« Page:Tolstoï - Résurrection, trad. Wyzewa, 1900.djvu/379 » : différence entre les versions

72ALI (discussion | contributions)
État de la page (Qualité des pages)État de la page (Qualité des pages)
-
Page corrigée
+
Page validée
En-tête (noinclude) :En-tête (noinclude) :
Ligne 1 : Ligne 1 :
{{numérotation|RÉSURRECTION||375}}
Contenu (par transclusion) :Contenu (par transclusion) :
Ligne 4 : Ligne 4 :


— Non, pas pour tout le monde ! Pour les véritables
— Non, pas pour tout le monde ! Pour les véritables
révolutionnaires, plusieurs me l’ont dit, c’est au contraire
révolutionnaires, plusieurs me l’ont dit, c’est au contraire un repos, une sécurité. Les malheureux vivent
dans l’angoisse, dans la privation, dans la crainte, craignant à la fois et pour eux, et pour les autres, et pour l’œuvre. Et puis, un beau jour, on les prend, et tout est fini, toute responsabilité cesse, ils n’ont plus qu’a rester étendus et à se reposer. J ’en connais qui, en se voyant pris, ont éprouvé une joie réelle. Mais pour les jeunes, comme Lydotchka, surtout pour les innocents, le premier choc est terrible. La suite, en comparaison, n’est
un repos, une sécurité. Les malheureux vivent
dans l’angoisse, dans la privation, dans la crainte, craignant
à la fois et pour eux, et pour les autres, et pour
l’œuvre. Et puis, un beau jour, on les prend, et tout est
fini, toute responsabilité cesse, ils n’ont plus qu’a rester
étendus et à se reposer. J ’en connais qui, en se voyant
pris, ont éprouvé une joie réelle. Mais pour les jeunes,
comme Lydotchka, surtout pour les innocents, le premier
choc est terrible. La suite, en comparaison, n’est
rien. La privation de la liberté, les mauvais traitements,
rien. La privation de la liberté, les mauvais traitements,
le manque d’air et de nourriture, tout cela n’aurait
le manque d’air et de nourriture, tout cela n’aurait
aucune importance et se supporterait facilement s’il
aucune importance et se supporterait facilement s’il n’y avait pas ce choc moral qu’on ressent quand on se trouve emprisonné pour la première fois.
n’y avait pas ce choc moral qu’on ressent quand on se
trouve emprisonné pour la première fois.


La mère de Lydie, revenant près de Nekhludov, lui
La mère de Lydie, revenant près de Nekhludov, lui
annonça que sa fille était souffrante et avait dû se
annonça que sa fille était souffrante et avait dû se mettre au lit.
mettre au lit.


— Sans motif aucun, ils ont perdu cette jeune vie ! —
— Sans motif aucun, ils ont perdu cette jeune vie ! — dit la tante. — Et je souffre plus encore à la pensée que,
dit la tante. — Et je souffre plus encore à la pensée que,
malgré moi, j’ai été la cause de cet affreux malheur.
malgré moi, j’ai été la cause de cet affreux malheur.


— Mais non, rien n’est perdu ! l’air de la campagne
— Mais non, rien n’est perdu ! l’air de la campagne la remettra.
la remettra.


— Sans vous, en tout cas, elle aurait certainement péri !
— Sans vous, en tout cas, elle aurait certainement péri !
— reprit la tante en se tournant vers Nekhludov, —
— reprit la tante en se tournant vers Nekhludov, — Mais, au fait, j’oublie de vous dire une des raisons pour
Mais, au fait, j’oublie de vous dire une des raisons pour
lesquelles je désirais vous voir. C’était pour vous prier
lesquelles je désirais vous voir. C’était pour vous prier
de remettre cette lettre à Vera Efremovna ! L’enveloppe
de remettre cette lettre à Vera Efremovna ! L’enveloppe
n’est pas fermée, vous pourrez lire la lettre, et la déchirer
n’est pas fermée, vous pourrez lire la lettre, et la déchirer si vos opinions ne vous permettent pas d’en approuver le contenu. Mais je n’y ai rien écrit de compromettant.
si vos opinions ne vous permettent pas d’en approuver
le contenu. Mais je n’y ai rien écrit de compromettant.


Nekhludov prit la lettre, et, ayant dit adieu aux deux
Nekhludov prit la lettre, et, ayant dit adieu aux deux dames, il sortit. Dans la rue, avant de serrer la lettre
dames, il sortit. Dans la rue, avant de serrer la lettre
dans son portefeuille, il cacheta l’enveloppe, bien résolu
dans son portefeuille, il cacheta l’enveloppe, bien résolu
à faire la commission dont l’avait chargé la tante de
à faire la commission dont l’avait chargé la tante de