« Les Vies des plus illustres philosophes de l’antiquité/Livre II/Socrate » : différence entre les versions
Contenu supprimé Contenu ajouté
match |
|||
Ligne 1 :
{{TextQuality|50%}}<div class="text">
{{chapitre|[[Les Vies des plus illustres philosophes de l’antiquité]]:avec leurs dogmes, leurs systèmes, leur morale et leurs sentences les plus remarquables, 1840|[[Auteur: Diogène Laërce|Diogène Laërce]]|Livre II - Socrate|}}
<includeonly>[18]
« Les Phrygiens font une nouvelle pièce d’Euripide, sous laquelle Socrate a mis les sarments. »
==__MATCH__:[[Page:Diogène Laërce - Vies, édition Lefèvre,1840.djvu/79]]==
Ailleurs il dit aussi que Socrate mettait les clous aux pièces d’Euripide.
Pareillement Callias, auteur d’une pièce intitulée les Captifs, y parle ainsi :
Ligne 13 ⟶ 14 :
Aristophane, dans ses Nuées, accuse aussi Euripide d’être aidé dans ses tragédies par celui qui proférait à tout propos des discours de sagesse.
<includeonly>[19]
De ces Grâces est venu ce tailleur de pierre, ce raisonneur sur les lois, cet enchanteur de la Grèce, cet imposteur, ce railleur, ce demi-Athénien, et cet homme dissimulé !
Socrate, comme le remarque Idoménée, était fort habile dans la rhétorique ; mais les trente tyrans, dit Xénophon, lui défendirent de l’enseigner. <includeonly>[20]
Démétrius de Byzance dit que Criton le tira de sa boutique et qu’il s’appliqua à l’instruire, étant charmé des dispositions de son esprit.
<includeonly>[21]
à ce qu’il y avait de bon ou de mauvais chez lui.
Ligne 26 ⟶ 27 :
Souvent il s’animait en parlant jusqu’à se frapper lui-même et à se tirer les cheveux : cela faisait qu’on se moquait de lui ; mais il souffrait le mépris et la raillerie jusque là que, comme le rapporte Démétrius, quelqu’un lui ayant donné un coup de pied, il dit à ceux qui admiraient sa patience : Si un âne m’avait donné une ruade, irais-je lui faire un procès ?
<includeonly>[22]
Socrate était d’une bonne constitution, et avait beaucoup de soin de s’exercer le corps ; il fut à l’expédition d’Amphipolis, et, dans une bataille qui se donna près de Délium, il sauva la vie à Xénophon qui était tombé de son cheval ; <includeonly>[23]
<includeonly>[24]
La frugalité et la pureté des mœurs caractérisaient encore ce philosophe ; Pamphila, dans ses Commentaires, livre septième, nous apprend qu’Alcibiade lui donna une grande place pour y bâtir une maison, et que Socrate le remercia, eu lui disant : Si j’avais besoin de souliers et que vous me donnassiez du cuir pour que je les fisse moi-même, ne serait-il pas ridicule à moi de le prendre ? Quelquefois il jetait les yeux sur la multitude des choses qui se vendaient à l’enchère, en pensant en lui-même : Que de choses dont je n’ai pas besoin ! Il récitait souvent ces vers :
Ligne 38 ⟶ 39 :
Il méprisa généreusement Archélaüs de Macédoine, Scopas de Cranon, et Euryloque de Larisse, refusa leur argent, et ne daigna pas même profiter des invitations qu’ils lui firent de les aller voir. D’ailleurs il vivait avec tant de sobriété, que, quoiqu’Athènes eût souvent été attaquée de la peste, il n’en fut jamais atteint.
<includeonly>[26]
<includeonly>[27]
« Ô toi qui aspires à la plus sublime sagesse, que ton sort sera glorieux à Athènes et parmi les Grecs ! »
Ligne 48 ⟶ 49 :
« Pourvu que tu aies de la mémoire et de la prudence, et que tu ne fasses consister les maux que dans l’opinion, tu ne te fatigueras pas, soit que tu te tiennes debout où que tu marches : tu ne sens ni le froid ni la faim ; tu n’aimes ni le vin, ni les festins, ni toutes les choses inutiles. »
<includeonly>[28]
Socrate, toi qui es la meilleure d’entre peu de personnes et la plus vaine d’entre plusieurs, quel sujet t’amène enfin dans notre compagnie, et depuis quand peux-tu nous souffrir ? Mais à propos de quoi portes-tu cette robe d’hiver ? C’est sans doute une méchanceté de ton corroyeur.
Ligne 58 ⟶ 59 :
Il n’était pourtant pas tellement attaché à cette manière de vivre qu’il ne s’accommodât aux circonstances ; il s’habillait mieux selon les occasions, comme lorsqu’il fut trouver Agathon, ainsi que le rapporte Platon, dans son Banquet.
<includeonly>[29]
<includeonly>[30]
Socrate remarquait avec étonnement qu’il est facile de dire les biens qu’on possède, mais difficile de dire les amis qu’on a, tant on néglige de les connaître. Voyant l’assiduité d’Euclide au barreau, il lui dit : « Mon cher Euclide, vous saurez vivre avec des sophistes, et point avec des hommes. » En effet, il regardait ces sortes d’affaires comme inutiles et peu honorables ; pensée que lui attribue Platon, dans son Euthydème.
<includeonly>[31]
<includeonly>[32]
<includeonly>[33]
qu’il était bon de s’en dépouiller hardiment,
Ligne 74 ⟶ 75 :
il se leva et sortit, en disant ces paroles : « Quel ridicule n’est-ce point de faire des recherches sur un esclave qui s’est enfui, et de permettre que la vertu périsse ? » Interrogé s’il valait mieux se marier ou non : « Lequel des deux que l’on choisisse, dit-il, le repentir est certain. » Il s’étonnait fort de ce que les sculpteurs en pierre se donnaient tant de peine pour imiter la nature, en tâchant de rendre leurs copies semblables aux originaux, et de ce qu’ils prenaient si peu de soin pour ne pas ressembler eux-mêmes à la matière dont ils faisaient leurs statues. Il conseillait aux jeunes gens de se regarder souvent dans le miroir, afin de se rendre dignes de leur beauté, s’ils en avaient, ou de réparer la difformité de leur corps en s’ornant l’esprit de science.
<includeonly>[34]
Il comparait l’action de louer la multitude à celle d’un homme qui rejetterait une pièce de quatre drachmes comme de nulle valeur, et qui recevrait ensuite pour bon argent une quantité de ces mêmes espèces. Eschine lui ayant dit : Je suis pauvre, et je n’ai rien en mon pouvoir que ma personne, disposez-en ; Socrate lui répondit : Songez-vous bien à la grandeur du présent que vous me faites ? Un homme s’affligeait du mépris où il était tombé depuis que les tyrans avaient usurpé le gouvernement ; il lui répondit : Qu’y a-t-il en cela qui soit proprement le sujet de votre chagrin ? <includeonly>[35]
« Dans trois jours tu seras dans les champs fertiles de Phthie<ref>C’est un vers d’Homère. Phthie était la patrie d’Achille, qui, menaçant Ulysse de se retirer chez lui, se sert de ces mots : Dans trois jours j’arriverai à la fertile Phthie. Socrate voulait dire que la mort le ramènerait dans sa patrie. Note de Dacier sur les Dialogues de Platon, tome II, le Criton. )</ref>, »
il avertit Eschine qu’il mourrait le troisième jour suivant. Le jour où il devait boire le jus de la ciguë étant arrivé, Apollodore lui offrit un riche manteau, en le priant de s’en envelopper pour mourir. Si le mien, dit-il, m’a servi pour vivre, ne me servira-t-il pas bien aussi pour mourir ? On lui dit que quelqu’un le chargeait de malédictions : Il faut le souffrir, dit-il, il n’a point appris à mieux parler. <includeonly>[36]
Toutes ces maximes, qu’il proposait et qu’il confirmait par son exemple, furent cause que la pythonisse loua sa conduite, et rendit à Chéréphont cet oracle connu :
Ligne 85 ⟶ 86 :
De tous les hommes, Socrate est le plus sage.
<includeonly>[38]
Platon, dans son Ménon, met Anytus au nombre des envieux de Socrate. Comme il ne pouvait souffrir que Socrate se moquât de lui, il indisposa d’abord Aristophane contre lui ; ensuite il suborna Mélitus, qui l’accusa devant les juges d’être un impie et de corrompre la jeunesse.
Phavorin, dans son Histoire diverse, rapporte que Polyeucte plaida le procès. Hermippe dit que Polycrate, le sophiste, dressa la harangue ; d’autres veulent que ce fut Anytus, mais que l’orateur Lycon prépara le tout.
<includeonly>[39]
<includeonly>[40]
Mélitus, fils de Mélitus de Lampsaque, charge Socrate, natif d’Alopèce, fils de Sophronisque, des crimes suivants : Il viole la sainteté des lois, en niant l’existence des dieux reconnus par la ville, et en en mettant de nouveaux à leur place. Il corrompt aussi la jeunesse. Il ne peut expier ces crimes que par la mort.
Lysias lui ayant récité une apologie qu’il avait faite pour lui : Mon ami, lui dit le philosophe, la pièce est bonne, mais elle ne me convient pas. En effet, le style en était plus propre à l’usage du barreau que sortable à la gravité d’un philosophe. <includeonly>[41]
Juste Tibérien dit, dans sa Généalogie, que, pendant qu’on plaidait la cause de Socrate, Platon monta à la tribune et dit ces paroles : « Athéniens, quoique je sois le plus jeune de tous ceux qui se sont présentés pour parler dans cette occasion… ; » mais les juges se récrièrent là-dessus et lui imposèrent silence.
Socrate fut donc condamné à la pluralité de deux cent quatre-vingt-une voix ; mais comme les juges délibéraient pour savoir s’il fallait le condamner au supplice ou à une amende, il se taxa lui-même à vingt-cinq drachmes, <includeonly>[42]
À peine eut-il dit cela, que quatre-vingts nouvelles voix se joignirent à celles qui opinaient à la rigueur. Il fut jugé digne de mort, conduit en prison, et peu de jours après il but la ciguë. Avant ce moment il fit un discours élégant et solide, que Platon a rapporté dans son Phédon. Plusieurs croient qu’il composa même un hymne qui commence par ces mots :
Ligne 107 ⟶ 108 :
Esope recommanda au sénat de Corinthe de ne point juger la vertu par les avis du peuple.
<includeonly>[43]
Au reste, ce n’est pas seulement envers Socrate que les Athéniens en ont mal agi ; ils ont maltraité plusieurs autres grands hommes ; ils traitèrent Homère d’insensé, et le mirent à une amende de cinquante drachmes, comme le dit Héraclide ; ils accusèrent Tyrtée de folie, et condamnèrent Astydamas, le plus illustre imitateur d’Eschyle, à une amende de vingt pièces de cuivre : <includeonly>[44]
« Vous avez ravi la vie au plus grand des sages, à cette muse agréable qui n’affligeait personne. »
Ligne 114 ⟶ 115 :
Voilà ce qui arriva à Socrate : Philochore date pourtant la mort d’Euripide avant celle de Socrate.
Apollodore, dans ses Chroniques, place la naissance du dernier sous l’archontat d’Apséphion à la quatrième année de la soixante-dix-septième olympiade, le sixième jour du mois phargélion<ref>Avril.</ref>, jour dans lequel les Athéniens avaient coutume de purifier leur ville, et auquel ceux de Délos disent que Diane naquit. Il mourut la première année de la quatre-vingt-quinzième olympiade, âgé de soixante et dix ans. Démétrius de Phalère semble en convenir, mais d’autres le disent mort dans la soixantième année de son âge. <includeonly>[45]
Si je ne me trompe, Socrate a traité des choses naturelles : ce qui me donne lieu de le croire, c’est qu’il a parlé de la Providence, quoique Xénophon, qui le rapporte, dise qu’il s’est borné à ce qui regarde les mœurs. D’un autre côté, Platon, dans son apologie, en faisant mention d’Anaxagore et d’autres physiciens, avance des choses que Socrate combat, nonobstant qu’il lui attribue tout ce qu’il dit du sien. Aristote raconte qu’un certain mage étant venu de Syrie à Athènes, reprit Socrate sur différents sujets, et lui prédit qu’il aurait une fin tragique. J’ajoute ici l’épitaphe que j’ai faite sur la mort de notre philosophe :
Ligne 122 ⟶ 123 :
Aristote, au troisième livre de son Art poétique dit que Socrate eut, avec un nommé Antioloque de Lemnos et avec Antiphon, interprète des prodiges, quelque différend, comme eurent Pythagore avec Cydon et Ounatas ; Homère et Hésiode, l’un avec Sagaris, l’autre avec Cécrops pendant leur vie, et tous les deux avec Xénophane de Colophon après leur mort ; Pindare avec Amphimène de Cos ; Thalès avec Phérécyde ; Bias avec Salare de Priène ; Pittacus avec Antiménide et Alcée ; Anaxagore avec Sosibe, et Simonide avec Timocréon.
<includeonly>[47]
Au reste, il y a eu plusieurs autres Socrates : un historien qui a donné une description du pays d’Argos, un philosophe péripatéticien, de Bithynie, un épigrammatiste, et enfin un écrivain de Cos qui a composé un livre des surnoms des dieux.
|