« L’Espagne depuis le ministère O’Donnell » : différence entre les versions

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L’antipathie entre le ministère et l’opposition conservatrice était surtout très vive et arrivait à un degré d’irritation extrême; c’était au fond une vieille et implacable querelle. Les modérés poursuivaient toujours dans le général O’Donnell le chef de la révolte militaire du 28 juin 1854, et le comte de Lucena à son tour, sans vouloir rentrer dans la discussion du passé, ne résistait pas à la tentation de réveiller des souvenirs irritans, comme pour créer à sa prise d’armes une sorte de légitimité rétrospective par l’indignité des administrations modérées qui avaient précédé la révolution. De là un épisode qui surgissait tout à coup, et où, sous l’apparence d’une question de moralité, se déguisaient assez peu les haines personnelles. Le mot de moralité joue un grand rôle dans les affaires de l’Espagne depuis dix ans ; il a été un programme de gouvernement, il est devenu le prétexte d’une révolution. Les cortès constituantes, issues de cette révolution, allaient fouiller tous les actes des cabinets conservateurs depuis 1843 pour y découvrir des traces d’improbité et de vénalité. Cet orage d’accusations avait semblé s’apaiser, lorsque le général O’Donnell, cédant à un dangereux désir de représailles, le laissait éclater de nouveau par deux procès engagés coup sur coup contre un membre du sénat et contre un ancien ministre; puis, par une coïncidence au moins malheureuse, le ministère prenait l’initiative de la première de ces poursuites trois jours après une discussion où le sénateur mis en cause, M. Manuel Lopez Santaella, avait fait acte d’hostilité par son vote.
 
Deux fois ainsi en peu de temps le sénat se trouvait transforme en cour de justice. M. Lopez Santaella était accusé comme ancien commissaire de la ''cruzada'', et le sénat se déclarait incompétent (1)<ref>La commission de la ''crusada'', supprimée on 1851, était une institution d’origine pontificale, chargée d’administrer les fonds provenant du placement des bulles du papa en Espagno et des droits payés par les fidèles pour la dispense du maigre. Le commissaire, par la nature de ses fonctions, ne relevait que de Rome ; le sénat l’a jugé ainsi par son arrêt d’incompétence.</ref>. M. Esteban Collantès était poursuivi comme ancien ministre des travaux publics, au sujet d’une somme de près de neuf cent mille réaux payée par l’état pour des fournitures qui n’avaient point été faites, et; il fut absous, parce qu’il n’y eut pas une majorité légale suffisante pour le condamner. Tristes affaires où perçait trop l’irritation politique! On avait évidemment voulu, par le procès fait à M. Esteban Collantes, atteindre un parti ou une opposition, et c’est peut-être la tendance donnée à une accusation de ce genre qui avait le mieux servi à préserver l’ancien ministre. Au fond, le verdict du sénat qui absolvait M. Collantès avait un peu l’air d’un avertissement, et en fin de compte ces procès répétés, qui ressemblaient à des emportemens d’humeur ou à des représailles, qui faisaient revivre tous les souvenirs des divisions passées, n’étaient propres qu’à rendre plus irréconciliables le ministère de l’''union libérale'' et ses adversaires de l’ancien parti modéré. Il en résultait qu’à la fin de la session, après six mois de luttes parlementaires, le général O’Donnell se retrouvait dans la même position de combat et d’incertitude, ayant vécu sans avoir moralement gagné, rencontrant en face de lui des oppositions plus vives et plus ardentes, soutenu par une majorité qui ne l’avait point abandonné, mais qui n’était point devenue un parti nouveau, et dont l’incohérence restait toujours le premier caractère.
 
Un certain accord ne s’était manifesté entre les partis durant cette longue session que dans les questions qui intéressaient et mettaient en jeu le sentiment national, dans quelques affaires extérieures. Lorsqu’au commencement de 1859 on connut à Madrid le message présidentiel des États-Unis, où M. Buchanan, avec la tranquille hardiesse d’un spéculateur accoutumé aux opérations heureuses, proposait de tenter de nouveau des négociations pour acheter l’île de Cuba, et laissait entrevoir dans le lointain la possibilité d’un appel à la loi omnipotente de la force, l’instinct espagnol se soulevait d’un élan spontané et unanime dans le sénat et dans le congrès; toutes les opinions, toutes les fractions d’opinions se serraient autour du gouvernement pour opposer le faisceau de tous les patriotismes aux audacieux calculs de la république américaine. C’était aux premiers jours de janvier 1859. Lorsque la guerre d’Italie commençait et obligeait les peuples les plus désintéressés dans la lutte à augmenter leurs forces, à prendre une attitude d’observation et d’attente, tous les partis se rallièrent aussi à la politique du cabinet, qui consistait dans une neutralité appuyée sur un accroissement du matériel de guerre et de l’armée jusqu’au chiffre de cent mille hommes.
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CHARLES DE MAZADE.
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<small> (1) La commission de la ''crusada'', supprimée on 1851, était une institution d’origine pontificale, chargée d’administrer les fonds provenant du placement des bulles du papa en Espagno et des droits payés par les fidèles pour la dispense du maigre. Le commissaire, par la nature de ses fonctions, ne relevait que de Rome ; le sénat l’a jugé ainsi par son arrêt d’incompétence.</small><br />
 
<references>
 
CHARLES DE MAZADE.