ýil des pygmes de n'avoir pas su marcher pas de gant ? 24. Pourquoi les miracles de Jsus¡ÝChrist sont¡Ýils vrais, et ceux d'Esculape, d'Apollonius de Tyane et de Mahomet sont¡Ýils faux ? 25. Mais tous les juifs qui taient Jrusalem ont apparemment t convertis la vue des miracles de Jsus¡ÝChrist ? Aucunement. Loin de croire en lui, ils l'ont crucifi. Il faut convenir que ces juifs sont des hommes comme il n'y en a point ; partout on a vu les peuples entrans par un seul faux miracle, et Jsus¡ÝChrist n'a pu rien faire du peuple juif avec une infinit de miracles vrais. 26.
 
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C'est ce miracle¡Ýl d'incrdulit des juifs qu'il faut faire valoir, et non celui de sa rsurrection. 27. Il est aussi sr que deux et deux font quatre, que Csar a exist ; il est aussi sr que Jsus¡ÝChrist a exist que Csar. Donc il est aussi sr que Jsus¡ÝChrist est ressuscit, que lui ou Csar a exist. Quelle logique ! L'existence de Jsus¡ÝChrist et de Csar n'est pas un miracle. 28. On lit dans la vie de M De Turenne , que le feu ayant pris dans une maison, la prsence du saint¡Ýsacrement arrta subitement l'incendie. D'accord. Mais on lit aussi dans l'histoire, qu'un moine ayant empoisonn une hostie consacre, un empereur d'Allemagne ne l'eut pas plus tt avale qu'il en mourut. 29. Il y avait l autre chose que les apparences du pain et du vin, ou il faut dire que le poison s'tait incorpor au corps et au sang de Jsus¡ÝChrist. 30.
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Ce corps se moisit, ce sang s'aigrit. Ce dieu est dvor par les mites sur son autel. Peuple aveugle, gyptien imbcile, ouvre donc les yeux ! 31. La religion de Jsus¡ÝChrist, annonce par des ignorants, a fait les premiers chrtiens. La mme religion, prche par des savants et des docteurs, ne fait aujourd'hui que des incrdules. 32. On objecte que la soumission une autorit lgislative dispense de raisonner. Mais o est la religion, sur la surface de la terre, sans une pareille autorit ? 33. C'est l'ducation de l'enfance qui empche un mahomtan de se faire baptiser ; c'est l'ducation de l'enfance qui empche un chrtien de se faire circoncire ; c'est la raison de l'homme fait qui mprise galement le baptme et la circoncision. 34.
 
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Il est dit dans Saint Luc, que Dieu le pre est plus grand que Dieu le fils, pater major me est . Cependant, au mpris d'un passage aussi formel, l'glise prononce anathme au fidle scrupuleux qui s'en tient littralement aux mots du testament de son pre. 35. Si l'autorit a pu disposer son gr du sens de ce passage, comme il n'y en a pas un dans toutes les critures qui soit plus prcis, il n'y en a pas un qu'on puisse se flatter de bien entendre, et dont l'glise ne fasse dans l'avenir tout ce qu'il lui plaira. 36. tu es petrus, etc. est¡Ýce l le langage d'un dieu, ou une bigarrure digne du seigneur des accords ? 37. in dolore paries. tu engendreras dans la douleur, dit Dieu la femme prvaricatrice. Et que lui ont fait les femelles des animaux, qui engendrent aussi dans la douleur ? 38.
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S'il faut entendre la lettre, pater major me est, Jsus¡ÝChrist n'est pas Dieu. S'il faut entendre la lettre, hoc est corpus meum, il se donnait ses aptres de ses propres mains ; ce qui est aussi absurde que de dire que Saint Denis baisa sa tte aprs qu'on la lui eut coupe. 39. Il est dit qu'il se retira sur le mont des oliviers, et qu'il pria. Et qui pria¡Ýt¡Ýil ? Il se pria lui¡Ýmme. 40. ce Dieu, qui fait mourir Dieu pour apaiser Dieu, est un mot excellent du baron de la Hontan. Il rsulte moins d'vidence de cent volumes in¡Ýfolio , crits pour ou contre le christianisme, que du ridicule de ces deux lignes. 41. Dire que l'homme est un compos de force et de faiblesse, de lumire et d'aveuglement, de petitesse et de grandeur, ce n'est pas lui faire son procs, c'est le dfinir. 42. L'homme est comme Dieu ou la nature l'a fait ; et Dieu ou la nature ne fait rien de mal.
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43. Ce que nous appelons le pch originel, Ninon De L'Enclos l'appelait le pch original . 44. C'est une impudence sans exemple que de citer la conformit des vanglistes, tandis qu'il y a dans les uns des faits trs¡Ýimportants dont il n'est pas dit un mot dans les autres. 45. Platon considrait la divinit sous trois aspects, la bont, la sagesse et la puissance. Il faut se fermer les yeux pour ne pas voir l la trinit des chrtiens. Il y avait prs de trois mille ans que le philosophe d'Athnes appelait logos ce que nous appelons le verbe. 46. Les personnes divines sont, ou trois accidents, ou trois substances. Point de milieu. Si ce sont trois accidents, nous sommes athes ou distes. Si ce sont trois substances, nous sommes paens. 47.
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Dieu le pre juge les hommes dignes de sa vengeance ternelle : Dieu le fils les juge dignes de sa misricorde infinie : le Saint¡ÝEsprit reste neutre. Comment accorder ce verbiage catholique avec l'unit de la volont divine ? 48. Il y a longtemps qu'on a demand aux thologiens d'accorder le dogme des peines ternelles avec la misricorde infinie de Dieu ; et ils en sont encore l. 49. Et pourquoi punir un coupable, quand il n'y a plus aucun bien tirer de son chtiment ? 50. Si l'on punit pour soi seul, on est bien cruel et bien mchant. 51. Il n'y a point de bon pre qui voult ressembler notre pre cleste.
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52. Quelle proportion entre l'offenseur et l'offens ? Quelle proportion entre l'offense et le chtiment ? Amas de btises et d'atrocits ! 53. Et de quoi se courrouce¡Ýt¡Ýil si fort, ce Dieu ? Et ne dirait¡Ýon pas que je puisse quelque chose pour ou contre sa gloire, pour ou contre son repos, pour ou contre son bonheur ? 54. On veut que Dieu fasse brler le mchant, qui ne peut rien contre lui, dans un feu qui durera sans fin ; et on permettrait peine un pre de donner une mort passagre un fils qui compromettrait sa vie, son honneur et sa fortune ! 55. chrtiens ! Vous avez donc deux ides diffrentes de la bont et de la mchancet, de la vrit et du mensonge. Vous tes donc les plus absurdes des dogmatistes, ou les plus outrs des pyrrhoniens.
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56. Tout le mal dont on est capable n'est pas tout le mal possible : or, il n'y a que celui qui pourrait commettre tout le mal possible qui pourrait aussi mriter un chtiment ternel. Pour faire de Dieu un tre infiniment vindicatif, vous transformez un ver de terre en un tre infiniment puissant. 57. entendre un thologien exagrer l'action d'un homme que Dieu fit paillard, et qui a couch avec sa voisine, que Dieu fit complaisante et jolie, ne dirait¡Ýon pas que le feu ait t mis aux quatre coins de l'univers ? Eh ! Mon ami, coute Marc¡ÝAurle, et tu verras que tu courrouces ton dieu pour le frottement illicite et voluptueux de deux intestins. 58. Ce que ces atroces chrtiens ont traduit par ternel ne signifie, en hbreu, que durable . C'est de l'ignorance d'un hbraste, et de l'humeur froce d'un interprte, que vient le dogme de l'ternit des peines. 59.
 
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Pascal a dit : si votre religion est fausse, vous ne risquez rien la croire vraie ; si elle est vraie, vous risquez tout la croire fausse. un iman en peut dire tout autant que Pascal. 60. Que Jsus¡ÝChrist qui est Dieu ait t tent par le diable, c'est un conte digne des mille et une nuits . 61. Je voudrais bien qu'un chrtien, qu'un jansniste surtout, me ft sentir le cui bono de l'incarnation. Encore ne faudrait¡Ýil pas enfler l'infini le nombre des damns si l'on veut tirer quelque parti de ce dogme. 62. Une jeune fille vivait fort retire : un jour elle reut la visite d'un jeune homme qui portait un oiseau ; elle devint grosse : et l'on demande qui est¡Ýce qui a fait l'enfant ? Belle question ! C'est l'oiseau. 63.
 
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Mais pourquoi le cygne de Lda et les petites flammes de Castor et Pollux nous font¡Ýils rire, et que nous ne rions pas de la colombe et des langues de feu de l'vangile ? 64. Il y avait, dans les premiers sicles, soixante vangiles presque galement crus. On en a rejet cinquante¡Ýsix pour raison de purilit et d'ineptie. Ne reste¡Ýt¡Ýil rien de cela dans ceux qu'on a conservs ? 65. Dieu donne une premire loi aux hommes ; il abolit ensuite cette loi. Cette conduite n'est¡Ýelle pas un peu d'un lgislateur qui s'est tromp, et qui le reconnat avec le temps ? Est¡Ýce qu'il est d'un tre parfait de se raviser ? 66. Il y a autant d'espces de foi qu'il y a de religions au monde. 67. Tous les sectaires du monde ne sont que des distes hrtiques.
 
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