« Le Sphinx des glaces/II/XIV » : différence entre les versions

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Le titre donné à ce chapitre indique que les aventures de William Guy et de ses compagnons après la destruction de la goélette anglaise, les détails de leur existence sur l’île Tsalal depuis le départ d’Arthur Pym et de Dirk Peters, vont être très succinctement racontés.
Le titre donné à ce chapitre indique que les aventures de William Guy et de ses compagnons après la destruction de la goélette anglaise,
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Le titre donné à ce chapitre indique que les aventures de William Guy et de ses compagnons après la destruction de la goélette anglaise, les détails de leur existence sur l’île Tsalal depuis le départ d’Arthur Pym et de Dirk Peters, vont être très succinctement racontés.
 
Transportés à la caverne, William Guy et les trois autres matelots, Trinkle, Roberts, Covin, avaient pu être rappelés à la vie. En réalité, c’était la faim – rien que la faim –, qui avait réduit ces malheureux à un état de faiblesse voisin de la mort.
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À ce récit, William Guy répondit par le résumé des onze ans qu’il avait passés sur l’île Tsalal.
 
On ne l’a point oublié, le 8 février 1828, l’équipage de la ''Jane'', n’ayant aucunement lieu de soupçonner la mauvaise foi de la population
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tsalalaise et de son chef Too-Wit, débarqua, afin de se rendre au village de Klock-Klock, non sans avoir mis en état de défense la goélette à bord de laquelle six hommes étaient restés.
 
L’équipage, en comptant le capitaine William, le second Patterson, Arthur Pym et Dirk Peters, formait un groupe de trente-deux hommes armés de fusils, de pistolets et de couteaux. Le chien Tigre l’accompagnait.
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Sept, miraculeusement abrités au fond d’une large déchirure de la colline, avaient survécu. C’étaient William Guy, Patterson, Roberts, Covin, Trinkle, plus Forbes et Lexton, morts depuis. Quant à Tigre, avait-il péri sous l’éboulement ou avait-il échappé, ils l’ignoraient.
 
Cependant William Guy et ses six compagnons ne pouvaient demeurer en cet endroit étroit et obscur, où l’air respirable ne tarderait pas à manquer. Ainsi que l’avait tout d’abord pensé Arthur Pym, ils s’étaient crus victimes d’un tremblement de terre. Mais, ainsi que lui, ils allaient reconnaître que si la gorge était comblée par les débris chaotiques de plus d’un million de tonnes de terre et de pierre, c’est que cet éboulement avait été artificiellement préparé par Too-Wit et les insulaires de Tsalal. Comme Arthur Pym, il leur fallut, le plus vite possible, échapper à la noirceur des ténèbres, au défaut d’air, aux exhalaisons suffocantes de la terre humide, – alors que, pour employer les expressions du récit, « ils se trouvaient exilés
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au-delà des confins les plus lointains de l’espérance et qu’ils étaient dans la condition spéciale des morts ».
 
De même que dans la colline de gauche, il existait des labyrinthes à travers la colline de droite, et ce fut en rampant le long de ces sombres couloirs que William Guy, Patterson et les autres atteignirent une cavité où le jour et l’air pénétraient en abondance.
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Enfin, après sept jours de séquestration, si Arthur Pym et le métis parvinrent – on le sait – à quitter leur cachette, à descendre au rivage, à s’emparer d’une embarcation, à abandonner l’île Tsalal, William Guy et ses compagnons n’avaient pas trouvé jusqu’alors l’occasion de s’enfuir.
 
À vingt et un jours de là, le capitaine de la ''Jane'' et les siens, toujours
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enfermés dans le labyrinthe, voyaient arriver le moment où ces oiseaux dont ils vivaient leur feraient défaut. Afin d’échapper à la faim – sinon à la soif, puisqu’une source intérieure leur procurait une eau limpide –, il n’y avait qu’un moyen : c’était de gagner le littoral, puis de s’aventurer au large dans une embarcation indigène… Il est vrai, où les fugitifs iraient-ils et que deviendraient-ils sans provisions ?… Néanmoins, ils n’eussent pas hésité à tenter l’aventure s’ils avaient pu profiter de quelques heures de nuit. Or, à cette époque, le soleil ne se couchait pas encore derrière l’horizon du 24e parallèle.
 
Il est donc probable que la mort fût venue mettre un terme à tant de misères, si la situation n’eût changé dans les circonstances que voici.
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Un animal, un quadrupède, venait d’apparaître, et, se précipitant au milieu des insulaires, il s’acharnait à les mordre, il leur sautait à la gorge, tandis que sa bouche écumante vomissait de rauques hurlements.
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Et cependant il était seul, ce quadrupède, et on pouvait l’accabler de pierres ou de flèches… Pourquoi donc des centaines de sauvages manifestaient-ils une pareille épouvante, pourquoi prenaient-ils la fuite, pourquoi paraissaient-ils ne pas oser se défendre contre l’animal qui s’élançait sur eux ?…
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Voilà pourquoi la plupart des Tsalalais avaient pris la fuite, et aussi leur chef Too-Wit et aussi les Wampos, qui étaient les principaux personnages de Klock-Klock !… Ce fut dans ces extraordinaires circonstances qu’ils abandonnèrent non seulement le village, mais l’île, où nulle puissance n’aurait pu les retenir, où ils ne devaient point remettre le pied !…
 
Cependant, si les canots suffirent à en transporter le plus grand nombre sur les îles voisines, plusieurs centaines d’indigènes avaient dû rester à Tsalal, faute de moyens de s’enfuir. Quelques-uns ayant été mordus par Tigre, des cas de rage s’étaient déclarés, après une assez courte période d’incubation. Alors – spectacle dont il est impossible de retracer l’horreur –, ils s’étaient précipités les uns sur les autres, ils s’étaient déchirés à coups de dents… Et les ossements
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que nous avions rencontrés aux environs de Klock-Klock, c’étaient ceux de ces sauvages, qui, depuis onze années, blanchissaient à cette place !…
 
Quant au malheureux chien, il était allé mourir en un coin de ce littoral, où Dirk Peters avait retrouvé son squelette, auquel tenait encore un collier gravé du nom d’Arthur Pym…
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Donc, il n’y avait à se préoccuper que de s’installer du mieux possible, en attendant une occasion de quitter l’île. Et d’où pourrait-elle venir, si ce n’est de l’un de ces hasards dont dispose seule la Providence ?…
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Et, en premier lieu, sur l’avis du capitaine et du second, on résolut d’établir un campement sur la côte du nord-ouest. Du village de Klock-Klock, on n’apercevait pas le large. Or, il importait d’être constamment en vue de la mer, pour le cas – si improbable, hélas ! – où quelque bâtiment apparaîtrait sur les parages de Tsalal !…
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Et c’est en cet endroit que, pendant de longues et désespérantes années, les sept survivants de la ''Jane'' vécurent, comme nous allions le faire nous-mêmes, – il est vrai, dans des conditions meilleures, puisque la fertilité du sol de Tsalal offrait des ressources qui manquaient à celui d’''Halbrane''-Land. En réalité, si nous étions condamnés à périr, lorsque nos provisions seraient épuisées, eux ne l’étaient pas. Ils pouvaient indéfiniment attendre… et ils attendirent…
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Ce qui ne faisait aucun doute dans leur esprit, c’est qu’Arthur Pym, Dirk Peters et Allen avaient péri dans l’éboulement – et ce n’était que trop certain pour ce dernier. En effet, auraient-ils jamais imaginé qu’Arthur Pym et le métis, après s’être emparés d’un canot, avaient pu prendre la mer ?…
 
Ainsi que nous le dit William Guy, aucun incident ne vint rompre la monotonie de cette existence de onze années, aucun, – pas même l’apparition
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des insulaires, auxquels l’épouvante interdisait l’approche de l’île Tsalal. Nul danger ne les avait menacés pendant cette période. D’autre part, à mesure qu’elle se prolongeait, ils perdaient de plus en plus l’espoir d’être jamais recueillis. Au début, avec le retour de la belle saison, quand la mer redevenait libre, ils s’étaient dit qu’un navire serait envoyé à la recherche de la ''Jane''. Mais, lorsque quatre ou cinq ans se furent écoulés, ils perdirent toute espérance…
 
En même temps que les produits du sol – et parmi eux ces précieuses plantes antiscorbutiques, le cochléaria, le céleri brun, qui abondaient aux environs de la caverne – William Guy avait ramené du village une certaine quantité de volatiles, des poules, des canards d’espèce excellente, et aussi nombre de ces porcs noirs, très multipliés sur l’île. En outre, sans avoir besoin de recourir aux armes à feu, il fut aisé d’abattre des butors au plumage d’un noir de jais. À ces diverses ressources alimentaires, il convenait d’ajouter les centaines d’œufs d’albatros et de tortues galapagos, enfouis sous le sable des grèves, et, rien que ces tortues de dimensions énormes, d’une chair salubre et nourrissante, auraient suffi aux hiverneurs de l’Antarctide.
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Restaient encore les inépuisables réserves de la mer, de ce Jane-Sund, où foisonnaient toutes sortes de poissons jusqu’au fond des criques, – des saumons, des morues, des raies, des antoys, des soles, des rougets, des mulets, des carrelets, des scares, et aussi, sans parler des mollusques, ces savoureuses biches de mer, dont la goélette anglaise comptait prendre une cargaison afin de la vendre sur les marchés du Céleste-Empire.
 
Il n’y a pas lieu de s’étendre sur cette période, qui va de l’année 1828 à l’année 1839. Certes, les hivers furent très durs. En effet, si l’été faisait généreusement sentir sa bienfaisante influence aux îles du groupe Tsalal, la mauvaise saison, avec son cortège de neiges, de pluies, de rafales, de tourmentes, ne lui épargnait pas ses rigueurs. Le terrible froid régnait en maître sur tout le domaine des terres
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antarctiques. La mer, encombrée de glaces flottantes, se solidifiait pour six à sept mois. Il fallait attendre la réapparition du soleil avant de retrouver ces eaux libres, telles que les avait vues Arthur Pym, telles que nous les avions rencontrées depuis la banquise.
 
En somme, l’existence avait été relativement facile à l’île de Tsalal. En serait-il ainsi sur ce littoral aride d’''Halbrane''-Land que nous occupions ? Si abondantes qu’elles fussent, nos provisions finiraient par s’épuiser, et, l’hiver venu, les tortues ne regagnaient-elles pas de plus basses latitudes ?…
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Quelle douleur causa à tous ces braves gens cette disparition de l’un d’eux, de l’un des meilleurs ?… Et n’était-ce pas le présage de prochaines catastrophes ?…
 
Or, ce que William Guy ignorait, ce que nous lui apprîmes alors, c’est que Patterson – dans quelles circonstances, on ne le saurait jamais – avait été emporté à la surface d’un glaçon sur lequel il allait mourir de faim. Et c’était sur ce glaçon, parvenu à la hauteur des îles du Prince-Édouard, rongé par les eaux plus chaudes,
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et près de se dissoudre, que le bosseman avait découvert le cadavre du second de la ''Jane''…
 
Lorsque le capitaine Len Guy eut raconté comment, grâce aux notes trouvées dans la poche de son malheureux compagnon, l’''Halbrane'' s’était dirigée vers les mers antarctiques, son frère ne put retenir de grosses larmes…
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Par malheur, il régnait alors une brise d’une violence extrême, due aux phénomènes sismiques qui avaient troublé les profondeurs du sol comme les profondeurs du ciel. Résister à cette brise ne fut pas possible, et elle rejeta l’embarcation vers le sud, livrée à ce courant auquel obéissait notre iceberg, lorsqu’il dérivait jusqu’au littoral d’''Halbrane''-Land.
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Pendant deux mois et demi, les malheureux allèrent ainsi à travers la mer libre, sans parvenir à modifier leur direction. Ce fut seulement le 2 janvier de la présente année 1840, qu’ils aperçurent une terre, – celle précisément que baignait à l’est le Jane-Sund.
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C’est à cet instant que le bosseman l’aperçut, et Dirk Peters s’était jeté à la mer, pour la rejoindre, et avait manœuvré de manière à la ramener vers le rivage.
 
Au moment où il mettait le pied dans le canot, le métis avait reconnu le capitaine de la ''Jane'' et les matelots Roberts, Trinkle,
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Covin. Après s’être assuré qu’ils respiraient encore, il prit les pagaies, nagea vers la terre, et, lorsqu’il ne fut plus qu’à une encablure, soulevant la tête de William Guy :
 
« Vivant…, vivant ! » avait-il crié d’une voix si puissante qu’elle arriva jusqu’à nous.
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