« Le Corbeau (traduit par Stéphane Mallarmé) » : différence entre les versions

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UNE fois, par un minuit lugubre, tandis que je m’appesantissais, faible et fatigué, sur maint curieux et bigarrebizarre volume de savoir oublié – tandis que je dodelinais la tête, somnolant presque : soudain se fit un heurt, comme de quelqu’un frappant doucement, frappant à la porte de ma chambre – cela seul et rien de plus.
 
Ah ! distinctement je me souviens que c’était en le glacial Décembre : et chaque tison, mourant isolé, ouvrageait son spectre sur le sol. Ardemment je souhaitais le jour – vainement j’avais cherché d’emprunter à mes livres un sursis au chagrin – au chagrin de la Lénore perdue – de la rare et rayonnante jeune fille que les anges nomment Lénore : – de nom pour elle ici, non, jamais plus !
 
Et de la soie l’incertain et triste bruissement en chaque rideau purpural me traversait – m’emplissait de fantastiques terreurs pas senties encore : si bien que, pour calmer le battement de mon cceurcœur, je demeurais maintenant à répéter « C’est quelque visiteur qui sollicite l’entrée, à la porte de ma chambre – quelque visiteur qui sollicite l’entrée, à la porte de ma chambre ; c’est cela et rien de plus. »
 
Mon âme devint subitement plus forte et, n’hésitant davantage « Monsieur, dis–je, ou Madame, j’implore véritablement votre pardon ; mais le fait est que je somnolais et vous vîntes si doucement frapper, et si faiblement vous vîntes heurter, heurter à la porte de ma chambre, que j’étais à peine sûr de vous avoir entendu. » – Ici j’ouvris, grande, la porte : les ténèbres et rien de plus.