« Essai sur les Comores/2 » : différence entre les versions

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Chacun croyait Djombé dévouée à la France ; le commandant de Mayotte la considérait comme sa fille, et M. Lambert, qui l'avait comblée de cadeaux et avait triplé ses revenus, crut pouvoir se fier à sa parole et faire un voyage à la Réunion, en juillet 1867 ; mais il avait affaire à une Malgache et la trahison ne se fit pas attendre. Depuis plus d'un an, la reine, trompant et le commandant de Mayotte et M. Lambert, négociait
la cession de Mohéli au sultan de Zanzibar. Djombé s'ennuyait dans son royaume et désirait vivre sur un plus grand théâtre. Elle céda son île au sultan Saïd-Medjid, on ignore au juste à quelles conditions. Restait à se débarrasser de M. Lambert ; la reine. Personnellement engagée, ne pouvait, sans motif, rompre le traité qui avait toujours été loyalement exécuté par le duc d'Emyrne ; on tourna la difficulté ; Djombé dut abdiquer et disparaître du gouvernement ; elle abdiqua, en effet, en faveur de son fils aîné Mohamed. Alors, considérant le traité conclu avec M. Lambert comme rompu par l'abdication de la reine, quelques Arabes résolurent de ne pas laisser débarquer M. Lambert à son retour. Puis, se regardant comme déjà propriétaires de son habitation, les familiers de la reine mirent à contribution les provisions de toutes sortes dont la maison était pleine ; et, plus tard, il fut assez curieux de voir, sur le carnet du sommelier de M. Lambert, le nombre et la qualité des bouteilles que ces rigides Musulmanes avaient vidées en son absence.
Pour parer à tout événement, ils fabriquèrent des affûts neufs pour les canons ; le mur d'enceinte fut réparé et garni de portes solides ; et ils attendirent le retour de M. Lambert, pendant qu'une corvette zanzibarienne de 12 canons, la Nadarcha, portant 200 hommes de débarquement, croisait, fortuitement, dans les eaux de la Grande Comore. Le principal agent de toutes ces manoeuvresmanœuvres était un certain Seli, parent du sultan de Zanzibar et de la reine, par son mari, établi depuis peu de temps à Mohéli.
Dans les premiers jours de novembre 1867, l'Indre ramena M. Lambert à Fomboni, mais les Mohéliens refusèrent de le laisser débarquer. On apprit alors vaguement ce qui s'était passé et chacun en fut stupéfait. Tous les conseils, toutes les remontrances furent inutiles ; le commandant Empis vint à Mayotte rendre compte de la situation au colonel Colomb, commandant supérieur ; il fut décidé que l'Indre et l'aviso de La Bourdonnais se rendraient à Mohéli avec une lettre du commandant de Mayotte pour la reine, qu'ils exigeraient la loyale exécution du traité passé avec un de nos nationaux, mais qu'ils éviteraient l'emploi de la force. Les deux navires partirent, au milieu des fanfaronnades des Arabes qui disaient tout haut qu'ils seraient coulés s'ils osaient approcher de Fombone.
Arrivée à Fomboni, l'Indre salua la reine de vingt-et-un coups de canon ; le fort rendit le salut, coup pour coup, avec ses vingt-et-une pièces. Le commandant Empis envoya auprès de la reine M. Pompon, lieutenant de vaisseau, porteur de la lettre du commandant supérieur de Mayotte. Djombé ne voulut pas recevoir la lettre ; elle déclara qu'elle ne reconnaissait plus le traité qu'elle avait passé avec M. Lambert et, sans le moindre motif, fit jeter M. Pompon à la porte du palais par ses esclaves, en présence de l'agent de Zanzibar et des chefs mohéliens. En même temps, elle fit battre le tam-tam de guerre et fermer les portes de la ville.