« Le Râmâyana (trad. Fauche)/Tome 1 » : différence entre les versions

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À ces paroles de Kêkéyî, la Mantharâ, qui savait ourdir un discours artificieux, lui répondit ainsi, les yeux rouges de colère et d’envie, pour augmenter le trouble de sa maîtresse et la séparer enfin de Râma, dont cette femme à la pensée coupable désirait la perte : « Une chose bien grave te menace, une chose que tu ne dois pas tolérer, ô ma reine : c’est que le roi Daçaratha se dispose à consacrer son fils Râma comme héritier de sa couronne.
formes des palais, sur les bazars des trafiquants, où sont amoncelées toutes les sortes infinies des marchandises, sur les splendides hôtels des riches pères de famille, sur toutes les maisons destinées à réunir des assemblées, sur les plus majestueux des arbres, flottent dressés les étendards et les banderoles de couleurs variées. De tous les côtés on entend les troupes des danseurs, des comédiens et des chanteurs, dont les voix se modulent pour le délicieux plaisir de l’âme et des oreilles.
 
Quand fut arrivé le jour du sacre, les hommes s’entretenaient, assis dans les cours ou dans leurs maisons, de conversations qui roulaient toutes sur les éloges de Râma ; et, de tous côtés, les enfants mêmes, qui s’amusaient devant les portes des maisons, désertant le jeu, s’entretenaient aussi de conversations, qui roulaient toutes sur les éloges de Râma. Pour fêter le sacre du jeune prince, les citadins avaient brillamment décoré, parfumé de la résine embaumée de l’encens, paré de fleurs et de présents la rue royale ; et, par une sage prévoyance contre l’arrivée de la nuit, afin de ramener le jour dans les ténèbres, ils avaient planté au long des rues dans toute la ville des arbres d’illuminations.
 
Dans ce temps, une suivante de Kèkéyî, sa parente éloignée, qui l’avait emmenée avec elle dans Ayodhyâ, monta d’elle-même sur la plate-forme du palais ; et là, promenant ses yeux, elle vit la rue du roi brillamment décorée, la ville pavoisée de grands étendards, ses voies remplies d’un peuple nombreux et rassasié.
 
À cet aspect de la cité riante et pleine de monde en habits de fête, elle s’approcha d’une nourrice placée non loin d’elle, et fît cette demande : « D’où vient aujourd’hui cette joie extrême des habitants ? Dis-le moi ! Quelle chose aimée des citoyens veut donc faire le puissant monarque ? Pour quelle raison, au comble d’un enchantement suprême, la mère de Râma verse-t-elle aujourd’hui ses trésors comme une pluie de largesses ? »
 
Interrogée ainsi par cette femme bossue, la nourrice, toute ravie de plaisir, commence à lui raconter ce qui en était du sacre attendu pour l’association à la couronne : « Demain, au moment où la lune se met en conjonction avec l’astérisme Poushya, le roi fait sacrer comme héritier du trône son fils Râma, cette mine opulente de vertus. C’est pour cela que tout ce peuple est en joie dans l’attente du sacre, que les habitants ont décoré la ville et que tu vois la mère de Râma si heureuse. »
 
À peine eut-elle ouï ce langage désagréable pour elle, soudain, transportée de colère, la femme bossue descendit précipitamment de cette plate-forme du palais. La Mantharâ, qui avait conçu une mauvaise pensée, vint donc, les yeux enflammés de fureur, tenir ce langage à Kêkéyî, qui n’était pas encore levée : « Femme aveugle, sors du lit ! Quoi ! tu dors ! Un affreux danger fond sur toi ! Malheureuse, ne comprends-tu pas que tu es entraînée dans un abyme ! »
 
Kêkéyî, aux oreilles de qui cette bossue à l’intention méchante avait jeté dans sa fureur ces mots si amers, lui fit à son tour cette demande : « Pourquoi es-tu si en colère, Mantharâ ? Apprends-moi quelle est cette chose que tu ne peux supporter : en effet, je te vois toute pleine de tristesse et le visage bouleversé. »
 
À ces paroles de Kêkéyî, la Mantharâ, qui savait ourdir un discours artificieux, lui répondit ainsi, les yeux rouges de colère et d’envie, pour augmenter le trouble de sa maîtresse et la séparer enfin de Râma, dont cette femme à la pensée coupable désirait la perte : « Une chose bien grave te menace, une chose que tu ne dois pas tolérer, ô ma reine : c’est que le roi Daçaratha se dispose à consacrer son fils Râma comme héritier de sa couronne.
 
« Telle qu’une mère, à qui, séduite par un langage artificieux, sa bienveillance a fait recueillir un ennemi : ainsi, toi, imprudente, tu as réchauffé un serpent dans ton sein ! En effet, ce que pourrait faire, scit un serpent, soit un ennemi, que tu ne vois pas derrière toi et comme sous tes pieds, Daçaratha le fait aujourd’hui à ton fils et à toi. L’épouse bien-aimée de ce roi au langage traître et mensonger va mettre son Râma sur le trône ; et toi, imprévoyante créature, tu seras immolée avec ton enfant ! »