« Le Mariage de Figaro » : différence entre les versions

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’’La''La scène est au château d’Aguas-Frescas, à trois lieues de Séville.’’''
 
Placement des acteurs
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{{acte| I}}
 
’’Le''Le théâtre représente une chambre à demi démeublée ; un grand fauteuil de malade est au milieu. Figaro, avec une toise, mesure le plancher. Suzanne attache à sa tête, devant une glace, le petit bouquet de fleurs d’orange, appelé chapeau de la mariée.’’''
 
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{{scène|1}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
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Tiens, Figaro, voilà mon petit chapeau : le trouves-tu mieux ainsi ?
 
{{personnage|Figaro}} ’’lui''lui prend les mains.’’''
 
Sans comparaison, ma charmante. Oh ! que ce joli bouquet virginal, élevé sur la tête d’une belle fille, est doux, le matin des noces, à l’oeil amoureux d’un époux ! ...
 
{{personnage|Suzanne}} ’’se''se retire.’’''
 
Que mesures-tu donc là, mon fils ?
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Eh bien, s’il l’a détruit, il s’en repent ; et c’est de ta fiancée qu’il veut le racheter en secret aujourd’hui.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’se''se frottant la tête.’’''
 
Ma tête s’amollit de surprise, et mon front fertilisé...
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Quel danger ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’riant''riant.’’''
 
S’il y venait un petit bouton, des gens superstitieux...
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C’est que tu n’as pas d’idée de mon amour.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’se''se défripant.’’''
 
Quand cesserez-vous, importun, de m’en parler du matin au soir ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’mystérieusement''mystérieusement.’’''
 
Quand je pourrai te le prouver du soir jusqu’au matin. (On sonne une seconde fois.)
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’de''de loin, les doigts unis sur sa bouche.’’''
 
Voilà votre baiser, monsieur ; je n’ai plus rien à vous.
 
{{personnage|Figaro}} ’’court''court après elle.’’''
 
Oh ! mais ce n’est pas ainsi que vous l’avez reçu.
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{{scène|2}}
 
’’''{{personnage|Figaro}}, seul.’’''
 
La charmante fille ! toujours riante, verdissante, pleine de gaieté, d’esprit, d’amour et de délices ! mais sage ! ’’''(Il marche vivement en se frottant les mains.)’’'' Ah ! Monseigneur ! mon cher Monseigneur ! vous voulez m’en donner... à garder ? Je cherchais aussi pourquoi m’ayant nommé concierge, il m’emmène à son ambassade, et m’établit courrier de dépêches. J’entends, monsieur le Comte ; trois promotions à la fois : vous, compagnon ministre ; moi, casse-cou politique, et Suzon, dame du lieu, l’ambassadrice de poche, et puis ; fouette courrier ! Pendant que je galoperais d’un côté, vous feriez faire de l’autre à ma belle un joli chemin ! Me crottant, m’échinant pour la gloire de votre famille ; vous, daignant concourir à l’accroissement de la mienne ! Quelle douce réciprocité ! Mais, Monseigneur, il y a de l’abus. Faire à Londres, en même temps, les affaires de votre maître et celles de votre valet ! représenter à la fois le Roi et moi dans une Cour étrangère, c’est trop de moitié, c’est trop. - Pour toi, Bazile ! fripon mon cadet ! je veux t’apprendre à clocher devant les boiteux ; je veux... Non, dissimulons avec eux, pour les enferrer l’un par l’autre. Attention sur la journée, monsieur Figaro ! D’abord avancer l’heure de votre petite fête, pour épouser plus sûrement ; écarter une Marceline qui de vous est friande en diable ; empocher l’or et les présents ; donner le change aux petites passions de monsieur le Comte ; étriller rondement monsieur du Bazile, et...
 
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{{scène|3}}
 
’’Marceline''Marceline, Bartholo, Figaro.’’''
 
{{personnage|Figaro}} ’’s’interrompt''s’interrompt.’’''
 
Héééé, voilà le gros docteur : la fête sera complète. Hé ! bonjour, cher docteur de mon cœur ! Est-ce ma noce avec Suzon qui vous attire au château ?
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’avec''avec dédain.’’''
 
Ah ! mon cher monsieur, point du tout.
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On n’aura pas pris soin de votre mule !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’en''en colère.’’''
 
Bavard enragé ! laissez-nous.
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{{personnage|Figaro}}
 
Elle vous le contera de reste. ’’''(Il sort.)’’''
 
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{{scène|4}}
 
’’Marceline''Marceline, Bartholo.’’''
 
{{personnage|Bartholo}} ’’le''le regarde aller.’’''
 
Ce drôle est toujours le même ! Et à moins qu’on ne l’écorche vif, je prédis qu’il mourra dans la peau du plus fier insolent...
 
{{personnage|Marceline}} ’’le''le retourne.’’''
 
Enfin, vous voilà donc, éternel docteur ! toujours si grave et compassé, qu’on pourrait mourir en attendant vos secours, comme on s’est marié jadis, malgré vos précautions.
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Son mari la néglige.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’avec''avec joie.’’''
 
Ah ! le digne époux qui me venge !
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Railleur fade et cruel, que ne vous débarrassez-vous de la mienne à ce prix ? Ne le devez-vous pas ? Où est le souvenir de vos engagements ? Qu’est devenu celui de notre petit Emmanuel, ce fruit d’un amour oublié, qui devait nous conduire à des noces ?
 
{{personnage|Bartholo}} ’’ôtant''ôtant son chapeau.’’''
 
Est-ce pour écouter ces sornettes que vous m’avez fait venir de Séville ? Et cet accès d’hymen qui vous reprend si vif...
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Elle a raison. Parbleu ! c’est un bon tour que de faire épouser ma vieille gouvernante au coquin qui fit enlever ma jeune maîtresse.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’vite''vite.’’''
 
Et qui croit ajouter à ses plaisirs en trompant mes espérances.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’vite''vite.’’''
 
Et qui m’a volé dans le temps cent écus que j’ai sur le cœur.
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{{scène|5}}
 
’’Marceline''Marceline, Bartholo, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’un''un bonnet de femme avec un large ruban dans la main, une robe de femme sur le bras.’’''
 
L’épouser, l’épouser ! Qui donc ? Mon Figaro ?
 
{{personnage|Marceline}}, ’’aigrement''aigrement.’’''
 
Pourquoi non ? Vous l’épousez bien !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’riant''riant.’’''
 
Le bon argument de femme en colère ! Nous parlions, belle Suzon, du bonheur qu’il aura de vous posséder.
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Sans compter Monseigneur, dont on ne parle pas.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Votre servante, madame ; il y a toujours quelque chose d’amer dans vos propos.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Bien la vôtre, madame ; où donc est l’amertume ? N’est-il pas juste qu’un libéral seigneur partage un peu la joie qu’il procure à ses gens ?
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Et l’enfant ne l’est pas du tout ! Innocente comme un vieux juge !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’attirant''attirant Marceline.’’''
 
Adieu, jolie fiancée de notre Figaro.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’une''une révérence.’’''
 
L’accordée secrète de Monseigneur.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Qui vous estime beaucoup, madame.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Me fera-t-elle aussi l’honneur de me chérir un peu, madame ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’une''une révérence.’’''
 
À cet égard, madame n’a rien à désirer.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’une''une révérence.’’''
 
C’est une si jolie personne que madame !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Eh mais ! assez pour désoler madame.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’une''une révérence.’’''
 
Surtout bien respectable !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’une''une révérence.’’''
 
C’est aux duègnes à l’être.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’outrée''outrée.’’''
 
Aux duègnes ! aux duégnes !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’l’arrêtant''l’arrêtant.’’''
 
Marceline !
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Allons, docteur, car je n’y tiendrais pas. Bonjour, madame.
 
’’''(Une révérence.)’’''
 
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{{scène|6}}
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’seule''seule.’’''
 
Allez, madame ! allez, pédante ! je crains aussi peu vos efforts que je méprise vos outrages. - Voyez cette vieille sibylle ! parce qu’elle a fait quelques études et tourmenté la jeunesse de madame, elle veut tout dominer au château ! (Elle jette la robe qu’elle tient sur une chaise.) Je ne sais plus ce que je venais prendre.
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{{scène|7}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Chérubin.’’''
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’accourant''accourant.’’''
 
Ah ! Suzon, depuis deux heures j’épie le moment de te trouver seule. Hélas ! tu te maries, et moi je vais partir.
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Comment mon mariage éloigne-t-il du château le premier page de Monseigneur ?
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’piteusement''piteusement.’’''
 
Suzanne, il me renvoie.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’le''le contrefait.’’''
 
Chérubin, quelque sottise !
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Tu sais trop bien, méchante, que je n’ose pas oser. Mais que tu es heureuse ! à tous moments la voir, lui parler, l’habiller le matin et la déshabiller le soir, épingle à épingle ! ... Ah ! Suzon ! je donnerais... Qu’est-ce que tu tiens donc là ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’raillant''raillant.’’''
 
Hélas ! l’heureux bonnet et le fortuné ruban qui renferment la nuit les cheveux de cette belle marraine...
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
Son ruban de nuit ! donne-le-moi, mon cœur.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’le''le retirant’’retirant''
 
Eh ! que non pas ! - Son cœur ! Comme il est familier donc ! Si ce n’était pas un morveux sans conséquence... ’’''(Chérubin arrache le ruban.)’’'' Ah ! le ruban !
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’tourne''tourne autour du grand fauteuil.’’''
 
Tu diras qu’il est égaré, gâté ; qu’il est perdu. Tu diras tout ce que tu voudras.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’tourne''tourne après lui.’’''
 
Oh ! dans trois ou quatre ans, je prédis que vous serez le plus grand petit vaurien ! ... Rendez-vous le ruban ? ’’''(Elle veut le reprendre.)’’''
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’tire''tire une romance de sa poche.’’''
 
Laisse, ah ! laisse-le-moi, Suzon ; je te donnerai ma romance ; et pendant que le souvenir de ta belle maîtresse attristera tous mes moments, le tien y versera le seul rayon de joie qui puisse encore amuser mon cœur.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’arrache''arrache la romance.’’''
 
Amuser votre cœur, petit scélérat ! vous croyez parler à votre Fanchette. On vous surprend chez elle, et vous soupirez pour madame ; et vous m’en contez à moi, par-dessus le marché !
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’exalté''exalté.’’''
 
Cela est vrai, d’honneur ! Je ne sais plus ce que je suis ; mais depuis quelque temps je sens ma poitrine agitée ; mon cœur palpite au seul aspect d’une femme ; les mots amour et volupté le font tressaillir et le troublent. Enfin le besoin de dire à quelqu’un Je vous aime, est devenu pour moi si pressant, que je le dis tout seul, en courant dans le parc, à ta maîtresse, à toi, aux arbres, aux nuages, au vent qui les emporte avec mes paroles perdues. - Hier je rencontrai Marceline...
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’riant''riant.’’''
 
Ah ! ah ! ah ! ah !
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{{personnage|Suzanne}}
 
C’est bien dommage ; écoutez donc monsieur ! ’’''(Elle veut arracher le ruban.)’’''
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’tourne''tourne en fuyant.’’''
 
Ah ! ouiche ! on ne l’aura, vois-tu, qu’avec ma vie. Mais si tu n’es pas contente du prix, j’y joindrai mille baisers. ’’''(Il lui donne chasse à son tour.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’tourne''tourne en fuyant.’’''
 
Mille soufflets, si vous approchez. Je vais m’en plaindre à ma maîtresse ; et loin de supplier pour vous, je dirai moi-même à Monseigneur : C’est bien fait, Monseigneur ; chassez-nous ce petit voleur ; renvoyez à ses parents un petit mauvais sujet qui se donne les airs d’aimer madame, et qui veut toujours m’embrasser par contrecoup.
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’voit''voit le Comte entrer ; il se jette derrière le fauteuil avec effroi.’’''
 
Je suis perdu !
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{{scène|8}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Le Comte, Chérubin, caché.’’''
 
{{personnage|Suzanne}} ’’aperçoit''aperçoit le Comte.’’''
 
Ah ! ... ’’''(Elle s’approche du fauteuil pour masquer Chérubin.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}} ’’s’avance''s’avance.’’''
 
Tu es émue, Suzon ! tu parlais seule, et ton petit cœur paraît dans une agitation... bien pardonnable, au reste, un jour comme celui-ci.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’troublée''troublée.’’''
 
Monseigneur, que me voulez-vous ? Si l’on vous trouvait avec moi...
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{{personnage|Le Comte}}
 
Je serais désolé qu’on m’y surprît ; mais tu sais tout l’intérêt que je prends à toi. Bazile ne t’a pas laissé ignorer mon amour. Je n’ai qu’un instant pour t’expliquer mes vues ; écoute. ’’''(Il s’assied dans le fauteuil.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
Je n’écoute rien.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’lui''lui prend la main.’’''
 
Un seul mot. Tu sais que le Roi m’a nommé son ambassadeur à Londres. J’emmène avec moi Figaro ; je lui donne un excellent poste ; et, comme le devoir d’une femme est de suivre son mari...
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Ah ! si j’osais parler !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’la''la rapproche de lui.’’''
 
Parle, parle, ma chère ; use aujourd’hui d’un droit que tu prends sur moi pour la vie.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’effrayée''effrayée.’’''
 
Je n’en veux point, Monseigneur, je n’en veux point. Quittez-moi, je vous prie.
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Mais dis auparavant.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’en''en colère.’’''
 
Je ne sais plus ce que je disais.
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Eh bien, lorsque Monseigneur enleva la sienne de chez le docteur, et qu’il l’épousa par amour ; lorsqu’il abolit pour elle un certain affreux droit du seigneur...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
Qui faisait bien de la peine aux filles ! Ah ! Suzette ! ce droit charmant ! Si tu venais en jaser sur la brune au jardin, je mettrais un tel prix à cette légère faveur...
 
{{personnage|Bazile}}, ’’parle''parle en dehors.’’''
 
Il n’est pas chez lui, Monseigneur.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’se''se lève.’’''
 
Quelle est cette voix ?
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Sors, pour qu’on n’entre pas.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’troublée''troublée.’’''
 
Que je vous laisse ici ?
 
{{personnage|Bazile}}, ’’crie''crie en dehors.’’''
 
Monseigneur était chez Madame, il en est sorti ; je vais voir.
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{{personnage|Le Comte}}
 
Et pas un lieu pour se cacher ! Ah ! derrière ce fauteuil... assez mal ; mais renvoie-le bien vite. ’’''(Suzanne lui barre le chemin ; il la pousse doucement, elle recule, et se met ainsi entre lui et le petit page ; mais, pendant que le Comte s’abaisse et prend sa place, Chérubin tourne et se jette effrayé sur le fauteuil à genoux et s’y blottit. Suzanne prend la robe qu’elle apportait, en couvre le page, et se met devant le fauteuil.)’’''
 
Ligne 833 :
{{scène|9}}
 
’’Le''Le Comte et Chérubin cachés, Suzanne, Bazile.’’''
 
{{personnage|Bazile}}
Ligne 839 :
N’auriez-vous pas vu Monseigneur, mademoiselle ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’brusquement''brusquement.’’''
 
Hé, pourquoi l’aurais-je vu ? Laissez-moi.
 
{{personnage|Bazile}} ’’s’approche''s’approche.’’''
 
Si vous étiez plus raisonnable, il n’y aurait rien d’étonnant à ma question. C’est Figaro qui le cherche.
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Il cherche donc l’homme qui lui veut le plus de mal après vous ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Voyons un peu comme il me sert.
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De toutes les choses sérieuses le mariage étant la plus bouffonne, j’avais pensé...
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’outrée''outrée.’’''
 
Des horreurs ! Qui vous permet d’entrer ici ?
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Là, là, mauvaise ! Dieu vous apaise ! Il n’en sera que ce que vous voulez : mais ne croyez pas non plus que je regarde monsieur Figaro comme l’obstacle qui nuit à Monseigneur ; et sans le petit page...
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’timidement''timidement.’’''
 
Don Chérubin ?
 
{{personnage|Bazile}} ’’la''la contrefait.’’''
 
Cherubino di amore, qui tourne autour de vous sans cesse, et qui ce matin encore rôdait ici pour y entrer, quand je vous ai quittée. Dites que cela n’est pas vrai ?
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On est un méchant homme, parce qu’on y voit clair. N’est-ce pas pour vous aussi, cette romance dont il fait mystère ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’en''en colère.’’''
 
Ah ! oui, pour moi ! ...
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À moins qu’il ne l’ait composée pour madame ! En effet, quand il sert à table, on dit qu’il la regarde avec des yeux ! ... Mais, peste, qu’il ne s’y joue pas ! Monseigneur est brutal sur l’article.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’outrée''outrée.’’''
 
Et vous bien scélérat, d’aller semant de pareils bruits pour perdre un malheureux enfant tombé dans la disgrâce de son maître.
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L’ai-je inventé ? Je le dis, parce que tout le monde en parle.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’se''se lève.’’''
 
Comment, tout le monde en parle !
Ligne 935 :
Ah ! que je suis fâché d’être entré !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’troublée''troublée.’’''
 
Mon Dieu ! Mon Dieu !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à Bazile.’’''
 
Elle est saisie. Asseyons-la dans ce fauteuil.
 
{{personnage|Suzanne}} ’’le''le repousse vivement.’’''
 
Je ne veux pas m’asseoir. Entrer ainsi librement, c’est indigne !
Ligne 975 :
Et dans sa chambre.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’outrée''outrée.’’''
 
Où Monseigneur avait sans doute affaire aussi !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
J’en aime assez la remarque.
Ligne 987 :
Elle est d’un bon augure.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
Mais non ; j’allais chercher ton oncle Antonio, mon ivrogne de jardinier, pour lui donner des ordres. Je frappe, on est longtemps à m’ouvrir ; ta cousine a l’air empêtré ; je prends un soupçon, je lui parle, et tout en causant j’examine. Il y avait derrière la porte une espèce de rideau, de portemanteau, de je ne sais pas quoi, lui couvrait des hardes ; sans faire semblant de rien, je vais doucement, doucement lever ce rideau ’’''(pour imiter le geste, il lève la robe du fauteuil)’’'', et je vois... ’’''(Il aperçoit le page.)’’'' Ah ! ...
 
{{personnage|Bazile}}
Ligne 1 003 :
Encore mieux.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à Suzanne.’’''
 
À merveille, mademoiselle ! à peine fiancée, vous faites de ces apprêts ? C’était pour recevoir mon page que vous désiriez d’être seule ? Et vous, monsieur, qui ne changez point de conduite, il vous manquait de vous adresser, sans respect pour votre marraine, à sa première camariste, à la femme le votre ami ! Mais je ne souffrirai pas que Figaro, qu’un homme que j’estime et que j’aime, soit victime une pareille tromperie. Etait-il avec vous, Bazile ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’outrée''outrée.’’''
 
Il n’y a ni tromperie ni victime ; il était là lorsque vous me parliez.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’emporté''emporté.’’''
 
Puisses-tu mentir en le disant ! Son plus cruel ennemi n’oserait lui souhaiter ce malheur.
Ligne 1 019 :
Il me priait d’engager madame à vous demander sa grâce. Votre arrivée l’a si fort troublé, qu’il s’est masqué de ce fauteuil.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’en''en colère : ’’''
 
Ruse d’enfer ! Je m’y suis assis en entrant.
Ligne 1 035 :
Pardon ; mais c’est alors que je me suis blotti dedans.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’plus''plus outré.’’''
 
C’est donc une couleuvre que ce petit... serpent-là ! Il nous écoutait !
Ligne 1 045 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Ô perfidie ! ’’''(À Suzanne.)’’'' Tu n’épouseras pas Figaro.
 
{{personnage|Bazile}}
Ligne 1 051 :
Contenez-vous, on vient.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’tirant''tirant Chérubin du fauteuil et le mettant sur ses pieds.’’''
 
Il resterait là devant toute la terre !
Ligne 1 059 :
{{scène|10}}
 
’’Chérubin''Chérubin, Suzanne, Figaro, La Comtesse, Le Comte, Fanchette, Bazile. Beaucoup de valets, paysannes, paysans velus de blanc.’’''
 
{{personnage|Figaro}}, ’’tenant''tenant une toque de femme, garnie de plumes blanches et de rubans blancs, parle à la Comtesse.’’''
 
Il n’y a que vous, madame, qui puissiez nous obtenir cette faveur.
Ligne 1 069 :
Vous le voyez, monsieur le Comte, ils me supposent un crédit que je n’ai point, mais comme leur demande n’est pas déraisonnable...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’embarrassé''embarrassé.’’''
 
Il faudrait qu’elle le fût beaucoup...
 
{{personnage|Figaro}}, ’’bas''bas à Suzanne.’’''
 
Soutiens bien mes efforts.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Qui ne mèneront à rien.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’bas''bas.’’''
 
Va toujours.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Que voulez-vous ? ,
Ligne 1 097 :
Hé bien, ce droit n’existe plus. Que veux-tu dire ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’malignement''malignement.’’''
 
Qu’il est bien temps que la vertu d’un si bon maître éclate ; elle m’est d’un tel avantage aujourd’hui, que je désire être le premier à la célébrer à mes noces.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’plus''plus embarrassé.’’''
 
Tu te moques, ami ! L’abolition d’un droit honteux n’est que l’acquit d’une dette envers l’honnêteté. Un Espagnol peut vouloir conquérir la beauté par des soins ; mais en exiger le premier, le plus doux emploi, comme une servile redevance, ah ! c’est la tyrannie d’un Vandale, et non le droit avoué d’un noble Castillan.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’tenant''tenant Suzanne par la main.’’''
 
Permettez donc que cette jeune créature, de qui votre sagesse a préservé l’honneur, reçoive de votre main, publiquement, la toque virginale, ornée de plumes et de rubans blancs, symbole de la pureté de vos intentions : adoptez-en la cérémonie pour tous les mariages, et qu’un quatrain chanté en chœur rappelle à jamais le souvenir...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’embarrassé''embarrassé.’’''
 
Si je ne savais pas qu’amoureux, poète et musicien sont trois titres d’indulgence pour toutes les folies...
Ligne 1 121 :
Monseigneur ! Monseigneur !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’au''au Comte.’’''
 
Pourquoi fuir un éloge que vous méritez si bien ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
La perfide !
Ligne 1 137 :
Laisse là ma figure, et ne vantons que sa vertu.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
C’est un jeu que tout ceci.
Ligne 1 153 :
Vivat !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Je suis pris. ’’''(Haut.)’’'' Pour que la cérémonie eût un peu plus d’éclat, je voudrais seulement qu’on la remît à tantôt, ’’''(À part.)’’'' Faisons vite chercher Marceline.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à Chérubin.’’''
 
Eh bien, espiègle, vous n’applaudissez pas ?
Ligne 1 181 :
Pas tant que ! vous le croyez.
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’tremblant''tremblant.’’''
 
Pardonner généreusement n’est pas le droit du seigneur auquel vous avez renoncé en épousant madame.
Ligne 1 193 :
Si Monseigneur avait cédé le droit de pardonner, ce serait sûrement le premier qu’il voudrait racheter en secret.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’embarrassé''embarrassé.’’''
 
Sans doute.
Ligne 1 201 :
Eh pourquoi le racheter ?
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’au''au Comte.’’''
 
Je fus léger dans ma conduite, il est vrai, Monseigneur ; mais jamais la moindre indiscrétion dans mes paroles...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’embarrassé''embarrassé.’’''
 
Eh bien, c’est assez...
Ligne 1 213 :
Qu’entend-il ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
C’est assez, c’est assez. Tout le monde exige son pardon, je l’accorde ; et j’irai plus loin : je lui donne une compagnie dans ma légion.
Ligne 1 229 :
Ah ! Monseigneur, demain.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’insiste''insiste.’’''
 
Je le veux.
Ligne 1 239 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Saluez votre marraine, et demandez sa protection. ’’''(Chérubin met un genou en terre devant la Comtesse, et ne peut parier.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’émue''émue.’’''
 
Puisqu’on ne peut vous garder seulement aujourd’hui, partez, jeune homme. Un nouvel état vous appelle ; allez la remplir dignement. Honorez votre bienfaiteur. Souvenez-vous de cette maison, où votre jeunesse a trouvé tant d’indulgence. Soyez soumis, honnête et brave ; nous prendrons part à vos succès. ’’''(Chérubin se relève et retourne à sa place.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 1 253 :
Je ne m’en défends pas. Qui sait le sort d’un enfant jeté dans une carrière aussi dangereuse ? Il est allié de mes parents ; et de plus, il est mon filleul.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Je vois que Bazile avait raison. ’’''(Haut.)’’'' Jeune homme, embrassez Suzanne... pour la dernière fois.
 
{{personnage|Figaro}}
 
Pourquoi cela, Monseigneur ? Il viendra passer ses hivers. Baise-moi donc aussi, capitaine ! ’’''(Il l’embrasse.)’’'' Adieu, mon petit Chérubin. Tu vas mener un train de vie bien différent, mon enfant : dame ! tu ne rôderas plus tout le jour au quartier des femmes, plus d’échaudés, de goûtés à la crème ; plus de main-chaude ou de colin-maillard. De bons soldats, morbleu ! basanés, mal vêtus ; un grand fusil bien lourd : tourne à droite, tourne à gauche, en avant, marche à la gloire ; et ne va pas broncher en chemin ; à moins qu’un bon coup de feu...
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 1 293 :
Monsieur le docteur lui donnait le bras.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
Le docteur est ici ?
Ligne 1 301 :
Elle s’en est d’abord emparée...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Il ne pouvait venir plus à propos.
Ligne 1 309 :
Elle avait l’air bien échauffée ; elle parlait tout haut en marchant, puis elle s’arrêtait, et faisait comme ça de grands bras... et monsieur le docteur lui faisait comme ça de la main, en l’apaisant : elle paraissait si courroucée ! elle nommait mon cousin Figaro.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’lui''lui prend le menton.’’''
 
Cousin... futur.
 
{{personnage|Fanchette}}, ’’montrant''montrant Chérubin.’’''
 
Monseigneur, nous avez-vous pardonné d’hier ? ...
 
{{personnage|Le Comte}} ’’interrompt''interrompt.’’''
 
Bonjour, bonjour, petite.
Ligne 1 325 :
C’est son chien d’amour qui la berce : elle aurait troublé notre fête.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Elle la troublera, je t’en réponds. ’’''(Haut.)’’'' Allons, madame, entrons. Bazile, vous passerez chez moi.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Tu me rejoindras, mon fils ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’bas''bas à Suzanne.’’''
 
Est-il bien enfilé.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas.’’''
 
Charmant garçon ! ’’''(Ils sortent tous.)’’''
 
Ligne 1 345 :
{{scène|11}}
 
’’Chérubin''Chérubin, Figaro, Bazile.’’'' ’’''(Pendant qu’on sort, Figaro les arrête tous deux et les ramène.)’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 1 351 :
Ah ça, vous autres ! la cérémonie adoptée, ma fête de ce soir en est la suite ; il faut bravement nous recorder : ne faisons point comme ces acteurs qui ne jouent jamais si mal que le jour où la critique est le plus éveillée. Nous n’avons point de lendemain qui nous excuse, nous. Sachons bien nos rôles aujourd’hui.
 
{{personnage|Bazile}}, ’’malignement''malignement.’’''
 
Le mien est plus difficile que tu ne crois.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’faisant''faisant, sans qu’il le voie, le geste de le rosser.’’''
 
Tu es loin aussi de savoir tout le succès qu’il te vaudra.
Ligne 1 399 :
Elle s’emplit.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’en''en s’en allant.’’''
 
Pas si bête, pourtant, pas si bête !
Ligne 1 413 :
{{scène|1}}
 
’’Suzanne''Suzanne, La Comtesse, entrent par la porte à droite.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, se jette dans un bergère.
Ligne 1 479 :
Que si je ne voulais pas l’entendre, il allait protéger Marceline.
 
{{personnage|La Comtesse}} ’’se''se lève et se promène en se servant fortement de l’éventail.’’''
 
Il ne m’aime plus du tout.
Ligne 1 495 :
Dès qu’il verra partir la chasse.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’se''se servant de l’éventail.’’''
 
Ouvre un peu la croisée sur le jardin. Il fait une chaleur ici ! ...
Ligne 1 501 :
{{personnage|Suzanne}}
 
C’est que madame parle et marche avec action. ’’''(Elle va ouvrir la croisée du fond.)’’''
 
Sans cette constance à me fuir... Les hommes sont bien coupables !
 
{{personnage|Suzanne}} ’’crie''crie de la fenêtre.’’''
 
Ah ! voilà Monseigneur qui traverse à cheval le grand potager, suivi de Pédrille, avec deux, trois, quatre lévriers.
Ligne 1 511 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Nous avons du temps devant nous. ’’''(Elle s’assied.)’’'' On frappe, Suzon ?
 
{{personnage|Suzanne}} ’’court''court ouvrir en chantant.’’''
 
Ah ! c’est mon Figaro ! ah ! c’est mon Figaro !
Ligne 1 521 :
{{scène|2}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 1 677 :
{{personnage|Figaro}}
 
Que, pendant l’absence de Monseigneur, je vais vous envoyer le Chérubin ; coiffez-le, habillez-le ; je le renferme et l’endoctrine ; et puis dansez, Monseigneur. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 1 683 :
{{scène|3}}
 
’’Suzanne''Suzanne, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’tenant''tenant sa boîte à mouches.’’''
 
Mon Dieu, Suzon, comme je suis faite ! ... Ce jeune homme qui va venir ! ...
Ligne 1 699 :
{{personnage|Suzanne}}
 
Faisons-lui chanter sa romance. ’’''(Elle la met sur la Comtesse.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 1 717 :
{{scène|4}}
 
’’Chérubin''Chérubin, l’air honteux, Suzanne, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 1 763 :
Oh ! madame, je suis si tremblant ! ...
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’en''en riant.’’''
 
Et gnian, gnian, gnian, gnian, gnian gnian, gnian dès que madame le veut, modeste auteur ! je vais l’accompagner.
Ligne 1 897 :
{{personnage|Suzanne}} se mesure avec lui.
 
Il est de ma grandeur. Otons d’abord le manteau. ’’''(Elle le détache.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 1 905 :
{{personnage|Suzanne}}
 
Est-ce que nous faisons du mal donc ? Je vais fermer la porte ’’''(elle court)’’'' ; mais c’est la coiffure que je veux voir.
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
Sur ma toilette, une baigneuse à moi. ’’''(Suzanne entre dans le cabinet dont la porte est au bord du théâtre.)’’''
 
Ligne 1 915 :
{{scène|5}}
 
’’Chérubin''Chérubin, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 1 927 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Déjà ? L’on a craint d’y perdre une minute. ’’''(Elle lit.)’’'' Ils se sont tant pressés, qu’ils ont oublié d’y mettre son cachet. ’’''(Elle le lui rend.)’’''
 
Ligne 1 933 :
{{scène|6}}
 
’’Chérubin''Chérubin, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Suzanne}} entre avec un grand bonnet.
Ligne 1 953 :
{{personnage|Suzanne}} s’assied près de la Comtesse.
 
Et la plus belle de toutes. ’’''(Elle chante avec des épingles dans sa bouche.)’’''
 
Tournez-vous donc envers ici,
Ligne 1 959 :
Jean de Lyra, mon bel ami.
 
’’''(Chérubin se met à genoux. Elle le coiffe.)’’''
 
Madame, il est charmant !
Ligne 1 969 :
{{personnage|Suzanne}} l’arrange.
 
Là... Mais voyez donc ce morveux, comme il est joli en fille ! j’en suis jalouse, moi ! ’’''(Elle lui prend le menton.)’’'' Voulez-vous bien n’être pas joli comme ça ?
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
Qu’elle est folle ! il faut relever la manche, afin que l’amadis prenne mieux... ’’''(Elle le retrousse.)’’'' Qu’est-ce qu’il a donc au bras ? Un ruban !
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 1 981 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Il y a du sang ! ’’''(Elle détache le ruban.)’’''
 
{{personnage|Chérubin}}, honteux.
Ligne 1 993 :
{{personnage|Suzanne}}
 
Et surtout un ruban volé. - Voyons donc ce que la bossette... la courbette... la cornette du cheval... Je n’entends rien à tous ces noms-là. - Ah ! qu’il a le bras blanc ! c’est comme une femme ! plus blanc que le mien ! Regardez donc, madame ! ’’''(Elle les compare.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, d’un ton glacé.
Ligne 2 003 :
{{scène|7}}
 
’’Chérubin''Chérubin, à genoux, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}} ’’reste''reste un moment sans parler, les yeux sur son ruban. Chérubin la dévore de ses regards.’’''
 
Pour mon ruban, monsieur... comme c’est celui dont la couleur m’agrée le plus... j’étais fort en colère de l’avoir perdu.
Ligne 2 013 :
{{scène|8}}
 
’’Chérubin''Chérubin, à genoux, La Comtesse, assise, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’revenant''revenant.’’''
 
Et la ligature à son bras ? ’’''(Elle remet à la Comtesse du taffetas gommé et des ciseaux.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
En allant lui chercher tes hardes, prends le ruban d’un autre bonnet. ’’''(Suzanne sort par la porte du fond, en emportant le manteau du page.)’’''
 
Ligne 2 027 :
{{scène|9}}
 
’’Chérubin''Chérubin, à genoux, La Comtesse, assise.’’''
 
{{personnage|Chérubin}}, les yeux baissés.
Ligne 2 035 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Par quelle vertu ? ’’''(Lui montrant le taffetas.)’’'' Ceci vaut mieux.
 
{{personnage|Chérubin}}, hésitant.
Ligne 2 067 :
{{personnage|La Comtesse}}, l’interrompt et lui essuie les yeux avec son mouchoir.
 
Taisez-vous, taisez-vous, enfant ! Il n’y a pas un brin de raison dans tout ce que vous dites. ’’''(On frappe à la porte ; elle élève la voix.)’’'' Qui frappe ainsi chez moi ?
 
Ligne 2 073 :
{{scène|10}}
 
’’Chérubin''Chérubin, La Comtesse, Le Comte, en dehors.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}, en dehors.
Ligne 2 081 :
{{personnage|La Comtesse}}, troublée, se lève.
 
C’est mon époux ! grands dieux ! ’’''(À Chérubin qui s’est levé aussi.)’’'' Vous, sans manteau, le col et les bras nus ! seul avec moi ! cet air de désordre, un billet reçu, sa jalousie ! ...
 
{{personnage|Le Comte}}, en dehors.
Ligne 2 101 :
{{personnage|Chérubin}}, à part.
 
Après les scènes d’hier et de ce matin, il me tuerait sur la place ! ’’''(Il court au cabinet de toilette, y entre, et tire la porte sur lui.)’’''
 
Ligne 2 107 :
{{scène|11}}
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’seule''seule, en ôte la clef, et court ouvrir au Comte.’’''
 
Ah ! quelle faute ! quelle faute !
Ligne 2 115 :
{{scène|12}}
 
’’Le''Le Comte, La Comtesse.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}, un peu sévère.
Ligne 2 159 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Heureusement le docteur est ici. ’’''(Le page fait tomber une chaise dans le cabinet.)’’'' Quel bruit entends-je ?
 
{{personnage|La Comtesse}}, plus troublée.
Ligne 2 233 :
{{scène|13}}
 
’’Le''Le Comte, La Comtesse, Suzanne entre avec des hardes et pousse la porte du fond.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
 
Ils en seront plus aisés à détruire. ’’''(Il parle au cabinet.)’’'' Sortez, Suzon, je vous l’ordonne ! ’’''(Suzanne s’arrête auprès de l’alcôve dans le fond.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 2 245 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Si elle craint tant de se montrer, au moins elle peut parler. ’’''(Il se tourne vers la porte du cabinet.)’’'' Répondez-moi, Suzanne ; êtes-vous dans ce cabinet ? ’’''(Suzanne, restée au fond, se jette dans l’alcôve et s’y cache.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’vivement''vivement, parlant au cabinet.’’''
 
Suzon, je vous défends de répondre. ’’''(Au Comte.)’’'' On n’a jamais poussé si loin la tyrannie !
 
{{personnage|Le Comte}} ’’s’avance''s’avance au cabinet.’’''
 
Oh ! bien, puisqu’elle ne parle pas, vêtue ou non, je la verrai.
 
{{personnage|La Comtesse}} ’’se''se met au-devant.’’''
 
Partout ailleurs je ne puis l’empêcher ; mais j’espère aussi que chez moi...
Ligne 2 269 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Fort bien, madame. En effet, j’y suffirai ; je vais à l’instant prendre chez moi ce qu’il faut... ’’''(Il marche pour sortir, et revient.)’’'' Mais, pour que tout reste au même état, voudrez-vous bien m’accompagner sans scandale et sans bruit, puisqu’il vous déplaît tant ? ... Une chose aussi simple, apparemment, ne me sera pas refusée !
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’troublée''troublée.’’''
 
Eh ! monsieur, qui songe à vous contrarier ?
Ligne 2 277 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Ah ! j’oubliais la porte qui va chez vos femmes ; il faut que je la ferme aussi, pour que vous soyez pleinement justifiée. ’’''(Il va fermer la porte du fond et en ôte la clef.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’à''à part.’’''
 
Ô ciel ! étourderie funeste !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’revenant''revenant à elle.’’''
 
Maintenant que cette chambre est close, acceptez mon bras, je vous prie ; ’’''(il élève la voix)’’'' et quant à la Suzanne du cabinet, il faudra qu’elle ait la bonté de m’attendre ; et le moindre mal qui puisse lui arriver à mon retour...
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
En vérité, monsieur, voilà bien la plus odieuse aventure... ’’''(Le Comte l’emmène et ferme la porte à la clef.)’’''
 
Ligne 2 295 :
{{scène|14}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Chérubin.’’''
 
{{personnage|Suzanne}} sort de l’alcove, accourt au cabinet et parle à la serrure.
Ligne 2 301 :
Ouvez, Chérubin, ouvez vite, c’est Suzanne ; ouvrez et sortez.
 
{{personnage|Chérubin}} ’’sort''sort.’’''
 
Ah ! Suzon, quelle horrible scène !
Ligne 2 309 :
Sortez, vous n’avez pas une minute.
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’effrayé''effrayé.’’''
 
Eh, par où sortir ?
Ligne 2 327 :
{{personnage|Chérubin}}
 
La fenêtre du jardin n’est peut-être pas bien haute. ’’''(Il court y regarder.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’avec''avec effroi.’’''
 
Un grand étage ! impossible ! Ah ! ma pauvre maîtresse ! Et mon mariage, ô ciel !
Ligne 2 341 :
Il va se tuer !
 
{{personnage|Chérubin}}, ’’exalté''exalté.’’''
 
Dans un gouffre allumé, Suzon ! oui, je m’y jetterais plutôt que de lui nuire... Et ce baiser va me porter bonheur. ’’''(Il l’embrasse et court sauter par la fenêtre.)’’''
 
Ligne 2 349 :
{{scène|15}}
 
{{personnage|Suzanne}} ’’seule''seule, un cri de frayeur.’’''
 
Ah ! ... ’’''(Elle tombe assise un moment. Elle va péniblement regarder à la fenêtre et revient.)’’'' Il est déjà bien loin. Oh ! le petit garnement ! aussi leste que joli ! si celui-là manque de femmes... Prenons sa place au plus tôt. ’’''(En entrant dans le cabinet.)’’'' Vous pouvez à présent, monsieur le Comte, rompre la cloison, si cela vous amuse ; au diantre qui répond un mot ! ’’''(Elle s’y enferme.)’’''
 
Ligne 2 357 :
{{scène|16}}
 
’’Le''Le Comte, La Comtesse rentrent dans la chambre.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’une''une pince à la main qu’il jette sur le fauteuil.’’''
 
Tout est bien comme je l’ai laissé. Madame, en m’exposant à briser cette porte, réfléchissez aux suites : encore une fois, voulez-vous l’ouvrir ?
Ligne 2 371 :
Amour ou vanité, vous ouvrirez la porte ; ou je vais à l’instant...
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’au''au-devant.’’''
 
Arrêtez, monsieur, je vous prie ! Me croyez-vous capable de manquer à ce que je me dois ?
Ligne 2 379 :
Tout ce qu’il vous plaira, madame ; mais je verrai qui est dans ce cabinet.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’effrayée''effrayée.’’''
 
Hé bien, monsieur, vous le verrez. Ecoutez-moi... tranquillement.
Ligne 2 387 :
Ce n’est donc pas Suzanne ?
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’timidement''timidement.’’''
 
Au moins n’est-ce pas non plus une personne... dont vous deviez rien redouter... Nous disposions une plaisanterie... bien innocente, en vérité, pour ce soir ; et je vous jure...
Ligne 2 399 :
Que nous n’avions pas plus dessein de vous offenser l’un que l’autre.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’vite''vite.’’''
 
L’un que l’autre ? C’est un homme.
Ligne 2 415 :
À peine osé-je le nommer !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’furieux''furieux.’’''
 
Je le tuerai.
Ligne 2 435 :
Chérubin ! l’insolent ! Voilà mes soupçons et le billet expliqués.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’joignant''joignant les mains.’’''
 
Ah ! monsieur ! gardez de penser...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’frappant''frappant du pied, à part.’’''
 
Je trouverai partout ce maudit page ! ’’''(Haut.)’’'' Allons, madame, ouvrez ; je sais tout maintenant. Vous n’auriez pas été si émue, en le congédiant ce matin ; il serait parti quand je l’ai ordonné ; vous n’auriez pas mis tant de fausseté dans votre conte de Suzanne, il ne se serait pas si soigneusement caché, s’il n’y avait rien de criminel.
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 2 447 :
Il a craint de vous irriter en se montrant.
 
{{personnage|Le Comte}},’’'' hors de lui, crie au cabinet.’’''
 
Sors donc, petit malheureux !
Ligne 2 479 :
Il n’est pas coupable, il partait : c’est moi qui l’ai fait appeler.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’furieux''furieux.’’''
 
Levez-vous. Otez-vous... Tu es bien audacieuse d’oser me parler pour un autre !
Ligne 2 511 :
{{scène|17}}
 
’’La''La Comtesse, Le Comte, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Suzanne}} ’’sort''sort en riant.’’''
 
Je le tuerai, je le tuerai ! Tuez-le donc, ce méchant page.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Ah ! quelle école ! ’’''(Regardant la Comtesse qui est restée stupéfaite.)’’'' Et vous aussi, vous jouez l’étonnement ? ... Mais peut-être elle n’y est pas seule. ’’''(Il entre.)’’''
 
Ligne 2 525 :
{{scène|18}}
 
’’La''La Comtesse, assise, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Suzanne}} ’’accourt''accourt à sa maîtresse.’’''
 
Remettez-vous, madame ; il est bien loin ; il a fait un saut...
Ligne 2 539 :
{{scène|19}}
 
’’La''La Comtesse, assise, Suzanne, Le Comte.’’''
 
{{personnage|Le Comte}} sort du cabinet d’un air confus. Après un court silence.
Ligne 2 545 :
Il n’y a personne, et pour le coup j’ai tort. - Madame... vous jouez fort bien la comédie.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
Et moi, Monseigneur ? ’’''(La Comtesse, son mouchoir sur la bouche, pour se remettre, ne parle pas.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}} ’’s’approche''s’approche.’’''
 
Quoi ! madame, vous plaisantiez ?
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’se''se remettant un peu.’’''
 
Eh pourquoi non, monsieur ?
Ligne 2 569 :
Nommer folies ce qui touche à l’honneur !
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’assurant''assurant son ton par degrés.’’''
 
Me suis-je unie à vous pour être éternellement dévouée à l’abandon et à la jalousie, que vous seul osez concilier ?
Ligne 2 629 :
Madame !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’suppliant''suppliant.’’''
 
Par pitié !
Ligne 2 681 :
Ah ! dites pour moi seul. - Mais je suis encore à concevoir comment les femmes prennent si vite et si juste l’air et le ton des circonstances. Vous rougissiez, vous pleuriez, votre visage était défait... D’honneur, il l’est encore.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’s’efforçant''s’efforçant de sourire.’’''
 
Je rougissais... du ressentiment de vos soupçons. Mais les hommes sont-ils assez délicats pour distinguer l’indignation d’une âme honnête outragée, d’avec la confusion qui naît d’une accusation méritée ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’souriant''souriant.’’''
 
Et ce page en désordre, en veste et presque nu...
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’montrant''montrant Suzanne.’’''
 
Vous le voyez devant vous. N’aimez-vous pas mieux l’avoir trouvé que l’autre ? En général vous ne haïssez pas de rencontrer celui-ci.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’riant''riant plus fort.’’''
 
Et ces prières, ces larmes feintes...
Ligne 2 759 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Ah ! Suzon, que je suis faible ! quel exemple je te donne ! ’’''(Tendant la main au Comte.)’’'' On ne croira plus à la colère des femmes.
 
{{personnage|Suzanne}}
 
Bon, madame, avec eux ne faut-il pas toujours en venir là ? ’’''(Le Comte baise ardemment la main de sa femme.)’’''
 
Ligne 2 769 :
{{scène|20}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Figaro, La Comtesse, Le Comte.’’''
 
{{personnage|Figaro}}, ’’arrivant''arrivant tout essoufflé.’’''
 
On disait madame incommodée. Je suis vite accouru... je vois avec joie qu’il n’en est rien.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’sèchement''sèchement.’’''
 
Vous êtes fort attentif.
Ligne 2 859 :
Toujours mentir contre l’évidence ! À la fin, cela m’irrite.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’en''en riant.’’''
 
Eh ! ce pauvre garçon ! pourquoi voulez-vous, monsieur, qu’il dise une fois la vérité ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’bas''bas à Suzanne.’’''
 
Je l’avertis de son danger ; c’est tout ce qu’un honnête homme peut faire.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas.’’''
 
As-tu vu le petit page ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’bas''bas.’’''
 
Encore tout froissé.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas.’’''
 
Ah ! pécaire !
Ligne 2 883 :
Allons, monsieur le Comte, ils brûlent de s’unir : leur impatience est naturelle ! Entrons pour la cérémonie.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Et Marceline, Marceline... ’’''(Haut.)’’'' Je voudrais être... au moins vêtu.
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 2 895 :
{{scène|21}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne, La Comtesse, Le Comte, Antonio.’’''
 
{{personnage|Antonio}},’’'' demi-gris, tenant un pot de giroflées écrasées.’’''
 
Monseigneur ! Monseigneur !
Ligne 2 917 :
Regardez comme on arrange mes giroflées !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Alerte, Figaro, alerte !
Ligne 2 929 :
Vous n’y êtes pas. C’est un petit reste d’hier. Voilà comme on fait des jugements... ténébreux.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’avec''avec feu.’’''
 
Cet homme ! cet homme ! où est-il ?
Ligne 2 945 :
C’est ce que je dis. Il faut me le trouver, déjà. Je suis votre domestique ; il n’y a que moi qui prends soin de votre jardin ; il y tombe un homme ; et vous sentez... que ma réputation en est effleurée.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Détourne, détourne !
Ligne 2 965 :
Boire sans soif et faire l’amour en tout temps, madame, il n’y a que ça qui nous distingue des autres bêtes.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
Réponds-moi donc, ou je vais te chasser.
Ligne 2 977 :
Comment donc ?
 
{{personnage|Antonio}}, ’’se''se touchant le front.’’''
 
Si vous n’avez pas assez de ça pour garder un bon domestique, je ne suis pas assez bête, moi, pour renvoyer un si bon maître.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’le''le secoue avec colère.’’''
 
On a, dis-tu, jeté un homme par cette fenêtre ?
Ligne 2 989 :
Oui, mon Excellence ; tout à l’heure, en veste blanche, et qui s’est enfui, jarni, courant...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’impatienté''impatienté.’’''
 
Après ?
Ligne 2 995 :
{{personnage|Antonio}}
 
J’ai bien voulu courir après ; mais je me suis donné, contre la grille, une si fière gourde à la main, que je ne peux plus remuer ni pied, ni patte, de ce doigt-là. ’’''(Levant le doigt.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 3 005 :
Oh ! que oui-dà ! si je l’avais vu pourtant !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Il ne l’a pas vu.
Ligne 3 047 :
{{personnage|Figaro}}
 
J’étais dans la chambre des femmes, en veste blanche : il fait un chaud ! ... J’attendais là, ma Suzannette, quand j’ai ouï tout à coup la voix de Monseigneur et le grand bruit qui se faisait ! je ne sais quelle crainte m’a saisi à l’occasion de ce billet ; et, s’il faut avouer ma bêtise, j’ai sauté sans réflexion sur les couches, où je me suis même un peu foulé le pied droit. ’’''(Il frotte son pied.)’’''
 
{{personnage|Antonio}}
Ligne 3 053 :
Puisque c’est vous, il est juste de vous rendre ce brimborion de papier qui a coulé de votre veste, en tombant.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’se''se jette dessus.’’''
 
Donne-le-moi. ’’''(Il ouvre le papier et le referme.)’’''
 
{{personnage|Figaro}},’’'' à part.’’''
 
Je suis pris.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à Figaro’’Figaro''.
 
La frayeur ne vous aura pas fait oublier ce que contient ce papier, ni comment il se trouvait dans votre poche ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’embarrassé''embarrassé, fouille dans ses poches et en tire des papiers.’’''
 
Non sûrement... Mais c’est que j’en ai tant. Il faut répondre à tout... ’’''(Il regarde un des papiers.) ’’Ceci''Ceci ? ah ! c’est une lettre de Marceline, en quatre pages ; elle est belle ! ... Ne serait-ce pas la requête de ce pauvre braconnier en prison ? ... Non, la voici... J’avais l’état des meubles du petit château dans l’autre poche... ’’''(Le Comte rouvre le papier qu’il tient.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’bas''bas à Suzanne.’’''
 
Ah ! dieux ! Suzon, c’est le brevet d’officier.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Tout est perdu, c’est le brevet.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’replie''replie le papier.’’''
 
Eh bien ! l’homme aux expédients, vous ne devinez pas ?
 
{{personnage|Antonio}}, ’’s’approchant''s’approchant de Figaro.’’''
 
Monseigneur dit, si vous ne devinez pas ?
 
{{personnage|Figaro}} ’’le''le repousse.’’''
 
Fi donc, vilain, qui me parle dans le nez !
Ligne 3 101 :
Pourquoi vous l’aurait-il remis ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’embarrassé''embarrassé.’’''
 
Il... désirait qu’on y fît quelque chose.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’regarde''regarde son papier.’’''
 
Il n’y manque rien.
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’bas''bas à Suzanne.’’''
 
Le cachet.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Le cachet manque.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Vous ne répondez pas ?
Ligne 3 133 :
D’y apposer le sceau de vos armes. Peut-être aussi que cela ne valait pas la peine.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’rouvre''rouvre le papier et le chiffonne de colère.’’''
 
Allons, il est écrit que je ne saurai rien. ’’''(À part.)’’'' C’est ce Figaro qui les mène, et je ne m’en vengerais pas ! ’’''(Il veut sortir avec dépit.)’’''
 
{{personnage|Figaro}}, ’’l’arrêtant''l’arrêtant.’’''
 
Vous sortez sans ordonner mon mariage ?
Ligne 3 145 :
{{scène|22}}
 
’’Bazile''Bazile, Bartholo ,Marceline, Figaro, Le Comte, Gripe-Soleil, La Comtesse, Suzanne, Antonio ; valets du Comte, ses vassaux.’’''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’au''au Comte.’’''
 
Ne l’ordonnez pas, Monseigneur ! Avant de lui faire grâce, vous nous devez justice. Il a des engagements avec moi.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Voilà ma vengeance arrivée.
Ligne 3 161 :
{{personnage|Marceline}}
 
Oui, je m’expliquerai, malhonnête ! ’’''(La Comtesse s’assied sur une bergère. Suzanne est derrière elle.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 3 175 :
Un billet, voilà tout, pour de l’argent prêté.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’au''au Comte.’’''
 
Sous condition de m’épouser. Vous êtes un grand seigneur, le premier juge de la province...
Ligne 3 183 :
Présentez-vous au tribunal, j’y rendrai justice à tout le monde.
 
{{personnage|Bazile}}, ’’montrant''montrant Marceline.’’''
 
En ce cas, Votre Grandeur permet que je fasse aussi valoir mes droits sur Marceline ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Ah, voilà mon fripon du billet.
Ligne 3 195 :
Autre fou de la même espèce !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’en''en colère, à Bazile.’’''
 
Vos droits ! vos droits ! Il vous convient bien de parler devant moi, maître sot !
 
{{personnage|Antonio}}, ’’frappant''frappant dans sa main.’’''
 
Il ne l’a, ma foi, pas manqué du premier coup : c’est son nom.
Ligne 3 235 :
Homme à talent sur l’orgue du village, je montre le clavecin à madame, à chanter à ses femmes, la mandoline aux pages ; et mon emploi surtout est d’amuser votre compagnie avec ma guitare, quand il vous plaît me l’ordonner.
 
{{personnage|Gripe-Soleil}} ’’s’avance''s’avance.’’''
 
J’irai bien, Monsigneu, si cela vous plaira.
Ligne 3 249 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Ton zèle me plaît ; vas-y : mais vous ’’''(à Bazile)’’'', accompagnez monsieur en jouant de la guitare, et chantant pour amuser en chemin. Il est de ma compagnie.
 
{{personnage|Gripe-Soleil}}, ’’joyeux''joyeux.’’''
 
Oh ! moi, je suis de la ? ... ’’''(Suzanne l’apaise de la main, en lui montrant la Comtesse.)’’''
 
{{personnage|Bazile}}, ’’surpris''surpris.’’''
 
Que j’accompagne Gripe-Soleil en jouant ? ...
Ligne 3 261 :
{{personnage|Le Comte}}
 
C’est votre emploi. Partez ou je vous chasse. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 3 267 :
{{scène|23}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, excepté Le Comte.’’''
 
{{personnage|Bazile}}, ’’à''à lui-même.’’''
 
Ah ! je n’irai pas lutter contre le pot de fer, moi qui ne suis...
Ligne 3 277 :
Qu’une cruche.
 
{{personnage|Bazile}}, ’’à''à part.’’''
 
Au lieu d’aider à leur mariage, je m’en vais assurer le mien avec Marceline. ’’''(À Figaro.)’’'' Ne conclus rien, crois-moi, que je ne sois de retour. ’’''(Il va prendre la guitare sur le fauteuil du fond.)’’''
 
{{personnage|Figaro}} ’’le''le suit.’’''
 
Conclure ! oh ! va, ne crains rien, quand même tu ne reviendrais jamais... Tu n’as pas l’air en train de chanter, veux-tu que je commence ? ... Allons, gai, haut la-mi-la pour ma fiancée. ’’''(Il se met en marche à reculons, danse en chantant la séguedille suivante ; Bazile accompagne ; et tout le monde le suit.)’’''
 
SEGUEDILLE : Air noté.
Ligne 3 321 :
{{scène|24}}
 
’’Suzanne''Suzanne, La Comtesse.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’dans''dans sa bergère.’’''
 
Vous voyez, Suzanne, la jolie scène que votre étourdi m’a value avec son billet.
Ligne 3 381 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Non, non. Il voudrait mettre ici du sien... Mon masque de velours et ma canne ; que j’aille y rêver sur la terrasse. ’’''(Suzanne entre dans le cabinet de toilette.)’’''
 
Ligne 3 387 :
{{scène|25}}
 
{{personnage|La Comtesse}}, ’’seule''seule,’’''
 
Il est assez effronté, mon petit projet ! ’’''(Elle se retourne.)’’'' Ah ! le ruban ! mon joli ruban ! je t’oubliais ! ’’''(Elle le prend sur sa bergère et le roule.)’’'' Tu ne me quitteras plus... tu me rappelleras la scène où ce malheureux enfant... Ah ! monsieur le Comte, qu’avez-vous fait ? et moi, que fais-je en ce moment ?
 
Ligne 3 395 :
{{scène|26}}
 
’’La''La Comtesse, Suzanne.’’'' ’’''(La Comtesse met furtivement le ruban dans son sein.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 3 405 :
Souviens-toi que je t’ai défendu d’en dire un mot à Figaro.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’avec''avec joie’’joie''
 
Madame, il est charmant votre projet ! je viens d’y réfléchir. Il rapproche tout, termine tout, embrasse tout ; et, quelque chose qui arrive, mon mariage est maintenant certain. ’’''(Elle baise la main de sa maîtresse. Elles sortent.)’’''
 
Pendant l’entracte, des valets arrangent la salle d’audience : on apporte les deux banquettes à dossier des avocats, que l’on place aux deux colis du théâtre, de façon que le passage soit libre par-derrière. On pose une estrade à deux marches dans le milieu du théâtre, vers le fond, sur laquelle on place le fauteuil du Comte. On met la table du greffier et son tabouret de côté sur le devant, et des sièges pour Brid’oison et d’autres juges, des deux côtés de l’estrade du Comte.
Ligne 3 415 :
{{acte|III}}
 
’’Le''Le théâtre représente une salle du château appelée salle du trône et servant de salle d’audience, ayant sur le côté une impériale en dais, et dessous, le portrait du Roi.’’''
 
Ligne 3 421 :
{{scène|1}}
 
’’Le''Le Comte, Pédrille, en veste et botté, tenant un paquet cacheté.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’vite''vite.’’''
 
M’as-tu bien entendu ?
Ligne 3 429 :
{{personnage|Pédrille}}
 
Excellence, oui. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 3 435 :
{{scène|2}}
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’seul''seul, criant.’’''
 
Pédrille !
Ligne 3 443 :
{{scène|3}}
 
’’Le''Le Comte, Pédrille revient.’’''
 
{{personnage|Pédrille}}
Ligne 3 505 :
{{scène|4}}
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’seul''seul, marche en rêvant.’’''
 
J’ai fait une gaucherie en éloignant Bazile ! ... la colère n’est bonne à rien. - Ce billet remis par lui, qui m’avertit d’une entreprise sur la Comtesse ; la camariste enfermée quand j’arrive ; la maîtresse affectée d’une terreur fausse ou vraie ; un homme qui saute par la fenêtre, et l’autre après qui avoue... ou qui prétend que c’est lui... Le fil m’échappe. Il y a là-dedans une obscurité... Des libertés chez mes vassaux, qu’importe à gens de cette étoffe ? Mais la Comtesse ! si quelque insolent attentait... Où m’égaré-je ? En vérité, quand la tête se monte, l’imagination la mieux réglée devient folle comme un rêve ! - Elle s’amusait : ces ris étouffés, cette joie mal éteinte ! - Elle se respecte ; et mon honneur... où diable on l’a placé ! De l’autre part, où suis-je ? cette friponne de Suzanne a-t-elle trahi mon secret ? ... comme il n’est pas encore le sien... Qui donc m’enchaîne à cette fantaisie ? j’ai voulu vingt fois y renoncer... Etrange effet de l’irrésolution ! si je la voulais sans débat, je la désirerais mille fois moins. - Ce Figaro se fait bien attendre ! il faut le sonder adroitement ’’''(Figaro paraît dans le fond, il s’arrête)’’'' et tâcher, dans la conversation que je vais avoir avec lui, de démêler d’une manière détournée s’il est instruit ou non de mon amour pour Suzanne.
 
Ligne 3 513 :
{{scène|5}}
 
’’Le''Le Comte, Figaro.’’''
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Nous y voilà.
Ligne 3 523 :
... S’il en sait par elle un seul mot...
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
je m’en suis douté.
Ligne 3 531 :
... Je lui fais épouser la vieille.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part,’’''
 
Les amours de monsieur Bazile ?
Ligne 3 539 :
... Et voyons ce que nous ferons de la jeune.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Ah ! ma femme, s’il vous plaît.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’se''se retourne.’’''
 
Hein ? quoi ? qu’est-ce que c’est ?
 
{{personnage|Figaro}} ’’s’avance''s’avance.’’''
 
Moi, qui me rends à vos ordres.
Ligne 3 559 :
Je n’ai rien dit.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’répète''répète.’’''
 
Ma femme, s’il vous plaît ?
Ligne 3 567 :
C’est... la fin d’une réponse que je faisais : allez le dire à ma femme, s’il vous plaît.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’se''se promène.’’''
 
Sa femme ! ... Je voudrais bien savoir quelle affaire peut arrêter monsieur, quand je le fais appeler ?
 
{{personnage|Figaro}},’’'' feignant d’assurer son habillement.’’''
 
Je m’étais sali sur ces couches en tombant ; je me changeais.
Ligne 3 607 :
Sur un faux avis, vous arrivez furieux, renversant tout, comme le torrent de la Morena ; vous cherchez un homme, il vous le faut, ou vous allez briser les portes, enfoncer les cloisons ! Je me trouve là par hasard : qui sait dans votre emportement si...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’interrompant''interrompant.’’''
 
Vous pouviez fuir par l’escalier.
Ligne 3 615 :
Et vous, me prendre au corridor.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’en''en colère.’’''
 
Au corridor ! ’’''(À part.)’’'' Je m’emporte, et nuis à ce que je veux savoir.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Voyons-le venir, et jouons serré.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’radouci''radouci.’’''
 
Ce n’est pas ce que je voulais dire ; laissons cela. J’avais... oui, j’avais quelque envie de t’emmener à Londres courrier de dépêches... mais, toutes réflexions faites...
Ligne 3 653 :
{{personnage|Figaro}}
 
Diable ! c’est une belle langue que l’anglais ! il en faut peu pour aller loin. Avec God-dam, en Angleterre, on ne manque de rien nulle part, - Voulez-vous tâter d’un bon poulet gras ? entrez dans une taverne, et faites seulement ce geste au garçon. ’’''(Il tourne la broche.)’’'' God-dam ! on vous apporte un pied de bœuf salé, sans pain. C’est admirable ! Aimez-vous à boire un coup d’excellent bourgogne ou de clairet ? rien que celui-ci. ’’''(Il débouche une bouteille.)’’'' God-dam ! on vous sert un pot de bière, en bel étain, la mousse aux bords. Quelle satisfaction ! Rencontrez-vous une de ces jolies personnes qui vont trottant menu, les yeux baissés, coudes en arrière, et tortillant un peu des hanches ? mettez mignardement tous les doigts unis sur la bouche. Ah ! God-dam ! elle vous sangle un soufflet de crocheteur : preuve qu’elle entend. Les Anglais, à la vérité, ajoutent par-ci, par-là, quelques autres mots en conversant ; mais il est bien aisé de voir que God-dam est le fond de la langue ; et si Monseigneur n’a pas d’autre motif de me laisser en Espagne...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Il veut venir à Londres ; elle n’a pas parlé.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Il croit que je ne sais rien ; travaillons-le un peu dans son genre.
Ligne 3 721 :
{{personnage|Le Comte}}
 
À la fortune ? ’’''(À part.)’’'' Voici du neuf.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
À mon tour maintenant. ’’''(Haut.)’’'' Votre Excellence m’a gratifié de la conciergerie du château ; c’est un fort joli sort : à la vérité, je ne serai pas le courrier étrenné des nouvelles intéressantes ; mais, en revanche, heureux avec ma femme au fond de l’Andalousie...
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 3 767 :
La politique, l’intrigue, volontiers ; mais, comme je les crois un peu germaines, en fasse qui voudra ! J’aime mieux ma mie, ô gué ! comme dit la chanson du bon Roi.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Il veut rester. J’entends... Suzanne m’a trahi.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Je l’enfile, et le paye en sa monnaie.
Ligne 3 783 :
Me feriez-vous un crime de refuser une vieille fille, quand Votre Excellence se permet de nous souffler toutes les jeunes !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’raillant''raillant.’’''
 
Au tribunal le magistrat s’oublie, et ne voit plus que l’ordonnance.
Ligne 3 799 :
Eh ! qui le sait, Monseigneur ? Tempo è galant’uomo, dit l’Italien ; il dit toujours la vérité : c’est lui qui m’apprendra qui me veut du mal, ou du bien.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Je vois qu’on lui a tout dit ; il épousera la duègne.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Il a joué au fin avec moi, qu’a-t-il appris ?
Ligne 3 811 :
{{scène|6}}
 
’’Le''Le Comte, un laquais, Figaro.’’''
 
{{personnage|Le laquais}}, ’’annonçant''annonçant.’’''
 
Dom Gusman Brid’oison.
Ligne 3 827 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Qu’il attende. ’’''(Le laquais sort.)’’''
 
Ligne 3 833 :
{{scène|7}}
 
’’Le''Le Comte, Figaro.’’''
 
{{personnage|Figaro}} ’’reste''reste un moment à regarder le Comte qui rêve.’’''
 
... Est-ce là ce que Monseigneur voulait ?
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’revenant''revenant à lui.’’''
 
Moi ? ... je disais d’arranger ce salon pour l’audience publique.
Ligne 3 845 :
{{personnage|Figaro}}
 
Hé ! qu’est-ce qu’il manque ? Le grand fauteuil pour vous, de bonnes chaises aux prud’hommes, le tabouret du greffier, deux banquettes aux avocats, le plancher pour le beau monde et la canaille derrière. Je vais renvoyer les frotteurs. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 3 851 :
{{scène|8}}
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’seul''seul.’’''
 
Le maraud m’embarrassait ! en disputant, il prend son avantage, il vous serre, vous enveloppe... Ah ! friponne et fripon, vous vous entendez pour me jouer ? Soyez amis, soyez amants, soyez ce qu’il vous plaira, j’y consens ; mais parbleu, pour époux...
Ligne 3 859 :
{{scène|9}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Le Comte.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’essoufflée''essoufflée.’’''
 
Monseigneur... pardon, Monseigneur.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’avec''avec humeur.’’''
 
Qu’est-ce qu’il y a, mademoiselle ?
Ligne 3 877 :
Vous voulez quelque chose apparemment ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’timidement''timidement.’’''
 
C’est que ma maîtresse a ses vapeurs. J’accourais vous prier de nous prêter votre flacon d’éther. Je l’aurais rapporté dans l’instant,
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’le''le lui donne.’’''
 
Non, non, gardez-le pour vous-même. Il ne tardera pas à vous être utile.
Ligne 3 901 :
Que je vous ai promise, moi ?
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’baissant''baissant les yeux.’’''
 
Monseigneur, j’avais cru l’entendre.
Ligne 3 909 :
Oui, si vous consentiez à m’entendre vous-même.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’les''les yeux baissés.’’''
 
Et n’est-ce pas mon devoir d’écouter Son Excellence ?
Ligne 3 953 :
Dame ! oui, je lui dis tout... hors ce qu’il faut lui taire,
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’en''en riant.’’''
 
Ah ! charmante ! Et tu me le promets ? Si tu manquais à ta parole, entendons-nous, mon cœur : point de rendez-vous, point de dot, point de mariage.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’faisant''faisant la révérence.’’''
 
Mais aussi point de mariage, point de droit du seigneur, Monseigneur.
Ligne 3 965 :
Où prend-elle ce qu’elle dit ? d’honneur j’en raffolerai ! Mais ta maîtresse attend le flacon...
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’riant''riant et rendant le flacon.’’''
 
Aurais-je pu vous parler sans un prétexte ?
 
{{personnage|Le Comte}} ’’veut''veut l’embrasser’’l’embrasser''
 
Délicieuse créature !
 
{{personnage|Suzanne}} ’’s’échappe''s’échappe.’’''
 
Voilà du monde.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Elle est à moi. ’’''(Il s’enfuit.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 3 989 :
{{scène|10}}
 
’’Suzanne''Suzanne, Figaro.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 3 997 :
{{personnage|Suzanne}}
 
Plaide à présent, si tu le veux ; tu viens de gagner ton procès. ’’''(Elle s’enfuit.)’’''
 
{{personnage|Figaro}} ’’la''la suit.’’''
 
Ah ! mais, dis donc...
Ligne 4 007 :
{{scène|11}}
 
{{personnage|Le Comte}} ’’rentre''rentre seul.’’''
 
Tu viens de gagner ton procès ! - Je donnais là dans un bon piège ! Ô mes chers insolents ! je vous punirai de façon... Un bon arrêt, bien juste... Mais s’il allait payer la duègne... Avec quoi... S’il payait... Eeeeh ! n’ai-je pas le fier Antonio, dont le noble orgueil dédaigne en Figaro un inconnu pour sa nièce ? En caressant cette manie... Pourquoi non ? dans le vaste champ de l’intrigue il faut savoir tout cultiver, jusqu’à la vanité d’un sot. ’’''(Il appelle.)’’'' Anto... ’’''(Il voit entrer Marceline, etc. Il sort.)’’''
 
Ligne 4 015 :
{{scène|12}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Marceline, Brid’oison’’Brid’oison''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’à''à Brid’oison.’’''
 
Monsieur, écoutez mon affaire.
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’en''en robe, et bégayant un peu.’’''
 
Eh bien ! pa-arlons-en verbalement.
Ligne 4 071 :
{{personnage|Marceline}}
 
Non, monsieur. ’’''(À Bartholo.)’’'' Où sommes-nous ? ’’''(À Brid’oison)’’''. Quoi ! c’est vous qui nous jugerez ?
 
{{personnage|Brid’oison}}
Ligne 4 077 :
Est-ce que j’ai a-acheté ma charge pour autre chose ?
 
{{personnage|Marceline}}, ’’en''en soupirant.’’''
 
C’est un grand abus que de les vendre !
Ligne 4 089 :
{{scène|13}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Marceline, Brid’oison.’’''
 
’’Figaro''Figaro rentre en se frottant les mains.’’''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’montrant''montrant Figaro.’’''
 
Monsieur, contre ce malhonnête homme.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’très''très gaiement, à Marceline.’’''
 
Je vous gêne peut-être. - Monseigneur revient dans l’instant, monsieur le conseiller.
Ligne 4 181 :
{{scène|14}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Marceline, Le Comte, Brid’oison, Figaro, un huissier.’’''
 
{{personnage|L’huissier}}, ’’précédant''précédant le Comte, crie.’’''
 
Monseigneur, messieurs.
Ligne 4 195 :
C’è-est vous qui l’êtes, monsieur le Comte. Mais je ne vais jamais san-ans elle, parce que la forme, voyez-vous, la forme ! Tel rit d’un juge en habit court, qui-i tremble au seul aspect d’un procureur en robe. La forme, la-a forme !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à l’huissier.’’''
 
Faites entrer l’audience.
 
{{personnage|L’huissier}} ’’va''va ouvrir en glapissant.’’''
 
L’audience !
Ligne 4 207 :
{{scène|15}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Antonio, Les Valets du château, les paysans et paysannes en habits de fête ; Le Comte s’assied sur le grand fauteuil ; Brid’oison, sur une chaise à côté ; Le Greffier, sur le tabouret derrière sa table ; Les Juges, Les Avocats, sur les banquettes ; Marceline, à côté de Bartholo ; Figaro, sur l’autre banquette ; Les Paysans et Valets, debout derrière.’’''
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’à''à Double-Main.’’''
 
Double-Main, a-appelez les causes.
 
{{personnage|Double-Main}} ’’lit''lit un papier.’’''
 
"Noble, très noble, infiniment noble, don Pedro George, hidalgo, baron de Los Altos, y Montes Fieros, y Otros Montes ; contre Alonzo Calderon, jeune auteur dramatique. Il est question d’une comédie mort-née, que chacun désavoue et rejette sur l’autre."
Ligne 4 221 :
Ils ont raison tous deux. Hors de cour. S’ils font ensemble un autre ouvrage, pour qu’il marque un peu dans le grand monde, ordonné que le noble y mettra son nom, le poète son talent.
 
{{personnage|Double-Main}} ’’lit''lit un autre papier.’’''
 
"André Pétrutebio, laboureur ; contre le receveur de la province." Il s’agit d’un forcement arbitraire.
Ligne 4 229 :
L’affaire n’est pas de mon ressort. Je servirai mieux mes vassaux en les protégeant près du Roi. Passez.
 
{{personnage|Double-Main}} ’’en''en prend un troisième. Bartholo et Figaro se lèvent.’’''
 
"Barbe - Agar - Raab - Magdelaine - Nicole - Marceline de Verte-Allure, fille majeure ’’''(Marceline se lève et salue)’’'' ; contre Figaro..." Nom de baptême en blanc ?
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 4 245 :
C’est le mien.
 
{{personnage|Double-Main}} ’’écrit''écrit.’’''
 
Contre anonyme Figaro. Qualités ?
Ligne 4 255 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Vous êtes gentilhomme ? ’’''(Le greffier écrit.)’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 4 261 :
Si le ciel l’eût voulu, je serais fils d’un prince
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’au''au greffier.’’''
 
Allez.
 
{{personnage|L’Huissier}}, ’’glapissant''glapissant.’’''
 
Silence ! messieurs.
 
{{personnage|Double-Main}} ’’lit''lit.’’''
 
"... Pour cause d’opposition faite au mariage dudit Figaro par ladite de Verte-Allure. Le docteur Bartholo plaidant pour la demanderesse, et ledit Figaro pour lui-même, si la cour le permet, contre le vœu de l’usage et la jurisprudence du siège."
Ligne 4 285 :
Oui, promesse !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’mettant''mettant ses lunettes.’’''
 
Elle est précise.
Ligne 4 297 :
Silence donc, messieurs !
 
{{personnage|L’Huissier}}, ’’glapissant''glapissant.’’''
 
Silence !
 
{{personnage|Bartholo}} ’’lit''lit.’’''
 
"Je soussigné reconnais avoir reçu de damoiselle, etc. Marceline de Verte-Allure dans le château d’Aguas-Frescas, la somme de deux mille piastres fortes cordonnées, laquelle somme je lui rendrai à sa réquisition, dans ce château ; et je l’épouserai, par forme de reconnaissance, etc. Signé Figaro, tout court." Mes conclusions sont au paiement du billet et à l’exécution de la promesse, avec dépens. ’’''(Il plaide.)’’'' Messieurs... jamais cause plus intéressante ne fut soumise au jugement de la cour ; et, depuis Alexandre le Grand, qui promit mariage à la belle Thalestris...
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’interrompant''interrompant.’’''
 
Avant d’aller plus loin, avocat, convient-on de la validité du titre ?
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Qu’oppo... qu’oppo-osez-vous à cette lecture ?
Ligne 4 333 :
Dou-ouble-Main, lisez vous-même.
 
{{personnage|Double-Main}}, ’’prenant''prenant le papier.’’''
 
Et c’est le plus sûr ; car souvent les parties déguisent en lisant. ’’''(Il lit.)’’'' "E, e, e, Damoiselle e, e, e, de Verte-Allure, e, e, e, Ha ! laquelle somme je lui rendrai à sa réquisition, dans ce château... ET... OU... ET... OU..." Le mot est si mal écrit... il y a un pâté.
 
{{personnage|Brid’oison}}
Ligne 4 341 :
Un pâ-âté ? je sais ce que c’est.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’plaidant''plaidant.’’''
 
Je soutiens, moi, que c’est la conjonction copulative ET qui lie les membres corrélatifs de la phrase ; je payerai la demoiselle, ET je l’épouserai.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’plaidant''plaidant.’’''
 
Je soutiens, moi, que c’est la conjonction alternative OU qui sépare lesdits membres ; je payerai la donzelle, OU je l’épouserai. À pédant, pédant et demi. Qu’il s’avise de parler latin, j’y suis grec ; je l’extermine.
Ligne 4 363 :
{{personnage|Bartholo}}
 
Et nous y adhérons. Un si mauvais refuge ne sauvera pas le coupable. Examinons le titre en ce sens. ’’''(Il lit.)’’'' "Laquelle somme je lui rendrai dans ce château, où je l’épouserai." C’est ainsi qu’on dirait, messieurs : "Vous vous ferez saigner dans ce lit, où vous resterez chaudement" ; c’est dans lequel. "Il prendra deux gros de rhubarbe, où vous mêlerez un peu de tamarin" ; dans lesquels on mêlera. Ainsi "château où je l’épouserai", messieurs, c’est "château dans lequel.."
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 4 369 :
Point du tout : la phrase est dans le sens de celle-ci : "ou la maladie vous tuera, ou ce sera le médecin" ; ou bien le médecin ; c’est incontestable. Autre exemple : "ou vous n’écrirez rien qui plaise, ou les sots vous dénigreront" ; ou bien les sots ; le sens est clair ; car, audit cas, sots ou méchants sont le substantif qui gouverne. Maître Bartholo croit-il donc que j’aie oublié ma syntaxe ? Ainsi, je la payerai dans ce château, virgule, ou je l’épouserai...
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’vite''vite.’’''
 
Sans virgule.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’vite''vite.’’''
 
Elle y est. C’est, virgule, messieurs, ou bien je l’épouserai.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’regardant''regardant le papier, vite.’’''
 
Sans virgule, messieurs.
 
{{personnage|Figaro}},’’'' vite.’’''
 
Elle y était, messieurs. D’ailleurs, l’homme qui épouse est-il tenu de rembourser ?
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’vite''vite.’’''
 
Oui ; nous nous marions séparés de biens.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’vite''vite.’’''
 
Et nous de corps, dès que mariage n’est pas quittance. ’’''(Les juges se lèvent et opinent tout bas.)’’''
 
{{personnage|Bartholo}}
Ligne 4 401 :
Silence, messieurs !
 
{{personnage|L’Huissier}}, ’’glapissant''glapissant.’’''
 
Silence !
Ligne 4 419 :
{{personnage|Figaro}}
 
Continuez à déraisonner, mais cessez d’injurier. Lorsque, craignant l’emportement des plaideurs, les tribunaux ont toléré qu’on appelât des tiers, ils n’ont pas entendu que ces défenseurs modérés deviendraient impunément des insolents privilégiés. C’est dégrader le plus noble institut. ’’''(Les juges continuent d’opiner bas.)’’''
 
{{personnage|Antonio}}, ’’à''à Marceline, montrant les juges.’’''
 
Qu’ont-ils tant à balbucifier ?
Ligne 4 429 :
On a corrompu le grand juge ; il corrompt l’autre, et je perds mon procès.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’bas''bas, d’un ton sombre.’’''
 
J’en ai peur.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
Courage, Marceline !
 
{{personnage|Double-Main}} ’’se''se lève ; à Marceline.’’''
 
Ah ! c’est trop fort ! je vous dénonce ; et, pour l’honneur du tribunal, je demande qu’avant faire droit sur l’autre affaire, il soit prononcé sur celle-ci.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’s’assied''s’assied.’’''
 
Non, greffier, je ne prononcerai point sur mon injure personnelle ; un juge espagnol n’aura point à rougir d’un excès digne au plus des tribunaux asiatiques : c’est assez des autres abus ! J’en vais corriger un second, en vous motivant mon arrêt : tout juge qui s’y refuse est un grand ennemi des lois. Que peut requérir la demanderesse ? mariage à défaut de paiement : les deux ensemble impliqueraient.
Ligne 4 449 :
Silence, messieurs !
 
{{personnage|L’Huissier}}, ’’glapissant''glapissant.’’''
 
Silence.
Ligne 4 457 :
Que nous répond le défendeur ? qu’il veut garder sa personne ; à lui permis.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’avec''avec joie.’’''
 
J’ai gagné !
Ligne 4 463 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Mais comme le texte dit : "Laquelle somme je payerai à sa première réquisition, ou bien j’épouserai, etc.", la cour condamne le défendeur à payer deux mille piastres fortes à la demanderesse, ou bien à l’épouser dans le jour. ’’''(Il se lève.)’’''
 
{{personnage|Figaro}}, ’’stupéfait''stupéfait.’’''
 
J’ai perdu.
 
{{personnage|Antonio}}, ’’avec''avec joie.’’''
 
Superbe arrêt !
Ligne 4 481 :
En ce que tu n’es plus mon neveu. Grand merci, monseigneur.
 
{{personnage|L’Huissier}}, ’’glapissant''glapissant.’’''
 
Passez, messieurs. ’’''(Le peuple sort.)’’''
 
{{personnage|Antonio}}
 
Je m’en vas tout conter à ma nièce ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 4 493 :
{{scène|16}}
 
’’Le''Le Comte, allant de côté et d’autre ; Marceline, Bartholo, Figaro, Brid’oison.’’''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’s’assied''s’assied.’’''
 
Ah ! je respire !
Ligne 4 503 :
Et moi, j’étouffe.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Au moins je suis vengé, cela soulage.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Et ce Bazile qui devait s’opposer au mariage de Marceline, voyez comme il revient ! - ’’''(Au Comte qui sort.)’’'' monseigneur, vous nous quittez ?
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 4 515 :
Tout est jugé.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à Brid’oison.’’''
 
C’est ce gros enflé de conseiller...
Ligne 4 525 :
{{personnage|Figaro}}
 
Sans doute. Et je ne l’épouserai pas : je suis gentilhomme, une fois. ’’''(Le Comte s’arrête.)’’''
 
{{personnage|Bartholo}}
Ligne 4 551 :
Enfant perdu, docteur, ou plutôt enfant volé.
 
{{personnage|Le Comte}} ’’revient''revient.’’''
 
Volé, perdu, la preuve ? Il crierait qu’on lui fait injure !
Ligne 4 557 :
{{personnage|Figaro}}
 
Monseigneur, quand les langes à dentelles, tapis brodés et joyaux d’or trouvés sur moi par les brigands n’indiqueraient pas ma haute naissance, la précaution qu’on avait prise de me faire des marques distinctives témoignerait assez combien j’étais un fils précieux : et cet hiéroglyphe à mon bras... ’’''(Il veut se dépouiller le bras droit.)’’''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’se''se levant vivement.’’''
 
Une spatule à ton bras droit ?
Ligne 4 575 :
Oui, c’est moi.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’à''à Marceline.’’''
 
Et qui ? lui !
 
{{personnage|Marceline}}, ’’vivement’’''vivement''
 
C’est Emmanuel.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Tu fus enlevé par des bohémiens ?
 
{{personnage|Figaro}}, ’’exalté''exalté.’’''
 
Tout près d’un château. Bon docteur, si vous me rendez à ma noble famille, mettez un prix à ce service ; des monceaux d’or n’arrêteront pas mes illustres parents.
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’montrant''montrant Marceline.’’''
 
Voilà ta mère.
Ligne 4 611 :
Expliquez-vous.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’montrant''montrant Bartholo.’’''
 
Voilà ton père.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’désolé''désolé.’’''
 
Oooh ! aie de moi !
Ligne 4 627 :
Jamais.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Sa mère !
Ligne 4 655 :
Des fautes si connues ! une jeunesse déplorable !
 
{{personnage|Marceline}}, ’’s’échauffant''s’échauffant par degrés.’’''
 
Oui, déplorable, et plus qu’on ne croit ! Je n’entends pas nier mes fautes ; ce jour les a trop bien prouvées ! mais qu’il est dur de les expier après trente ans d’une vie modeste ! J’étais née, moi, pour être sage, et je la suis devenue sitôt qu’on m’a permis d’user de ma raison. Mais dans l’âge des illusions, de l’inexpérience et des besoins, où les séducteurs nous assiègent pendant que la misère nous poignarde, que peut opposer une enfant à tant d’ennemis rassemblés ? Tel nous juge ici sévèrement, qui, peut-être, en sa vie a perdu dix infortunées !
Ligne 4 663 :
Les plus coupables sont les moins généreux ; c’est la règle.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’vivement''vivement.’’''
 
Hommes plus qu’ingrats, qui flétrissez par le mépris les jouets de vos passions, vos victimes ! c’est vous qu’il faut punir des erreurs de notre jeunesse ; vous et vos magistrats, si vains du droit de nous juger, et qui nous laissent enlever, par leur coupable négligence, tout honnête moyen de subsister. Est-il un seul état pour les malheureuses filles ? Elles avaient un droit naturel à toute la parure des femmes : on y laisse former mille ouvriers de l’autre sexe.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’en''en colère.’’''
 
Ils font broder jusqu’aux soldats !
 
{{personnage|Marceline}}, ’’exaltée''exaltée.’’''
 
Dans les rangs même plus élevés, les femmes n’obtiennent de vous qu’une considération dérisoire ; leurrées de respects apparents, dans une servitude réelle ; traitées en mineures pour nos biens, punies en majeures pour nos fautes ! Ah ! sous tous les aspects, votre conduite avec nous fait horreur ou pitié !
Ligne 4 679 :
Elle a raison !
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Que trop raison !
Ligne 4 699 :
Sot événement qui me dérange !
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Et la noblesse, et le château ? Vous impo-osez à la justice !
Ligne 4 705 :
{{personnage|Figaro}}
 
Elle allait me faire faire une belle sottise, la justice ! Après que j’ai manqué, pour ces maudits cent écus, d’assommer vingt fois monsieur, qui se trouve aujourd’hui mon père ! Mais puisque le ciel sauvé ma vertu de ces dangers, mon père, agréez mes excuses... et vous, ma mère, embrassez-moi... le plus maternellement que vous pourrez ’’''(Marceline lui saute au cou.)’’''
 
Ligne 4 711 :
{{scène|17}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Figaro, Marceline, Brid’oison, Suzanne, Antonio, Le Comte.’’''
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’accourant''accourant, une bourse à la main.’’''
 
Monseigneur, arrêtez ; qu’on ne les marie pas : je viens payer madame avec la dot que ma maîtresse me donne.
 
{{personnage|Le Comte}}, ’’à''à part.’’''
 
Au diable la maîtresse ! Il semble que tout conspire... ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 4 725 :
{{scène|18}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Antonio, Suzanne, Figaro, Marceline, Brid’oison.’’''
 
{{personnage|Antonio}}, ’’voyant''voyant Figaro embrasser sa mère, dit à Suzanne.’’''
 
Ah ! oui, payer ! Tiens, tiens.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’se''se retourne.’’''
 
J’en vois assez : sortons, mon oncle.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’l’arrêtant''l’arrêtant.’’''
 
Non, s’il vous plaît. Que vois-tu donc ?
Ligne 4 747 :
Pas plus de l’une que de l’autre.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’en''en colère.’’''
 
Et que tu l’épouses à gré, puisque tu la caresses.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’gaiement''gaiement.’’''
 
Je la caresse, mais je ne l’épouse pas. ’’''(Suzanne veut sortir, Figaro la retient.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}} ’’lui''lui donne un soufflet.’’''
 
Vous êtes bien insolent d’oser me retenir !
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à la compagnie.’’''
 
C’est-il çà de l’amour ! Avant de nous quitter, je t’en supplie, envisage bien cette chère femme-là.
Ligne 4 779 :
Et vive la jalousie ! elle ne vous marchande pas.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’les''les bras ouverts.’’''
 
Embrasse ta mère, ma jolie Suzannette. Le méchant qui te tourmente est mon fils.
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’court''court à elle.’’''
 
Vous, sa mère ! ’’''(Elles restent dans les bras l’une de l’autre.)’’''
 
{{personnage|Antonio}}
Ligne 4 795 :
... Que je le sais.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’exaltée''exaltée.’’''
 
Non, mon cœur entraîné vers lui ne se trompait que de motif ; c’était le sang qui me parlait.
Ligne 4 803 :
Et moi le bon sens, ma mère, qui me servait d’instinct quand je vous refusais ; car j’étais loin de vous haïr, témoin l’argent...
 
{{personnage|Marceline}}, ’’lui''lui remet un papier.’’''
 
Il est à toi : reprends ton billet, c’est ta dot.
 
{{personnage|Suzanne}} ’’lui''lui jette la bourse.’’''
 
Prends encore celle-ci.
Ligne 4 815 :
Grand merci.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’exaltée''exaltée.’’''
 
Fille assez malheureuse, j’allais devenir la plus misérable des femmes, et je suis la plus fortunée des mères ! Embrassez-moi, mes deux enfants ; j’unis dans vous toutes mes tendresses. Heureuse autant que je puis l’être, ah ! mes enfants, combien je vais aimer !
 
{{personnage|Figaro}}, ’’attendri''attendri, avec vivacité.
''
’’
Arrête donc, chère mère ! arrête donc ! voudrais-tu voir se fondre en eau mes yeux noyés des premières larmes que je connaisse ? Elles sont de joie, au moins. Mais quelle stupidité ! j’ai manqué d’en être honteux : je les sentais couler entre mes doigts : regarde ; ’’''(Il montre ses doigts écartés)’’'' et je les retenais bêtement ! Va te promener, la honte ! je veux rire et pleurer en même. temps ; on ne sent pas deux fois ce que j’éprouve. ’’''(Il embrasse sa mère d’un côté, Suzanne de l’autre.).’’''
 
{{personnage|Marceline}}
Ligne 4 831 :
Mon cher ami !
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’s’essuyant''s’essuyant les yeux d’un mouchoir.’’''
 
Et bien ! moi, je suis donc bê-ête aussi !
 
{{personnage|Figaro}}, ’’exalté''exalté.’’''
 
Chagrin, c’est maintenant que je puis te défier ! Atteins-moi, si tu l’oses, entre ces deux femmes chéries.
 
{{personnage|Antonio}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Pas tant de cajoleries, s’il vous plaît. En fait de mariage dans les familles, celui des parents va devant, savez. Les vôtres se baillent-ils la main ?
Ligne 4 847 :
Ma main ! puisse-t-elle se dessécher et tomber, si jamais je la donne à la mère d’un tel drôle !
 
{{personnage|Antonio}}, ’’à''à Bartholo.’’''
 
Vous n’êtes donc qu’un père marâtre ? ’’''(À Figaro.)’’'' En ce cas, not’ galant, plus de parole.
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 4 865 :
{{personnage|Antonio}}
 
Tarare ! ... Il ne l’aura jamais. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 4 871 :
{{scène|19}}
 
’’Bartholo''Bartholo, Suzanne, Figaro, Marceline, Brid’oison.’’''
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’à''à Figaro.’’''
 
Et cherche à présent qui t’adopte. ’’''(Il veut sortir.)’’''
 
{{personnage|Marceline}}, ’’courant''courant prendre Bartholo à bras-le-corps, le ramène.’’''
 
Arrêtez, docteur, ne sortez pas !
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à part.’’''
 
Non, tous les sots d’Andalousie sont, je crois, déchaînés contre mon pauvre mariage !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’à''à Bartholo.’’''
 
Bon petit papa, c’est votre fils.
 
{{personnage|Marceline}}, ’’à''à Bartholo.’’''
 
De l’esprit, des talents, de la figure.
 
{{personnage|Figaro}}, ’’à''à Bartholo.’’''
 
Et qui ne vous a pas coûté une obole.
Ligne 4 901 :
Et les cent écus qu’il m’a pris ?
 
{{personnage|Marceline}}, ’’le''le caressant.’’''
 
Nous aurons tant soin de vous, papa !
 
{{personnage|Suzanne}}, ’’le''le caressant.’’''
 
Nous vous aimerons tant, petit papa !
 
{{personnage|Bartholo}}, ’’attendri''attendri.’’''
 
Papa ! bon papa ! petit papa ! Voilà que je suis plus bête encore que monsieur, moi. ’’''(Montrant Brid’oison.)’’'' Je me laisse aller comme un enfant. ’’''(Marceline et Suzanne l’embrassent.)’’'' Oh ! non, je n’ai pas dit oui. ’’''(Il se retourne.)’’'' Qu’est donc devenu Monseigneur ?
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 4 919 :
{{personnage|Tous ensemble}}
 
Courons, courons. ’’''(Ils entraînent Bartholo dehors.)’’''
 
Ligne 4 925 :
{{scène|20}}
 
{{personnage|Brid’oison}}, ’’seul''seul.’’''
 
Plus bê-ête encore que monsieur ! On peut se dire à soi-même ces-es sortes de choses-là, mais... I-ils ne sont pas polis du tout dan-ans cet endroit-ci. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 4 933 :
{{acte|IV}}
 
’’Le''Le théâtre représente une galerie ornée de candélabres, de lustres allumés, de fleurs, de guirlandes, en un mot, préparée pour donner une fête. Sur le devant, à droite, est une table avec une écritoire, un fauteuil derrière.’’''
 
Ligne 4 939 :
{{scène|1}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne.’’''
 
Figaro, ’’la''la tenant à bras-le-corps.’’''
 
Hé bien ! amour, es-tu contente ? Elle a converti son docteur, cette fine langue dorée de ma mère ! Malgré sa répugnance, il l’épouse, et ton bourru d’oncle est bridé ; il n’y a que Monseigneur qui rage, car enfin notre hymen va devenir le prix du leur. Ris donc un peu de ce bon résultat.
Ligne 4 959 :
{{personnage|Figaro}}
 
Le hasard a mieux fait que nous tous, ma petite : ainsi va le monde ; on travaille, on projette, on arrange d’un côté ; la fortune accomplit de l’autre : et depuis l’affamé conquérant qui voudrait avaler la terre, jusqu’au paisible aveugle qui se laisse mener par son chien, tous sont le jouet de ses caprices ; encore l’aveugle au chien est-il souvent mieux conduit, moins trompé dans ses vues, que l’autre aveugle avec son entourage. - Pour cet aimable aveugle qu’on nomme Amour... ’’''(Il la reprend tendrement à bras-le-corps.)’’''
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 5 055 :
{{personnage|Figaro}}
 
Tiens parole, et tu feras une belle exception à l’usage. ’’''(Il veut l’embrasser.)’’''
 
Ligne 5 061 :
{{scène|2}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne, La Comtesse.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 5 069 :
{{personnage|Figaro}}
 
Il est vrai, madame, je m’oublie. je vais leur montrer mon excuse. ’’''(Il veut emmener Suzanne.)’’''
 
La Comtesse la retient.
Ligne 5 079 :
{{scène|3}}
 
’’Suzanne''Suzanne, La Comtesse.’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 5 115 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Qu’enfin, d’accord avec le Comte, il vous fâche à présent de m’avoir confié ses projets. Je vous sais par cœur. Laissez-moi. ’’''(Elle veut sortir.)’’''
 
Suzanne ’’se''se jette à genoux.’’''
 
Au nom du ciel, espoir de tous ! Vous ne savez pas, madame, le mal que vous faites à Suzanne ! Après vos bontés continuelles et la dot que vous me donnez ! ...
 
La Comtesse ’’la''la relève.’’''
 
Hé mais... je ne sais ce que je dis ! En me cédant ta place au jardin, tu n’y vas pas, mon cœur ; tu tiens parole à ton mari, tu m’aides à ramener le mien.
Ligne 5 131 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
C’est que je ne suis qu’une étourdie. ’’''(Elle la baise au front.)’’'' Où est ton rendez-vous ?
 
Suzanne, lui baise la main.
Ligne 5 155 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Je mets tout sur mon compte. ’’''(Suzanne s’assied, la Comtesse dicte.)’’''
 
Chanson nouvelle, sur l’air... "Qu’il fera beau ce soir sous les grands marronniers... Qu’il fera beau ce soir... "
Ligne 5 169 :
Suzanne relit.
 
C’est juste. ’’''(Elle plie le billet.)’’'' Avec quoi cacheter ?
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 5 189 :
La Comtesse détache sa lévite.
 
Prends celle-ci. ’’''(Le ruban du page tombe de son sein à terre.)’’'' Ah ! mon ruban !
 
Suzanne le ramasse.
Ligne 5 211 :
{{scène|4}}
 
’’Une''Une jeune bergère, Chérubin en fille, Fanchette et beaucoup de jeunes filles habillées comme elle, et tenant des bouquets, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Fanchette}}
Ligne 5 217 :
Madame, ce sont les filles du bourg qui viennent vous présenter des fleurs.
 
La Comtesse, ’’serrant''serrant vite son ruban.’’''
 
Elles sont charmantes. Je me reproche, mes belles petites, de ne pas vous connaître toutes. ’’''(Montrant Chérubin.)’’'' Quelle est cette aimable enfant qui a l’air si modeste ?
 
Une Bergère
Ligne 5 227 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Elle est jolie. Ne pouvant porter vingt bouquets, faisons honneur à l’étrangère. ’’''(Elle prend le bouquet de Chérubin, et le baise au front.)’’'' Elle en rougit ! ’’''(À Suzanne.)’’'' Ne trouves-tu pas, Suzon... qu’elle ressemble à quelqu’un ?
 
{{personnage|Suzanne}}
Ligne 5 233 :
À s’y méprendre, en vérité.
 
Chérubin, ’’à''à part, les mains sur son cœur.’’''
 
Ah ! ce baiser-là m’a été bien loin !
Ligne 5 241 :
{{scène|5}}
 
’’Les''Les jeunes filles, Chérubin au milieu d’elles, Fanchette, Antonio, Le Comte, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Antonio}}
 
Moi je vous dis, Monseigneur, qu’il y est ; elles l’ont habillé chez ma fille ; toutes ses hardes y sont encore, et voilà son chapeau d’ordonnance que j’ai retiré du paquet. ’’''(Il s’avance et regardant toutes les filles, il reconnaît Chérubin, lui enlève son bonnet de femme, ce qui fait retomber ses longs cheveux en cadenette. Il lui met sur la tête le chapeau d’ordonnance et dit : )’’'' Eh parguenne, v’là notre officier !
 
La Comtesse recule.
Ligne 5 275 :
Je serais coupable, en effet, si je dissimulais encore. Il était descendu chez moi. Nous entamions le badinage que ces enfants viennent d’achever ; vous nous avez surprises l’habillant : votre premier mouvement est si vif ! il s’est sauvé, je me suis troublée ; l’effroi général a fait le reste.
 
Le Comte, ’’avec''avec dépit, à Chérubin.’’''
 
Pourquoi n’êtes-vous pas parti ?
Ligne 5 299 :
Oui, Monseigneur. Au lieu de punir Chérubin, donnez-le-moi en mariage, et je vous aimerai à la folie.
 
Le Comte, ’’à''à part.’’''
 
Etre ensorcelé par un page !
Ligne 5 319 :
{{scène|6}}
 
’’Les''Les jeunes filles, Chérubin, Antonio, Figaro, Le Comte, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 5 329 :
Vous, danser ! vous n’y pensez pas. Après votre chute de ce matin, qui vous a foulé le pied droit !
 
Figaro, ’’remuant''remuant la jambe.’’''
 
Je souffre encore un peu ; ce n’est rien. ’’''(Aux jeunes filles.)’’'' Allons, mes belles, allons !
 
Le Comte le retourne.
Ligne 5 373 :
Figaro, surpris.
 
Chérubin ! ... ’’''(À part.)’’'' Peste du petit fat !
 
{{personnage|Antonio}}
Ligne 5 405 :
{{personnage|Figaro}}
 
On aurait sauté deux douzaines. Et qu’est-ce que cela fait, Monseigneur, dès qu’il n’y a personne de blessé ? ’’''(Aux jeunes filles.)’’'' Ah ça, voulez-vous venir, ou non ?
 
Le Comte, outré.
 
Jouons-nous une comédie ? ’’''(On entend un prélude de fanfare.)’’''
 
{{personnage|Figaro}}
 
Voilà le signal de la marche. À vos postes, les belles, à vos postes. Allons, Suzanne, donne-moi le bras. ’’''(Tous s’enfuient ; Chérubin reste seul, la tête baissée.)’’''
 
Ligne 5 419 :
{{scène|7}}
 
’’Chérubin''Chérubin, Le Comte, La Comtesse.’’''
 
Le Comte, ’’regardant''regardant aller Figaro.’’''
 
En voit-on de plus audacieux ? ’’''(Au page.)’’'' Pour vous, monsieur le sournois qui faites le honteux, allez vous rhabiller bien vite, et que je ne vous rencontre nulle part de la soirée.
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 5 431 :
Chérubin, étourdiment.
 
M’ennuyer ! j’emporte à mon front du bonheur pour plus de cent années de prison, ’’''(Il met son chapeau et s’enfuit.)’’''
 
Ligne 5 437 :
{{scène|8}}
 
’’Le''Le Comte, La Comtesse. (La Comtesse s’évente fortement sans parler.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 5 443 :
Qu’a-t-il au front de si heureux ?
 
La Comtesse, ’’avec''avec embarras.’’''
 
Son... premier chapeau d’officier, sans doute ; aux enfants tout sert de hochet. ’’''(Elle veut sortir.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 5 465 :
Le Comte, à part.
 
La noce ! Il faut souffrir ce qu’on ne peut empêcher. ’’''(Le Comte et la Comtesse s’asseyent vers un des côtés de la galerie.)’’''
 
Ligne 5 557 :
{{personnage|La Comtesse}}
 
Suzanne ! ... Elle reviendra. ’’''(À part, à Suzanne.)’’'' Allons changer d’habits. ’’''(Elle sort avec Suzanne.)’’''
 
{{personnage|Marceline}}
Ligne 5 571 :
{{scène|10}}
 
’’Tous''Tous les Acteurs précédents, excepté la Comtesse et Suzanne ; Bazile tenant sa guitare ; Gripe-Soleil.’’''
 
Bazile entre en chantant sur l’air du vaudeville de la fin. (Air noté.)
Ligne 5 759 :
Le Comte, à part.
 
Moi, ma maîtresse ! ’’''(Il se lève.)’’''
 
Brid’oison, à Marceline.
Ligne 5 771 :
Tous ensemble
 
Vivat ! ’’''(Ils sortent.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
 
J’ai besoin d’une heure de retraite. ’’''(Il veut sortir avec les autres.)’’''
 
Ligne 5 781 :
{{scène|12}}
 
’’Gripe''Gripe-Soleil, Figaro, Marceline, Le Comte.’’''
 
Gripe-Soleil, à Figaro.
Ligne 5 805 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Sous les grands marronniers ! belle idée ! ’’''(En s’en allant, à part.)’’'' Ils allaient incendier mon rendez-vous !
 
Ligne 5 811 :
{{scène|13}}
 
’’Figaro''Figaro, Marceline.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
 
Quel excès d’attention pour sa femme ! ’’''(Il veut sortir.)’’''
 
Marceline l’arrête.
Ligne 5 831 :
{{personnage|Figaro}}
 
... N’est qu’un sot enfant de l’orgueil, ou c’est la maladie d’un fou. Oh ! j’ai là-dessus, ma mère, une philosophie... imperturbable ; et si Suzanne doit me tromper un jour, je le lui pardonne d’avance ; elle aura longtemps travaillé... ’’''(Il se retourne et aperçoit Fanchette qui cherche de côté et d’autre.)’’''
 
Ligne 5 837 :
{{scène|14}}
 
’’Figaro''Figaro, Fanchette, Marceline.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 5 923 :
{{scène|15}}
 
’’Figaro''Figaro, Marceline.’’''
 
{{personnage|Figaro}}
Ligne 5 949 :
Ce cœur plein d’assurance n’était donc qu’un ballon gonflé ? une épingle a tout fait partir !
 
Figaro, ’’furieux''furieux.’’''
 
Mais cette épingle, ma mère, est celle qu’il a ramassée !
Ligne 5 957 :
La jalousie ! oh ! j’ai là-dessus, ma mère, une philosophie...imperturbable ; et si Suzanne m’attrape un jour, je le lui pardonne...
 
Figaro, ’’vivement''vivement.’’''
 
Oh, ma mère ! on parle comme on sent : mettez le plus glacé des juges à plaider dans sa propre cause, et voyez-le expliquer la loi ! - Je ne m’étonne plus s’il avait tant d’humeur sur ce feu ! - Pour la mignonne aux fines épingles, elle n’en est pas où elle le croit, ma mère, avec ses marronniers ! Si mon mariage est assez fait pour légitimer ma colère, en revanche il ne l’est pas assez pour que je n’en puisse épouser une autre, et l’abandonner...
Ligne 5 965 :
Bien conclu ! Abîmons tout sur un soupçon. Qui t’a prouvé dis-moi, que c’est toi qu’elle joue, et non le Comte ? L’as-tu étudiée de nouveau, pour la condamner sans appel ? Sais-tu si elle se rendra sous les arbres, à quelle intention elle y va ? ce qu’elle y dira, ce qu’elle y fera ? Je te croyais plus fort en jugement !
 
Figaro, ’’lui''lui baisant la main avec respect.’’''
 
Elle a raison, ma mère ; elle a raison, raison, toujours raison ! Mais accordons, maman, quelque chose à la nature : on en vaut mieux après. Examinons en effet avant d’accuser et d’agir. je sais où est le rendez-vous. Adieu, ma mère. ’’''(Il sort.)’’''
 
Ligne 5 973 :
{{scène|16}}
 
{{personnage|Marceline}}, ’’seule''seule.’’''
 
Adieu. Et moi aussi, je le sais. Après l’avoir arrêté, veillons sur les voies de Suzanne, ou plutôt avertissons-la ; elle est si jolie créature ! Ah ! quand l’intérêt personnel ne nous arme point les unes contre les autres, nous sommes toutes portées à soutenir notre pauvre sexe opprimé contre ce fier, ce terrible... ’’''(En riant.)’’'' et pourtant un peu nigaud de sexe masculin. ’’''(Elle sort.)’’''
 
Ligne 5 987 :
{{scène|1}}
 
{{personnage|Fanchette}}, ’’seule''seule, tenant d’une main deux biscuits et une orange, et de l’autre une lanterne de papier, allumée.’’''
 
Dans le pavillon à gauche, a-t-il dit. C’est celui-ci. - S’il allais ne pas venir à présent ! mon petit rôle... Ces vilaines gens de l’office qui ne voulaient pas seulement me donner une orange et deux biscuits ! - Pour qui, mademoiselle ? - Eh bien, monsieur, c’est pour quelqu’un. - Oh ! nous savons. - Et quand ça serait ? Parce que Monseigneur ne veut pas le voir, faut-il qu’il meure de faim ? - Tout ça pourtant m’a coûté un fier baiser sur la joue ! ... Que sait-on ? il me le rendra peut-être. ’’''(Elle voit Figaro qui vient l’examiner : elle fait un cri.)’’'' Ah ! ... ’’''(Elle s’enfuit, et elle entre dans le pavillon à sa gauche.)’’''
 
Ligne 5 999 :
Figaro, d’abord seul.
 
C’est Fanchette ! ’’''(Il parcourt des yeux les autres à mesure qu’ils arrivent, et dit d’un ton farouche.)’’'' Bonjour, messieurs ; bonsoir : êtes-vous tous ici ?
 
{{personnage|Bazile}}
Ligne 6 017 :
Eh ! quels noirs apprêts fais-tu donc ? Il a l’air d’un conspirateur !
 
Figaro, ’’s’agitant''s’agitant.’’''
 
N’est-ce pas pour une noce, je vous prie, que vous êtes rassemblés au château ?
Ligne 6 037 :
Ah ! vraiment, je sais ce que c’est. Retirons-nous, si vous m’en croyez : il est question d’un rendez-vous ; je vous conterai cela près d’ici.
 
Brid’oison, ’’à''à Figaro.’’''
 
Nou-ous reviendrons.
Ligne 6 077 :
I-il l’a
 
Bazile, ’’à''à part.’’''
 
Le Comte et sa Suzanne se sont arrangés sans moi ? Je ne suis pas fâché de l’algarade.
 
Figaro, ’’aux''aux valets.’’''
 
Pour vous autres, coquins, à qui j’ai donné l’ordre, illuminez-moi ces entours ; ou, par la mort que je voudrais tenir aux dents, si j’en saisis un par le bras... ’’''(Il secoue le bras de Gripe-Soleil.)’’''
 
Gripe-Soleil s’en va en criant et pleurant. A, a, o, oh ! damné brutal !
Ligne 6 097 :
Figaro, seul, se promenant dans l’obscurité, dit du ton le plus sombre :
 
Ô femme ! femme ! femme ! créature faible et décevante ! ... nul animal créé ne peut manquer à son instinct : le tien est-il donc de tromper ? ... Après m’avoir obstinément refusé quand je l’en pressais devant sa maîtresse ; à l’instant qu’elle me donne sa parole, au milieu même de la cérémonie... Il riait en lisant, le perfide ! et moi comme un benêt... Non, monsieur le Comte, vous ne l’aurez pas... vous ne l’aurez pas. Parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie ! ... Noblesse, fortune, un rang, des places, tout cela rend si fier ! Qu’avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus. Du reste, homme assez ordinaire ; tandis que moi, morbleu ! perdu dans la foule obscure, il m’a fallu déployer plus de science et de calculs pour subsister seulement, qu’on n’en a mis depuis cent ans à gouverner toutes les Espagnes : et vous voulez jouter... On vient... c’est elle... ce n’est personne. - La nuit est noire en diable, et me voilà faisant le sot métier de mari quoique je ne le sois qu’à moitié ! ’’''(Il s’assied sur un banc.)’’'' Est-il rien de plus bizarre que ma destinée ? Fils de je ne sais pas qui, volé par des bandits, élevé dans leurs mœurs, je m’en dégoûte et veux courir une carrière honnête ; et partout je suis repoussé ! J’apprends la chimie, la pharmacie, la chirurgie, et tout le crédit d’un grand seigneur peut à peine me mettre à la main une lancette vétérinaire ! - Las d’attrister des bêtes malades, et pour faire un métier contraire, je me jette à corps perdu dans le théâtre : me fussé-je mis une pierre au cou ! Je broche une comédie dans les mœurs du sérail. Auteur espagnol, je crois pouvoir y fronder Mahomet sans scrupule : à l’instant un envoyé... de je ne sais où se plaint que j’offense dans mes vers la Sublime-Porte, la Perse, une partie de la presqu’île de l’Inde, toute l’Egypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d’Alger et de Maroc : et voilà ma comédie flambée, pour plaire aux princes mahométans, dont pas un, je crois, ne sait lire, et qui nous meurtrissent l’omoplate, en nous disant : chiens de chrétiens ! - Ne pouvant avilir l’esprit, on se venge en le maltraitant. - Mes joues creusaient, mon terme était échu : je voyais de loin arriver l’affreux recors, la plume fichée dans sa perruque : en frémissant je m’évertue. Il s’élève une question sur la nature des richesses ; et, comme il n’est pas nécessaire de tenir les choses pour en raisonner, n’ayant pas un sol, j’écris sur la valeur de l’argent et sur son produit net : sitôt je vois du fond d’un fiacre baisser pour moi le pont d’un château fort, à l’entrée duquel je laissai l’espérance et la liberté. ’’''(Il se lève.)’’'' Que je voudrais bien tenir un de ces puissants de quatre jours, si légers sur le mal qu’ils ordonnent, quand une bonne disgrâce a cuvé son orgueil ! Je lui dirais... que les sottises imprimées n’ont d’importance qu’aux lieux où l’on en gêne le cours ; que sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur ; et qu’il n’y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits. ’’''(Il se rassied.)’’'' Las de nourrir un obscur pensionnaire, on me met un jour dans la rue ; et comme il faut dîner, quoiqu’on ne soit plus en prison, je taille encore ma plume et demande à chacun de quoi il est question : on me dit que, pendant ma retraite économique, il s’est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s’étend même à celles de la presse ; et que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni dé la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs. Pour profiter de cette douce liberté, j’annonce un écrit périodique, et, croyant n’aller sur les brisées d’aucun autre, je le nomme Journal inutile. Pou-ou ! je vois s’élever contre moi mille pauvres diables à la feuille, on me supprime, et me voilà derechef sans emploi ! - Le désespoir m’allait saisir ; on pense à moi pour une place, mais par malheur j’y étais propre : il fallait un calculateur, ce fut un danseur qui l’obtint. Il ne me restait plus qu’à voler ; je me fais banquier de pharaon : alors, bonnes gens ! je soupe en ville, et les personnes dites comme il faut m’ouvrent poliment leur maison, en retenant pour elles les trois quarts du profit. J’aurais bien pu me remonter ; je commençais même à comprendre que, pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir. Mais comme chacun pillait autour de moi, en exigeant que je fusse honnête, il fallut bien périr encore. Pour le coup je quittais le monde, et vingt brasses d’eau m’en allaient séparer, lorsqu’un dieu bienfaisant m’appelle à mon premier état. Je reprends ma trousse et mon cuir anglais ; puis, laissant la fumée aux sots qui s’en nourrissent, et la honte au milieu du chemin, comme trop lourde à un piéton, je vais rasant de ville en ville, et je vis enfin sans souci. Un grand seigneur passe à Séville ; il me reconnaît, je le marie ; et pour prix d’avoir eu par mes soins son épouse, il veut intercepter la mienne ! Intrigue, orage à ce sujet. Prêt à tomber dans un abîme, au moment d’épouser ma mère, mes parents m’arrivent à la file. ’’''(Il se lève en s’échauffant.)’’'' On se débat, c’est vous, c’est lui, c’est moi, c’est toi, non, ce n’est pas nous ; eh ! mais qui donc ? ’’''(Il retombe assis,)’’'' Ô bizarre suite d’événements ! Comment cela m’est-il arrivé ? Pourquoi ces choses et non pas d’autres ? Qui les a fixées sur ma tête ? Forcé de parcourir la route où je suis entré sans le savoir, comme j’en sortirai sans le vouloir, je l’ai jonchée d’autant de fleurs que ma gaieté me l’a permis : encore je dis ma gaieté sans savoir si elle est à moi plus que le reste, ni même quel est ce moi dont je m’occupe : un assemblage informe de parties inconnues ; puis un chétif être imbécile ; un petit animal folâtre ; un jeune homme ardent au plaisir, ayant tous les goûts pour jouir, faisant tous les métiers pour vivre ; maître ici, valet là, selon qu’il plaît à la fortune ; ambitieux par vanité, laborieux par nécessité, mais paresseux... avec délices ! orateur selon le danger ; poète par délassement ; musicien par occasion ; amoureux par folles bouffées, j’ai tout vu, tout fait, tout usé. Puis l’illusion s’est détruite et, trop désabusé... Désabusé... ! Suzon, Suzon, Suzon ! que tu me donnes de tourments ! ... J’entends marcher... on vient. Voici l’instant de la crise. ’’''(Il se retire près de la première coulisse à sa droite.)’’''
 
Ligne 6 103 :
{{scène|4}}
 
’’Figaro''Figaro, La Comtesse avec les habits de Suzon, Suzanne avec ceux de la Comtesse, Marceline.’’''
 
Suzanne, ’’bas''bas à la Comtesse.’’''
 
Oui, Marceline m’a dit que Figaro y serait.
Ligne 6 119 :
{{personnage|Marceline}}
 
Pour n’en pas perdre un mot, je vais me cacher dans le pavillon. ’’''(Elle entre dans le pavillon où est entrée Fanchette.)’’''
 
Ligne 6 125 :
{{scène|5}}
 
’’Figaro''Figaro, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
Suzanne, ’’haut''haut.’’''
 
Madame tremble ! Est-ce qu’elle aurait froid ?
 
La Comtesse, ’’haut''haut.’’''
 
La soirée est humide, je vais me retirer.
 
Suzanne, ’’haut''haut.’’''
 
Si madame n’avait pas besoin de moi, je prendrais l’air un moment sous ces arbres.
 
La Comtesse, ’’haut''haut.’’''
 
C’est le serein que tu prendras.
 
Suzanne, ’’haut''haut.’’''
 
J’y suis toute faite.
 
Figaro, ’’à''à part.’’''
 
Ah oui, le serein ! ’’''(Suzanne se retire près de la coulisse, du côté opposé à Figaro.)’’''
 
Ligne 6 155 :
{{scène|6}}
 
’’Figaro''Figaro, Chérubin, Le Comte, La Comtesse, Suzanne. (Figaro et Suzanne retirés de chaque côté sur le devant.)’’''
 
Chérubin, ’’en''en habit d’officier, arrive en chantant gaiement la reprise de l’air de la romance.’’''
 
La, la, la, etc.
Ligne 6 183 :
La Comtesse, à part.
 
Si le Comte arrivait ! ... ’’''(Le Comte Parait dans le fond.)’’''
 
Chérubin, s’approche et prend la main de la Comtesse qui se défend.
Ligne 6 263 :
Suzanne, à part.
 
Hardi comme un page. ’’''(Chérubin veut embrasser la Comtesse ; le Comte se met entre deux et reçoit le baiser.)’’''
 
La Comtesse, se retirant.
Ligne 6 271 :
Figaro, à part, entendant le baiser.
 
J’épousais une jolie mignonne ! ’’''(Il écoute.)’’''
 
Chérubin, tant les habits du Comte. ’’''(À part.)’’''
 
C’est Monseigneur ! ’’''(Il s’enfuit dans le pavillon où sont entrées Fanchette et Marceline.)’’''
 
Ligne 6 281 :
{{scène|7}}
 
’’Figaro''Figaro, Le Comte, La Comtesse, Suzanne.’’''
 
Figaro ’’s’approche''s’approche.’’''
 
Je vais...
 
Le Comte, ’’croyant''croyant parler au page.’’''
 
Puisque vous ne redoublez pas le baiser... ’’''(Il croit lui donner un soufflet.)’’''
 
Figaro, ’’qui''qui est à portée, le reçoit.’’''
 
Ah !
Ligne 6 299 :
... Voilà toujours le premier payé.
 
Figaro, ’’à''à part, s’éloigne en se frottant la joue.’’''
 
Tout n’est pas gain non plus, en écoutant.
 
Suzanne, ’’riant''riant tout haut, de l’autre côté.’’''
 
Ah ! ah ! ah ! ah !
 
Le Comte, ’’à''à la Comtesse, qu’il prend pour Suzanne.’’''
 
Entend-on quelque chose à ce page ? il reçoit le plus rude soufflet, et s’enfuit en éclatant de rire.
 
Figaro, ’’à''à part.’’''
 
S’il s’affligeait de celui-ci ! ...
Ligne 6 317 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Comment ! je ne pourrai faire un pas... ’’''(À la Comtesse.)’’'' Mais laissons cette bizarrerie ; elle empoisonnerait le plaisir que j’ai de te trouver dans cette salle.
 
La Comtesse, imitant le parler de Suzanne.
Ligne 6 325 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Après ton ingénieux billet ! ’’''(Il lui prend la main.)’’'' Tu trembles ?
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 6 333 :
{{personnage|Le Comte}}
 
Ce n’est pas pour te priver du baiser que je l’ai pris. ’’''(Il la baise au front.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
Ligne 6 339 :
Des libertés !
 
Figaro, ’’à''à part.’’''
 
Coquine !
 
Suzanne, ’’à''à part.’’''
 
Charmante !
Ligne 6 351 :
Mais quelle peau fine et douce, et qu’il s’en faut que la Comtesse ait la main aussi belle !
 
La Comtesse, ’’à''à part.’’''
 
Oh ! la prévention !
Ligne 6 423 :
Ni moi.
 
Figaro, ’’à''à part.’’''
 
Ni moi.
 
Suzanne, ’’à''à part.’’''
 
Ni moi.
 
Le Comte ’’prend''prend la main de sa femme.’’''
 
Il y a de l’écho ici, parlons plus bas. Tu n’as nul besoin d’y songer, toi que l’amour a faite et si vive et si jolie ! Avec un grain de caprice, tu seras la plus agaçante maîtresse ! (Il la baise au front.) Ma Suzanne, un Castillan n’a que sa parole. Voici tout l’or promis pour le rachat du droit que je n’ai plus sur le délicieux moment que tu m’accordes. Mais comme la grâce que tu daignes y mettre est sans prix, j’y joindrai ce brillant, que tu porteras pour l’amour de moi.
 
La Comtesse, ’’une''une révérence.’’''
 
Suzanne accepte tout.
 
Figaro,’’'' à part.’’''
 
On n’est pas plus coquine que cela.
 
Suzanne, ’’à''à part.’’''
 
Voilà du bon bien qui nous arrive.
 
Le Comte, ’’à''à part.’’''
 
Elle est intéressée ; tant mieux !
Ligne 6 467 :
À quoi bon ? Nous n’avons rien à lire.
 
Figaro, ’’à''à part.’’''
 
Elle y va, ma foi ! Je m’en doutais. ’’''(Il s’avance.)’’''
 
Le Comte grossit sa voix en se retournant.
Ligne 6 475 :
Qui passe ici ?
 
Figaro, ’’en''en colère.’’''
 
Passer ! on vient exprès.
 
Le Comte, ’’bas''bas, à la Comtesse.’’''
 
C’est Figaro ! ... ’’''(Il s’enfuit.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
Je vous suis. ’’''(Elle entre dans le pavillon à sa droite, pendant que le Comte se perd dans le bois au fond.)’’''
 
Ligne 6 491 :
{{scène|8}}
 
’’Figaro''Figaro, Suzanne, dans l’obscurité.’’''
 
Figaro ’’cherche''cherche à voir où vont le Comte et la Comtesse, qu’il prend pour Suzanne.’’''
 
Je n’entends plus rien ; ils sont entrés ; m’y voila. ’’''(D’un ton altéré.)’’'' Vous autres, époux maladroits, qui tenez des espions à gages et tournez des mois entiers autour d’un soupçon, sans l’asseoir, que ne m’imitez-vous ? Dès le premier jour, je suis ma femme et je l’écoute ; en un tour de main, on est au fait : c’est charmant, plus de doutes ; on sait à quoi s’en tenir. (Marchant vivement.) Heureusement que je ne m’en soucie guère, et que sa trahison ne me fait plus rien du tout. Je les tiens donc enfin !
 
Suzanne, qui s’est avancée doucement dans l’obscurité. ’’''(À part.)’’''
 
Tu vas payer tes beaux soupçons. ’’''(Du ton de voix de la Comtesse.)’’'' Qui va là ?
 
Figaro, extravagant.
Ligne 6 505 :
Qui va là ? Celui qui voudrait de bon cœur que la peste eût étouffé en naissant...
 
Suzanne, ’’du''du ton de la Comtesse.’’''
 
Eh ! mais, c’est Figaro !
Ligne 6 733 :
{{scène|9}}
 
’’Le''Le Comte entre par le fond du théâtre et va droit au pavillon à sa droite ; Figaro, Suzanne.’’''
 
Le Comte, ’’à''à lui-même.’’''
 
Je la cherche en vain dans le bois, elle est peut-être entrée ici.
 
Suzanne, ’’à''à Figaro parlant bas.’’''
 
C’est lui.
Ligne 6 747 :
Suzon, es-tu là dedans ?
 
Figaro, ’’bas''bas.’’''
 
Il la cherche, et moi je croyais...
 
Suzanne, ’’bas''bas.’’''
 
Il ne l’a pas reconnue.
Ligne 6 757 :
{{personnage|Figaro}}
 
Achevons-le, veux-tu ? ’’''(Il lui baise la main.)’’''
 
Le Comte, se retourne.
 
Un homme aux pieds de la Comtesse ! ... Ah ! je suis sans armes. ’’''(Il s’avance.)’’''
 
Figaro se relève tout à fait en déguisant sa voix.
Ligne 6 769 :
Le Comte, à part.
 
C’est l’homme du cabinet de ce matin. ’’''(Il se frappe le front.)’’''
 
Figaro continue.
Ligne 6 779 :
Massacre ! mort ! enfer !
 
Figaro, ’’la''la conduisant au cabinet.’’''
 
’’''(Bas.)’’'' Il jure. ’’''(Haut.)’’'' Pressons-nous donc, madame, et réparons le tort qu’on nous a fait tantôt, quand j’ai sauté par la fenêtre.
 
Le Comte, ’’à''à part.’’''
 
Ah ! tout se découvre enfin.
 
Suzanne, ’’près''près du pavillon à sa gauche.’’''
 
Avant d’entrer, voyez si personne n’a suivi. ’’''(Il la baise au front.)’’''
 
Le Comte s’écrie :
 
Vengeance ! ’’''(Suzanne s’enfuit dans le pavillon où sont entrés Fanchette, Marceline et Chérubin.)’’''
 
Ligne 6 799 :
{{scène|10}}
 
Le Comte, Figaro. ’’''(Le Comte saisit le bras de Figaro.)’’''
 
Figaro, jouant la frayeur excessive.
Ligne 6 813 :
{{scène|11}}
 
’’Pédrille''Pédrille, Le Comte, Figaro.’’''
 
Pédrille, ’’botté''botté.’’''
 
Monseigneur, je vous trouve enfin.
Ligne 6 831 :
Approche-toi de moi, et crie bien fort !
 
Pédrille, ’’criant''criant à tue-tête.’’''
 
Pas plus de page que sur ma main. Voilà le paquet.
Ligne 6 855 :
{{scène|12}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Brid’oison, Bartholo, Bazile, Antonio, Gripe-Soleil, toute la noce accourt avec des flambeaux.’’''
 
Bartholo, ’’à''à Figaro.’’''
 
Tu vois qu’à ton premier signal...
Ligne 6 865 :
Pédrille, empare-toi de cette porte. (Pédrille y va.)
 
Bazile, ’’bas''bas à Figaro.’’''
 
Tu l’as surpris avec Suzanne
Ligne 6 879 :
Le Comte, furieux.
 
Taisez-vous donc ! ’’''(À Figaro, d’un ton glacé.)’’'' Mon cavalier, répondez-vous à mes questions ?
 
Figaro, froidement.
Ligne 6 903 :
Le Comte, hors de lui.
 
Ô rage ! ’’''(Se contenant.)’’'' Homme de bien qui feignez d’ignorer, nous ferez-vous au moins la faveur de nous dire quelle est la dame actuellement par vous amenée dans ce pavillon ?
 
Figaro, montrant l’autre avec malice.
Ligne 6 909 :
Dans celui-là ?
 
Le Comte, ’’vite''vite.’’''
 
Dans celui-ci.
Ligne 6 939 :
Le Comte, vivement.
 
La préf... ’’''(Se contenant.)’’'' Au moins il est naïf ! car ce qu’il avoue, messieurs, Je l’ai ouï, je vous jure, de la bouche même de sa complice.
 
Brid’oison, stupéfait.
Ligne 6 947 :
Le Comte, avec fureur.
 
Or, quand le déshonneur est public, il faut que la vengeance le soit aussi. ’’''(Il entre dans le pavillon.)’’''
 
Ligne 6 953 :
{{scène|13}}
 
’’Tous''Tous les Acteurs précédents, hors Le Comte.’’''
 
{{personnage|Antonio}}
Ligne 6 959 :
C’est juste.
 
Brid’oison, ’’à''à Figaro.’’''
 
Qui-i donc a pris la femme de l’autre ?
 
Figaro, ’’en''en riant.’’''
 
Aucun n’a eu cette joie-là.
Ligne 6 971 :
{{scène|14}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Le Comte, Chérubin.’’''
 
Le Comte, ’’parlant''parlant dans le pavillon, et attirant quelqu’un qu’on ne voit pas encore.’’''
 
Tous vos efforts sont inutiles ; vous êtes perdue, madame, et votre heure est bien arrivée ! ’’''(Il sort sans regarder.)’’'' Quel bonheur qu’aucun gage d’une union aussi détestée...
 
Figaro s’écrie :
Ligne 6 991 :
Le Comte, hors de lui, à part.
 
Et toujours le page endiablé ! ’’''(À Chérubin.)’’'' Que faisiez-vous dans ce salon ?
 
Chérubin, timidement.
Ligne 7 015 :
Le Comte, furieux.
 
Entre donc ! ’’''(Antonio entre.)’’''
 
Ligne 7 021 :
{{scène|15}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, excepté Antonio.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
Ligne 7 027 :
Vous allez voir, messieurs, que le page n’y était pas seul.
 
Chérubin, ’’timidement''timidement.’’''
 
Mon sort eût été trop cruel, si quelque âme sensible n’en eût adouci l’amertume.
Ligne 7 035 :
{{scène|16}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Antonio, Fanchette.’’''
 
Antonio, attirant par le bras quelqu’un qu’on ne voit pas encore.
Ligne 7 059 :
Le Comte, outré.
 
Qui la savait là dedans ? ’’''(Il veut rentrer.)’’''
 
Bartholo, au devant.
Ligne 7 073 :
{{scène|17}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Marceline.’’''
 
Bartholo, ’’parlant''parlant en dedans et sortant’’sortant''.
 
Ne craignez rien, madame, il ne vous sera fait aucun mal. J’en réponds. ’’''(Il se retourne et s’écrie : )’’'' Marceline !
 
{{personnage|Bazile}}
Ligne 7 083 :
Ha ! Ha !
 
Figaro, ’’riant''riant.’’''
 
Hé, quelle folie ! ma mère en est ?
Ligne 7 091 :
À qui pis fera.
 
Le Comte, ’’outré''outré.’’''
 
Que m’importe à moi ? La Comtesse...
Ligne 7 099 :
{{scène|18}}
 
’’Les''Les Acteurs précédents, Suzanne, son éventail sur le visage.’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
 
... Ah ! la voici qui sort. ’’''(Il la prend violemment par le bras.)’’'' Que croyez-vous, messieurs, que mérite une odieuse... ’’''(Suzanne se jette à genoux la tête baissée.)’’'' - Le Comte : Non, non ! ’’''(Figaro se jette à genoux de l’autre côté.)’’'' - Le Comte, plus fort : Non, non ! ’’''(Marceline se jette à genoux devant lui.)’’'' - Le Comte plus fort : - Non, non ! ’’''(Tous se mettent à genoux, excepté Brid’oison.)’’'' - Le Comte hors de lui : Y fussiez-vous un cent !
 
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{{scène|19}}
 
’’Tous''Tous les Acteurs précédents, la Comtesse sort de l’autre pavillon.’’''
 
La Comtesse se jette à genoux.
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Le Comte veut relever la Comtesse.
 
Quoi ! c’était vous, Comtesse ? ’’''(D’un ton suppliant.)’’'' Il n’y a qu’un pardon bien généreux...
 
La Comtesse, en riant.
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Vous diriez : Non, non, à ma place ; et moi, pour la troisième fois d’aujourd’hui, je l’accorde sans condition.
 
’’''(Elle se relève.)’’''
 
Suzanne se relève.
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Figaro se relève.
 
Moi aussi, il y a de l’écho ici ! ’’''(Tous se relèvent.)’’''
 
{{personnage|Le Comte}}
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{{personnage|Le Comte}}
 
La réponse lui en est bien due. ’’''(Il baise la main de la Comtesse.)’’''
 
{{personnage|La Comtesse}}
 
Chacun aura ce qui lui appartient. ’’''(Elle donne la bourse à Figaro et le diamant à Suzanne.)’’''
 
Suzanne, à Figaro.
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La Comtesse arrache le ruban qu’elle a tant gardé dans son sein et le jette à terre.
 
La jarretière ? Elle était avec ses habits ; la voilà. ’’''(Les garçons de la noce veulent la ramasser.)’’''
 
Chérubin, plus alerte, court la prendre, et dit.
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Figaro, saluant les spectateurs.
 
Ma femme et mon bien mis à part, tous me feront honneur et plaisir. ’’''(On joue la ritournelle du vaudeville. Air noté)’’''.
 
Vaudeville