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Les inconvénients d’une telle organisation sont à peine sensibles tant que dure la lune de miel de la victoire, prolongée, d’ailleurs, par l’habileté et l’autorité personnelle de Guillaume {{rom-maj|ii|2}}. Mais elle ne saurait durer toujours, et si même le Bundesrath et le Reichstag pouvaient continuer d’être le conseil froidement discret et l’assemblée un peu hargneuse, mais obéissante quand même, qu’ils ont été jusqu’à présent, cette situation ne saurait survivre à l’annexion des provinces autrichiennes. Sans doute, le particularisme est mort, en tant qu’obstacle à l’unité ; seulement unité allemande et prédominance prussienne ne sont pas synonymes à perpétuité ; s’ils le furent au début, les deux termes perdent déjà un peu de leur équivalence. L’accord, d’ailleurs, n’existe entre Allemands ni au point de vue religieux, ni au point de vue économique. Le jour où le Sud recevra un pareil renfort, comment les conflits qui déjà mettent aux prises catholiques et protestants, industriels et agrariens n’auraient-ils pas une répercussion directe au sein du Conseil Fédéral ? Ce jour-là, le roi de Prusse ne pourra plus gouverner l’Empire sans l’exposer à de graves désordres. Il faudra de toute nécessité modifier l’œuvre de 1867 et créer les prérogatives impériales qui n’existent pas. Cela ne se fera point sans résistances de la part de la Prusse. Si Guillaume {{rom-maj|ii|2}} n’est plus, son successeur sera-t-il à la hauteur de cette tâche intéressante et patriotique, mais infiniment délicate ?… Tout est là.
Les inconvénients d’une telle organisation sont à peine sensibles tant que dure la lune de miel de la victoire, prolongée, d’ailleurs, par l’habileté et l’autorité personnelle de Guillaume {{rom-maj|ii|2}}. Mais elle ne saurait durer toujours, et si même le Bundesrath et le Reichstag pouvaient continuer d’être le conseil froidement discret et l’assemblée un peu hargneuse, mais obéissante quand même, qu’ils ont été jusqu’à présent, cette situation ne saurait survivre à l’annexion des provinces autrichiennes. Sans doute, le particularisme est mort, en tant qu’obstacle à l’unité ; seulement unité allemande et prédominance prussienne ne sont pas synonymes à perpétuité ; s’ils le furent au début, les deux termes perdent déjà un peu de leur équivalence. L’accord, d’ailleurs, n’existe entre Allemands ni au point de vue religieux, ni au point de vue économique. Le jour où le Sud recevra un pareil renfort, comment les conflits qui déjà mettent aux prises catholiques et protestants, industriels et agrariens n’auraient-ils pas une répercussion directe au sein du Conseil Fédéral ? Ce jour-là, le roi de Prusse ne pourra plus gouverner l’Empire sans l’exposer à de graves désordres. Il faudra de toute nécessité modifier l’œuvre de 1867 et créer les prérogatives impériales qui n’existent pas. Cela ne se fera point sans résistances de la part de la Prusse. Si Guillaume {{rom-maj|ii|2}} n’est plus, son successeur sera-t-il à la hauteur de cette tâche intéressante et patriotique, mais infiniment délicate ?… Tout est là.


Les apparences, on le voit, sont trompeuses. Au premier abord, ce qui paraît solide en Allemagne, c’est l’édiflce politique puissamment construit, cimenté de sang et de gloire, tandis que les oppositions de caractères, de religions, d’intérêts, les exagérations de l’impérialisme, les progrès des socialistes tendraient à faire croire que socialement et moralement, l’unité n’est point complète. Dans la réalité, c’est tout le contraire. Les rouages politiques sont frêles parce que le poids qu’ils étaient destinés à supporter
Les apparences, on le voit, sont trompeuses. Au premier abord, ce qui paraît solide en Allemagne, c’est l’édifice politique puissamment construit, cimenté de sang et de gloire, tandis que les oppositions de caractères, de religions, d’intérêts, les exagérations de l’impérialisme, les progrès des socialistes tendraient à faire croire que socialement et moralement, l’unité n’est point complète. Dans la réalité, c’est tout le contraire. Les rouages politiques sont frêles parce que le poids qu’ils étaient destinés à supporter