« Un capitaine de quinze ans/II/12 » : différence entre les versions

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Au lieu de l’abattre, cette scène avait rendu à Dick Sand toute sa force morale. Son énergie physique en subit l’heureux contre-coup et reprit en même temps le dessus. Negoro, en s’accrochant à lui dans sa rage, avait-il quelque peu desserré les liens qui jusque-là lui avaient rendu tout mouvement impossible ? C’est probable, car Dick Sand se rendit compte que ses membres avaient plus de jeu qu’avant l’arrivée de son bourreau. Le jeune novice, se sentant soulagé, se dit qu’il lui serait peut-être possible de dégager ses bras sans trop d’efforts. Gardé comme il l’était dans une prison solidement close, ce ne serait sans doute qu’une gêne, qu’un supplice de moins ; mais il est tel moment dans la vie où le plus petit bien-être est inappréciable.
 
Certes, Dick Sand n’espérait rien. Aucun secours humain n’eût pu lui venir que du dehors, et d’où lui fût-il venu ? Il était donc résigné. Pour dire le vrai, il ne tenait même plus à vivre ! Il songeait à tous ceux qui l’avaient devancé dans la mort et n’aspirait qu’à les rejoindre. Negoro venait de lui répéter ce que lui avait dit Harris : Mrs. Weldon et le petit Jack avaient succombé ! Il n’était que trop vraisemblable, en effet, qu’Hercule, exposé à tant de dangers, avait dû périr, lui aussi, et d’une mort cruelle ! Tom et ses compagnons étaient au loin, à jamais perdus pour lui, Dick Sand devait le croire. Espérer autre chose que la fin de ses maux par une mort qui ne pouvait être plus terrible que sa vie, eût été une insigne folie. Il se préparait donc à mourir, s’en remettant à Dieu du surplus, et lui demandant le courage d’aller jusqu’au bout sans faiblesse. Mais c’est une bonne et noble pensée que celle de Dieu. Ce n’est pas en vain qu’on élève son âme jusqu’à Celui qui peut tout, et quand Dick Sand eut fait son sacrifice tout entier, il se trouva que si l’on eût été jusqu’au fond de son coeurcœur, on y eût peut-être découvert une dernière lueur d’espérance, cette lueur qu’un souffle d’en haut peut changer, en dépit de toutes les probabilités, en lumière éclatante.
 
Les heures s’écoulèrent. La nuit vint. Les rayons du jour qui filtraient à travers le chaume du baracon s’effacèrent peu à peu. Les derniers bruits de la tchitoka, qui, pendant cette journée-là, avait été bien silencieuse, après l’effroyable brouhaha de la veille, ces derniers bruits s’éteignirent. L’ombre se fit, très profonde à l’intérieur de l’étroite prison. Bientôt tout reposa dans la ville de Kazonndé.