« Le Râmâyana (trad. Fauche)/Tome 1 » : différence entre les versions
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je ne puis donc t’emmener, de cette ville dans les forêts. Ton époux vit ; par conséquent, tu ne peux me▼
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▲dans les forêts. Ton époux vit ; par conséquent, tu ne peux me
▲suivre avec décence. En effet, qu'il ait une grande âme, ou qu'il
▲ait un esprit méchant, la route qu'une femme doit tenir, c'est
''toujours'' son époux. À combien plus forte raison, quand cet époux
est un monarque magnanime, reine, et bien-aimé de toi ! Sans aucun
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son père, deviendra légalement ton fils, comme je suis le tien
''naturellement''. Tu obtiendras même de Bharata une vénération
supérieure à celle dont tu jouis auprès de moi. En effet, je
jamais eu à souffrir de lui rien qui ne fût pas
élevé. Moi sorti une fois de ces lieux, il te sied
sorte que les regrets donnés à
mon père
« Tu ne dois pas
de la vie, un intérêt égal à celui que réclame un époux courbé
sous le poids de la vieillesse et tourmenté de chagrins à cause de
mon absence.
« Veuille donc bien rester dans ta maison et trouver là
continuellement ta joie dans
devoir éternel des épouses vertueuses. Pleine de zèle pour le culte
des Immortels, faisant ton plaisir de vaquer aux devoirs qui siéent
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ton âme sur la sienne. Honorant les brahmes, versés dans la science
des Védas, reste ici, pieuse épouse, dans la compagnie de ton époux
et
ton époux que tu dois me revoir à mon retour dans ces lieux, si
toutefois mon père, séparé de moi, peut supporter la vie. »
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de larmes :
« Va, mon fils ! Que le bonheur
ton père. Revenu ici heureux, en bonne santé, mes yeux te reverront
un jour. ''Oui'' ! je saurai me complaire dans
époux, comme tu
faire. Va donc, suivi de la félicité ! »
Ensuite, quand elle vit Râma tout près
et, saisie tout à coup
se mit à parler
* * * * *
Au même instant, la princesse du Vidéha, absorbant toute son
âme dans une seule pensée, attendait, pleine
consécration de son époux, comme héritier de la couronne. Cette
pieuse fille des rois, sachant à quels devoirs les monarques sont
obligés, venait
la protection des Immortels, mais encore celle des Mânes ; et
maintenant, impatiente de voir son époux, elle se tenait au milieu de
son appartement, les yeux fixés sur les portes du palais, et pressait
vivement de ses désirs
Alors et tout à coup, dans ses chambres pleines de serviteurs
dévoués, voici Râma, qui entre, sa tête légèrement inclinée de
confusion,
visage abattu la tristesse de son âme. Quand il eut passé le seuil
palais, sa bien-aimée Sîtâ debout, mais
respect, Sîtâ, cette épouse dévouée, plus chère à lui-même que
sa vie et douée éminemment de toutes les vertus qui tiennent à la
modestie.
À
au-devant, le salua et se mit à son côté ; mais, remarquant alors
son visage triste, où se laissait entrevoir la douleur cachée dans
son âme : «
brahmes, versés dans ces connaissances,
la planète de Vrihaspati opère à cette heure sa conjonction avec
Couvert du parasol, zébré de cent raies et tel que
la lune, pourquoi ne vois-je pas briller sous lui ton charmant visage ?
Ô toi, de qui les beaux yeux ressemblent aux pétales des lotus,
pourquoi ne vois-je pas le chasse-mouche et
visage, qui égale en splendeur le disque plein de
Dis-moi, noble sang de Raghou, pourquoi
les bardes officiels et les panégyristes à la voix éloquente te
chanter, à cette heure de ton sacre, comme le roi de la jeunesse ?
Pourquoi les brahmes, qui ont abordé à la rive ultérieure ''dans
et du lait caillé, suivant les rites, pour donner à ce ''noble'' front
la consécration royale ?
« Pourquoi ne vois-je pas maintenant
la pompe du sacre, un éléphant, le plus grand de tous, marqué de
signes heureux, et versant par trois canaux une sueur
les tempes ? Pourquoi enfin, devant toi, ne vois-je marcher, ''nous''
apportant la fortune et la victoire, un coursier ''
non pareille, au blanc pelage, au corps doué richement de signes
prospères ? »
À ces mots, par lesquels Sîtâ exprimait
son esprit, le fils de Kâauçalyâ répondit en ces termes avec une
fermeté
née dans une famille de rois saints ; toi, à qui le devoir est si
bien connu ; toi, de qui la parole est celle de la vérité, arme-toi
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Jadis, le roi Daçaratha, sincère dans ses promesses, accorda deux
grâces à Kêkéyî, en reconnaissance de quelque service. Sommé
tout à coup
en vue de mon sacre, comme héritier de la couronne, mon père
bien-aimée, quatorze années dans les bois ; mais Bharata doit rester
dans Ayodhyâ et porter ce même temps la couronne. Près de
aller dans les bois déserts, je viens ici te voir, ô femme comblée
veuille bien me donner congé.
« Mets-toi
de ta belle-mère ; accomplis envers eux les devoirs de la plus
respectueuse obéissance ; et que jamais le ressentiment de mon exil
ne te pousse, noble dame, à risquer mon éloge en face de Bharata.
En effet, ceux
éloges donnés aux vertus
présence de Bharata. Désirant conserver sa vérité à la parole
de mon père,
forêts : ainsi, fais-toi un cœur inébranlable ! Quand je serai parti,
noble dame, pour les bois chéris des anachorètes, sache te plaire,
ô ma bien-aimée, dans les abstinences et la dévotion.
« Tu dois, chère Sîtâ, pour
partage à ma ''bonne'' mère, accablée sous le poids de la vieillesse
et par la douleur de mon exil. »
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à son époux : « Un père, une mère, un fils, un frère, un parent
quelconque mange seul, ô mon noble époux, dans ce monde et dans
Un père
mérites de son fils, ni un fils par les mérites de son père ;
chacun
lui-même, ''sans partage avec un autre''. Seule,
son mari obtient de goûter au bonheur mérité par son époux ; je
te suivrai donc en tous lieux où tu iras. Séparée de toi, je ne
voudrais pas habiter dans le ciel même : je te le jure, noble enfant
de Raghou, par ton amour et ta vie ! Tu es mon seigneur, mon gourou,
ma route, ma divinité même ;
résolution dernière. Si tu as ''tant de'' hâte pour aller dans la
forêt épineuse, impraticable,
mes pieds, afin de
épines. Pour une femme de bien, ce
une mère, ni un ami, ni son âme à elle-même, qui est la route
à suivre : non ! son époux est sa voix suprême ! Ne
''bonheur'' ; jette loin de toi cette pensée jalouse, comme
reste au ''fond du vase'' après que
emmène-moi sans défiance : il
méchanceté.
mes yeux, préférable aux palais, aux châteaux, à la cour des rois,
aux chars de nos Dieux, ''que dis-je'' ? au ciel même. Accorde-moi
cette faveur : que
fréquentés seulement par des lions, des éléphants, des tigres, des
sangliers et des ours !
heureuse
couler mes jours avec toi, que dans les palais du ''bienheureux'' Indra.
«
racines ; je ne serai
dans les forêts. Je désire habiter dans la joie ces forêts avec
toi, au milieu de ces régions ombragées, délicieuses, embaumées
par les senteurs des fleurs diverses. Là, plusieurs milliers mêmes
duré
odieux, et
préféré. »
À ces paroles de son épouse chère et dévouée, Râma fit
cette réponse, lui exposant les nombreuses misères attachées à
plus haute noblesse, le devoir est une science que tu possèdes ''à
fond'', tu ceins la renommée ''comme un diadème'' : partant, il te sied
à
« Moi, qui sais les dangers bien terribles des bois, je ne me sens pas
la force de
« Dans le bois repairent les tigres, qui déchirent les hommes,
conduits ''par le sort'' dans leur voisinage : on est à cause
des transes continuelles, ce qui fait du bois, mon amie, une chose
affreuse !
« Dans le bois circulent de nombreux éléphants, aux joues inondées
par la sueur de rut ; ils ''vous'' attaquent et ''vous'' tuent ; ce qui fait
du bois, mon amie, une chose affreuse !
« On y trouve les deux points extrêmes de la chaleur et du froid, la
faim et la soif, les dangers sous mille formes ; ce qui fait du bois,
mon amie, une chose affreuse !
« Les serpents et toutes les espèces de reptiles errent dans la
forêt impénétrable au milieu des scorpions aux subtils venins ; ce
qui fait du bois, mon amie, une chose affreuse !
« On rencontre dans les sentiers du bois, tantôt errants
tortueuse, comme les sinuosités
les creux de la terre, une foule de serpents, dont le souffle et
même le regard exhalent un poison mortel. Il faut traverser là des
fleuves, dont
infestés par de longs crocodiles.
«
couches incommodes, que
sein même de la terre, ô femme ''si'' délicate, que
sommeil dans la forêt déserte. On y mange pour seule nourriture des
jujubes sauvages, les fruits de
ceux du cyâmâka[13], le riz né sans culture ou le fruit amer du
tiktaka[14] à la saveur astringente. Et puis, quand on
provision de racines et de fruits sauvages dans les forêts, il arrive
que les anachorètes de leurs solitudes
passer beaucoup de jours, dénués absolument de toute nourriture.
Dans les bois, on se fait des habits avec la peau des bêtes, avec
cheveux en gerbe, de porter la barbe longue et le poil non taillé
sur un corps tout souillé de fange et de poussière, sur des membres
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séjour dans les bois, mon amie, est-il une chose affreuse !
[Note 13 : ''Panicum frumentaceum''.]
[Note 14 : ''Trichosantes diœca''.]
« De quel plaisir ou de quelle volupté pourrai-je donc être là
pour toi, quand il ne restera plus de moi, consumé par la pénitence,
suivi dans la solitude, y seras toute plongée dans tes vœux et tes
mortifications, quelle volupté pourras-tu
Mais alors, moi, te voyant la couleur effacée par le hâle du vent et
la chaleur du soleil, ton ''corps si frêle'' épuisé de jeûnes et de
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à mes souffrances.
« Demeure ici, tu
cœur ; et, si tu restes ici, tu
éloignée de ma ''pensée'' ! »
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yeux baignés de pleurs :
« Les inconvénients attachés au séjour des bois, répondit à ces
paroles de son mari la triste Sîtâ, de qui les pleurs inondaient le
visage ; ces inconvénients, que tu viens
pour toi, ''cher'' et noble époux, les montre à mes yeux comme autant
tous ces animaux qui errent dans les forêts ! Je
''naturellement'' des lions, des tigres, des sangliers, ni des autres
bêtes, dont tu
Combien moins puis-je en redouter les dents ou le venin, si la force
de ton bras étend sur moi sa défense ! Mourir là ''
mieux pour moi que vivre ici !
« Jadis, fils de Raghou, cette prédiction me fut donnée par des
brahmes versés dans la connaissance des signes : « Ton sort,
dit ces hommes véridiques, ton sort, ''jeune'' Sîtâ, est
''quelque jour'' une forêt déserte. » Et moi, depuis ce temps où les
devins
dans mon cœur un vif désir de passer ma vie au milieu des bois.
« Voici le moment arrivé ; donne à la parole des brahmes toute sa
vérité.
« Emmène-moi, fils de Raghou ! car
les forêts avec toi : je
un instant,
Raghouide, à partir. Ce pieux voyage à tes côtés dans les bois est
mon ''brûlant'' désir.
« Je suis déterminée à te suivre ; mais, si tu refuses que
touche,
doute pas ! »
À ces mots, prononcés
au doux parler, triste, navrée de sa douleur, tout enveloppée à
la fois de colère et de chagrin, éclata en pleurs, arrosant le
désespoir avec les gouttes brûlantes de ses larmes.
Râma ne se décida pas encore à lui permettre de partager son exil ;
mais il arrêta ses yeux un instant sur
la tête et se mit à rêver, considérant sous plusieurs faces les
peines semées dans un séjour au milieu des bois.
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pour la consoler :
« Le ciel même sans toi
traits suaves ! Si je
tous les signes de la beauté, si je
défendre : « Non, je ne
Et puis, Sîtâ, je ne voulais pas, toi, qui as le plaisir en partage,
sein des forêts. Mais puisque, dans ton amour dévoué pour moi, tu
ne tiens pas compte des périls que la nature a semés au milieu
des bois, il
répudier sa gloire.
« Viens donc, suis-moi, comme il te plaît, ma chérie ! Je veux faire
toujours ce qui est agréable à ton ''cœur'', ô femme digne de tous
les respects !
« Donne en présents nos vêtements et nos parures aux brahmes
vertueux et à tous ceux qui ont trouvé un refuge dans notre
assistance. Ensuite, quand tu auras dit adieu aux personnes à
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Djanaka ! »
Joyeuse et au comble de ses vœux,
distribuer aux ''plus'' sages des brahmes les vêtements ''superbes'', les
''magnifiques'' parures et toutes les richesses.
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vers Lakshmana, modestement incliné, et, lui adressant la parole,
il tint ce langage : « Tu es mon frère, mon compagnon et mon ami ;
je
dire. Tu ne dois en aucune manière venir avec moi dans les bois :
en effet, guerrier sans reproche, il te faut porter ici un pesant
fardeau. »
Il dit ; à ces mots,
noyé dans ses larmes, Lakshmana ne put contenir sa douleur. Mais il
tomba à genoux, et, tenant les pieds de son frère serrés fortement
avec les pieds de Sîtâ : « Il
homme plein de sens, ta grandeur
bois, pour quelle raison me le défend-elle maintenant ? »
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femme ? Ce monarque des hommes, qui versait ''à pleines mains'' ses
grâces sur nos deux mères, ne les verra sans doute plus avec les
mêmes yeux que dans les jours passés, maintenant
sous le pouvoir d'''un autre'' amour. Un jour, enivrée par les fumées
de la toute-puissance, Kêkéyî, incapable de modérer son âme, fera
sentir quelque dureté à ses rivales.
et défendre nos mères, fils de Soumitrâ,
moi-même, un bras où elles pourront
difficiles et un refuge assuré contre les persécutions. »
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hommes, sur lesquels Çrî a répandu ses faveurs, joignit les mains
et répondit en ces termes à Râma : « Seigneur, il serait possible
à Kâauçalyâ
furent données pour son apanage ; et
considération pour toi, Bharata ne peut manquer jamais
nos deux mères : on le verra même apporter le plus grand zèle à
protéger Kâauçalyâ et Soumitrâ.
« Je suis ton disciple, je suis ton serviteur, je te suis entièrement
dévoué, je
à ma prière ; emmène-moi, vertueux ami ! »
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Après que Râma, assisté par son illustre Vidéhaine, eut donné
aux brahmes ses richesses, il prit ses armes et les instruments,
''
avec Lakshmana, il
accompagné de son épouse et de son frère.
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habitants de la cité montent de tous les côtés sur le faîte des
maisons et sur les plates-formes des palais. Dans la rue royale, toute
couverte de campagnards, on
tant était grand alors cet amour du peuple, accourant saluer à son
départ ce Râma
prince'' marcher à pied, avec Lakshmana, avec Sîtâ même, alors,
saisis de tristesse, leur âme
voilà, suivi par Lakshmana seul avec Sîtâ, ce héros, dans les
marches duquel une puissante armée, divisée en quatre corps, allait
toujours devant et derrière son char ! Ce guerrier, plein
dévoué, juste comme la justice elle-même, ne veut pas que son père
fausse une parole donnée, et cependant il a goûté la saveur exquise
du pouvoir et du plaisir !
« Elle, Sîtâ, dont naguère les Dieux mêmes qui voyagent dans
ne pouvaient obtenir la vue, elle est exposée maintenant à tous les
regards du vulgaire dans la rue du roi ! Le vent, le chaud, le froid
vont effacer toute la fraîcheur de Sîtâ ; elle, de qui le visage
aux charmantes couleurs est paré
bannit
« Laissons nos promenades, les jardins publics, nos lits moelleux,
nos siéges, nos instruments, nos maisons ; et, suivant tous ce fils du
roi, embrassons une infortune égale à son malheur.
« Que la forêt où va ce noble enfant de Raghou soit désormais notre
cité ! Que cette ville, abandonnée par nous, soit réduite à
héros magnanime ! Quittez les cavernes et les bois, serpents, oiseaux,
éléphants et gazelles ! Abandonnez ce que vous habitez, et venez
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Promenant ses regards en souriant au milieu de cette multitude
affligée, le jeune prince, affligé lui-même sous
contentement, allait donc ainsi, désirant voir son père et comme
impatient
Mais avant que Râma fût arrivé, accompagné de son épouse et de
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Alors Soumantra se présenta devant le maître de la terre, et,
joignant ses mains, lui dit ces mots, le cœur vivement affligé :
« Râma, qui a distribué ses richesses aux brahmes et pourvu à la
subsistance de ses domestiques ; lui-même, qui, la tête inclinée,
a reçu ton ordre, puissant roi, de partir dans un instant pour
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rayons de ses vertus, comme le soleil par les rayons de sa lumière,
est venu voir ici tes pieds ''augustes'' ; reçois-le en ta présence,
Il dit, et le roi, de qui
brûlants soupirs, et, dans sa vive douleur, il répondit ainsi :
« Soumantra, conduis promptement ici toutes mes épouses, je veux
recevoir, entouré
À ces mots, Soumantra de courir au gynœcée, où il tint ce langage :
« Le roi vous mande auprès de lui, nobles dames ; venez là sans
tarder ! » Il dit, et toutes ces femmes, apprenant de sa bouche
envoyé par leur époux,
monarque.
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délai ! »
Du ''plus'' loin
« Viens, Râma ! viens, mon fils ! »
émotion, il tomba avant même
Râma, vivement touché, accourut vers le roi qui
reçut dans ses bras
sur la terre ; puis, avec une âme palpitante
doucement son père ; et, secondé par Lakshmana, aidé même par
Sîtâ, il remit le monarque évanoui dans son trône. Ensuite, ''le
voilà'' qui ''
roi sans connaissance.
Alors toutes les femmes remplirent de cris tout le palais du roi ;
mais, au bout
Râma, joignant ses mains, dit au monarque, plongé dans une mer de
tristesse :
« Grand roi, je viens te dire adieu ; car tu es, prince auguste, notre
seigneur. Jette un regard favorable sur moi, qui pars à
pour habiter les forêts. Daigne aussi, maître de la terre, donner
congé à Lakshmana comme à la belle Vidéhaine, mon épouse. Car
tous deux, refusés par moi,
Veuille donc bien nous donner congé à tous les trois. »
Quand le maître de la terre eut connu que le désir de prendre congé
avait conduit Râma dans son palais, il fixa le regard
consternée sur lui et dit, ses yeux noyés de larmes :
« On
prendre toi-même les rênes du royaume. »
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père, un gourou, un roi, un seigneur, un dieu ; elle est digne de tous
mes respects ; le devoir seul est plus vénérable. Pardonne-moi,
ô mon roi ; mais le mien est de rester ferme dans
prescrit ta majesté. Tu ne peux me faire sortir de la voie où ta
parole
encore notre auguste monarque pendant une vie de mille autres
années. »
À peine eut-il entendu ce langage de Râma, le roi, que liait
étroitement la chaîne de la vérité, dit ces paroles
ses larmes rendaient balbutiante : « Si tu es résolu de quitter cette
ville et de
du moins avec moi, car abandonné par toi, Râma, il
de vivre ! Règne, Bharata, dans cette ville, abandonnée par toi et
par moi ! »
À ces paroles du vieux monarque, Râma lui répondit en ces termes :
« Il ne te sied nullement, auguste roi, de venir avec moi dans les
forêts : tu ne dois pas faire un tel acte de complaisance à mon
égard. Pardonne, ô mon bien-aimé père, mais que ta majesté daigne
nous lier ensemble au devoir : ''oui'', veuille bien, ô toi, qui donnes
te rappelle simplement ton devoir, ô mon roi ; ce
que
maintenant par amitié pour moi ! »
À ces mots de Râma : « Que la gloire, une longue vie, la force,
le courage et la justice soient ton domaine éternel ! dit le roi
Daçaratha. Va donc, sauvant
une route sans danger pour un nouvel accroissement de ta renommée et
les joies du retour ! Mais veuille bien demeurer ici toi-même
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Il dit ; à ces mots de son père affligé, Râma joignit les mains et
répondit au sage monarque agité par le chagrin : «
ma présence le plaisir, je ne puis donc le rappeler. Demain, qui me
donnerait ces mets délicieux, dont ta royale table
le régal
«
ses royaumes et ses villes ! moi, sauvant
à laquelle je renonce, Bharata la gouverne heureusement, dans ses
frontières paisibles, avec ses montagnes, avec ses villes, avec ses
forêts !
mon cœur
dans les grandeurs même,
ordres : loin de toi cette douleur, que fait naître en ton âme ta
séparation
Ensuite le monarque, étouffé sous le poids de sa promesse, manda
son ministre Soumantra et lui donna cet ordre, accompagné de longs
et brûlants soupirs : « Que
cortége au digne enfant de Raghou, une armée nombreuse, divisée
en quatre corps, munie de ses flèches et revêtue de ses cuirasses.
Quelque richesse qui
affectée pour ma vie, que tout cela marche avec Râma, sans
en laisse rien ici ! Que Bharata soit donc le roi dans cette ville
dépouillée de ses richesses, mais que le fortuné Râma voie tous
ses désirs comblés au fond même des bois ! »
Tandis que Daçaratha parlait ainsi, la crainte
Kêkéyî ; sa figure même se fana, ses yeux rougirent de colère et
sans couleur, elle jeta ces mots
« Si tu ôtes ainsi la moelle du royaume que tu
foi perfide, comme une liqueur dont tu aurais bu
un roi menteur ! »
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avec les flèches de sa voix, lui répliqua en ces termes : « Femme
inhumaine et justement blâmée par tous les hommes de bien, pourquoi
donc me piquer sans cesse avec
porte un fardeau si lourd et même insoutenable ! »
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ce langage amer, que lui inspirait son génie malfaisant : « Jadis
Sagara, ton ancêtre, abandonna résolûment Asamandjas même,
son fils aîné ; abandonne, à son exemple, toi,
Raghouides ! »
« Ô honte ! »
il se met à songer, tout plein de confusion, en secouant un peu la
tête.
Alors un vieillard
et qui jouissait de la plus haute estime auprès du ''puissant'' roi,
moi, qui vais
rejeté par Sagara, le maître de la terre. Il est sûr que, poussé
des citadins et les jetait dans les flots de la Çarayoû : voilà,
''reine'', le fait tel
butte à ses vexations : « Dominateur de la terre, choisis, dirent au
monarque les citadins irrités, choisis entre abandonner Asamandjas
seul ou bien nous tous ! »
« Pour quel motif ? » reprit cet auguste souverain. À ces mots,
les citoyens de lui répondre avec colère : « Poussé
méchant, ton fils prend à la gorge nos jeunes enfants et les jette
eux-mêmes, tout criant, aux flots de la Çarayoû ! »
« Quand il eut recueilli
voulait complaire aux habitants de la ville, dégrada son fils et
le bannit de sa présence.
renoncer à un fils sans conduite ; mais ce monarque-ci, quelle raison
a-t-il de chasser Râma, un fils plein de vertus ? »
Il dit ; à ces paroles de Siddhârtha, le roi Daçaratha,
que troublait sa douleur, tint à Kêkéyî ce langage : « Je renonce
à mon trône et même aux plaisirs, je vais en personne accompagner
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couronne avec ''ton'' Bharata ! »
Ensuite, Kêkéyî apporta de ses mains les habits
femme sans pudeur dans
Aussitôt le jeune prince, ayant quitté ses vêtements du plus fin
tissu, endossa les habits
Kêkéyî. Après lui, de la même manière, le héros Lakshmana,
dépouillant son resplendissant costume,
vile sous les yeux de son père.
À
Kêkéyî, afin
robe de soie jaune, dont elle était gracieusement parée, la fille
du roi Djanaka rougit de confusion, et, réfugiée à côté de son
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comme une gazelle qui se voit emprisonnée dans un filet.
Quand Sîtâ eut pris ces vêtements
par ses larmes, elle dit à son mari, semblable au roi des Gandharvas :
« Comment faut-il
de moi ces vêtements
À ces mots, elle jeta sur ses épaules une partie de
La princesse de Mithila prit ensuite la seconde et se mit à songer,
car la jolie reine était encore inhabile à revêtir, comme il
fallait, un habit
écorce vile, comme une ''mendiante'' sans appui, celle qui avait pour
appui un tel époux, toutes les femmes de pousser simultanément des
cris, et même : « Ô honte ! disaient-elles à
honte ! » À peine le roi eut-il entendu ses femmes crier : « Honte ! oh !
la honte ! » toute sa foi dans la vie, toute sa foi dans le bonheur en
fut complètement brisée par la douleur.
Le vieux rejeton
épouse : « Femme cruelle, toi, qui marches dans les voies du péché,
la grâce que tu
non le fils de Soumitrâ, et non la fille du roi Djanaka.
« Pour quelle raison, ô toi, de qui la vue est sinistre et la
conduite pleine
vêtements
famille ? Sîtâ ne mérite point, Kêkéyî, ces habits tissus avec
À son père, assis dans le trône,
Râma, la tête inclinée, adressa les paroles suivantes, impatient de
partir aussitôt pour les forêts : « O roi, versé dans la science
de nos devoirs, Kâauçalyâ, ma mère, cette femme inébranlablement
dévouée à toi, livrée tout entière à la pénitence,
généreux et
cette inattendue séparation
consoler, ''ta plus haute'' considération. Daigne, par amitié pour
moi, daigne toujours la couvrir tellement de tes yeux, roi puissant,
que, défendue par toi, son protecteur ''légal'', elle
subir de persécutions. »
À
lui parlant ainsi, le monarque se mit à gémir et pleurer avec toutes
ses femmes.
« Peut-être ai-je ravi autrefois des enfants chéris à des pères
affectionnés, dit-il, puisque je suis fatalement séparé de toi, mon
fils, dans mon excessive infortune ! Les êtres animés ne peuvent donc
mourir, ô mon ami, avant
mort ne
À ces mots, le roi
l’évanouissement.
Kâauçalyâ baisa tendrement Sîtâ sur le front et dit ces mots à
Râma : « Il te faut, ô toi, qui donnes
sans cesse, fils de Raghou, aux côtés de Sîtâ et de Lakshmana, ce
héros, qui
grande attention au milieu de ces arbres nombreux, dont les forêts
sont couvertes. »
Râma, les mains jointes,
des épouses du roi, il tint à sa mère ce langage dicté par le
devoir, lui, pour qui le devoir
« Pourquoi me donnes-tu ce conseil, mère, à
« Lakshmana est mon bras droit ; et la princesse de Mithila, mon ombre.
En effet, il
main,
de Çatakratou, le seigneur des trois mondes ! Bonne mère, ne sois
pas affligée ! obéis à mon père ! La fin de cet exil au milieu des
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Après ce discours, dont le geste accompagnait la matière, il se leva
et vit les trois cent cinquante épouses du roi. Lui, alors même, le
devoir en personne, il
mères, et, courbant la tête avec modestie, leur tint ce langage :
« Je vous adresse à toutes mes adieux. Si jamais, soit inattention,
soit ignorance,
moi-même, à cette heure, je vous en demande humblement pardon. »
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Ensuite Lakshmana embrassa les pieds de Soumitrâ, qui, voyant son
fils prosterné à ses genoux, lui donna sur le front un baiser
discours :
« Il est ''cinq devoirs'', bien dignes de votre famille : ce sont la
défense
et
pense que la forêt,
volonté ! »
Ensuite,
voit Mâtali
fils du roi ! dit Soumantra au digne rejeton de Kakoutstha :
« Je vais te conduire avec lui où tu as
À ces nobles paroles du cocher, Râma, accompagné de son épouse,
''se prépare à'' monter dans ce char magnifique avec Lakshmana.
Il déposa lui-même sur le fond du char les différentes espèces
panier. Cela fait, et sur
cocher du roi y plaça encore une cruche de terre.
Soumantra les fit monter et monta lui-même derrière ces ''nobles
compagnons
consternée sur les deux frères assis auprès de la ''belle jeune''
femme, le troisième avec eux, Soumantra de fouetter ses chevaux, sur
le commandement, que Râma en donna lui-même au cocher.
« Hélas ! Râma ! »
« Retiens les chevaux, cocher !
désirons voir la face du magnanime Râma, ce visage aimable comme la
lune.
« Notre seigneur, aux yeux de qui le devoir est préférable à tout,
des routes sauvages de la forêt ? La mère de Râma a donc un cœur
de fer ; il est donc joint solidement,
quand elle a vu partir son fils bien-aimé pour
forêts ! Seule, elle a fait acte de vertu, cette jeune Vidéhaine à
la taille menue, qui
suit le corps. Et toi aussi, Lakshmana, tu es heureux, ''car'' tu
satisfais à la vertu, toi, qui suis par dévouement ce frère aîné,
que tu aimes, sur la route, où
Dans ce moment, Râma, voyant son père, qui, environné de ses
femmes, le suivait à pied, en proie à la douleur, et gémissait
à chaque pas avec la reine Kâauçalyâ, il ne put,
soutenir un tel spectacle, enchaîné, comme il était, dans les
nœuds de son devoir. Quand il vit son père et sa mère aller ainsi
à pied, courbés sous le chagrin, eux, à qui le bonheur seul était
dû, il se mit à presser le cocher : « Avance ! dit-il ; avance ! » Il ne
put, comme un éléphant que
ces deux chers vieillards enveloppés ainsi par la douleur.
« Hâ ! mon fils Râma !
les yeux vers moi ! »
la reine couraient après le char.
« Arrête ! arrête ! » criait le vieux monarque ; « Marche ! » disait au
cocher le jeune Raghouide. La position de Soumantra était alors celle
monter ou descendre''. « Quand tu seras de retour chez le roi, tu lui
diras : « Je
la rendre plus cruelle. » Ainsi Râma parlait à Soumantra.
Aussitôt que celui-ci,
du jeune prince, il tourna ses mains jointes vers le vieux monarque et
poussa les chevaux.
Ligne 796 ⟶ 788 :
* * * * *
Le roi, chef de la race
tant
marchait vers son exil.
Aussi longtemps que le roi vit de ses yeux ce fils bien-aimé, il
supprima en quelque sorte dans son esprit la distance lointaine jetée
entre eux. Tant
le regard suivait ce fils, non moins vertueux que bien-aimé, ses
yeux, marchèrent ''comme'' pas à pas avec lui. Mais, quand le roi,
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en toi mon épouse !
« Si Bharata devient célèbre, quand il aura fait passer ainsi
le royaume dans ses mains, que mon ombre ne goûte jamais aux dons
funèbres
Dans ce moment la reine Kâauçalyâ, en proie elle-même à sa
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Le monarque, accompagné de sa tristesse, dit alors ces paroles : « Que
mère de ''mon fils'' Râma ! »
Ligne 834 ⟶ 826 :
pitoyablement à haute voix, désolé, torturé de chagrin et levant
ses bras au ciel : « Hélas ! disait-il ; hélas ! enfant de Raghou, tu
verront, mon fils, revenu des bois, à la fin du temps fixé par ton
arrêt ! mais, ''hélas'' ! moi, je ne te verrai pas !
« Bonne Kâauçalyâ, touche-moi de ta main ; car ma vue a suivi Râma,
et
La reine jeta les yeux sur le monarque, abattu dans ce lit,
pensée ne cessait de suivre ''son bien-aimé'' Râma : elle entra dans
cette couche, ''près de son époux'', elle, de qui la douleur avait
tourmenté les formes, et, poussant de longs soupirs, elle éclata en
lamentations
* * * * *
Les hommes les plus affectionnés à Râma suivirent ce héros, qui,
magnanime et fort comme la vérité,
devait habiter. Quand le monarque tout-puissant retourna sur ses pas
avec la foule de ses amis, ceux-là
continuèrent
Râma, le devoir en personne, promenant sur eux ses regards et buvant
de ses yeux, pour ainsi dire,
leur tint ce langage, comme si tous ils eussent été ses propres
fils : « Faites maintenant reposer entièrement sur la tête de
Bharata, pour
encore enfant, il est avancé dans la science ; il est toujours aimable
à ses amis, il est plein de courage, il est audacieux même, et
cependant sa bouche
Ces peuples des villes et des campagnes, malheureux et baignés de
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lui, enchaînés par ses vertus.
Ensuite le noble prince, ayant décidé
le rivage de la Tamasâ, porta ses regards sur la rivière et dit
ces paroles au fils de Soumitrâ : « Voici près
beau Lakshmana, la première nuit de notre habitation au milieu
des forêts. Que la félicité descende sur toi ! Ne veuille pas te
Ligne 885 ⟶ 877 :
Le cocher du roi arrêta donc le char en ce moment où le soleil
arrivait à son couchant ; et, quand il eut donné à ses coursiers une
abondante nourriture, il
Ensuite, après
noble conducteur, voyant la nuit toute venue, prépara de ses mains,
aidé par le fils de Soumitrâ, la couche même de Râma. Alors, quand
Ligne 896 ⟶ 888 :
Ce fut donc ainsi que, parvenu sur les rives de la Tamasâ, qui voit
les troupeaux et les génisses troubler ses limpides tîrthas, Râma
fit halte là cette nuit avec les sujets de son père. Mais,
levé au milieu de la nuit et les ayant vus tous endormis, il dit à
son frère, distingué par des signes heureux : « Vois, mon frère, ces
habitants de la ville, sans nul souci de leurs maisons,
nous à cœur uniquement, vois-les dormir au pied des arbres aussi
tranquillement que sous leurs toits.
« Nous donc, pendant
et gagnons par cette route le bois des mortifications. Ainsi les
habitants de la ville fondée par Ikshwâkou
plus loin, et ces hommes si dévoués à moi ne seront plus réduits
à chercher un lit au pied des arbres. »
Aussitôt Lakshmana répondit à son frère, qui était là devant
ses yeux comme le devoir même incarné : «
plein de sagesse ; montons sans délai sur le char ! »
Ligne 918 ⟶ 910 :
char, le front droit au midi, et mets dans les mouvements une telle
attention, que les traces du retour ne décèlent pas aux habitants du
notre cité le chemin par où je vais
À ces mots du prince, le cocher à
il ''alla'', revint et présenta son léger véhicule au vaillant Râma.
Celui-ci monta lestement sur le char avec ses deux compagnons
''
longs bras fut arrivé sur
tourbillons agitent la surface, il suivit le cours de
une route belle, heureuse, sans obstacle, sans péril et
délicieux. Ensuite, quand ces habitants de la grande cité,
réveillés à la fin de la nuit, virent les traces qui annonçaient
le retour du char à la ville : « Le fils du roi, pensèrent-ils, a
repris le chemin
revinrent eux-mêmes à la ville.
Ligne 941 ⟶ 933 :
cygnes et de grues indiennes ; la Gangâ, qui doit sa naissance au mont
Himâlaya, dont les abords sont habités par des saints, dont les eaux
purifient tout ce
où
Râma,
sur les ondes aux vagues tourbillonnantes, dit à Soumantra : « Faisons
halte ici
du fleuve, un arbre ingoudi très-haut, tout couvert de fleurs et
de jeunes pousses : demeurons ''cette nuit'' ici même, conducteur ! »
« Bien ! » lui répondent Lakshmana et Soumantra, qui aussitôt fait
avancer les chevaux près de
descendit du char avec son épouse et son frère. Dans ce moment
Soumantra, qui avait mis pied à terre lui-même et dételé ses
excellents coursiers, joignit ses mains et
Raghouide, arrivé déjà au pied de
« Ici habite un ami bien-aimé de Râma, ''lui dit-il'', un prince
équitable, de qui la bouche est
Nishâdas, qui a nom Gouha aux longs bras. À la nouvelle que Râma,
le tigre des hommes, était venu dans sa contrée, ce monarque est
Ligne 965 ⟶ 957 :
Après ces mots de son cocher, comme il vit de loin Gouha qui
roi des Nishâdas. Quand il eut embrassé le malheureux exilé : « Que
ma ville te soit comme Ayodhyâ ! Que veux-tu, lui dit Gouha, que je
Ligne 971 ⟶ 963 :
À ces paroles de Gouha, le noble Raghouide répondit ainsi : « Il ne
manque rien à
majesté. »
Puis, quand il eut baisé tendrement au front ce monarque venu à
pied, quand il eut serré Gouha dans ses bras
Râma lui tint ce langage :
« Je refuse tout ce que ton amitié fit apporter ici, quelle
soit la chose ; car je ne suis plus dans une condition où je puisse
recevoir des présents. Sache que je porte le vêtement
ma nourriture et le devoir toute ma pensée ; que je suis un ascète
''enfin'' et que les choses des bois sont les seuls objets permis à mes
sens.
chose : avec cela seul, ta majesté
comme un honneur fait à moi les bons soins donnés à ses nobles
coursiers. »
Aussitôt Gouha de jeter lui-même cet ordre à ses gens : «
hâte
Râma, vêtu de ses habits tissus
usitée au coucher du soleil et prit seulement un peu
Lakshmana lui apporta de soi-même. Puis, quand celui-ci eut lavé les
pieds du noble ermite, couché sur la terre avec son épouse, il vint
à la souche de
La nuit alors, bien
doucement pour cet illustre, ce sage, ce magnanime fils du roi
Daçaratha, qui
de la vie que ses plaisirs.
Gouha adressa, consumé par la douleur, ces mots à Lakshmana, qui
veillait, sans fermer
« Ami,
cette nuit, fils de roi, délasse bien tes membres dans cette couche !
« Tous ces gens sont accoutumés aux fatigues, mais toi, as-tu goûté
de la vie autre chose que ses douceurs ! Laisse-moi veiller cette nuit
à la garde du ''généreux'' Kakoutsthide. Certes ! il
sur la terre, qui me soit plus cher que Râma : fie-toi donc à cela
en toute assurance ; je le jure à toi, héros, je le jure par la
vérité ! »
« Gardés ici par toi, monarque sans péché, nous sommes tous sans
crainte, lui répondit Lakshmana : ce
la pensée qui veille ici ''et dans sa tristesse, ne peut céder au
sommeil''. Comment le sommeil, ou les plaisirs, ou même la vie me
Ligne 1 023 ⟶ 1 015 :
par terre avec Sîtâ ?
« Vois, Gouha, vois, couché dans
devant lequel ne pourraient tenir dans une bataille tous les Dieux,
ligués même avec les Asouras ; lui, que sa mère obtint à force de
Ligne 1 030 ⟶ 1 022 :
son père !
« Après le départ de son fils, cet auguste monarque ne vivra pas
longtemps ; et la terre, sans aucun doute, la terre elle-même en sera
bientôt veuve !
« Et, quand ce temps sera venu, à qui sera-ce donc, si ce
avec toutes les cérémonies funèbres ?
« Heureux tous ceux qui pourront errer à leur fantaisie dans la
capitale de mon père aux larges rues bien distribuées, aux cours
délicieuses, où
encombrée
promenades et de jardins publics, heureuse de toutes les félicités,
embellie par les plus suaves courtisanes ; cette ville, où tant de
fêtes attirent le concours et
cité, dont les échos répètent sans cesse les différents sons des
instruments de musique, dont les rues se resserrent entre les
files des palais et des belles maisons ; cette ville, où
confusément un peuple florissant et joyeux !
« À la fin de notre exil dans les bois, puissions-nous entrer
nous-mêmes sains et saufs dans la superbe Ayodhyâ avec ce héros si
pieux observateur de la foi donnée ! »
Ligne 1 056 ⟶ 1 048 :
Quand la nuit se fut éclairés aux premières lueurs du matin, Râma,
le héros illustre à la vaste poitrine, dit au brillant Lakshmana,
son frère, le fils de Soumitrâ : « Voici le moment où
jour se lève ; la nuit sainte est écoulée ; entends, mon ami, cet
oiseau heureux, le kokila chanter sa joie. Déjà même le bruit des
Ligne 1 065 ⟶ 1 057 :
de Râma, il appela aussitôt le roi des Nishâdas avec le cocher
Soumantra, et se tint debout lui-même devant son frère. Ensuite,
après
les épées à leurs flancs et pris les arcs dans leurs mains, les
deux Raghouides, accompagnés de Sîtâ,
Gangâ. Là,
« Que dois-je faire ? dit le cocher, ses mains jointes, à
jeune homme, bien instruit sur le devoir. »
« Retourne ! lui repartit celui-ci ; je
char : je
À la vue
anachorète, qui désirait passer le Gange au plus vite, Râma dit ces
mots à Lakshmana : « Monte, tigre des hommes, monte dans ce bateau,
Ligne 1 081 ⟶ 1 073 :
la barque ''ma chère'' pénitente Sîtâ. »
Lui sur-le-champ
il plaça
lui-même dans
aîné, le magnanime ermite.
Alors, quand il eut salué
ministres : « Entre dans ta barque, heureux nautonnier, dit le
Kakoutsthide au pilote ; délie ce bateau et conduis-nous à
bord ! »
Ligne 1 096 ⟶ 1 088 :
Quand ils ont abordé le rivage, ces deux princes magnanimes sortent
de la barque, et,
Gangâ une humble adoration. Alors ce fléau des ennemis, ce héros,
de qui
se mit en route, les yeux noyés de larmes, avec son frère et son
épouse.
''Mais
ce langage au brave Lakshmana, douce joie de sa mère : « Marche en
avant, fils de Soumitrâ, et que Sîtâ vienne après ;
par derrière, afin de protéger Sîtâ et toi !
ma chère Vidéhaine connaîtra les maux
des bois : il faudra
sangliers, des tigres et des lions ! » Puis, tournant un dernier regard
vers cette plage, où se tenait encore Soumantra, nos deux frères,
quand les enfants du roi se furent avancés
remportant avec eux leur amour.
Les trois nouveaux ascètes
promenant leur vue çà et là sur différentes portions de terre, sur
des régions délicieuses, sur des lieux
vus, ils arrivent au pays qui était leur but, cette contrée où
eut suivi longtemps un chemin sans péril et contemplé des arbres de
plusieurs essences, Râma dit à Lakshmana vers le temps où le soleil
commence à baisser un peu : « Vois, fils de Soumitrâ, vois, près du
saint confluent
sacré : nous sommes, je pense, dans le voisinage
Sans doute, nous voici bientôt arrivés à
bruit qui vient à nos oreilles ne peut naître que de ces deux
rivières, dont les vagues
être que les anachorètes nés dans la forêt qui ont fendu ce bois
pour le feu du sacrifice ; et voici différentes espèces
comme en en voit dans
Quand ils eurent marché encore à leur aise un peu de temps,
en main, ils arrivèrent, accablés de fatigue, après le coucher de
Parvenu avec son frère à
effrayant les gazelles et les oiseaux endormis. Amené par le désir
de voir le solitaire à la porte même de son ermitage, le beau Râma
présentaient chez lui, fit introduire aussitôt les voyageurs dans
avec son épouse et son frère, aux pieds de
qui, assis devant son feu sacré, venait
oblations.
même et de gazelles accroupies autour de lui, accueillit avec honneur
« Nous sommes frères, et fils du roi Daçaratha ; on nous appelle
Râma et Lakshmana. Mon épouse, que voici, est née dans le Vidéha ;
pas de son époux, elle est venue avec moi dans cette forêt de la
pénitence.
« Ce frère chéri est plus jeune que moi ; il est fils de Soumitrâ :
ferme dans les vœux
de soi-même dans ces bois, où
voix, je vais entrer dans la grande forêt ; je marcherai là, saint
anachorète, sur les pas mêmes du devoir : les fruits et les racines y
feront toute ma nourriture. »
À ces mots du sage Kakoutsthide,
vertu elle-même lui présenta
siége et
son repas de racines et de fruits, lui, dont les fruits seuls étaient
la nourriture quotidienne. À son jeune compagnon assis, quand il eut
reçu de tels honneurs, Bharadwâdja tint alors ce langage assorti aux
''convenances, dont la politesse fait un'' devoir : « ''Je remercie''
la bonne fortune, ''qui''
ermitage : assurément !
auquel ton père
fils de Raghou, est
confluent de la Gangâ et de
si le pays te plaît : tout ce que tes yeux voient ici appartient en
commun aux habitants du bois consacré à la pénitence. »
Râma, joignant les mains, répondit à ces paroles de
« Ce serait une faveur insigne pour moi, brahme vénéré,
ici avec toi. Mais notre pays, ô le plus saint des pénitents, est
à la proximité de ces lieux ; et mes parents viendraient, sans nul
doute,
ici ; mais daigne
déserte, où je puisse habiter avec plaisir, sans trouble, ignoré
de mes parents, accompagné seulement de Lakshmana et de ma chaste
Ligne 1 194 ⟶ 1 186 :
Il dit ; à ce langage de Râma, le grand anachorète Bharadwâdja
réfléchit un instant avec recueillement et lui répondit en
ces termes : « À trois yodjanas
fréquentée des ours, hantée par les singes et dont les échos
répètent les cris des golângoulas[15]. Cette retraite sainte,
Ligne 1 201 ⟶ 1 193 :
peux demeurer là.
[Note 15 :
« Tant
félicité ne cesse pas de lui sourire et toutes ses pensées lui
viennent de la vertu. »
Ligne 1 209 ⟶ 1 201 :
Ensuite Râma, quand il eut mangé, se mit à raconter diverses
histoires, entremêlées avec celles de Bharadwâdja, et toute la
sainte nuit
récita la prière du matin et vint respectueusement
le grand saint : « Râma, lui dit le solitaire, va
au mont Tchitrakoûta avec ton épouse et Lakshmana : tu habiteras ces
lieux en toute assurance.
« Dirige-toi vers cette montagne heureuse et bien charmante, dont les
échos répètent les chants des kokilas, des gallinules et des
paons, le bruit des gazelles et les cris de nombreux éléphants ivres
poser ton habitation. »
Leur ayant fait connaître le chemin, Bharadwâdja, salué par le
sage Râma, Lakshmana et Sîtâ, revint ''dans son ermitage''. Quand
qui'' lave mes souillures. » Ainsi causant et marchant derrière
Sîtâ, les deux héros voués à la pénitence arrivent sur les bords
de la Kâlindi[16].
[Note 16 : Un des noms donnés à
Là, quand ils ont réuni et lié ensemble des bois et des bambous
Ligne 1 237 ⟶ 1 229 :
frêle embarcation.
Ce fut donc avec ce radeau
rivière, fille du soleil, aux flots rapides, aux guirlandes de
vagues, aux bords inaccessibles par la masse épaisse des arbres
Ligne 1 243 ⟶ 1 235 :
Ils se remettent dans la route du Tchitrakoûta, bien résolus
Peu de temps après, les voici qui entrent dans le bois du
Tchitrakoûta aux arbres variés, et Râma tient ce langage à Sîtâ :
« Sîtâ, ma ''belle'' aux grands yeux, vois-tu, à la fin de la saison
froide, ces kinçoukas déjà fleuris et comme en feu, près du
fleuve, dont ils ceignent le front
long de la Mandâkinî, cette forêt de karnikâras, tout illuminée
de ses fleurs splendides, flamboyantes et comme de
bhallâtakas, ces vilvas, ces arbres à pain, ces plaqueminiers et
tous ces autres, dont les branches pendent sous le poids des fruits.
Ligne 1 259 ⟶ 1 251 :
ce mont Tchitrakoûta, semblable au paradis !
« Vois, ma belle chérie, vois comme, sur les bords de la Mandâkinî,
la nature, au pied de chaque arbre, nous a jonché des lits brodés
avec une multitude de fleurs ! »
Tandis
Mandâkinî, ils arrivèrent au mont Tchitrakoûta, ombragé par
une variété infinie
environné
frères, se construisent un ermitage.
Ils vont chercher au milieu du ''bois suave comme un'' jardin et
rapportent de fortes branches, cassées par les éléphants. ''Fichées
dans la terre et'' rattachées
épandues, ''qui remplissent tous les intervalles'', elles se forment
bientôt sous leurs mains en deux huttes séparées. Ils couvrent
le toit avec les feuilles nombreuses des arbres. Lakshmana ensuite
nettoie les deux cases terminées ; et la Vidéhaine à la taille
charmante les enduit elle-même
édifié, Râma dit à Lakshmana :
« Apporte une gazelle, fils de Soumitrâ, et fais-la cuire, sans
tarder : je veux honorer les Dieux de
sacré. »
À ces paroles de son frère, Lakshmana
noire, la rapporta du bois, alluma du feu et fit cuire son gibier
parfaitement.
Ensuite Râma lui-même
deux se mirent à manger sur un plat net et pur,
des feuilles ''verdoyantes'' le reste des choses offertes en sacrifice.
Sîtâ avait elle-même servi les mets devant son époux et son
beau-frère ; puis,
enlever ce qui restait du festin. Dès ce moment, Râma goûta
délicieusement avec Lakshmana les charmes de
était venu demander à cette montagne sourcilleuse, embellie par
les guirlandes et les bouquets de fleurs les plus variées, au milieu
desquelles gazouillait un nombre infini
espèces.
Ligne 1 304 ⟶ 1 296 :
pays, et des fleuves, et des lacs, et des villages et des cités ; il
arriva enfin avec sa tristesse, après la chute du jour, aux portes
éteint parmi ses troupes désolées
semblait abandonnée, tant le silence était vide de son !
Aussitôt
''
lui jetant cette question : « Où est Râma ? »
« Ce magnanime, leur dit alors celui-ci,
du Gange ; et, quand il eut traversé le fleuve, je suis revenu à la
ville. »
À ces mots : « traversé le fleuve, » ils
baignés de larmes : « Oh ! douleur ! » et, continuant à gémir : « Nous
sommes frappés à mort ! » disaient-ils. Alors Soumantra entendit
courir autour de lui ces mots proférés
faut
joyeux dans
pourrions-nous, sans avoir dépouillé toute pitié, goûter encore
le plaisir dans ces grandes fêtes, où
parts ! Où sera désormais une chose agréable à ce peuple ? Quelle
chose,
Ainsi pensaient ''les foules de'' ce peuple autour de Soumantra, qui
évitait de blesser personne ''avec son char''. Il entendait aussi
les voix des femmes, qui, accourues à leurs fenêtres, disaient :
« Comment, ce malheureux ! il est revenu, après avoir quitté Râma ! »
Le cocher, navré de chagrin, avait recueilli dans sa route ces
paroles et
roi Daçaratha fixait sa résidence. Descendu promptement de son
char, il entra dans
dépouillée maintenant de son auguste splendeur et toute pleine
cour noyée dans la douleur.
Le roi jeta un regard de ses yeux noyés de pleurs à Soumantra, qui
couvert encore de la poussière du char : « Où est allé Râma ?
dis-moi, Soumantra ! où va-t-il habiter ? En quel lieu était ce digne
enfant de Raghou, quand il
extrême délicatesse, mon fils pourra-t-il supporter de
le sol même pour unique siége ? Ou comment dormira-t-il à ''ciel nu''
dans un bois, ce fils du maître de la terre ?
à la vive splendeur ? Quelles paroles
fait dire Sîtâ, cette femme vertueuse et dévouée à son époux ?
Raconte-moi les haltes, les discours, les festins de Râma, sans rien
omettre et de la manière que tout
parti de ces lieux pour habiter les forêts. »
Ainsi invité par
mais
depuis son départ de la ville
« Lorsque ces deux héros eurent disposé leurs cheveux en djatâ
et que, revêtus
traversé le Gange, ils marchèrent, la face tournée vers le
confluent. Ensuite, ô mon roi, à
voici que mes coursiers, émus
et suivant Râma de leurs yeux, poussent des hennissements plaintifs.
« Quand
mes deux mains jointes et creusées en patère, je suis revenu ici,
prince, malgré moi, dans la crainte
« Dans ces contrées, ô le plus noble des hommes, on voit les arbres
mêmes, avec toutes les feuilles, les bouquets de fleurs et
les pousses nouvelles, se faner, languissants
avec des eaux tristes et des ondes troublées : les étangs de lotus,
dépouillés de splendeur,
fanées. Les volatiles et les quadrupèdes, immobiles, fixant les yeux
sur un seul point et plongés dans leurs sombres pensées, oubliaient
deuil par les chagrins du magnanime, était sans gazouillement.
« Dans la ville, dans le royaume, entre les habitants de la cité,
parmi ceux des campagnes, je ne vois pas un être, ô mon roi, qui ne
« Cette ville sans joie, sans travail, sans prières ni sacrifices,
cette ville, résonnante
son que des sanglots ou des gémissements ; ta cité, avec ses hommes
tristes, malades, consternés, avec les arbres fanés de ses jardins,
elle est sans aucun resplendissement depuis
Après
de Soumantra, le monarque, saisi par une subite défaillance de son
esprit, tomba de son trône une seconde fois, semblable à un corps
gémissait ainsi
gisait hors de lui-même sur la terre, la mère de Râma se plaignait
sur un ton plus déplorable encore, tout affaissée sous un poids
beaucoup plus lourd de chagrin et
* * * * *
Ligne 1 402 ⟶ 1 394 :
Aussitôt que Râma, le tigre des hommes, fut parti avec Lakshmana
pour les forêts, Daçaratha, ce roi si fortuné naguère, tomba dans
une grande infortune. Depuis
semblable à Indra fut saisi par le malheur, comme
enveloppe le soleil au sein des cieux, à
éclipse. Le sixième jour
fameux, étant réveillé au milieu de la nuit, se rappela une grande
faute,
À ce ressouvenir, il adressa la parole à Kâauçalyâ en ces termes :
« Si tu es réveillée, Kâauçalyâ, écoute mon discours avec
attention. Quand un homme a fait une action ou bonne ou mauvaise,
noble dame, il ne peut éviter
la succession du temps.--Quiconque, dans les commencements des choses,
mal et faire le bien, est appelé un enfant par les sages.
« Jadis, Kâauçalyâ, dans mon adolescence, imprudent jeune homme,
fier de mon habileté à toucher un but et vanté pour mon adresse à
percer
il
coupable a mûri ce fruit de malheur, ''que je recueille
comme
qui en a bu la substance. ''Mais'' cette mauvaise action des jours
passés, je
homme boirait un poison.
« Je ne
moi-même que
saison des pluies arrivée répandait la joie dans mon âme.
« En effet, le soleil, ayant brûlé de ses rayons la terre et ravi
au sol tous les sucs humides, las de parcourir les régions du nord,
était passé dans
nuages délicieux couvrir tous les points du ciel, et les grues, les
cygnes, les paons
des nuages forçait toutes les rivières élargies à déverser leurs
flots
étroites. La terre, égayée par cette riche ondée, conçue au sein
des nuées, brillait sous sa verte parure de gazons nouveaux, où se
jouaient le paon et le coucou radié.
« Tandis que cette agréable saison marchait ainsi dans sa carrière,
arc à la main, je
de cette manière sur les rives désertes de cette belle rivière, où
bruit seul, grâces à ma grande habitude des exercices de
je me tenais caché dans les ténèbres, mon arc toujours bandé en
main, près de
la nuit, les quadrupèdes habitants des forêts. Là, dirigeant une
flèche du côté que
de tuer soit un buffle sauvage, soit un éléphant ou tel autre animal
venu au bord des eaux.
« Alors et comme il
entre les objets sensibles,
remplissait
éléphant. Moi aussitôt
bien empennée, et de
Destin, sur le point
« Dans le moment que mon trait lancé toucha le but,
voix jetée par un homme qui
suis mort ! Comment se peut-il
ascète de ma sorte ? À qui est la main si cruelle, qui a dirigé son
dard contre moi ?
le fleuve solitaire : qui est cet homme, dont le bras
flèche ! À qui donc ai-je fait ici une offense ? Cette flèche va
pénétrer, à travers le cœur expiré de son fils, dans le sein
même
sauvages au milieu de ce bois ! Cette fin malheureuse de ma vie, je la
déplore avec moins
et de ma mère, ces deux vieillards aveugles. Ce couple
chargé
mon trépas, ce couple misérable et sans appui ? Qui est
cœur méchant, de qui la flèche nous a frappés tous les trois, eux
et moi,
racines, de fruits et
« Il dit ; et moi, à ces lamentables paroles,
tremblant de la crainte que
échapper les armes que je tenais à la main. Je me précipitai
vers lui et je vis, tombé dans
infortuné, portant la peau
Lui, profondément blessé dans une articulation, il fixa les yeux
sur moi, ''non moins'' infortuné, et me dit ces mots, reine, comme
eût voulu me consumer par le feu de sa rayonnante sainteté : « Quelle
offense ai-je commise envers toi, kshatrya, moi, ''solitaire'', habitant
des bois, pour mériter que tu me frappasses
voulais prendre ici de
jours, sans appui dans la forêt déserte, ils attendent maintenant,
ces deux pauvres aveugles, dans
par ce trait seul et du même coup trois personnes à la fois, mon
père, ma mère et moi : pour quelle raison ?
aucune offense de nous ! Sans doute que ni la pénitence, ni la science
sainte ne produisent, je pense, aucun fruit sur la terre, puisque
mon père ne sait pas, homme insensé, que tu
même, quand il le saurait, que ferait-il dans
où le met sa triste cécité ? Il en est de lui comme
ne peut sauver à ''ses côtés'' un autre arbre que sape la hache ''du
bûcheron''. Va promptement, fils de Raghou, va trouver mon père et
raconte-lui cet événement fatal, de peur que sa malédiction ne te
consume, comme le feu dévore un bois sec ! Le sentier, que tu
vois, mène à
fléchis-le, de peur que, dans sa colère, il ne vienne à te maudire !
Mais, avant, retire-moi vite la flèche ; car ce trait au contact
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cœur, ferme la voie à ma respiration. Arrache-moi ce dard ! Que la
mort ne vienne pas me saisir avec cette flèche dans ma poitrine ! Je
ne suis pas un brahme ; ainsi, mets de côté la terreur
meurtre commis sur un brahmane. Un brahme, il est vrai, un brahme qui
habite ces bois,
« Voilà en quels termes me parla ce jeune homme, que
cette manière, gisant ainsi dans la Çarayoû, le corps mouillé
de ses ondes, poussant de longs soupirs et déchiré par
abattement.--Ensuite, hors de moi, je retirai à contre-cœur, mais
avec un soin égal à mon désir extrême de lui conserver la vie,
cette flèche entrée dans le sein de ce jeune ermite languissant.
Mais à peine mon trait fut-il ôté de sa blessure, que le fils de
hideusement ses yeux et rendit son dernier soupir.
« Quand le fils du grand saint eut quitté la vie, faisant crouler
entièrement consternée, car on ne pouvait douter que je ne fusse
tombé dans une calamité sans rivage.
« Après que
semblable au poison
vers
infortunés, aveugles,
deux oiseaux, les ailes coupées. Assis, désirant leur fils, ces deux
vieillards affligés
dans leur enfant, ils aspiraient au bonheur que ferait naître en eux
sa présence ! ''Tel'' je vis ce couple inquiet de pénitents se tenir
dans son ermitage, quand je
crime si grand que
« Mais ensuite, comme il entendit le bruit de mon pas,
fils ? Apporte-moi
bien attardé à jouer dans
fils, nous étions affligés
même ta mère, une chose qui te déplaise, pardonne et ne sois plus
désormais si longtemps, en quelque lieu que tu ailles. Tu es le pied
de moi, qui ne peux marcher ; tu es
pas ? »
« À ces mots,
le désir de voir son fils inspirait des paroles si touchantes, je
lui dis, agité par la crainte, les mains jointes, la gorge pleine de
sanglots, tremblant et
mais dont ma fermeté cherchait à soutenir la force : « Je suis un
kshatrya, on
chez toi, parce que
à tous les hommes vertueux.
arc à la main, sur les rives de la Çarayoû, épier les bêtes
fauves, que la soif conduirait à ses eaux, où mon plaisir était de
les atteindre sans les voir. Dans ce temps, le son
bruit'' et je blessai ton fils, croyant que
pleurs que lui arracha mon dard en lui perçant le cœur, je courus
tout tremblant au lieu ''
pénitent.
de moi, saint anachorète, et mon adresse à percer une bête, ''sans
la voir'', à son bruit seul, qui
cette flèche de fer, dont, ''hélas'' ! fut blessé ton fils. Après que
au ciel ; mais, avant, il avait déploré bien longtemps le sort de
vos saintetés.
conséquences de ma faute, je mérite que tu déchaînes contre moi ta
colère. »
« À ces paroles entendues, il demeura un instant comme pétrifié ;
mais, quand il eut repris
respiration, il me dit à moi, qui me tenais devant lui mes deux mains
humblement réunies : « Si, devenu coupable
tu ne me
même en eût porté le châtiment et je
tu avais commis un homicide sur un solitaire des bois, ce crime eût
bientôt précipité Brahma de son trône, où cependant, il est
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paradis fermerait ses portes à sept de tes descendants et sept de tes
ancêtres, si tu avais tué un ermite, sachant bien ce que tu faisais.
Mais comme tu as frappé celui-ci à ton insu,
tu
race entière des Raghouides
faudrait que tu vécusses toi-même !
« Allons, cruel ! conduis-moi vite au lieu où ta flèche a tué cet
enfant, où tu as brisé le bâton
cécité !
si toutefois je vis encore au moment de toucher mon fils pour la
dernière fois ! Je veux toucher maintenant avec mon épouse le corps
de mon fils baigné de sang, le djatâ dénoué et les cheveux épars,
ce corps, dont
« Alors, seul, je conduisis les deux aveugles, profondément
affligés, à ce lieu ''funèbre'', où je fis toucher à
comme à son épouse, le corps gisant de leur fils. Impuissants à
soutenir le poids de ce chagrin, à peine ont-ils porté la main sur
lui que, poussant
tomber sur leur fils étendu par terre. La mère, léchant même de sa
langue ce pâle visage de son enfant, se mit à gémir de la manière
la plus touchante, comme une tendre vache à qui
son jeune veau :
« Yadjnyadatta, ne te suis-je pas, disait-elle, plus chère que
la vie ? Comment ne me parles-tu pas au moment où tu pars, auguste
enfant, pour un si long voyage ? Donne à ta mère un baiser
maintenant, et tu partiras après que tu
que tu es fâché contre moi, ami, que tu ne me parles pas ? »
« Aussitôt le père affligé, et tout malade même de sa douleur,
tint à son fils mort, comme
touchant çà et là ses membres glacés :
« Mon fils, ne reconnais-tu pas ton père, venu ici avec ta mère ?
lève-toi maintenant ! viens ! prends, mon ami, nos cous réunis dans
tes bras ! De qui, dans la forêt, entendrai-je la douce voix me faire
une lecture des Védas, la nuit prochaine, avec un désir ''égal au
tien'', mon fils,
mon fils, apportera des bois la racine et le fruit sauvage à nous
deux, pauvres aveugles, qui les attendrons, assiégés par la faim ?
Et cette pénitente, aveugle, courbée sous le faix des années, la
mère, mon fils, comment la nourrirai-je, moi, de qui toute la force
seul maintenant. Ne veuille donc pas encore
demain, tu partiras, mon fils, avec ta mère et moi. Avant longtemps
le chagrin nous fera exhaler à tous les deux, abandonnés sans appui,
Ligne 1 642 ⟶ 1 634 :
mendierai, infortuné père, je mendierai moi-même, et portant mes
pas vers lui : « Dieu des morts, lui dirai-je accompagné par toi, fais
[Note 17 : Vivaswat, le soleil, père
« Qui, après la prière du soir et du matin récitée, après le
bain, après
dans ses mains, les touchera tout à
sensation agréable ? Parviens au monde des héros, qui ne retournent
pas ''dans le cercle des transmigrations'', comme il est vrai, mon fils,
que tu es un innocent, tombé sous le coup
mal ! Obtiens les mondes éternels des saints pénitents, des
sacrificateurs, des brahmes, qui ont rempli dignement
gourou, des héros enfin, qui ne renaissent pas dans un autre monde !
« Va dans ces mondes réservés aux anachorètes, qui ont lu
entièrement le Véda et les Védângas ; mondes où sont allés ces
rois saints Yayâti, Nahousha et les autres ! Entre dans ces mondes
ouverts aux chefs de maison qui ne cherchent point la volupté hors
des bras de leur épouse, aux chastes brahmatchâris, aux âmes
généreuses, qui distribuent en largesses des vaches, de
aliments et donnent même de la terre ''aux deux fois nés'' ! Va, mon
fils, va, suivi par ma pensée, dans ces mondes éternels où vont
Ligne 1 670 ⟶ 1 662 :
des ruisseaux de miel. »
« Quand
ces plaintes et
consternée, la cérémonie de
Aussitôt, revêtu
char aérien, le fils du saint ermite apparut et tint ce langage à
ses vieux parents :
« En récompense du service dévoué que
saintes personnes,
et du plus haut degré : bientôt vos révérences obtiendront
elles-mêmes ce désiré séjour. Vous
sort ; ce roi
trait lancé par son arc
« Quand il eut dit ces mots, transfiguré dans un corps divin,
lumineux, porté au sein des airs sur un char céleste
suprême, le fils du rishi monta au ciel. Mais, tandis que je
me tenais joignant les mains devant
« Comment se peut-il que tu sois né, homme vil et présomptueux, dans
la race des Ikshwâkides, ces rois saints, magnanimes et de qui la
gloire est célèbre ''en tous lieux'' ? Il
entre nous deux, ni au sujet
pourquoi, les choses étant ainsi, pourquoi
même flèche avec mon épouse ? Néanmoins, comme tu
fils
mais écoute-moi bien !
« De même que
supporter la douleur que
à la fin de ta carrière, tu quitteras la vie, appelant ton fils de
tes vains désirs !
« Chargé ainsi de sa malédiction, je revins à ma ville, et, peu de
temps après, le rishi même expira, consumé par la violence de
son affliction paternelle. Sans doute, la malédiction du brahme
''inconsolables'' pour mon fils précipite à sa fin le souffle de ma
vie.
« Reine, mes yeux ne voient plus ; ma mémoire elle-même vient de
hâte mon départ de cette vie. Si Râma venait me toucher, ou si
toute la vie, comme un agonisant qui aurait pu boire de
Le chagrin que son absence de mes regards fit naître dans mon âme
brise les éléments de ma vie, comme la grande furie des vagues rompt
les arbres qui croissent sur les rivages
qui, le temps de son exil au milieu des forêts accompli, verront de
leurs yeux Râma lui-même revenir dans Ayodhyâ, tel que Indra vient
Ligne 1 726 ⟶ 1 718 :
son retour des bois, il fera son entrée dans la grande cité !
« Ô fortunés, vous, qui pourrez contempler ce visage de Râma,
semblable à la reine des étoiles, ce visage pur, beau, gracieux, aux
dents charmantes, aux yeux comme les pétales du lotus ! Heureux
les hommes qui verront la face ''auguste'' de mon fils, dont la douce
haleine est égale au parfum du lotus quand il
Tandis que les souvenirs de Râma occupaient ainsi la pensée du
monarque, étendu sur les tapis de sa couche,
à la fin de la nuit, vers
fils ! » et tandis
des hommes rendit le souffle de la vie, si difficile à quitter,
souffle bien-aimé, que lui arrachait la violence du chagrin causé
par
étendu sur sa couche, se répandait en ces regrets sur
Râma, il exhala sa douce vie à
milieu de sa carrière.
* * * * *
Quand elle vit le monarque tombé dans le silence, après
fut ainsi lamenté, Kâauçalyâ désolée se dit : « Il dort ! » et ne
voulut pas le réveiller. Sans rien dire à son époux, elle, de qui
la fatigue du chagrin avait rendu la voix paresseuse, elle
de nouveau sur la couche, son âme saturée de tristesse par
son fils. Bientôt, lorsque la nuit fut écoulée et que fut arrivée
officiels du roi, se répandirent autour ''de sa chambre''.
Aussitôt, dans le gynœcée, à ces voix des chantres, des
panégyristes, des bardes, toutes les épouses du roi sortent
précipitamment du sommeil. On voit
femmes, et la foule de leurs eunuques, et ceux à qui leurs offices
respectifs imposent la fonction de se tenir, suivant leurs dignités,
près de la personne du roi. En même temps, les baigneurs, tenant
des urnes
dans leur ministère apportent aussi et les choses
pour attirer le bonheur, et quelque antidote efficace que pourrait
exiger telle ou telle circonstance. Ces habiles serviteurs
donc approchés du roi, immobile dans sa couche, les femmes se mirent
toutes à faire éclore son réveil dans la crainte de voir le
soleil monter sur
lumière''.
Mais quand, malgré tous leurs efforts mêmes pour le tirer du
sommeil, le monarque endormi ne se fut pas réveillé
le lever du soleil, ses épouses tombèrent dans une profonde
inquiétude.--Saisies de crainte, incertaines sur la vie du roi, elles
Ensuite, quand chacune eut touché le prince et reconnu que sa peur
changea pour elles en certitude. Consternées et toutes tremblantes
à la vue du roi mort, elles tombèrent alors en criant : « Hélas,
seigneur ! tu
À ce cri perçant de douleur, Kâauçalyâ et Soumitrâ endormies
se réveillèrent dans une grande affliction. « Hélas ! dirent-elles ;
hélas !
lèvent du lit en toute hâte, et, saisies
elles
Quand les deux reines eurent vu et touché leur époux, qui, tout
abandonné par la vie, semblait encore jouir du sommeil, leur immense
douleur
tous côtés les femmes du gynœcée se remirent de groupe en groupe
à crier au même instant, comme des bandes de pygargues effrayées.
Ligne 1 799 ⟶ 1 791 :
Dans un instant, ému, consterné, retentissant de plaintifs
gémissements et rempli
monarque, tombé sous
des siéges et des lits renversés, à
de cris lamentables, que les images du malheur envoyé, ''comme une
flèche'', dans cette royale maison.
Ensuite, après
les ministres, Vaçishtha le bienheureux ordonna ce
circonstance. Puis, quand il eut fait introduire le corps du roi de
Koçala dans une drôni[18], que le sésame avait rempli de son huile,
Ligne 1 813 ⟶ 1 805 :
sont allés depuis longtemps à la cour de leur aïeul maternel ? » En
effet, les ministres ne peuvent vaquer aux funérailles du monarque
en
corps inanimé du souverain.
[Note 18 : Bassin ou vaisseau de forme ovale.]
Aussitôt Vaçishtha, le plus saint des hommes qui récitent la
Ligne 1 822 ⟶ 1 814 :
Djayanta, et dit à ces trois messagers :
« Allez rapidement sur des chevaux légers à la ville, où
le palais du roi ''des Kékéyains'' ; et là, dépouillant vos airs
affligés, il vous faut parler à Bharata ''comme''
même de son père. « Ton père, ''lui direz-vous'', et tous les
ministres
« Hâte-toi de venir promptement ; quelque chose
importance réclame ici tes soins. » Arrivés là, gardez-vous bien
de lui apprendre en aucune manière, fussiez-vous interrogés même
Ligne 1 834 ⟶ 1 826 :
Il dit ; et, ces instructions données, les messagers, congédiés par
Vaçishtha se mettent en route,
vitesse soutenue par la vigueur.
Après sept nuits passées dans sa route, Bharata, le plus éminent
des hommes qui possèdent un char, dit,
de la cité en deuil, ces paroles au conducteur de son char : « Cocher,
la ville
mouvements très-joyeux : ses jardins et ses bosquets sont flétris ; sa
splendeur est comme effacée.
« Je vois même étalés maintenant partout de lugubres symboles :
agite maintenant tout mon corps ? »
Tandis
dans cette ville délicieuse, au milieu des hommages que rendaient à
sa personne les gardes et les concierges des portes.
Ligne 1 854 ⟶ 1 846 :
Quand il vit, ''dans son intérieur'', cette noble ville, souillée dans
ses portes et ses ventaux brunis de poussière ; cette ville, pleine
ses édifices, ses carrefours solitaires, il fut encore plus accablé
de chagrin. Sous
et qui
cité, le jeune magnanime entra dans le palais de son père, la tête
courbée sous le poids de son ''triste'' pressentiment.
Ligne 1 863 ⟶ 1 855 :
Étant donc entré dans ce palais riche, admirable aux yeux et
semblable au palais de Mahéndra, Bharata ne vit pas son père. Et,
comme il
Bharata de sortir aussitôt pour aller dans
mère. À peine eut-elle vu son fils arrivé, Kêkéyî
précipitamment de son siége, les yeux épanouis par la joie. Entré
Bharata, courbant la tête, prit ses pieds ''avec respect''. Elle,
à son tour, de baiser Bharata sur la tête, de serrer son fils
Ligne 1 873 ⟶ 1 865 :
lui adresser les questions suivantes :
« Combien as-tu compté de jours, mon fils, pour venir
ville où règne ton grand-père ? As-tu fait un heureux voyage ? Es-tu
même venu sans fatigue ? Ton aïeul est-il bien portant, ainsi que
Ligne 1 881 ⟶ 1 873 :
rapidement à sa mère toute la suite de son voyage et de son retour.
« Il y a
père de ma bonne mère se porte bien avec mon oncle Youdhadjit. Mou
aïeul
amitié ; mais la fatigue de mes équipages
dans ma route, tant je suis venu rapidement, plein de hâte, stimulé
par les messagers envoyés du roi, ''mon père'' ! Mais daigne maintenant
répondre aux demandes que je désire
« Pourquoi ne voit-on pas, comme à
de citadins joyeux, mais pleine
gaieté, dépouillé entièrement de ses parures et muet partout de ce
murmure qui accompagne la récitation des Védas ? Pourquoi dans la rue
royale ce peuple
serait allée dans
À ces mots de Bharata, Kêkéyî répondit, sans rougir, avec
ce langage horrible, mais où quelque douceur infusée tempérait
grand monarque, ton père,
dans le ciel, que lui ont mérité ses bonnes œuvres. »
Ligne 1 907 ⟶ 1 899 :
sapé au tronc.
« Relève-toi promptement, Bharata, et ne veuille pas te désoler : car
les hommes de ta condition, qui ont médité sur les causes et sur les
effets du chagrin, ne
Ton père est descendu dans la tombe, après
terre avec justice, sacrifié suivant les rites, versé des largesses
et des aumônes, tu
''ton père'', attaché
fils, à déplorer sa fortune. »
Elle dit : à ces mots déchirants de Kêkéyî, Bharata, dans
une extrême douleur, adressa de nouveau ces paroles à sa mère :
« Peut-être, ''me disais-je'', le roi va-t-il sacrer ''le vaillant''
Râma : peut-être va-t-il célébrer un sacrifice : » telles étaient
les espérances dont se berçait mon esprit et qui me faisaient
accourir en toute hâte.
«
arrivé ? Heureux, vous, Râma et Lakshmana, qui avez pu environner mon
père de vos tendres soins !
«
plus excellent des sages, Daçaratha, mon père ? »
Il dit, et Kêkéyî interrogée tint alors ce langage à Bharata :
« Magnanime fils de roi, écoute donc la vérité entièrement ; et,
ce récit fait, prends garde, ô toi qui donnes
la vie, ton père, la justice elle-même incarnée,
dans le ciel : je vais te raconter en même temps ce que ton père
a dit : « Ah ! mon fils Râma !
fils ! » et, quand il eut plusieurs fois jeté cette plainte,
alors que ton père a quitté la vie. Ton père
ciel, après
dernière : « Heureux les hommes qui pourront voir mon fils Râma de
retour ici des bois avec Sîtâ et Lakshmana, une fois expiré le
temps convenu ! »
À ces mots, Bharata que la crainte
comme un poison mortel, interrogea de nouveau sa mère : « Où Râma
demeure-t-il maintenant ?
pourquoi
et Lakshmana ont-ils suivi Râma dans les forêts ? »
À ces questions, Kêkéyî de répondre un langage plus horrible
encore, bas, odieux même, tout en croyant ne dire à son fils
chose agréable : « Couvert
de sa Vidéhaine, et suivi de Lakshmana, Râma
les bois sur
exiler ce frère, ''ton rival'', au sein des forêts. « Quand ton père
quitta ce monde pour le ciel. »
À ces mots, Bharata, soupçonnant ''malgré lui'' un crime dans une
telle mère, Bharata, qui aspirait de tous ses désirs à la pureté
de sa famille, se mit à
sage
digne frère
offense, pour laquelle mon père a banni de sa présence un fils plus
cher à ses yeux que la vie même ! »
Ensuite de ces paroles entendues, Kêkéyî, racontant son action
et
Bharata : « Il
qui que ce soit.
« Il a mérité
son devoir : aussi le roi désirait-il sacrer son fils aîné comme
associé à sa couronne.
« ''Mais'', aussitôt parvenue à moi cette nouvelle que le monarque
avait conçu une telle pensée, je conjurai
''
de Râma dans les forêts pendant neuf ans ajoutés à cinq années,
et ton père a banni Râma hors de la ville.
« Ainsi donc, saisis-toi du royaume ; fais produire son fruit à ma
peine ; remplis, ''terrible'' immolateur de tes ennemis, remplis de joie
le cœur de tes amis et le mien ! Va, mon fils, va trouver bien vite
Ligne 1 990 ⟶ 1 982 :
les honneurs funèbres que tu dois à ton père, fais-toi sacrer
aussitôt, suivant les rites, comme souverain de cet empire, qui
Ayant donc ouï dire à sa mère que son père était mort et ses deux
Ligne 1 999 ⟶ 1 991 :
de mal à personne.
« Pourquoi, si tu veux, grâce à ton désir ''impatient'' du trône,
aller au fond des enfers, pourquoi
dans ta chute ?
« Est-ce que ton époux avait commis une offense envers toi ? Quelle
injustice devais-tu au magnanime Râma, pour les châtier également
tous deux, celui-là par la mort, celui-ci par
« Puisse être ce monde pour toi, puisse être même pour toi
monde stérile de bonheur, homicide fatale de ton mari ! Va dans
les enfers, Kêkéyî, écrasée par la malédiction de ton époux !
Hélas ! je suis foudroyé, je suis anéanti par ton avide ambition du
royaume !
quand tu
père, séparé de mon frère, qui était un second père à mes yeux,
* * * * *
Dès
souverain qui, ''vivant'', ressemblait au grand Indra lui-même. Cette
''illustre'' assemblée
affligé, ses yeux remplis de larmes, plongé dans le chagrin, étendu
sur la terre et semblable à un homme qui
Vaçishtha, le vénérable saint, dit à cet enfant désolé de
Raghou, qui, le front baissé, traçait des lignes sur le sol avec
la pointe du pied : «
nécessairement acquitter est appelé un sage par les maîtres de la
science. Ainsi, revêts-toi de fermeté, rejette le chagrin de ton
cœur, et veuille bien célébrer sans délai,
obsèques de ton père. ''Oui'' ! il a fini comme un être sans appui,
ce ''vigoureux'' appui du monde, ton père, juste comme la justice
elle-même. ''Alors'', nous avons agité cette question : «
pas un moyen de procéder aux funérailles sans Bharata ? » et nous
avons déposé le corps du feu ''roi'', ton père, dans un vaisseau
royales obsèques.
« Remets la force dans ton âme, Bharata, et ne sois pas un esprit
faible. La mort est forte : on ne peut la vaincre, fils de Kakoutstha ;
nous tous bientôt nous ne serons plus : cette grande affliction ne te
sied donc pas ! »
À ces paroles de
intelligents, jeta les yeux sur Vaçishtha, et, plus affligé encore,
lui répondit en ces termes : « Quand ta sainteté me parle ainsi,
''pieux'' ermite, je sens mon âme se déchirer en quelque sorte.
conduisez-moi où est le roi mon père :
de célébrer là ses funérailles, aidé par vous ; si toutefois
il est possible que mon cœur
mille fragments ! Que vos éminences me fassent donc voir mon père,
''hélas'' ! privé de la vie. »
Ligne 2 061 ⟶ 2 053 :
père ''gisant ainsi'' la vie éteinte et la splendeur effacée, il jeta
ce cri : « Hélas ! mon roi ! » et tomba sur la face de la terre. On eût
dit un homme, de qui
Mais, quand il a recouvré la connaissance, il tourne les yeux vers
son père, et, tout plein de tristesse, lui tient ce langage comme
voici arrivé sur ton ordre avec hâte, moi Bharata, et Çatroughna
majesté : ainsi fait mon oncle Youdhadjit, prosternant sa tête devant
toi.
quelque pays, tu me faisais monter sur ton sein, roi des hommes, tu
me donnais sur le front un baiser, tu me comblais des caresses de ton
amour ? Et pourquoi, dans ce moment, ne
à mon arrivée ? Jamais je
regarde-moi donc maintenant avec bienveillance.
« Heureux ce Râma, par qui ton ordre fut exécuté, roi de la terre !
Heureux encore ce Lakshmana, qui a suivi Râma dans
infortune et souillure à moi par cela même que, pénétré
vive douleur, tu as quitté la vie plein de ressentiment contre moi !
Sans doute, Râma et Lakshmana ne connaissent point ta mort ; car ils
auraient quitté les bois à
eût amenés dans ces lieux !
« Si, pour la faute de ma mère, je te suis maintenant odieux, roi
des hommes ; voici Çatroughna ; daigne au moins lui dire en ce moment
quelque chose. »
Ligne 2 092 ⟶ 2 084 :
affliction. Ce fut alors que le plus vertueux des hommes qui murmurent
la prière, Vaçishtha et Djâvâli même avec lui tinrent ce discours
au gémissant Bharata, que torturait sa douleur : « Ne
aux larmes, sage Bharata ! le maître de la terre ne doit pas être
plaint. Veuille bien
calme. Les parents et les amis, qui pleurent
''désolée'', ne font-ils pas tomber du ciel par la chute de ces
larmes, fils de Raghou,
Swarga ? »
À ces mots de Vaçishtha, Bharata, qui
Bharata, le plus éloquent des êtres qui ont reçu la voix en
partage, secoua ce ''trop vif'' chagrin et répondit en ces termes :
« Cet amour si fort de mon cœur à
en quelque sorte
sages conseils de vos saintetés, mes ''vénérables'' institutrices,
je dépose mon chagrin et je vais célébrer, ''comme il faut'', les
Ligne 2 114 ⟶ 2 106 :
''officiels'' de réveiller Bharata dans le sommeil et de chanter ses
louanges avec une voix mélodieuse. Soudain les tambours sont battus
à grand bruit, et,
résonner une foule de conques et de flûtes aux harmonieux concerts.
Le bruit des instruments à la voix si grande
pour ainsi dire, toute la ville, réveilla Bharata,
le trouble du chagrin.
Ligne 2 124 ⟶ 2 116 :
Çatroughna : « Vois, Çatroughna, quel écrasant déshonneur Kêkéyî
a fait tomber sur ma tête innocente par cette action blâmée dans
tout
avait mise au front de mon père, ''flotte incertaine'' maintenant
jouet ''du vent et'' des flots. »
Après
monté sur
tous les ministres : « Tu vois rassemblés devant toi et chargés des
choses nécessaires aux funérailles du roi tous les notables de la
ville et tes sujets du plus haut rang.
« Lève-toi promptement, Bharata !
aucune perte du temps !
« Dépose le roi des hommes dans cette bière, que tu vois là ;
enlève sur tes épaules ton père couché dans le cercueil ; puis,
emmène-le promptement hors de ces lieux. »
Ligne 2 145 ⟶ 2 137 :
contempla de tous les côtés ce corps du maître de la terre. Mais
alors il ne put dompter la fougue de son désespoir, soulevé comme la
fureur de
Quand il eut déposé le grand roi dans le cercueil, il para le
corps et jeta sur lui une robe précieuse, dont il couvrit l'''auguste
défunt'' tout entier. Il étala ensuite une guirlande de fleurs sur
les restes de son père,
encens divin ; puis il répandit ''à pleines mains'' autour
par tous les côtés des fleurs odorantes
souleva le cercueil, assisté par Çatroughna, et le porta désolé,
tout en larmes et répétant à chaque pas : « Où es-tu, mon roi ! Il
signe de Vaçishtha, les serviteurs obéissants prirent le cercueil,
Les domestiques du roi, tous pleurant et
chagrin, marchaient devant la bière, tenant un parasol blanc, un
chasse-mouche et même un éventail. Devant le monarque
flamboyant le feu sacré, que les brahmes et Djâvâli, leur chef,
avaient commencé par bénir. Ensuite venaient, pour en distribuer les
richesses aux gens malheureux et sans appui, des chars pleins
de pierreries. Là, tous les serviteurs du roi portaient des joyaux
de mainte espèce, destinés pour être distribués en largesses
aux funérailles du maître de la terre. Devant lui marchaient les
poëtes, les bardes et les panégyristes, qui chantaient
douce les éloges décernés aux bonnes actions du monarque.
Alors Bharata et Çatroughna se chargent du cercueil et
baignés de larmes, en proie à la douleur et au chagrin.
Arrivés sur les bords de la Çarayoû, dans un lieu solitaire, dans
un endroit gazonné
construire le bûcher du roi avec des bois
Un groupe
''glacé'' du monarque et le coucha sur le bûcher. Quand ils eurent
élevé sur le bois entassé le dominateur de la terre, vêtu avec une
robe de lin, les brahmes
sacrifice.
Ensuite, les chantres du Rig-Véda nettoient ces vases du sacrifice
avec un faisceau
aussitôt de toutes parts dans ce bûcher la cuiller et les vases, les
anneaux de la colonne victimaire, les graminées kouças, le pilon et
le mortier, accompagnés avec les deux morceaux de bois qui, frottés
Après
cérémonies et les hymnes saints, on étala tout à
roi un grand festin de mets divers. Cela fait, Bharata, aidé de ses
parents, ouvrit avec la charrue, ''en commençant'' à
sillon pour enceindre la terre où
ensuite il mit en liberté, suivant les rites, une vache avec son
veau, et, quand il eut arrosé de tous côtés la pile funèbre avec
la graisse,
sa main le feu au bûcher. Tout à coup la flamme se déroula, et le
feu, développant ''ses langues'' flamboyantes, consuma le corps du roi
Ligne 2 204 ⟶ 2 196 :
Assisté de la foule, Bharata, de sa main droite, joncha le bûcher
douleur, il se prosterne contre la face de la terre, adorant les pieds
de son père. Quelques-uns de ses amis le prennent dans leurs bras
et font relever malgré lui ce fils malheureux, aux formes toutes
empreintes
Mais, aussitôt
père, il poussa des cris, ses bras levés au ciel, et
nouveau sous le poids de sa douleur.
Vaçishtha fit relever Bharata et lui tint ce discours : « Ce monde est
continuellement affligé par
lamenter pour une condition, qui existe de toute nécessité,
pas digne de toi ! Tout ce qui est né doit mourir ; tout ce qui est
mort doit renaître : ne veuille donc plus te désoler pour deux choses
à la fatalité desquelles nul homme ne peut dérober sa tête ! »
Soumantra lui-même, tandis
gisant dessus la face de la terre, lui parla aussi de cette loi qui
soumet tous les êtres à la vie et à la mort.
Pendant
ministres exhortèrent ces deux nobles frères,
larmes, à faire la cérémonie de
Tandis que ce magnanime Bharata donnait
on vit les fleuves saints, la Vipâçâ, et le Çatadrou, et la
Gangâ, et
autres cours
Bharata, aidé par ses amis, rassasia avec
saintes
Après lui, tous les habitants de la ville, et les ministres, et le
pourohita de réjouir, suivant le rite, ces mânes du monarque avec
une libation
fait la cérémonie de
à consoler Bharata, de qui
chagrin. Ensuite, accompagné et consolé par eux, celui-ci reprit le
chemin
mainte et mainte fois.
Entré dans la demeure paternelle,
de la terre avec un lit
resta couché dix jours, sa pensée continuellement fixée sur la mort
de son père.
Quand le dixième jour fut écoulé, le fils du roi
offrit au mânes ''de son père'' les oblations funèbres du douzième
et même du treizième jour. Alors, dans ces royales obsèques, il
Ligne 2 260 ⟶ 2 252 :
Aussitôt que fut expiré le treizième soleil et terminée la
cérémonie, qui est immédiate à la fin de ce jour, tous les
ministres
« Ce monarque, qui était notre seigneur et notre gourou,
allé dans le ciel, après
fils, et Lakshmana même. Fils de roi, monte sur le trône, où le
droit
tombe, faute de maître, dans une triste infortune. »
À ces mots, ayant touché les choses du sacre en signe de bon augure,
Bharata dit alors aux ministres du feu roi : « Le trône dans ma
famille a toujours, depuis Manou, légitimement appartenu à
des frères : il ne sied donc point à vos excellences de me parler ce
langage, comme des gens ''de qui la raison est'' troublée. Râma ; celui
des hommes qui sait le mieux à quels devoirs sont obligés les rois ;
Râma aux yeux de lotus mérite, et comme
par ses belles qualités,
en choisir un autre ;
en ses quatre corps :
mon frère, ce rejeton vertueux de Raghou. Que ''nos'' ouvriers me
fassent des routes unies dans les chemins raboteux ; et que des hommes
Ligne 2 285 ⟶ 2 277 :
Il dit : alors tous les ministres du feu roi, le poil hérissé de
joie, répondirent à Bharata, qui tenait un langage si bien assorti
au devoir : « Daigne Çri, ''appelée
protéger, toi, digne enfant de Raghou, qui nous fais entendre ces
paroles et qui veux rendre la couronne à ton frère aîné ! »
Joyeux de ce discours plein de sens,
lèvres, les conseillers et les membres de
à Bharata : « Ô toi, le plus noble des hommes, toi, que le peuple
environne de son amour, nous allons, suivant tes ordres, commander à
des corps
* * * * *
Ligne 2 300 ⟶ 2 292 :
hâtent de faire leurs adieux à ceux qui doivent marcher dans cette
excursion, et chacune presse ''vivement'' le départ de son époux.
Bientôt les généraux viennent annoncer que
prête avec ses hommes de guerre, ses chevaux, ses voitures attelées
de taureaux et ses admirables chars légers. À cette nouvelle que
« Fais promptement avancer mon char ! » dit-il à Soumantra, debout
à son côté. À peine eut-il reçu
le char, attelé des coursiers les plus magnifiques.
Ligne 2 315 ⟶ 2 307 :
Ensuite le beau jeune prince, conduit par le désir de revoir enfin
Râma, se mit en route, assis dans un char superbe, attelé de chevaux
blancs. Devant lui
montés sur des chars semblables au char du soleil et traînés par
des coursiers rapides. Dix milliers
toutes les règles, suivaient Bharata dans sa marche, Bharata, les
délices de la race du grand Ikshwâkou. Soixante mille chars de
guerre, pleins
Bharata dans sa marche, Bharata, le fils de roi aux forces puissantes.
Cent mille chevaux montés de leurs cavaliers suivaient Bharata
dans sa marche, Bharata, le fils de roi et le descendant illustre de
''
On voyait sur des chars au bruit éclatant
et Soumitrâ, et
allaient'' ramener ''le bien-aimé'' Râma.
Ligne 2 333 ⟶ 2 325 :
nombreuse'', arrivée près du Gange et campée sur les bords du
fleuve, dit ces paroles à tous ses parents : « Voici de tous les
côtés une bien grande armée : je
est répandue ici et là ''dans un immense espace'' !
Ikshwâkides : on
montagnes. Bharata irait-il chasser ? Veut-il prendre des éléphants ?
Ou viendrait-il nous détruire ? En effet, aucune force
capable de résister à cette armée ! Hélas ! sans doute, par le
désir
Râma, que Daçaratha, son père, a banni dans les forêts ! Car la
beauté du trône est capable de séparer, dans un instant, des
cœurs le plus étroitement unis par
doute
maître, mon parent, mon ami, mon gourou :
je suis accouru vers ce fleuve du Gange. »
Ligne 2 352 ⟶ 2 344 :
ces mots à tout son cortége :
« Si
de Râma,
traversée du Gange ne sera point heureuse !
« Dans ce jour même, ou je mettrai fin à une chose des plus
difficiles pour le bien de Râma ; ou je serai gisant sur la terre,
couvert de blessures et souillé de poussière. ''Mais non'' ! je saurai
bien repousser devant moi cette armée, qui marche avec tant de
coursiers et
une œuvre utile à mon cher et magnanime Râma, de qui les nombreuses
vertus ont enchaîné mon cœur ! »
Alors Gouha prit avec lui des présents, des poissons, de la viande,
des liqueurs spiritueuses, et vint trouver Bharata. Quand
cocher, fils
Nishâdas, il annonça
bienséances de la modestie, cette visite à Bharata : « Environné
par un millier de ses parents, Gouha vient ici te voir :
vieillard ; il est ami de Râma, il connaît tous les secrets de la
forêt Dandaka. Ainsi, reçois-le en ta présence, lui que
de bienveillantes dispositions : ''il te dira, ce que'' sans doute il
sait, en quels lieux habitent Râma et Lakshmana. » À ces paroles de
Soumantra, le prince intelligent dit alors au conducteur de son char :
« Que Gouha soit donc introduit en ma présence ! »
Joyeux de cette permission accordée, le roi des Nishâdas, environné
de ses parents, Gouha se présenta devant Bharata, et,
lui tint ce langage : « Ce lieu est tout à fait, pour ainsi dire, sans
aucune maison et dépourvu ''des choses nécessaires'' ; mais voilà,
''non loin
maison, ''qui est la'' tienne, ''
Nous avons là des racines et des fruits, que mes Nishâdas ont
recueillis, de la chair boucanée ou fraîche, et beaucoup
aliments variés.
vainqueur des ennemis.
comblant de plaisirs variés au gré de tes désirs ; tu pourras
demain, au point du jour, continuer ton voyage. »
Ligne 2 392 ⟶ 2 384 :
À ces mots du roi des Nishâdas, Bharata, ce prince à la grande
sagesse, répondit à Gouha ces paroles, accompagnées de sens
et
satisfasses en cela même que tu veux bien, toi, mon gourou vénéré,
traiter avec honneur une telle armée de moi. » Quand le prince à
la vive splendeur eut parlé dans ces termes à Gouha, le fortuné
Bharata dit encore ces mots au roi des Nishâdas : « Par quel chemin,
Gouha, irons-nous à
région pleine de marécages
difficile à suivre et même bien impraticable. »
Quand il eut ouï ces paroles du sage fils des rois, Gouha, de qui les
sens étaient accoutumés aux impressions de ces forêts, joignit
les mains et lui répondit en ces termes : « Mes serviteurs,
poing, vont te suivre, attentifs à tes ordres ; et, moi-même, je veux
pas ennemi attaquer Râma aux bras infatigables ? En effet, ton
armée, comme je la vois, infiniment redoutable, excite en moi cette
inquiétude. »
À Gouha, qui parlait ainsi, Bharata pur à
langage
moi une telle infamie ! Ne veuille pas me soupçonner ''
à
égal devant mes yeux à mon père. Je marche, afin de ramener des
forêts,
pensée ne doit pas entrer dans ton esprit : cette parole que je dis
est la vérité. »
Le visage rayonnant de plaisir à ce langage de Bharata, le roi des
Nishâdas répondit ces mots à
Je ne vois pas, sur toute la face de la terre, un homme semblable
à toi qui veux abandonner un empire tombé dans tes mains sans nul
effort. Ta gloire, assurément, ô toi, qui veux ramener dans Ayodhyâ
ce Râma précipité dans
accompagnera la durée des mondes ! »
Tandis que les deux rois
plus
Quand il eut habité sur la rive de la Gangâ cette nuit seule,
Bharata, le magnanime, étant sorti de sa couche à
« Lève-toi ! dit-il à Çatroughna ; lève-toi ! la nuit est passée :
pourquoi dors-tu ? Vois, Çatroughna, le soleil, qui se lève, qui
chasse les ténèbres et qui réveille la fleur des lotus ! Amène-moi
promptement Gouha, qui règne sur la ville de Çringavéra :
héros, qui fera passer le fleuve du Gange à cette armée. »
À ces mots, Çatroughna, obéissant à
Bharata, dit à
magnanime parlait encore, que Gouha vint, joignit ses mains en coupe
et
sur la rive du Gange, noble enfant de Kakoutstha ? Es-tu, ainsi que
ton armée, dans un état parfait de santé ? Mais cette demande est
''moins''
effet,
par ta ''pieuse'' tendresse,
ton père assiègent continuellement ta pensée ; car les peines de
À la suite de ces mots,
à Gouha,
affectueux désir : « Roi, tu nous combles
traverser le Gange sur de nombreux vaisseaux. »
Ligne 2 459 ⟶ 2 451 :
en toute hâte vers sa ville, et là : « Réveillez-vous, mes chers
parents ! Levez-vous ! Que sur vous descende la félicité ! Mettez à
flot des navires ! Je vais passer
À ces mots, tous se lèvent avec empressement, et, sur
même du monarque, ils vont de tous les côtés rassembler cinq cents
navires.
Ensuite, Gouha fit amener un esquif magnifique, couvert
jaune-pâlissant et sur lequel, résonnant de joyeux concerts,
flottait un drapeau marqué du bienheureux swastika[19]. Dans ce
navire
immense, et Kâauçalyâ, et Soumitrâ, et les autres épouses du feu
roi.
[Note 19 :
Z redressés, qui se croisent
droit. Cet emblème a fait un grand chemin dans toute
car on le trouve sur des vases étrusques, des glyptes égyptiens et
même des pierres sépulcrales dans les catacombes de Rome.]
Ligne 2 486 ⟶ 2 478 :
Quand Bharata eut traversé le Gange avec son infanterie, avec ses
troupes montées, il dit, sous
à Gouha : « Par quelle région nous faut-il gagner la contrée où se
tient ''
qui as toujours vécu au milieu de ces forêts. »
Ces paroles entendues, Bharata eut cette réponse de Gouha, pour qui
« À partir
forêt ''du confluent'', toute remplie par les multitudes variées des
oiseaux, encombrée de feuilles tendres et vertes, qui tombent rompues
sous le pied des habitants de
de lotus. Fais halte là, prince auguste ; ensuite, que ta route se
fléchisse vers
forêt, à la distance
À Gouha, qui tenait ce langage : «
avec modestie Bharata, et,
paroles aux premières : « Va, mon gracieux ami ; retourne chez toi
avec tous tes parents : tu
accompagné, et tes vertus ont gagné toute mon affection. Tu as
dignement honoré dans ma personne ton amitié pour mon frère,
le sage Râma ; et tu
dévouement, ta bienveillance et ton amour. »
prince fit commander la halte de toute son armée et
accompagné des ministres. Instruit des bienséances, il marchait à
pied derrière le grand-prêtre du palais, sans armes, sans escorte
et vêtu
très-longue, sa vue ne laissa rien échapper de cet ermitage, orné
solitude soigneusement nettoyée, resplendissante de la beauté
des forêts, embellie par un bosquet de bananiers, toute pleine de
gazelles et de reptiles innocents, close enfin
basse, qui semblait ''en ce moment'' la porte ouverte du paradis même.
Arrivé sur le seuil de cet ermitage, à la suite du grand-prêtre,
Bharata vit
nimbe
de Raghou suspend
avec le pourohita. À peine
aperçu Vaçishtha,
à ses disciples : « ''Vite'' ! la corbeille de
Dès que Vaçishtha se fut mis face à face avec lui et que Bharata
derrière le pourohita ce fils du roi Daçaratha. Le saint, qui était
le devoir, ''pour ainsi dire'', en personne, leur offrit à tous les
deux sa corbeille hospitalière, de
boire, des fruits, et répondit par ''
de toute leur suite.
« Permets que je
rafraîchissements
ne
présents hospitaliers que
connais, reprit
manière que tu sois traité chez nous, il plaira toujours à ton
amitié pour moi
à toute cette armée, ''qui marche à'' ta ''suite'' : ce me sera une joie
de penser, noble prince,
« Pourquoi donc as-tu jeté loin
Alors il entra dans la chapelle de son feu sacré, but de
se purifia, et, comme il avait besoin de tout ce
« Je veux donner un banquet à mes hôtes, dit-il au céleste ouvrier
en bois venu en sa présence.
festin ! Fais couler ici toutes les rivières de la terre et du ciel
même, soit
à
soient bien apprises à rouler du vin au lieu
autres coule une onde fraîche, douce, semblable pour le goût au suc
tiré de la canne à sucre !
Viçvâvâsou, Hâhâ, Houhou, et les Apsaras célestes, et toutes
les Gandharvîs, Gritâtchî, Ménakâ, Rambhâ, Miçrakéçî,
Ligne 2 568 ⟶ 2 560 :
servent Brahma lui-même à la splendeur immense ! Je les appelle ici
tous avec Tombourou et leur gracieux cortége ! Ton œuvre à toi,
Viçvakarma,
et tout rempli de fruits divers !
« Que la lune me donne ici les plus savoureux des aliments, toutes les
choses que
en nombre infini et dans une grande variété, toutes les sortes
de viandes et de breuvages, toute la diversité des bouquets ou des
guirlandes ; et
et toutes les espèces de liqueurs spiritueuses ! »
Tandis que
tenait encore son âme plongée dans la contemplation, toutes ces
divinités arrivèrent dans son ermitage, famille par famille.
Ligne 2 590 ⟶ 2 582 :
Dieux chantent, et les Gandharvas font parler en sons mélodieux la
vînâ. Formée de cadences égales et liées entre elles avec art,
cette musique, allant
éthéré, la terre et les oreilles de tous les êtres animés.
Quand la divine symphonie eut cessé de couler par le canal enchanté
des oreilles, on vit au milieu des armées Viçvakarma donner
à chacune sa place dans ces lieux fortunés. La terre
''
et se couvrit de jeune gazon, qui semblait un pavé de lapis-lazuli
au fond
arbres à pains, des citroniers, des myrobolans emblics, des jambous
et des manguiers, parés tous de leurs beaux fruits.
Ligne 2 605 ⟶ 2 597 :
bâtiments, des écuries destinées aux coursiers, des étables pour
les éléphants, de nombreuses arcades, une multitude de grandes
maisons, une foule de palais et même un château royal, orné
majestueux portique, arrosé avec des eaux de senteur, tapissé de
blanches fleurs et semblable aux masses argentées des nuages. Quatre
Ligne 2 617 ⟶ 2 609 :
longs bras, fils de Kêkéyî, entra dans cette demeure étincelante
de pierreries. Les ministres, sur les pas du pourohita, suivirent tous
Bharata et furent émus de joie à
dans ce palais. Là, accompagné de ses ministres, le rejeton fortuné
de Raghou
l’ombrelle.
Dans
devant son jeune hôte toutes les rivières, coulant sur une vase de
lait caillé. Une ''sorte'' de boue jaune pâle enduisait les rivages
aux deux bords et se composait
infinie, produits tous grâces à la volonté du saint ermite. Au
même temps, ornées de leurs divines parures, affluèrent devant son
hôte les chœurs des Apsaras, nombreux essaims envoyés par le Dieu
des richesses, femmes célestes au nombre de vingt mille, pareilles
à
saisi par
Nandana.
Ligne 2 638 ⟶ 2 630 :
Gandharvas, chantèrent devant Bharata ; et ''les plus belles des
bayadères célestes'', Alamboushâ, Poundarikâ, Miçrakéçî,
Vâmanâ charmèrent ses yeux avec leurs danses, à
Bharadwâdja. Il
pas une guirlande aux riants bocages du Tchaîtratha,
paraître aussitôt dans le Prayâga, dès que
parlé.
Les çinçapas, les myrobolans emblics, les jambous, les lianes et
tous les autres arbres de la forêt avaient pris en ce moment les
formes de femmes charmantes dans
'' « Allons ! disaient-elles ; tout est prêt ! '' Que
fantaisie du lait, de la sourâ mêlée
Toi, qui désires manger, savoure ici à ton gré les viandes les plus
exquises ! »
Ligne 2 661 ⟶ 2 653 :
aux chameaux, à la race de Sourabhî. Un ordre est en vain donné
par les plus éminents guerriers, héros aux longs bras, issus même
éléphant.
Rassasiés de toutes les choses que
sandal rouge, ravis ''
Apsaras, les gens de
voulons plus retourner dans Ayodhyâ ! Nous ne voulons plus aller dans
la forêt Dandaka ! Adieu Bharata ! Que Râma fasse comme il voudra ! »
Ainsi parlaient fantassins, cavaliers, valets
combattant sur des ''chars ou des'' éléphants. Des milliers
partout
Quand ils avaient mangé de ces aliments pareils à
saveurs et des nourritures célestes
en eux la moindre envie
entièrement
Les éléphants, les chameaux, les ânes, les taureaux, les chèvres,
les brebis, ''en un mot'', tous les quadrupèdes et les volatiles, si
différents
repus
point des habits propres, qui eût faim, qui eût une ordure à son
corps : il
cheveux fussent imprégnés de poussière.
Aux quatre flancs des troupes stagnaient des lacs sur un limon de lait
caillé, des fleuves roulaient dans leurs ondes la réalisation de
tous désirs ; les arbres stillaient du miel. Des étangs
pleins de rhum, environnés, là par des monceaux de viandes cuites,
rôties ou bouillies de perdrix, de paons, de gazelles, de chèvres
mêmes et de sangliers, ici par des amas de mets exquis, les plus
délicats, assaisonnés avec un extrait de fleurs ou nageant dans les
flots ''
Çà et là se tiennent plusieurs milliers de plats
pleins
urnes, des bassins, élégamment décorés et remplis de miel ou de
frais babeurre, qui sent la pomme
de saveurs exquises, débordaient, les uns de caillé, les autres de
lait blanc, et voyaient
sucre. Le long des tîrthas, écoulés des fleuves, on voyait
des amphores contenant des gommes, des poudres, des onguents
Ligne 2 709 ⟶ 2 701 :
renfermant ou du sandal, soit en pâte, soit en poudre fine, ou des
amas de choses propres à nettoyer les dents, à les rendre blanches,
à les faire
Là étaient aussi des miroirs luisants, des bouquets de toute
espèce, des souliers et des pantoufles par milliers de paires, des
collyres, des peignes, des rasoirs, toute sorte
cuirasses admirables, des siéges et des lits variés. Il y avait des
étangs pleins
éléphants et des chevaux : il y avait des étangs pour
des tîrthas semés de nymphéas azurés, de magnifiques nélumbos, et
lisérés
Tandis
nuit
Gandharvas, et les nymphes célestes prirent congé de Bharadwâdja et
* * * * *
Quand Bharata eut passé là-même cette nuit avec sa suite, il
vint trouver Bharadwâdja au moment opportun et
venait de verser dans son feu sacré les oblations du matin, ayant
vu Bharata, qui se tenait devant lui ses mains jointes, adressa
les paroles suivantes à ce jeune tigre des hommes : « Cette nuit
est-il entièrement satisfait de mon hospitalité ? Dis-le moi, ''jeune
homme'' pur de tout péché. »
Ligne 2 742 ⟶ 2 734 :
incliné, répondit en ces termes :
« Mon séjour ici fut agréable, saint anachorète, ce
pour mes conseillers, mon armée et mes chars : tu nous as pleinement
rassasiés, bienheureux solitaire, de toutes les choses que
désirer. Je
saint anachorète ; je vais aller près de mon frère : daigne jeter sur
moi un regard favorable. Dis-moi, bienheureux, ô toi, versé dans la
science de la justice, quel chemin doit me conduire à
ce magnanime observateur de son devoir. »
À ces questions du magnanime Bharata, le sage et grand saint lui
répondit en ces termes : « À trois yodjanas augmentés
moitié
Tchitrakoûta, plein de grottes délicieuses et de murmurantes
cascades.
« Son flanc septentrional est baigné par les eaux de la Mandâkinî,
aux rives couvertes
Entre cette rivière et cette montagne, tu verras, bien défendue
par elles deux, une chaumière au toit de feuillage.
entendu raconter,
ermitage construit dans ce lieu solitaire, de ses propres mains
jointes aux mains de Lakshmana. »
Apprenant
descendirent aussitôt de leurs chars et décrivirent un pradakshina
autour du brahmane digne de tous hommages. Kâauçalyâ tremblante,
amaigrie, accablée de tristesse, prit dans ses deux mains les deux
pieds de
ambition échouée, Kêkéyî, le front couvert de rougeur, embrassa
même les pieds du solitaire.
Après
infatigables,
exécuteur de ses commandements : « Les apparences de ces lieux
ressemblent parfaitement au récit
doute, nous voici maintenant arrivés dans le pays dont Bharadwâdja
nous a parlé. Ce fleuve,
Tchitrakoûta.
« Les arbres inondent les cimes aplanies de la montagne avec une
variété infinie de fleurs, tels
enfants des vapeurs chaudes, verser des pluies à la fin
« Allons ! Que les guerriers
forêt ! Et que mon ordre soit accompli de manière à me donner
bientôt la vue de nos deux illustres bannis ! »
Ligne 2 792 ⟶ 2 784 :
pénètrent dans la forêt, où, peu de temps après, ils aperçoivent
de la fumée. À peine ont-ils vu le sommet de cette colonne fumeuse
été allumé
deux enfants de Raghou sont là. Mais, si
nobles fils de roi à la force puissante, du moins on y verra
pénitents, qui pourront, habitués de ces bois, te fournir quelque
renseignement. »
Ces paroles entendues, Bharata, qui tient la vertu en grand honneur,
ce héros, qui écrase une armée
à mon ordre ; vous ne devez pas quitter ce lieu, dit-il à tous les
guerriers : je vais aller seul avec Soumantra et Dhrishthi. »
Alors cette grande armée fit halte là, regardant cette fumée qui
réunir dans un instant au bien-aimé Râma augmentait encore la joie
de tous les cœurs.
Ligne 2 811 ⟶ 2 803 :
* * * * *
Après
noble ami de cette montagne, tantôt amusant de propos aimables
sa chère Vidéhaine, tantôt absorbé dans la contemplation de sa
Ligne 2 817 ⟶ 2 809 :
épouse les merveilles du mont Tchitrakoûta, comme le Dieu qui brise
les cités en eût montré le tableau à ''sa compagne, la divine''
Çatchî. » Depuis que
la perte de cette couronne tombée de ma tête, ni cet exil même
loin de mes amis ne tourmente plus mon âme. Vois quelle variété
métaux et plus élevées que le ciel même, pour ainsi dire. Les unes
ressemblent à des des lingots
que du sang, celles-là imitent les couleurs de la garance ou de
tapis de jeune gazon, et telle un diamant, qui
Partout enfin cette montagne, embellie déjà par la variété de ses
arbres, emprunte encore
parées de métaux, hantées par des troupes de singes et peuplées
« Regarde, pendus aux branches, ces glaives et ces vêtements
précieux ! Regarde ces lieux ravissants, que les épouses des
Vidyâdharas ont choisis pour la scène de leurs jeux ! Partout on voit
Ligne 2 837 ⟶ 2 829 :
on dirait un éléphant dont la sueur de rut arrose les tempes.
«
charmante, et Lakshmana, le chagrin
cet admirable plateau si enchanteur, si couvert de
des oiseaux, si riche de toute la diversité des fruits et des fleurs,
mes désirs, noble dame, sont pleinement satisfaits.
« Je dois à mon habitation dans ces forêts de savourer ''deux'' beaux
fruits :
père ; ensuite, une satisfaction donnée aux vœux de Bharata. »
Ensuite, le roi du Koçala conduisit la fille du roi des Vidéhains
en avant de la montagne et lui fit admirer la Mandâkinî, rivière
délicieuse aux limpides ondes.
Râma, dit alors à cette princesse
beau comme la lune : « Regarde la Mandâkinî, cette rivière suave,
peuplée de grues et de cygnes, voilée de lotus rouges et de
nymphéas bleus, ombragée sous des arbres de mille espèces, soit à
fleurs, soit à fruits, enfants de ses rivages, parsemée
îles et resplendissante de toutes parts comme
pépinière de nélumbos ''célestes''. Je sens la joie naître dans mon
cœur à la vue de ces beaux tîrthas, dont les eaux sont troublées
sous nos yeux par ces troupeaux de gazelles qui viennent se
désaltérer les uns à la suite des autres.
ces rishis, qui sont arrivés à la perfection, qui ont pour habit la
peau
en djatâ, viennent se plonger dans la sainte rivière Mandâkinî.
« Viens te baigner avec moi dans ses ondes agitées sans cesse par
des anachorètes vainqueurs de leurs sens, riches de pénitences
et resplendissants comme le feu du sacrifice. Plonge tes deux mains
Ligne 2 870 ⟶ 2 862 :
cette rivière, la plus sainte des rivières, cueille de ses nymphéas
et bois de son eau limpide. Pense toujours, femme chérie, que cette
montagne pleine de ses arbres,
et que ce fleuve,
« Lakshmana, que le devoir inspire et qui se tient attentif à mes
ordres, Lakshmana et toi, ma chère Vidéhaine, faites naître ici ma
félicité. »
Quand Râma eut fait voir à la fille du roi Djanaka les merveilles du
mont Tchitrakoûta et de ce fleuve, agréable champ de lotus, il
alla ''
une grotte charmante sous une voûte de roches et de métaux, secret
asile, peuplé
ombragé par des arbres aux branches courbées sous le poids des
fleurs, à la cime doucement balancée par le souffle du vent. À
de toutes les créatures,
dont les beautés de ce bois tenaient les yeux émerveillés :
« Ma Vidéhaine chérie, ta vue
grotte de la montagne : eh bien ! asseyons-nous là maintenant pour nous
délasser de notre fatigue.
ce banc de pierre fut disposé là devant toi : à côté, la cime de
cet arbre le couvre ''de ses rameaux pendants'' comme
''embaumée'',
Il dit ; et Sîtâ, que la nature seule avait faite toute belle,
répondit à son époux avec le plus doux langage et
saturée
paroles de toi, noble fils de Raghou ! Sans doute,
fleuri. » À ces mots de son épouse, il
siége de pierre et tint ce discours à la belle aux grands yeux :
« Vois-tu ces arbres déchirés par la défense des éléphants,
comme ils pleurent avec des larmes de résine !
grillons murmurent une élégie en leurs chants prolongés. Écoute
cet oiseau, à qui
fils ! fils ! » comme autrefois le disait ma mère
plaintive. Voici un autre habitant de
perché sur les épaules branchues
comme une partie dans un concert alternatif et répond aux chants du
kokila. Voici une liane, courbée sous le faix de ses fleurs et
Ligne 2 920 ⟶ 2 912 :
comme une fille des Dieux, elle enivra de caresses le cœur de Râma.
Alors celui-ci frotta son doigt mouillé sur une roche
et dessina un brillant tilaka au front de son épouse. Ainsi, le
front enluminé avec ce métal de la montagne, semblable en couleur au
soleil dans son enfance du jour, Sîtâ parut comme la nuit azurée,
quand elle
Voilà
''de singes'', et, saisie de frayeur, elle se serra palpitante contre
son époux. Celui-ci enveloppa cette femme charmante dans une
Ligne 2 933 ⟶ 2 925 :
menaça le grand singe.
Dans ce mouvement, le tilaka
milieu du front, vint à
vaste poitrine. Le chef de la bande quadrumane
de rire à la vue de son tilaka, dont
en rouge sur la couleur azurée de son époux.
Lakshmana vint à sa rencontre avec un vif empressement, et le
Soumitride fit voir à ce frère bien-aimé,
son gourou même, divers travaux
absence. Il avait tué de ses flèches étincelantes dix gazelles
noires, sans tache : il avait boucané la chair des unes, il avait
Ligne 2 947 ⟶ 2 939 :
déjà cuites. À la vue de cet ouvrage, le frère du Soumitride fut
satisfait et, ''se tournant vers'' Sîtâ, lui donna cet ordre : « Que
La noble dame commença par jeter de la nourriture à
tous les êtres ; cela fait, elle apporta devant les deux frères du
miel et de la viande préparée. Quand elle eut rassasié la faim
de ces deux héros, quand
''seulement'' après eux, suivant la règle, cette fille du roi Djanaka
prit enfin sa réfection.
« Noble fils de Soumitrâ, lui dit son frère avec tranquillité,
quelle peut être la vraie nature de ce bruit. »
Aussitôt Lakshmana se hâte de monter sur un arbre fleuri,
observe
vue sur la région orientale, il tourne sa face au nord, et fixant
là son regard attentif, il voit une grande armée toute pleine
de chevaux,
protégés par une infanterie vigilante. Le tigre des hommes,
Lakshmana, qui terrasse les héros ennemis, revint dire à son frère :
«
trêve au plaisir, noble ''fils de Raghou'' ; fais entrer Sîtâ dans
une caverne ; attache la corde à deux solides arcs et couvre-toi de la
cuirasse. »
Quand Râma eut appris que
chevaux,
armée ? » demanda-t-il au fils de Soumitrâ. Est-ce un monarque ou
le fils
autre chose, Lakshmana, te semble être la vérité, dis-le-moi. »
À ces mots, Lakshmana, flamboyant dans sa colère comme un
feu impatient de brûler tout, répondit à Râma ces paroles :
« Assurément,
Bharata, qui
la fureur de son ambition. Je vois briller sur les épaules de cet
éléphant un arbre au tronc énorme, à
un ébénier des montagnes, le drapeau de Bharata ! Ces coursiers bien
dressés, qui vont au gré du cavalier, sont de rapides chevaux, nés
dans le Vânâyou ; ces guerriers ont pris tous
prépare-toi, homme sans péché ! Ou bien cours te cacher toi-même
avec ton épouse dans une caverne de la montagne ; car le drapeau de
« Mais je ne vois pas
mort, toi, dès ce jour, donne tes lois à la terre !
abattu sous mon bras dans la bataille, comme un arbre
a brisé. »
Râma sans colère se mit à calmer Lakshmana, bouillant de courroux,
et tint ce langage au fils de Soumitrâ : « Quand et de quel acte
odieux Bharata
reçu de lui une offense que tu veuilles le tuer ? Garde-toi de lancer
à Bharata un mot violent ou fâcheux ; car toute parole amère tombée
sur Bharata, je la tiendrais comme jetée sur moi-même ! Est-il
possible
attente à la vie de son père ? Et quel frère pourrait, fils de
Soumitrâ, verser le sang
À ces mots
vérité, la pudeur fit rentrer, ''pour ainsi dire'', Lakshmana dans ses
membres. À peine eut-il entendu ce langage, que, plein de confusion,
il répondit : « Je le pense, Bharata, ton frère ''ne'' vient ici ''que''
pour nous voir. » Et Râma voyant Lakshmana tout confus, se hâta de
lui dire : «
pour nous voir. »
* * * * *
mit à construire ses logements tout à
Les troupes du héros né
campèrent dans cette forêt, avec leurs éléphants et leurs
chevaux, à la distance
l’yodjana.
frère, se dirigea vers
avait donné cet ordre à Vaçishtha le saint : « Amène vite mes
nobles mères ! » et, stimulé par
vénérable, il avait pris les devants et
hâté. Soumantra, de son côté, suivit également Çatroughna
marche vive, car la vue ''toute prochaine'' de Râma fit naître en
lui-même une joie égale à celle de Bharata.
Ligne 3 036 ⟶ 3 028 :
longs bras dit à tous les ministres, que son père vivant
traitait avec faveur : « Nous voici, je pense, arrivés au lieu dont
Bharadwâdja nous a parlé. Le fleuve Mandâkinî, je pense,
très-loin
ce bois coupé, ces racines roulées en bottes, ces habits pendus en
est jalonné par des signes pour ''guider'' ceux qui reviennent à
Râma'' que je vois monter et se mêler ''au ciel bleu'' cette fumée du
feu sacré, que les pénitents désirent alimenter sans fin au milieu
des forêts.
rejeton de Kakoutstha, lui, de qui
grand saint et qui remplit ''dans ces bois'' les commandements de mon
père ! »
Là, dans un lieu tourné entre le septentrion et
vit dans la maison de Râma un autel pur, où brillait allumé son
feu sacré. Un instant, il parcourut des yeux ce foyer saint ; puis il
aperçut le révérend solitaire, assis dans sa hutte en feuillage, ce
Râma aux épaules de lion, aux longs bras, à
yeux pur comme un lotus blanc, ce protecteur de la terre enclose
dans les bornes de
fortune, immortel comme Brahma lui-même, et qui, fidèle à marcher
dans son devoir, portait humblement alors son vêtement
ses cheveux à la manière des anachorètes.
Inondé par la douleur et le chagrin, à
délassant assis entre son épouse et Lakshmana, le fortuné Bharata,
ce vertueux fils de
frère ; mais, plus près de sa vue, il gémit avec désespoir, et,
de chars,
côtés ; celui,
tant les foules ''avides'' se faisaient obstacle
héros'', mon frère aîné, le voilà donc assis, entouré seulement
par les animaux des forêts ! Lui qui, pour se vêtir, possédait
naguère des habits par nombreux milliers, il
de gazelle pour dormir sur le sein de la terre ! Et
moi que mon frère, habitué à tous les plaisirs de
fut précipité dans une telle infortune ! Barbare que je suis ! Honte
éternelle à ma vie, blâmée dans
Arrivé près de Râma en gémissant ainsi et la sueur inondant son
Ligne 3 082 ⟶ 3 074 :
fils désolé du roi, Bharata dit : « Seigneur ! » une fois seulement,
et fut incapable de rien ajouter à cette parole. Çatroughna, de
son côté,
embrassa tous deux et mêla ses larmes aux pleurs de ses frères.
dans ses bras, le fit asseoir sur le haut de sa cuisse et lui adressa
même ces questions avec intérêt : « Où ton père est-il, mon ami,
Ligne 3 094 ⟶ 3 086 :
devoir dans sa vraie nature ? Ce brahme savant, inséparable de la
justice, le précepteur des Ikshwâkides, est-il honoré comme il
doit
est-elle heureuse avec son illustre compagne Soumitrâ ? Est-elle aussi
dans la joie cette Kêkéyî,
« Tes ministres sont-ils pleins de science, mon ami, remplis de
courage, maîtres de leurs sens, attentifs à ton moindre geste,
« En effet, le conseil, fils de Raghou, est la racine de la victoire :
elle habite dans les palais du roi au milieu des plus sages ministres
et des conseillers instruits dans les devoirs. Ne donnes-tu point au
sommeil trop
du réveil ? Versé dans la science des affaires, ton esprit en
est-il occupé même dans les nuits qui
mille ignorants ? car, dans les affaires épineuses un homme instruit
peut dire une parole salutaire.
« Tu ne fréquentes pas, ''
sont des insensés, habiles tisseurs de futilités, orgueilleux
science inutile.
théologie plus élevée, ils te viennent débiter de vaines
subtilités, après
hommes, la conduite que
même une gravité égale à celle de tes ancêtres ? As-tu soin de
hommes, ces ministres de ton père et de ton aïeul, ces gens purs,
qui ont passé dans le creuset de
Raghou, les mets que
tu ne les manges pas seul ? Tu invites,
tes serviteurs à les partager avec toi ?
« Le général de tes armées est-il adroit, vigilant, probe, de noble
race, audacieux, plein de courage,
Donnes-tu aux armées sans réduction, comme il est juste, ce
doit leur donner, les vivres et la paye, aussitôt que le temps est
échu ?
des rations et du prêt, le soldat murmure contre lui, et de là peut
résulter une immense catastrophe.
« Tes places fortes sont-elles bien remplies toujours
dépenses sont-elles moindres ? Tes richesses, prince, ne sont-elles
jamais répandues sur des gens indignes ? Tes dépenses ont-elles
Ligne 3 143 ⟶ 3 135 :
brahmanes, les guerriers et les différentes classes de tes amis ? »
Alors Bharata,
fit connaître ''en ces termes'' au pieux Râma, qui
ainsi, la mort du roi, son père : « Noble prince, le grand monarque a
délaissé son empire et
le chagrin de
Te suivant partout de ses regrets, altéré de ta vue, ne pouvant
séparer de ta pensée son âme toujours attachée à toi, abandonné
par toi et consumé par le chagrin de ton exil,
que ton père est descendu au tombeau ! »
À ces mots du magnanime Bharata, auquel Râma adressait tout à
accomplir la parole donnée par son père, demeura plongé dans le
silence.
« Daigne
suis ton serviteur : fais-toi sacrer dans ce trône de tes pères,
comme Indra le fut sur le trône du ciel ! Tous les sujets que tu vois,
Ligne 3 164 ⟶ 3 156 :
ta présence : accorde-leur aussi la même faveur.
« Permets que le droit
mets ainsi, ô toi, qui donnes
leurs vœux. »
À ces mots prononcés avec des larmes, le fils de Kêkéyî, ce
Bharata aux bras puissants, toucha de sa tête les pieds de Râma.
Celui-ci alors
langage à son frère, poussant maint et maint soupir : « Quel homme,
né
toujours marché fidèle à ses vœux, quel homme de ma condition
voudrait au prix
père et cette mère, distingués par tant de vertus,
dans les forêts ! » comment pourrais-je, fils de Raghou, agir
autre manière ? Ton lot est de ceindre à ton front dans Ayodhyâ
ce diadème honoré dans
Dandaka, ermite vêtu
fait ainsi nos parts à la face de la terre ; quand, nous laissant
à cet égard ses commandements, il
Daçaratha, le roi des rois et le vénérable du monde, a fixé son
choix sur ta personne, ce qui te sied, à toi,
lot, comme il te fut donné par ton père. Moi, bel ami, confiné pour
quatorze années dans la forêt Dandaka, je veux goûter ici ma part,
telle que me
À ces mots de Râma : « Quand
répondit Bharata, ma conduite pourra-t-elle être jamais celle
roi ? Il est une loi immortelle, noble prince, qui toujours exista chez
nous ; la voici : « Tant que
aucun droit à la couronne. » Va, digne fils de Raghou, va dans la
délicieuse Ayodhyâ, pleine de riches habitants, et fais-toi sacrer !
En effet, ta grandeur
famille ? Tandis que je vivais heureux à Kékaya et que
conduisait en ces bois, le grand monarque, notre père, estimé des
hommes vertueux,
des hommes, et répands
que
mondes où habitent les mânes ; et ta grandeur était, noble Râma, le
plus cher de tous ses fils. »
À ce discours touchant, avec lequel Bharata lui remettait la mort
de son père sous les yeux,
son esprit
Bharata ces paroles foudroyantes, semblables au tonnerre lancé dans
un combat par le céleste dispensateur des pluies, Râma étendit les
bras et tomba sur la terre, comme un arbre à la cime fleurie, que la
hache vient
chaste Vidéhaine, tous en larmes et déchirés par une double peine,
le maître de la terre, étendu maintenant sur la terre, comme un
éléphant ''couché au bord des eaux'' et que
connaissance, les yeux baignés de larmes à la pensée de son père
descendu au tombeau : « Infortuné que je suis ! dit-il à Bharata, que
puis-je faire, hélas ! pour ce magnanime, mort de chagrin à cause de
moi, qui
et toi, vertueux Bharata, et Çatroughna, vous, de qui ce monarque a
reçu tous les honneurs dus aux morts !
« Parvenu au terme de mon exil dans les bois, je sens que je
pas même la force de retourner dans cette Ayodhyâ, privée de son
chef, veuve du meilleur des rois et troublée dans la paix de son
Ligne 3 231 ⟶ 3 223 :
Quand il eut parlé de cette manière à Bharata, le noble
anachorète,
Sîtâ, dit-il, consumé par sa douleur, à cette femme au visage
charmant comme une pléoménie ; et ce ''bon'' Lakshmana a perdu son
père : Bharata vient de
la terre nous a quittés pour le ciel. » À cette nouvelle que son
beau-père, ce révérend de tous les mondes, était mort, la fille
Ligne 3 240 ⟶ 3 232 :
larmes !
Râma
tristesse, fixant un regard sur Lakshmana, il adressa au Soumitride
ces paroles désolées : « Apporte-moi des fruits
de sésame, un habit
aller, fléau des ennemis, offrir
père. Que Sîtâ marche devant ! Toi, suis-la de près ! Moi,
par derrière ! Hélas ! cette procession est bien cruelle à mon
cœur ! »
Ligne 3 252 ⟶ 3 244 :
délicieux, aux ondes fraîches, aux charmants tîrthas, aux forêts
nombreuses et fleuries. Entrés dans un endroit uni, tous, ils
répandirent
eau soit pour lui ! » Le plus vertueux des fils de Raghou, levant
ses mains réunies en coupe et remplies
pleurant, le visage tourné vers la plage soumise à
« Cette eau limpide, roi des rois, la plus sainte des eaux, qui
donnée par moi, puisse-t-elle servir à jamais pour étancher ta soif
dans les royaumes des Mânes ! »
Ligne 3 262 ⟶ 3 254 :
Ensuite, le fortuné monarque des hommes accomplit avec ses frères
dans un lieu pur et sur la rive de la Mandâkinî les oblations
funèbres,
jonchée
de chagrins : « Grand roi, mange avec plaisir ces aliments, que nous
mangeons nous-mêmes ; car, sans doute, la nourriture de
aussi la nourriture des Mânes et des Dieux ! »
Les confuses clameurs de ces princes à la force puissante, qui
pleuraient en offrant le don funèbre de
noble père, vinrent frapper les oreilles des guerriers de Bharata :
« Sans doute Bharata, se disaient-ils effrayés, a déjà fait son
entrevue avec Râma ; et ce grand bruit vient des cris que poussent les
quatre fils sur la mort du père ! » À ces mots, tous ils abandonnent
leur campement et courent
avait ou non rassemblés.
Quand Râma les vit ainsi plongés dans la douleur et les yeux noyés
de larmes, lui, qui
avec
du roi les embrassa donc sans distinction, et tous sans distinction
furent admis à le saluer : il
tous, comme il eût fait avec des hommes qualifiés.
* * * * *
Arrivées là
enfin Râma, qui semblait dans son ermitage un Dieu tombé du ciel. À
royales mères, désolées et ''comme'' irrassasiables de chagrin,
se mirent toutes à verser des larmes et des plaintes éclatantes.
Aussitôt Râma se lève ; il prend de ses mains douces au toucher les
pieds de toutes ses nobles mères, en suivant
des préséances'', et les presse avec les surfaces de ses doigts
veloutés. Les épouses du roi baisèrent le front de Râma et se
Ligne 3 300 ⟶ 3 292 :
Le fils même de Soumitrâ, le corps incliné et la tristesse ''au
cœur'',
en proie à la douleur.
Ligne 3 309 ⟶ 3 301 :
par son habitation dans les bois : « Comment, Djanakide, es-tu venue
dans ces forêts, toi, la fille du roi des Vidéhains, la bru du
puissant Daçaratha et
« Princesse du Vidéha, la flamme que le malheur frotté sur le
malheur a fait jaillir en ton âme, ravage ici cruellement ta
charmante figure, comme ''le soleil brûle'' un nymphée sans eau ! »
Tandis que sa mère désolée parlait ainsi, le noble Raghouide,
frère aîné de Bharata,
toucha ses pieds. Quand Râma eut pressé dans ses mains les pieds
du grand-prêtre, semblable au feu, comme le roi des Immortels,
Indra même, presse des siennes les pieds de Vrihaspati, ''le céleste
précepteur des Dieux'', alors ce rejeton magnanime de Raghou
avec le vénérable environné
accompagné des ministres et des guerriers chefs de
il
hommes dans la science du devoir.
Ligne 3 330 ⟶ 3 322 :
noble solitaire assis, plongé dans ses réflexions :
« Ô toi, qui sais le devoir, gouverne en paix avec tes amis et par
la vertu même de ton droit ce royaume sans épines de tes aïeux.
Que tous les sujets, et les prêtres du palais, et Vaçishtha, et les
brahmanes versés dans les formules des prières te donnent
royale ici même. Sacré par nous, comme Indra par les Maroutes,
quand il eut conquis rapidement les mondes, va dans Ayodhyâ exercer
trois saintes dettes, écrasant tes ennemis et rassasiant tes amis de
toutes les choses désirées.
ton sacre le faix de leur pénible tristesse !
ciel. Essuie mes larmes, taureau des hommes ; essuie les pleurs de ta
mère et délivre
« Les grands sages
un kshatrya la consécration, le sacrifice et la défense du peuple ?
Je
étends sur nos parents ta compassion, comme Çiva répand la sienne
sur toutes les créatures. Mais si, tournant le dos à mes prières,
ta grandeur
avec ta grandeur ! »
Les prêtres, les poëtes, les bardes, les panégyristes officiels,
les mères
le fils de Kâauçalyâ
ce discours de Bharata, et, prosternés devant Râma, tous, ils
suppliaient avec lui ce ''noble anachorète''.
Quand Bharata eut cessé de lui parler ainsi, Râma, ''continuant à
marcher''
discours plein de vigueur au milieu de
Destin, qui le traîne à son gré çà et là dans le cercle de la
vie.
des élévations, la séparation est la fin des assemblages et la
mort est la fin de la vie. Comme ce
maturité qui met les fruits en péril de tomber : ainsi le danger
de la mort ne vient pas chez les hommes
naissance.
« Telle que
jusque-là solide, tels
la mort peut jeter sur eux son lacet. La mort marche avec eux, la mort
ont fait un chemin assez long. Les jours et les nuits de tout ce qui
respire ici-bas
vie, comme les rayons du soleil au temps chaud tarissent
étangs''. Pourquoi pleures-tu sur un autre ? Pleure, ''hélas'' ! sur
toi-même, car, soit que tu reposes ou soit que tu marches, la vie
se consume incessamment. Les rides sont venues sillonner vos membres,
plaisir. Les hommes se réjouissent, quand
sur
personne, ''à cette heure comme à
marché lui-même vers la fin de sa vie ! Les êtres animés ont du
plaisir à voir la fleur nouvelle, qui vient succéder à la fleur
Ligne 3 391 ⟶ 3 383 :
successions.
« Tel
de bois promené dans
demeurent quelque peu réunies et se séparent bientôt ''pour ne
plus se rejoindre'' : ainsi, les épouses, les enfants, les amis, les
richesses vont de compagnie avec nous dans cette vie
instant, et disparaissent ; car ils ne peuvent éviter
détruit. Nul être animé
condition : aussi, tout homme ici-bas, qui pleure un défunt, lui
consacre des larmes qui ne sont point dues à son trépas. La mort est
une caravane en marche, tout ce qui respire est placé dans sa route
et peut lui dire : « Moi aussi, je suivrai demain les pas de ceux que
tu emmènes
se désoler au sujet
ont passé déjà son père et ses aïeux, qui est inévitable et dont
il
voler et le fleuve pour couler rapidement : mais
raison'' les attelages du Devoir.
« Les âmes, qui ont accompli saintement le devoir, lavées de leurs
péchés par une conduite pure et des sacrifices payés convenablement
aux deux fois nés, obtiennent
au séjour de la béatitude, lui, qui a bien nourri ses domestiques,
gouverné ses peuples avec sagesse et distribué des aliments à la
vertu ''indigente''. Le ciel a reçu, ''
de la terre, qui a célébré mainte et mainte sorte de sacrifices,
savouré toutes les félicités
plus avancé des âges.
« Par conséquent, ces larmes, répandues sur une âme qui a reçu de
si belles destinées, elles ne siéent point à un homme sage, de ta
sorte, ni de la mienne, qui a de
saintes traditions.
« Rappelle donc ta fermeté, ne te livre point à ce deuil ;
va, taureau des hommes, va promptement habiter dans cette belle
métropole, et fais de la manière que mon père te
Moi, de mon côté,
serait malséant à moi de manquer à son ordre, héros, qui domptes
les ennemis ; et sa parole doit toujours être obéie par toi-même,
car il est notre parent, il est ''plus'', notre père. »
À ces mots, Bharata
a-t-il
ennemis ? Tu
pourrait même
vieillards autant
ciel.
« Tu possèdes une âme semblable aux âmes des Immortels, tu es
magnanime, tu es fidèle à ton alliance avec la vérité même ! Le
plus accablant de tous les chagrins ne peut te renverser, toi qui,
doué avec de telles vertus, connais si bien ce que
et mourir.
« Mais à moi, sage frère, à moi, séparé de toi et privé de mon
père, il me sera impossible de vivre, consumé par mon chagrin, comme
le daim blessé par une flèche empoisonnée ! Veuille donc agir de
telle manière que je ne laisse pas ma vie dans cette forêt déserte,
où
épouse et Lakshmana : ''oui, sauve-moi'' ! et prends en main le sceptre
de la terre ! »
Tandis
ainsi Râma, ce maître de la terre, plein
point davantage son esprit vers la pensée du retour, mais il demeura
ferme, sans quitter des yeux la parole de son père. À
constance si admirable dans ce digne enfant de Raghou, tous les cœurs
se trouvaient également partagés entre la tristesse et la joie :
« Il ne revient pas dans Ayodhyâ ! » se disait-on ; et le peuple en
ressentait de la douleur, mais il éprouvait du plaisir à lui voir
cette fermeté dans la promesse ''donnée à son père''.
Ligne 3 471 ⟶ 3 463 :
Râma fit asseoir sur ''le siége musculeux'' de sa cuisse le jeune
homme au teint azuré, aux yeux charmants comme les pétales du lotus,
à la voix semblable au roucoulement du cygne, quand il
« Telle
science de gouverner les hommes, peut très-bien suffire à gouverner
même les trois mondes. Écoute, jeune roi, quels modèles Indra, le
soleil, le vent, Yama, la lune, Varouna et la terre mettent sous
nos yeux dans leur conduite ''invariable''. Tel
durant les quatre mois humides, tel un grand monarque doit inonder son
empire de ses bienfaits. De même que le soleil ravit
par la puissance de ses rayons, ''il faut toujours
« Puissé-je amasser ainsi des trésors avec justice ! »
tous les êtres, il faut
ses émissaires, et
''ventale''. Tel
également
tout monarque soit le même pour celui
avec la chaîne des eaux, de même le devoir ''appelé'' neptunien
roi,
« Tel que
dans les cœurs ; ainsi, tous les sujets doivent se réjouir en lui,
et
relâche porte également tous les êtres, tel
le devoir ''appelé terrané'' de soutenir, ''sans manquer même au
dernier'', tous les sujets de son empire.
«
une sage délibération avec ses ministres, ses amis, ses conseillers
judicieux, il fasse exécuter les décisions. On verra la splendeur
abandonner
a fait, soit par amour, soit par ambition, et te comporter vis-à-vis
À ce langage de Râma, égal en splendeur au soleil et
tel que la lune au premier jour de sa pléoménie, Bharata de
répondre ces mots : «
ses mains, toucha de sa tête les pieds de Râma, et, le gosier plein
de sanglots, il tomba sur la terre.
Aussitôt
Râma se recula vite, les yeux un peu troublés ''sous un voile'' de
larmes. Bharata cependant lui toucha les pieds ; et, pleurant, affligé
sur la berge
Il
de chagrin, avec les artisans, les guerriers, les marchands, avec les
instituteurs et le grand-prêtre du palais. Les lianes elles-mêmes
pleuraient toute une averse de fleurs ; combien plus devaient pleurer
l’humanité !
Râma, vivement ému de cet incident, étreignit fortement Bharata
dans un embrassement
consumé de chagrin et les yeux baignés de larmes : « Mon ami,
assez ! Allons ! retiens ces larmes ; vois combien la douleur nous
tourmente nous-mêmes : allons ! pars ! ''retourne dans Ayodhyâ'' ! Je ne
Ligne 3 538 ⟶ 3 530 :
poids de sa douleur. Héros, je jure, Sîtâ et Lakshmana le jurent
avec moi, de ne plus te parler jamais, si tu ne reprends le chemin
Il dit et Bharata
« Rends-moi tes bonnes grâces ! »
mot il ajouta ces paroles : « Loin de toi ce serment ! Je
ma présence te cause un tel chagrin ; car je ferai toujours, seigneur,
au prix même de ma vie, ce qui est agréable pour toi. Je
sans aucune feinte avec nos royales mères, entraînant sur mes pas
cette grande armée, je
fils de Raghou, je veux te rappeler une chose.
qui sais le devoir,
de ces mots, les tiens, seigneur, sans nul doute : « Prends à titre de
dépôt la couronne impériale
« Oui ! » répondit son frère, de qui cette résignation du jeune
homme à revenir dans sa ville augmentait la joie, et qui se mit à le
consoler avec des paroles heureuses.
Dans ce moment arrivèrent le sage Çarabhanga et ses disciples, qui
apportaient en présent des souliers tissus
le noble Raghouide eut échangé avec le très-magnanime solitaire
des questions relatives à leurs santés, il accepta son présent.
Aussitôt Bharata saisit et chaussa promptement aux deux pieds de son
frère les souliers donnés par
''tiges du'' graminée.
Alors Vaçishtha, orateur habile et qui savait augmenter à son gré
la tristesse ou la joie, dit ces mots, environné, comme il était,
par les foules du peuple. « Mets
ces chaussures ; ensuite, retire-les ; car elles vont arranger ici les
affaires au gré de tout le monde. »
ses pieds, en ôta les deux souliers, et du même temps les donna au
magnanime Bharata[20].
dans ses vœux, reçut lui-même cette paire de chaussures avec joie,
décrivit à
et posa les deux souliers sur sa tête, élevée comme celle
gigantesque éléphant.
[Note 20 : La cérémonie de
nous rappelle que
attribuée à
venait-elle ? De
furent transvasées dans
Ensuite, quand il eut honoré ce peuple suivant les rangs, Vaçishtha,
les autres gouravas et leurs disciples,
famille de Raghou, les congédia, se montrant aussi inébranlable dans
son devoir que le mont Himâlaya est immobile sur la terre. Il fut
impossible à ses mères de lui dire un adieu par
douleur, tant les sanglots fermaient leur gosier à la voix. Râma
enfin
et, pleurant lui-même, il entra dans son ermitage.
Ligne 3 599 ⟶ 3 591 :
amenés tous deux. Devant lui marchaient Vaçishtha, Vâmadéva,
Djâvâli, ferme dans ses vœux, et tous les ministres, honorés pour
la sagesse du conseil. La face tournée à
alors vers la sainte rivière Mandâkinî, laissant à main droite le
Tchitrakoûta, cette alpe sourcilleuse.
Ligne 3 607 ⟶ 3 599 :
métaux par milliers.
Non loin du solitaire Tchitrakoûta, il aperçut
Bharadwâdja, le pieux ermite, avait choisi pour son habitation. Le
fils de race, le prince éminent par
de la hutte sainte, descend de son char et vient toucher de sa tête
les pieds de Bharadwâdja. Tout joyeux à la vue du jeune monarque :
« As-tu vu Râma ? lui dit
affaire ? »
À ces paroles du sage anachorète, Bharata, si attaché au devoir,
fit cette réponse à
toutes mes supplications jointes aux prières mêmes des vénérables,
ce digne enfant de Raghou, ferme dans sa résolution, nous a tenu chez
lui ce langage au comble
mollesse la parole que
je reste donc ici les quatorze années, suivant la promesse que
faite à mon père. »
« Quand ce prince à la vive splendeur eut achevé ces paroles,
Vaçishtha, qui sait manier le discours, répondit en ces mots
solennels à ce fils de Raghou, habile dans
des hommes, ô toi, qui es ferme dans tes vœux et comme le devoir
incarné, donne tes souliers à ton frère ; car ils mettront ''la paix
et'' le bonheur dans les affaires au sein
de Vaçishtha, le noble Râma se tint debout, la face tournée à
bien faits et charmants.
par le très-magnanime Râma, je
Quand il eut ouï ces belles paroles du prince à la grande âme,
immortel ce Daçaratha, ton père, glorieux de posséder un tel fils
en toi, qui sembles à nos yeux le devoir même revêtu
humain. »
Ligne 3 646 ⟶ 3 638 :
solitaire à la vaste science. Ensuite, après deux et plusieurs tours
de pradakshina autour du pieux ermite, il reprit avec ses ministres le
chemin
''comme en allant'', ses longues files de voitures, de chars, de chevaux
et
Entré dans Ayodhyâ, le fils de Kêkéyî se rendit au palais même
de son père, veuf alors de cet Indra des mortels, comme une caverne
veuve du lion qui
Ensuite, quand il eut déposé dans la ville ses royales mères, le
prince aux vœux constants, Bharata de tenir ce langage à tous les
gouvaras universellement : « Je
demande à vous tous votre avis :
cette douleur de vivre séparé du noble enfant de Raghou. Le roi
mon père
gouverner la terre, en attendant que Râma puisse régner lui-même. »
À ces belles paroles du magnanime Bharata, les ministres et
Vaçishtha même à leur tête de lui répondre tous en ces termes :
« Un tel langage, que
est digne de toi, Bharata, et mérite les éloges. Quel homme ne
donnerait son approbation à ce voyage, dont
jamais de ton amour pour ton frère ? » À peine eut-il ouï dans ces
paroles agréables et conformes à ses désirs la réponse de ses
ministres : « Que
Assis dans son char, Bharata, de qui
inspirations dans le devoir et dans
à Nandigrâma, portant les deux souliers avec lui. Il entra dans le
village avec empressement, descendit à la hâte de son char et tint
ce langage aux vénérables : « Mon frère
empire comme un dépôt, et ces deux souliers, jolis à voir, qui
sauront le gouverner sagement. »
Ligne 3 683 ⟶ 3 675 :
chaussures, et, consumé de sa douleur, il adressa ce discours à
tous les sujets, répandus en couronne autour de lui : « Apportez
touchée'' les pieds du noble ''anachorète'' ! Les souliers, ornés ''de
cet emblème'', exerceront ici la royauté. Ma fonction à moi,
de veiller,
dépôt que son amitié même a remis dans mes mains. Un jour,
quand
confiés, et ce vaste empire ''dont je suis investi'',
je serai lavé de mes souillures dans Ayodhyâ. Une fois
royale donnée à cet illustre fils de Kakoutstha et le monde élevé
au comble de la joie par son couronnement, quatre royaumes comme
celui-ci ne payeraient pas mon bonheur et ma gloire ! »
Après que Bharata,
paroles du fond de sa tristesse, il établit le siége de
dans Nandigrâma,
Dès lors on vit
son armée, et ce maître du monde y porter
ses cheveux en djatâ et le valkala fait
exécutant sa promesse, il vivait dans
Ensuite le beau jeune prince, ayant sacré les deux nobles
chaussures, fit apporter lui-même auprès
et
la première des villes, ce fut au nom des souliers
désormais tous les ordres.
Ligne 3 713 ⟶ 3 705 :
Le fils de Raghou trouva dans ses réflexions beaucoup de motifs pour
condamner une plus longue habitation dans cette forêt : «
que
de la capitale. Ces lieux
sans cesse dans mon cœur la douleur vive des regrets. En outre, le
camp de sa nombreuse armée,
vastes fumiers, dont la terre fut toute jonchée par la bouse de ses
éléphants et de ses coursiers. Ainsi, passons ailleurs ! »
Parvenu à
homme, qui avait thésaurisé la pénitence ; et le saint anachorète
à son tour honora le royal ermite
« Toi, dit-il à son épouse Anasoûyâ, pénitente
plaisir dans le bonheur de tous les êtres ; toi, dit ce taureau des
solitaires, charge-toi de
Offre à cette illustre épouse de Râma toutes les choses
peut désirer. »
Alors,
dans ses vœux, et se hâta de lui dire : « Je suis la ''princesse'' de
Mithila. »
Anasoûyâ mit un baiser sur la tête de la vertueuse Mithilienne,
et lui dit ces mots
veux, de ce pouvoir ''surnaturel'', attribut de la pénitence, trésor
que
maintenant, Sîtâ, pour
« Noble fille du ''roi'' Djanaka, tu marcheras désormais ornée de
parures et les membres teints avec un fard céleste, présents de mon
''amitié''. À compter de ce jour, le tilaka, signe heureux ''que'' tu
''portes sur le front'' va durer,
fard ne
Mithilienne, avec ce liniment que tu reçois de mon ''amitié'', tu
raviras sans cesse ton époux bien-aimé, comme Çri, la déesse aux
Ligne 3 753 ⟶ 3 745 :
La princesse de Mithila reçut encore avec cet onguent céleste des
vêtements, des parures et même des bouquets de fleurs, présent
incomparable
accepta, dans toute la joie de son âme, une couple de robes
propreté inaltérable et brillantes comme le soleil dans sa jeunesse
du matin, les bouquets de fleurs, les parures et le fard de la
Ligne 3 770 ⟶ 3 762 :
tout resplendissants, leurs arcs et les deux épées, dont le
tranchant moissonne les ennemis. Ensuite Râma et Lakshmana
deux arcs à leur main, ils sortent et
visite à ''cette partie des'' ermitages ''
vus''.
Quand la fille du roi Djanaka vit en marche les deux héros, armés de
leurs solides arcs, elle dit à son époux
« Râma, les hommes de bien atteignent à coup sûr une condition
heureuse de justice, au moyen
qui en sont le venin destructeur. Quatre, assure-t-on, naissent de
enfants de la colère. Le premier est le mensonge, que fuit toujours
« Il est possible de les comprimer tous à ceux qui ont vaincu leurs
sens : les tiens obéissent à ta volonté, je le sais, Râma, et la
beauté de
seigneur, et jamais on ne trouvera dans ta bouche une parole menteuse :
combien moins ne peux-tu faire de mal à
encore séduire une femme ! Mais je
voyage à la forêt Dandaka.
« Je vais en dire la cause ; écoute-la donc ici de ma bouche.
« Te voici en chemin pour la forêt, accompagné de ton frère, avec
ton arc et tes flèches à la main. À la vue des animaux qui errent
dans ces futaies, comment ne voudrais-tu pas leur envoyer quelques
flèches ? En effet, seigneur,
bois aliment du feu ? Placée dans sa main,
et beaucoup plus sa bouillante ardeur : aussi,
guerre
dans une solitude
« Jadis
vainqueur de ses organes des sens, était arrivé à la perfection
dans la forêt des pénitents. Là,
dans ses mains, à titre de dépôt, une épée excellente et bien
affilée.
« Une fois
conserver son dépôt, ne
pas même cette épée dans les forêts. En quelque lieu
recueillir des fruits ou des fleurs, il
glaive, tant son dépôt le tient dans une continuelle inquiétude. À
force
que peu à peu
habituer sa pensée à la cruauté et perdit ses bonnes résolutions
de pénitent. Ensuite, arraché au devoir par son âme, que
cette familiarité avec une épée avait menée ainsi
infernal.
«
à ta mémoire :
Il te faut de toute manière éviter
as pris ton arc à la main. On ne déchaîne pas la mort contre les
Rakshasas mêmes sans un motif
« Quelle différence il y a des armes, des combats, des exercices
militaires aux travaux de la pénitence ! Celle-ci est ton devoir
maintenant ; observe-le : tous les autres te sont défendus.
« La culture des armes enfante naturellement une pensée vaseuse
le trône ? Un humble anachorète ! Le devoir est le père de
le devoir engendre le bonheur :
ciel ; ce monde a pour essence le devoir. Le paradis est la récompense
des hommes qui ont déchiré eux-mêmes leur corps dans les
pénitences ; ''car'' le bonheur ne
enfant de Raghou, fais ton plaisir de la mansuétude ; sois dévoué à
ton devoir !
connu dans toute sa vérité.
« Médite néanmoins ces paroles dans ton esprit avec ton jeune
frère, et fais-en, roi des hommes, ce
Quand il eut ouï ce discours si doux et si conforme au devoir, que
Ligne 3 856 ⟶ 3 848 :
amour, dépassent la grandeur même de ta race, noble fille du roi
Djanaka. Pourquoi dirais-je, femme charmante, ce qui fut dit par
toi-même ?
tu
la forêt Dandaka ! Ces hommes accomplis dans leur vœux sont venus
créatures'' ! Dans les bois
plaisir, des racines et des fruits leur seule nourriture, ils ne
peuvent goûter la paix un moment, opprimés
par les hideux Rakshasas. Enchaînés à tous les instants du jour
dans les liens de leurs différentes pénitences, ils sont dévorés
au milieu des bois par ces démons féroces, difformes, qui vaguent
dans ''
« Ces bonnes paroles, que vient de
sont telles ''
dans ta bouche, et conformes à la noblesse de ta race. Oui ! ces
paroles, que tu
celui
Quand ils eurent marché une longue route, ils virent de compagnie,
Ligne 3 881 ⟶ 3 873 :
célestes marié au concert des instruments de musique, et cependant
on ne voyait personne. Alors, poussés par la curiosité, Râma,
et Lakshmana,
« Un spectacle si merveilleux a fait naître en nous tous une vive
curiosité.
demandent ces héros fameux : allons ! raconte-nous ce ''mystère'' ! »
À cette question du magnanime fils de Raghou, le solitaire, qui
était comme le devoir même en personne, se mit à lui raconter
ainsi
Mandakarni, qui jadis, grâce au pouvoir de sa pénitence, créa
ce bassin
solitaire, assis sur une pierre et
nourriture, soutint dix mille années une pénitence douloureuse.
Effrayés
tête, de
notre place ! » Cinq Apsaras du plus haut rang et parées
toilette céleste furent donc envoyées par tous les dieux, avec
dans ces lieux, aussitôt ces beautés folâtres, nymphes à la taille
gracieuse, de
enchaîné au vœu de sa cruelle pénitence.
« La suite de cette aventure,
Immortels, ces Apsaras firent tomber sous le pouvoir de
grand ascète, de qui le regard embrassait le passé et
monde. Les cinq Apsaras furent élevées à
épouses et
Les cinq belles nymphes demeurent ici autant
fières de leur jeunesse, elles délassent
de sa pénitence. Ce grand bruit, que vous entendez là, ce sont les
jeux de ces bayadères célestes ; ce sont leurs chansons ravissantes
à
bracelets. »
À ces paroles de
admirable ! »
frère avec lui.
Tandis que le solitaire contait sa légende, Râma vit un enclos
circulaire
frère et de Sîtâ dans cette enceinte couverte de lianes et
variés, où tous les anachorètes ''
honneurs de
ermitages, le Kakoutsthide habita fort à son aise, honoré par chacun
de ces grands saints. Alors, ce noble fils de Raghou visita
après
porter lui-même les hommages de sa présence à leurs pieds. Là,
il demeurait un mois ou même une année ; ici, quatre mois ; ailleurs,
cinq ou six. Chez
huit mois :
révolution entière
moitié.
Tandis
dans les ermitages des anachorètes, il vit dix années couler pour
lui
« Nous voici arrivés, dit-il un jour, à
entre devant, fils de Soumitrâ, et annonce au rishi mon arrivée chez
lui avec Sîtâ. »
Entré dans la sainte cabane à cet ordre que lui donne son frère,
Lakshmana
« Il fut un roi, nommé Daçaratha ; son fils aîné, plein de force,
est appelé Râma : ce prince éminent est ici et demande à voir
dévoué et le frère puîné de ce resplendissant héros avec lequel
et son épouse je viens ici moi-même pour visiter le saint ermite. »
À ces paroles de Lakshmana : « Soit ! » répondit
pénitences, qui entra dans
la chapelle du feu, il dit ces mots,
mains réunies en coupe, à
Daçaratha, ce prince à la haute renommée, qui a nom Râma, attend
avec son frère et son épouse à la porte de ton ermitage. Il désire
voir ta révérence ; il vient ici lui apporter son hommage :
fais-moi connaître, saint anachorète, ce qui est à faire dans la
circonstance à
À peine le solitaire eut-il appris de son disciple que Râma venait
« Quel bonheur !
moi avec son épouse :
ici même ! Va ! que Râma, dignement accueilli avec son épouse et
Lakshmana, soit promptement introduit ici ! Et pourquoi ne
fait entrer ? »
Celui-ci entra donc, promenant ses yeux partout dans
Alors, environné de ses disciples, tous vêtus de valkalas
tissus
anachorète
Agastya, le plus excellent des solitaires, qui soutenait le poids
Lakshmana : «
sort ''du Sanctuaire'' et vient au-devant de nous, arrivés dans son
temple.
« Oh ! que de lumière dans ce nimbe du bienheureux ! » À ces mots,
le noble Daçarathide
belle Vidéhaine et Lakshmana les pieds du rishi dans ses mains : puis,
seyait à la civilité.
Alors, quand
courbé respectueusement : « Assieds-toi ! » lui dit cet homme à la
bien grande pénitence ; et, quand il eut honoré son hôte
manière assortie aux convenances et suivant
je suis charmé de toi, mon fils ! je suis content, Lakshmana, que vous
soyez venus tous deux avec Sîtâ me présenter vos hommages. Fils
de Raghou, la fatigue
En effet, Sîtâ est
quitté ses plaisirs.
« En
chose bien difficile ; car faiblesse et crainte, ce fut toujours la
nature des femmes. »
Ligne 4 009 ⟶ 4 001 :
inspirent une joie si grande. Mais indique-moi un lieu aux belles
ondes, aux nombreux bocages, où je puisse vivre heureux et content
sous le toit
Ouï ce pieux langage du pieux Raghouide, le plus saint des
anachorètes, le Devoir même en personne, le sage Agastya réfléchit
un instant et lui répondit en ces mots
« À deux yodjanas
Pantchavatî, lieu fortuné, aux limpides eaux, riche de fruits
doux et de succulentes racines. Vas-y, construis là un ermitage et
habite-le avec ton frère le Soumitride, observant la parole de ton
père telle
jeune homme sans péché, grâces au pouvoir acquis par ma pénitence
non moins
« Tu vois ce grand bois de bassins à larges feuilles : il vous faut
marcher au septentrion de cette forêt et diriger vos pas vers ce
banian. De là, quand vous serez parvenus sur les hauteurs de cette
montagne, qui
céleste. »
Aussitôt Râma, auquel Agastya avait tenu ce langage, de lui rendre
avec Lakshmana les honneurs dus et
solitaire, de qui la bouche était celle de la vérité. Puis,
ses pieds et partent avec Sîtâ, impatients
doivent habiter.
Ligne 4 039 ⟶ 4 031 :
Or, dans ces entrefaites, le grand vautour, fameux sous le nom de
Djatâyou,
et,
dit-il, apprends que je suis
le jour. » Le noble exilé, sachant
lui rendit ses hommages et lui demanda, plein de modestie,
jouissait
la curiosité : « Raconte-moi ton origine, mon ami ; dis-moi quelle est
ta race et ta lignée. »
À ces mots, le plus éminent des oiseaux : « Çyénî mit au monde
une fille avec
« Je suis né de ce Garouda avec mon frère aîné Sampâti : sache,
dompteur ''invincible'' des ennemis, que je suis Djatâyou, ''le
petit-fils'' de Çyénî. Je serai, si tu le désires, ton fidèle
Ligne 4 058 ⟶ 4 050 :
toi vous serez absents. »
« Soit ! dit le prince anachorète, accueillant son offre ; puis il
embrassa joyeux ce roi des volatiles, car il avait ouï raconter
mainte et mainte fois
héros, plein de vigueur, ayant confié Sîtâ la Mithilienne à
sa garde, continua de marcher vers
compagnie de
Quand Râma eut mis le pied dans la Pantchavatî, repaire des animaux
Ligne 4 069 ⟶ 4 061 :
la splendeur enflammée :
« Voici un lieu joli, fortuné, couvert de jeunes arbres tout en
fleurs : veuille bien nous bâtir ici, bel ami, un ermitage comme il
faut ! Non loin se montre, festonnée de lotus aux senteurs les plus
douces et brillants à
rivière de Godâvarî, pleine
des cygnes et troublée çà et là par ces troupeaux de gazelles, à
moyenne distance.
« Cette forêt est pure, elle est charmante, elle a mille qualités !
Fils de Soumitrâ, nous habiterons ici avec
compagnon. »
Ligne 4 089 ⟶ 4 081 :
Alors, quand il eut consacré une offrande de fleurs et sacrifié dans
le feu suivant les rites, il fit voir
enfant de Raghou. Celui-ci vint avec Sîtâ, vit la hutte de feuilles,
délicieux ermitage, et cette vue lui causa une joie suprême. Dans
son enchantement, il étreignit Lakshmana de ses deux bras, et lui
tint ce langage doux, ravissant
vive affection : « Je suis charmé que tu aies déjà fait un si grand
ouvrage : reçois donc maintenant cet embrassement de moi comme un
présent
par toi, bon fils, instruit dans le devoir, la reconnaissance et la
vertu. »
Après
Raghou, en compagnie de son épouse et de son frère, habita quelque
temps ces lieux riches de fruits et parés de fleurs, comme un second
Indra au sein
* * * * *
Tandis que le pieux Daçarathide coulait dans la forêt de pénitence
une vie heureuse,
saison. Un jour,
clartés du matin commencent à blanchir la nuit, il descendit à la
rivière de Godâvarî. Le fils de Soumitrâ, son frère, le front
incliné, une cruche à la main, le suivait par derrière avec Sîtâ :
« Voici arrivée, seigneur, dit alors celui-ci, une saison qui te fut
toujours agréable, où
nombreuses'' qualités.
« Il gèle ; le vent est âpre, la terre est couverte de fruits ; les
eaux ne donnent plus de plaisir et le feu est agréable. ''
temps où'' ceux qui mangent de
Dieux et les Mânes avec un sacrifice de riz nouveau, sont tous lavés
de leurs souillures.
« Nos jours
passages difficiles,
pleins de charme, quand le temps amène le milieu du jour. Maintenant,
frappées
frissonnantes
''la nuit'' fait briller au matin les forêts désertes.
« Le soleil, qui se lève au loin et dont les rayons nous arrivent,
enveloppés de la neige ou des brumes, apparaît maintenant sous
douce au toucher vers le milieu du jour ; et, sur le soir, il se colore
« Dans la ville, en ce moment, par attachement pour toi, Bharata,
consumé de sa douleur, Bharata, le Devoir même en personne, se livre
à de ''pénibles'' mortifications. Abandonnant et son trône, et
Ligne 4 144 ⟶ 4 136 :
la terre. Sans doute, environné des sujets, que leur dévouement
rassemble autour de lui, il se rend à cette heure même au fleuve
Çarayoû, mais son cœur
pour y faire avec nous ses ablutions.
«
modèle
en bouche dans
du proverbe. Comment, roi des enfants de Manou, comment Kêkéyî,
notre mère, elle, qui a pour fils le vertueux Bharata, elle, qui eut
pour époux Daçaratha, peut-elle être ce
Dans le temps que sa tendre amitié inspirait ces paroles au juste
Lakshmana, son frère, de qui
ton blâme devant moi à cette mère, qui tient le milieu entre
les nôtres : ne parle ici que de Bharata, le noble chef des
Ikshwâkides. »
Tandis
la Godâvarî : il accomplit dans cette rivière ses ablutions avec son
jeune frère et son épouse.
Quand il eut, suivant les rites, satisfait
les Mânes, il adora avec elle et Lakshmana le soleil, qui se levait
à
Dès que Râma eut terminé ses ablutions avec son épouse et le fils
de Soumitrâ, il quitta cette rive de la Godâvarî et revint à
son ermitage. Là donc, assis dans sa chaumière, entre Sîtâ et
Lakshmana, son frère, il
matières. Tandis que ce magnanime causait avec le Soumitride, le roi
des vautours se présenta et dit ces paroles au noble fils de Raghou :
« Héros à la grande fortune, à la grande force, aux grands bras, au
grand arc, je te dis adieu, ô le meilleur des hommes ; je retourne
en ma demeure. Il te faut apporter ici une continuelle attention à
meurtrier des ennemis,
Quand
reviendrai,
À ces mots, Râma et Lakshmana de répondre au monarque des oiseaux :
« Va donc, ô le meilleur des volatiles, mais à la condition de
revenir bientôt nous voir. » Quand le roi des vautours fut parti, le
fils de Raghou à
rentra dans sa chaumière avec Sîtâ.
Dans ce moment une certaine Rakshasî, nommée Çoûrpanakhâ,
sœur de ''Râvana, le'' démon aux dix têtes vint en ces lieux
mouvement spontané et vit là, semblable à un Dieu, Râma aux longs
bras, aux épaules de lion, aux yeux pareils aux pétales du lotus.
À la vue de ce prince beau comme un Immortel, la Rakshasî fut
enflammée
hideux, un caractère méchant, cette ignoble ''fée'', cruelle à
servir, qui marchait toujours avec la pensée de faire du mal à
Aussitôt elle prend une forme assortie à son désir ; elle
du héros aux longs bras, et, commençant par déployer sa nature de
femme, lui tient ce langage avec un ''doux'' sourire : « Qui es-tu, toi
qui, sous les apparences
épouse, avec un arc et des flèches, dans cette forêt impraticable,
séjour des Rakshasas ? »
Ligne 4 210 ⟶ 4 202 :
mit à lui tout raconter avec un esprit de droiture ; « Il fut un roi
nommé Daçaratha, juste et célèbre sur la terre ; je suis le fils
aîné de ce monarque et
mon épouse ; voici mon frère Lakshmana. Vertueux, aimant le devoir,
je suis venu demeurer dans ces forêts à
la voix de ma ''belle''-mère. Ô toi, en qui sont rassemblés tous
les caractères de la beauté, toi, si charmante,
elle-même, qui se manifeste aux yeux des mortels, qui es-tu donc,
toi, qui, femme craintive, te promènes dans le bois Dandaka, la plus
Ligne 4 221 ⟶ 4 213 :
ici et sans crainte. »
À ces mots, la Rakshasî, troublée par
alors cette réponse : « On
Rakshasî, je prends à mon gré toutes les formes ; et, si je me
promène seule au milieu des bois, Râma,
autels y périssent, anéantis par moi.
Rakshasas lui-même, nommé Râvana ; Vibhîshana,
répudié les mœurs des Rakshasas ; Koumbhakarna au sommeil prolongé,
à la force immense ; et deux Rakshasas fameux par le courage et la
vigueur, Khara et Doûshana. Ta vue seule
Râma : aime-moi donc comme je
Elle est sans charmes, elle est sans beauté, elle
égale ; moi, au contraire, je suis pour toi une épouse assortie et
douée, comme toi, des avantages de la beauté. ''Laisse''-moi dévorer
Ligne 4 238 ⟶ 4 230 :
après toi, mais de qui la vie est déjà terminée. Cela fait, tu
seras libre, mon bien-aimé, de te promener avec moi par toute la
contrée Dandaka, contemplant ici les sommets
des bois enchanteurs. »
Quand il eut ouï ce discours plus
héros aux longs bras avertit
Râma, cet orateur habile à tisser les paroles, se mit à dire ces
mots à Çoûrpanakhâ, mais pour se moquer :
« Je suis lié par
ta condition ne peut
frère puîné, qui a nom Lakshmana, beau, joli à voir,
caractère, plein
époux assorti à cette beauté, ''dont je te vois si bien douée'' ; il
est jeune, il a besoin
est
À ce discours, la Rakshasî, qui changeait de forme à sa volonté,
quitte Râma brusquement et se tourne avec ces mots vers Lakshmana :
« Aime-moi donc, ô toi, qui donnes
épouse assortie à ta beauté : tu auras du plaisir à te promener
avec moi dans la ravissante forêt Dandaka. »
À ce langage de Çoûrpanakhâ, le fils de Soumitrâ, habile dans
en ces termes : « Est-ce
servir un serviteur ? car je suis, ma haute dame, soumis à la volonté
de mon noble frère aîné. À toi, femme de la plus éminente
perfection, il te faut un homme de la plus haute fortune ; il
grands yeux, la plus jeune de ses deux épouses. »
Ligne 4 275 ⟶ 4 267 :
qui était une plaisanterie. Aussi courut-elle une seconde fois vers
ce Daçarathide à la grande splendeur, assis avec Sîtâ ; et,
folle
mon époux un long temps ! Que
Alors, avec des yeux semblables à deux tisons allumés, elle fondit
Ligne 4 286 ⟶ 4 278 :
la furie dans sa course, et ce héros à la grande force dit avec
colère à Lakshmana : « Fils de Soumitrâ, il ne faut pas jouer
ami !
Chasse à
dans sa conduite et folle au plus haut degré. »
Ligne 4 294 ⟶ 4 286 :
sous les yeux mêmes de Râma, et, tirant son épée, lui coupa le
nez et les oreilles. Ainsi mutilée dans son visage, la féroce
Çoûrpanakhâ remplit tout de ses cris et
fond du bois, comme elle était venue.
Ligne 4 304 ⟶ 4 296 :
À la vue de sa sœur étendue à terre, inondée par le sang, le nez
et les oreilles coupés, Khara le Rakshasa lui demanda, avec des yeux
rouges de colère : « Qui donc
douée de force et de courage, te promenais, pareille à la mort,
où bon te semblait sur la terre ? Quelle main parmi les Dieux, les
Gandharvas, les Bhoûtas et les magnanimes solitaires, possède
une vigueur si grande,
mutilation ? »
Il dit : à ces paroles de son frère jetées avec colère,
Çoûrpanakhâ répondit ces mots
bégayante : « ''
aux membres potelés, à la force puissante, aux grands yeux de lotus,
et doués de tous les signes où
de peaux noires et
et je ne saurais dire si ce sont des Dieux ou simplement des hommes.
«
la beauté dont elle est douée rayonne de toutes les parures. Je me
disposais dans la forêt à dévorer cette femme violemment avec ses
deux compagnons, mais je me vis réduite à
une misérable sans appui. Traînée dans le combat, malgré mes cris,
malgré ma résistance, vois ! quel outrage
toi, qui es mon protecteur ! »
À ces mots
Rakshasas noctivagues, semblables à la mort : « Deux hommes, armés
de traits, vêtus de peaux noires et
femme dans
que vous
veut boire le sang. »
Ligne 4 341 ⟶ 4 333 :
Soumitrâ, dit le vaillant Raghouide à Lakshmana, son frère, à la
vigueur éclatante, reste un instant près de ma chère Vidéhaine,
féroces. » Dès
sans mesure : « Oui ! » répondit Lakshmana, qui se mit à côté de la
''royale'' Vidéhaine.
Râma sur-le-champ attache la corde à son arc immense, orné
richement
adresse aux Démons ces paroles : « Retirez-vous
pas approcher davantage, si vous attachez quelque prix à votre vie :
retirez-vous, Démons nocturnes ! »
Ligne 4 354 ⟶ 4 346 :
À ces mots, les quatorze Démons, bouillants de fureur, la lance et
les javelots en main, répondirent, les yeux rouges de colère, à
Râma ; eux, qui avaient
l’héroïsme :
« Tu as fait naître la colère au cœur de Khara, notre bien
magnanime seigneur ; tu vas laisser ici ta vie, immolé par nous dans
le combat ! »
Ligne 4 364 ⟶ 4 356 :
sur Râma, les armes hautes et le cimeterre levé. Après un élan
rapide, les quatorze Démons noctivagues font pleuvoir sur lui avec
colère maillets
avec quatorze flèches brisa dans ce combat les armes de ces quatorze
Rakshasas. Ensuite, calme dans sa colère au milieu du combat,
Ligne 4 372 ⟶ 4 364 :
pareil au tonnerre de la foudre.
Les traits empennés
de feu. Ces flèches, semées
traversent de part en part les Démons et se plongent dans la terre,
où leur impétuosité les emporte, comme des serpents dans une
''molle'' taupinière.
Les dards luisante revinrent
eurent châtié les Démons. À la vue de ses vengeurs étendus sur la
terre, la Rakshasî, délirante de colère, trembla de nouveau et
jeta une clameur épouvantable. Aussitôt Çoûrpanakhâ
rapidement toute tremblante, en poussant de grands cris, vers la
région où demeurait son frère à la force puissante.
Ligne 4 388 ⟶ 4 380 :
* * * * *
À
de son frère, Khara,
cette femme revenue, sans
qui mangent la chair crue, pourquoi viens-tu encore verser ici des
larmes ?
« Sans doute, il
attentifs, dévoués à moi,
fût-ce que par attachement à leur vie ! Dis-moi quelle est donc la
cause, noble dame, qui te ramène ici : pourquoi gémis-tu, les yeux
Ligne 4 404 ⟶ 4 396 :
larmes et lui répondit en ces termes : « Ces héros des Rakshasas, que
tu avais envoyés, la lance au poing, Râma seul les a tous consumés
avec le feu de ses flèches. À la vue de cette prouesse, à
de ces guerriers tombés sur la terre, comme des arbres sapés à
la racine, je fus saisie
troublée, consternée, épouvantée ; et je viens, ne voyant partout
que terreur, me réfugier sous ta protection !
« Arrache toi-même, Démon nocturne, cette épine qui est venue
''Autrement'', moi, qui te parle, je vais jeter là ma vie devant toi,
lâche, qui
main
À sa cruelle sœur, qui
Khara de répondre avec ce langage plein de véhémence au milieu des
Rakshasas : « Ce Râma, qui
un être sans force,
ses méfaits ! Arrête donc ces larmes ! chasse-moi cette terreur !
demeures
sang chaud de Râma, frappé de cette massue et couché sans vie sur
la surface de la terre !
« Une fois Râma tué et son frère avec lui, tu pourras bientôt
faire de Sîtâ un festin, et tes cuisiniers
tendres, fines, délicieuses. »
Ligne 4 435 ⟶ 4 427 :
rang des Rakshasas : « Gloire à toi, héros, à toi, le seigneur
des Rakshasas, qui as fait germer en ta pensée le désir noble et
vaillant
« Sors donc en diligence pour tuer ce méchant !
sang de Râma sur le front même de la bataille ! »
À peine eut-il entendu ces ravissantes paroles, dont Çoûrpanakhâ
flattait son oreille : « Fais, dit-il au général de ses armées, qui
quatorze mille de ces Rakshasas, héros superbes,
formidable, qui obéissent à ma pensée et ne reculent jamais dans
les combats ; féroces, artisans de cruautés, semblables en couleur
Ligne 4 450 ⟶ 4 442 :
Khara, bouillant de colère, monta dans son char, pareil aux cimes de
Mérou et décoré avec un or épuré, tout plein
diversité des pierreries, égal au ciel en splendeur, où ''
habile'' avait sculpté des poissons, des fleurs, des arbres, des
montagnes, le soleil et la lune en or, des troupes
étoiles en argent ; char attelé de vigoureux coursiers, mais doué
lapis-lazuli, où brillait en or
Aussitôt que les Rakshasas à la force terrible virent Khara placé
Ligne 4 465 ⟶ 4 457 :
cria du haut de son char à tous les Rakshasas : « ''En avant'' !
sortez ! » Soudain toute cette armée, portant massues, lances et
tridents,
celui du grand Océan.
Ligne 4 471 ⟶ 4 463 :
Tout à coup une grande nuée fit tomber sur le Démon, qui
sinistre, dont
Un sombre nuage enveloppa de son manteau noir, liséré de rouge,
ressemblait alors au tison ardent.
Le ciel brilla
le crépuscule, et des oiseaux, qui planaient au milieu des airs,
se mirent à pousser des cris aigus, tournant la tête du côté où
Khara
clarté, et
son armée
À la vue de ces grands, de ces épouvantables présages, qui se
levaient partout simultanément, le roi de cette armée formidable dit
en riant à tous les Rakshasas : « Je ne fais nul cas de ces pronostics
horribles à voir, qui se lèvent autour de moi ;
certain dans cette bravoure, dont ma force est la source ! »
Ligne 4 497 ⟶ 4 489 :
Alors que le Démon à la bouillante audace, Khara, fut arrivé dans
le voisinage de sa chaumière sainte, Râma vit avec son frère les
sinistres augures. Et
langage :
« Héros, nous tenons sous la main une victoire et
défaite, car mon visage est serein, et tu vois comme il brille ! Mais,
dans cette conjoncture, il est
aux possibilités futures, comme
Prends donc, armé de ton arc et tes flèches à la main, prends
Sîtâ et cours la mettre à couvert dans un antre de la montagne,
environné
événements qui sont encore dans le futur
yeux. »
À ces mots de son frère, Lakshmana prend aussitôt son arc et ses
flèches ; puis, accompagné de Sîtâ, il se rend vers la caverne
accès impraticable. À peine Lakshmana fut-il entré dans la grotte
avec Sîtâ : « Bien ! » dit Râma, qui attacha alors solidement sa
cuirasse. Dès que le vaillant Raghouide fut paré de cette armure
aussi brillante que le feu, il resplendit à
vient à son lever de chasser les ténèbres.
De tous côtés,
également pleine de bannières, de cottes maillées,
armes, et poussant de profondes clameurs.
Ligne 4 527 ⟶ 4 519 :
le combat. Son arc empoigné dans une main et ses flèches tirées
du carquois, il se tint prêt à combattre, emplissant toute
avait
ne rendait que plus difficile à supporter la flamme de son regard,
aussi flamboyant que le feu à la fin
À
dans une profonde stupéfaction et
combat, immobiles comme une montagne.
À peine Khara, le roi des Rakshasas, eut-il vu toute son armée
glacée par la stupeur,
voix pleine de véhémence : « Il
traverser ici, et cependant voici que
entassée dans un même lieu : sache donc en vérité, bel ami, quelle
raison a déterminé ce mouvement. » Aussitôt Doûshana pousse
rapidement son char hors de
armes déjà levées. Il reconnaît que
terreur, il revient et le Rakshasa fait ce rapport au frère puîné
de Râvana : «
front de bataille : toute
pas à
ennemis. »
À ces mots, Khara
char vers le vaillant rejeton de Kakoutstha, comme Rahou fond sur
poussé au combat par
derrière lui en phalange profonde, avec le bruit des nuages, dont
Alors, pleins de colère, ces Démons noctivagues firent tomber
sur
variés dans les formes.
Il en reçut toutes les flèches ''
reçoit les tributs des fleuves. Le corps percé de ces dards cruels,
Râma en fut aussi peu troublé
coups nombreux de la foudre enflammée.
Dans le combat, il envoyait en masse aux Démons ses dards ornés
mort. Ces traits, volant avec leurs ailes de héron à travers les
phalanges des ennemis, ôtaient la vie aux Démons
aussi prompte que les malédictions des plus saints pénitents.
Il était de ces flèches, qui partaient de
entre elles par aucun lien et qui
terre, après
Ailleurs, tranchées par les dards ''en forme de croissant'', les têtes
des ennemis tombent par milliers sur la terre, où leur bouche agite
convulsivement ses lèvres pliées.
En ce moment, réfugiés sous
Doûshana, ces débris
les flèches de Râma, dit au général de ses troupes, guerrier à la
vigueur épouvantable, au cœur plein de courage : « Héros, que
ranime la valeur de mon armée ! Que
vais précipiter au séjour
Quand Doûshana eut aiguisé leur courage ''émoussé'' et rendu à
de Kakoutstha avec la même fureur que jadis le Démon Namoutchi
crainte, parce
eux-mêmes sur Râma une seconde fois, armés par divers projectiles.
Empoignant les tridents aigus, les javelots barbelés, les épées et
Ligne 4 599 ⟶ 4 591 :
toutes leurs armes en morceaux ; puis, de ravir ''sans relâche'' à
coups de flèches dans ce dernier combat le souffle de la vie à ce
reste des Rakshasas. Le héros aux longs bras marchant, comme
jouait, dans le cercle même des mauvais Génies, coupait lestement et
les bras et les têtes.
Ligne 4 606 ⟶ 4 598 :
vigueur épouvantable saisit une massue horrible à voir et pareille
à une cime de montagne. Armé de cette grande massue toute revêtue
de feuilles
de clous en fer à la pointe aiguë, terreur enfin de toutes les
créatures et qui, semblable à un grand serpent, frappe
écrasant comme la foudre même du tonnerre, pile et broie les membres
de ses ennemis, le vigoureux Doûshana fondit, pareil au Trépas, sur
le ''vaillant'' Râma, tel que jadis on vit le démon Vritra
contre le puissant Indra.
Voyant Doûshana, enflammé de colère,
lui donner la mort, le prompt guerrier de trancher avec deux
flèches les deux bras armés et décorés de ce fier Démon, qui
se précipitait sur lui dans le combat.
échappant à la main coupée, tomba sur le champ de bataille avec
le bras mutilé comme un drapeau de Mahéndra tombe du faîte de son
temple ; et Doûshana lui-même fut abattu mourant sur le sol avec ses
deux bras coupés, tel
ses défenses. Alors, voyant Doûshana étendu sur la terre avec sa
massue, toutes les créatures
criant : « Bien ! bien ! »
Le champ de bataille était vide de combattants, car le feu des
flèches de Râma les avait tous dévorés ; et, tel que dans le
Niraya[21], le sang et la chair en avaient détrempé
uns, percés
autres se lamentent ; ceux-là fuient comme des insensés devant les
dards qui les poursuivent. Râma, dans cette journée, immola quatorze
milliers de Rakshasas aux exploits épouvantables ; et cependant il
était seul, il était à pied, et ce
[Note 21 : Le Tartare indien.]
Le Rakshasa nommé Triçiras, ''ou le Démon aux trois têtes'', se jeta
devant le roi de
front tourné vers le vaillant Raghouide, et lui tint ce langage :
« Confie-moi ta vengeance, roi valeureux, et va-
promptement : tu verras bientôt le vaillant Râma tomber sous mes
coups dans le combat. Ou je serai sa mort dans le combat, ou il
Ligne 4 647 ⟶ 4 639 :
Calmé par ce langage de Triçiras, qui se précipitait de lui-même
à la mort, Khara joyeux lui répondit en ces termes : «
soit donc ainsi ! » Ensuite le Démon plein
congé dans le combat avec ce mot : « Va ! » élève bruyamment son arc
et
Alors
têtes et le vaillant Raghouide un combat tumultueux, âpre, où
chacun désirait tuer, où le sang était versé comme de
Ensuite Triçiras envoya trois dards aigus
du vaillant Râma, qui, plein de courroux, jeta ces mots avec
dépit : «
maintenant reste ferme devant moi, ''si tu
À ces mots, le héros irrité de plonger dans la poitrine de
Ligne 4 665 ⟶ 4 657 :
plein de vigueur abattit ses coursiers avec quatre et quatre flèches
de fer, il brisa son char avec sept ; il renversa le cocher sous les
coups de huit traits, il trancha
drapeau arboré.
À la vue
mentalement devant son rival ; mais, tirant son épée
rapide, il
eut-il vu ce mauvais Génie sauté lestement hors de son grand char,
aux yeux de lotus, riant de colère, coupa les trois têtes du monstre
avec six dards acérés. Vomissant un sang ''hideux'', sa vie tranchée
Ligne 4 681 ⟶ 4 673 :
Khara fut consumé de colère et son âme fut prise de la fièvre des
batailles. Mais, devant le spectacle de ces bataillons détruits,
il ne put
anéanti cette armée et renversé les deux héros. À la pensée
magnanime Daçarathide avait signalé son héroïsme, le tremblement
de la peur
Néanmoins, rappelant sa fermeté, le noctivague héros
courage, affermit son pied de nouveau pour le combat.
Il banda son grand arc et fit voler sur Râma des flèches
courroucées, reluisantes
serpents ''de flammes''. Mais, tel
gouttes de la pluie, Râma de les briser aussitôt avec ses flèches
de fer, irrésistibles et semblables à des feux pétillants
aiguës que Râma et Khara
arrive quand elle est pleine de ces nuages où la foudre allume ses
éclairs.
Le Daçarathide aux longs bras de frapper au milieu du sein par dix
flèches ce Khara, de qui sa main rabaissa
enflammé de fureur, plongea lui-même sept flèches dans la poitrine
du Raghouide, aussi versé dans le devoir
si nombreux que le Rakshasa lui avait envoyés de son arc, le
Kakoutsthide brillait du même éclat
Brandissant alors son grand arc, semblable à celui de Çakra même,
sa main
dompteur invincible des ennemis perça la poitrine avec une et les
deux bras au Démon avec deux autres : il abattit les quatre chevaux
par quatre dards en demi-lune. Dans sa colère, il en dépensa deux
pour jeter le cocher au noir séjour
force en mit sept pour casser
mains de Khara. Le noble fils de Raghou frappa le joug
et le coupa net ; il trancha les cinq drapeaux avec cinq traits, dont
Alors, son arc brisé, ses chevaux tués, son cocher sans vie,
Ligne 4 725 ⟶ 4 717 :
Khara, tout bouillant de colère, jette à Râma, comme un tonnerre
enflammé, sa massue ornée de bracelets
horriblement effrayante, enveloppée de flammes, comme un grand
météore de feu. Des arbrisseaux et même des arbres, dans le
voisinage desquels cette arme passa, il ne resta plus que des cendres.
En effet, le monstre avait conquis par les efforts
pénitence cette massue divine, que lui donna jadis le magnanime
Kouvéra.
Ligne 4 736 ⟶ 4 728 :
massue, prit dans son carquois le trait du feu, semblable à un
serpent, et décocha cette flèche resplendissante comme la flamme.
Le trait
son vol au milieu des airs et la fit tournoyer plusieurs fois sur
elle-même.
Ligne 4 745 ⟶ 4 737 :
En ce moment le Raghouide à la vigueur indomptable, homicide
''généreux'' des héros ennemis, adresse à Khara ce discours
voix terrible : « Ces paroles, que proclamait ta jactance par le désir
impatient de ma mort : « Je boirai ton sang ! » tu les vois démenties
à cette heure, ô le plus vil des Rakshasas ! Voici que ta massue,
consumée par ma flèche,
frappée ; ce fut assez pour la détruire et la jeter sans force sur la
terre. »
« Je ne veux pas
la bouche menteuse : rassemble tes moyens pour un nouveau combat ! Je
te ravirai le souffle, comme jadis Souparna ravit
abjecte, à la vie méchante, fléau des hommes qui vivent dans
la vertu !
tristesse qui a son origine dans la crainte et sa racine en toi,
fléau perpétuel de nos saints brahmanes. Âme féroce, nature
abjecte, ce
À ces mots, le Démon noctivague jeta ses regards de tous les
Ligne 4 768 ⟶ 4 760 :
évasés de ses lèvres, arracha ce grand arbre : il courut, poussa un
cri, et, visant Râma, lui jeta rapidement sa masse, en criant :
« Tu es mort ! » Mais son auguste ennemi de couper avec un torrent de
flèches le projectile feuillu dans son vol. Il conçut une brûlante
colère, ''un désir impatient'' de tuer Khara dans cette bataille. Tous
les arbres que celui-ci prenait, le noble meurtrier de ses ennemis,
Râma les tranchait
courbées.
Ligne 4 779 ⟶ 4 771 :
Aussitôt, mêlé au chant de voix mélodieuses, il se répandit
au sein de
acclamations : « Bien ! bien ! » Une pluie de fleurs tomba au milieu du
champ de bataille sur le front même de Râma, et
ciel'' crier à tous les points cardinaux : « Le scélérat est mort ! »
Depuis ce temps, Râma joyeux, entre Lakshmana et son épouse,
avait rassurée, Sîtâ, aux yeux charmants de gazelle, coula dans cet
ermitage une vie agréable, environné des honneurs que lui rendaient
Ligne 4 792 ⟶ 4 784 :
Quand Çoûrpanakhâ vit les quatorze mille Rakshasas tués,
terre, et que cet exploit, si difficile à beaucoup
pleine
Là elle vit, assis entre ses conseillers, devant son char, comme le
fils de Vasou au milieu des Maroutes, ce Râvana, le fléau du monde,
trônant sur un siége
tout flamboyant sur un autel
de sa cour admirable, avec ses dix visages, ses vingt bras, ses yeux
couleur de cuivre et sa vaste poitrine ; elle le vit marqué des signes
naturels où
ses longs bras, ses dents blanches, sa grande figure, sa bouche
toujours béante, comme celle de la mort, héros semblable à une
Ligne 4 810 ⟶ 4 802 :
Sillonné des blessures faites par les traits du tonnerre dans les
guerres des Asouras contre les Dieux, son corps étalait aux yeux
les nombreuses cicatrices des plaies
infligées avec la pointe de ses défenses, et les traces multiples
que le disque ''acéré'' de Vishnou avait laissées en tombant sur lui
dans ses combats avec les Immortels.
[Note 22 : Éléphant céleste, la monture
Alors, au milieu des ministres de son frère, Çoûrpanakhâ furieuse
jette ce discours plein
« Plongé sans aucun frein dans tes jouissances de toutes les choses
désirables, tu ne songes pas
terrible, auquel il est bien temps de songer.
« Khara est tué, Doûshana est tombé mort, et tu ne le sais pas !
Tu ignores que ces deux héros gisent percés de flèches dans le
Djanasthâna. Râma seul, à pied, avec un bras
quatorze milliers de Rakshasas à la vigueur enflammée ! La sécurité
est rendue aux saints, la joie est ramenée dans tous les alentours de
Ligne 4 831 ⟶ 4 823 :
même ta province du Djanasthâna !
« Et toi, Râvana, livré à
disposent de ta volonté, tu
Ensuite, Râvana de jeter avec colère au milieu des ministres ces
questions à Çoûrpanakhâ : « Qui est ce Râma ?
Quelle est sa force ? Quel est son courage ? Pour quel motif a-t-il
pénétré dans cette forêt Dandaka, si difficile à pratiquer ? Avec
Ligne 4 843 ⟶ 4 835 :
À ces mots du roi des Rakshasas, la furie pleine de colère se mit à
raconter ce
le fils du roi Daçaratha ; il a de longs bras, de grands yeux ; son
vêtement est un tissu
beauté est égale à celle de
enflammées, pareilles à des serpents au poison mortel. Quatorze
milliers de Rakshasas aux exploits épouvantables ont succombé
sous les traits acérés de lui seul, archer incomparable. À peine,
seigneur, ai-je pu seule échapper à la mort : «
a dit Râma ; et la seule grâce
ainsi la vie par dédain. Il a un frère
vigoureux, plein de vertus, attaché, dévoué à lui, marqué de
signes fortunés, égaux à ceux de Râma : son nom,
« Une dame illustre, aux grands yeux, à la taille charmante, si
déliée
légitime de Râma : elle se nomme Sîtâ. Je
la face de la terre une femme aussi belle, ni aucune nymphe, soit
Kinnarî, soit Yakshî, ou Gandharvî, ni même une déesse !
qui serait
il vivrait aussi heureux parmi les mortels
Dieux. Ainsi, elle, de qui la beauté ne voit rien de comparable à
elle-même sur la terre, elle sera ici une épouse assortie à toi,
Ligne 4 869 ⟶ 4 861 :
digne de Sîtâ.
« Si mon discours te sourit,
Rakshasas ; car tu
te promet. »
Après
plan avec justesse,
et des inconvénients : « Voilà ce qui est à faire ! » se dit-il,
arrêtant sa résolution ; et,
dessein, il se dirigea vers la magnifique remise où
char. Quand il se fut rendu là en secret, le roi des Rakshasas jeta
cet ordre à son cocher : « Que
À ces mots, le cocher aux mouvements agiles
même ce véhicule beau, resplendissant, muni de tous ses harnais,
orné de tous ses drapeaux. Le fortuné monarque des Rakshasas monte
sur le char fait
volonté, ''quoique'' attelé
visages de vampires. Ensuite, il dirige sa marche vers ''
souverain maître des rivières et des fleuves.
Le Démon passa au rivage ultérieur et vit dans un lieu solitaire,
pur, enchanteur,
un Rakshasa, nommé Mâritcha, qui, ses cheveux roulés en djatâ,
une peau noire de gazelle pour vêtement, vivait dans
toute nourriture.
Il
les honneurs exigés par
discours lui tint ce langage :
« Mâritcha, écoute maintenant les paroles que va prononcer ma
bouche, je suis affligé ; et mon suprême asile dans mon affliction,
Naîrritas[23], je ne trouverais nulle part, vaillant héros, un
compagnon semblable à toi dans les combats. Ne veuille point ici
ta sainteté briser mon affection : je
accomplis ma prière.
[Note 23 : Géants ou Démons.]
« Tu connais le Djanasthâna, où habitaient Khara, mon frère,
Doûshana à la grande vigueur, Çoûrpanakhâ, ma sœur, Triçiras,
ce Démon vigoureux, ''toujours'' affamé de chair ''humaine'', et
trait. Ils avaient mis là, suivant mon ordre, leurs habitations et
au devoir. Là, vivaient quatorze milliers de Rakshasas aux prouesses
épouvantables, qui marchaient à la volonté de Khara et
maintes fois signalés en frappant le but ''avec le javelot ou la
flèche''.
« Or, il est arrivé tout à
immense, campés dans le Djanasthâna, en sont venus aux mains avec
Râma, qui les a complètement battus dans la guerre.
« ''Oui'' ! Râma seul, à pied, avec son bras
sur le champ de bataille dans le Djanasthâna par ses flèches,
semblables à des serpents, ces quatorze milliers de Rakshasas, contre
qui
parole injurieuse. Il a tué Khara dans le combat, il a tué Doûshana
et Triçiras, il a rendu la sécurité aux saints et ramené le
bonheur dans toutes les contrées de la forêt Dandaka.
« Et cet être, qui a déserté le devoir, qui même ne connaît pas
le devoir, qui trouve son plaisir dans le mal des créatures, il porte
un vêtement
avec lui et son bras est armé
« Il a, ''dis-je'', une épouse, célèbre sous le nom de Sîtâ :
une femme aux grands yeux, douée parfaitement de jeunesse et de
beauté, charmante comme Çri même Apadma.
dans le Djanasthâna,
sois mon associé dans cette expédition ! Avec toi pour compagnon,
debout à mes côtés, Démon à la grande vigueur, je ne crains pas
tous les Dieux en bataille, Indra même à leur tête.
« Métamorphosé en gazelle au pelage
rends-toi à
Sîtâ. Sans doute, sortant de sa chaumière aussitôt
vu sous la forme de gazelle : « Prenez vivante cette ''jolie bête'' ! »
dira-t-elle à son époux ainsi
partis,
Sîtâ sans appui, comme
le pied léger de la gazelle, ta révérence peut fuir aisément : elle
a
de cette mission. Parmi ces Rakshasas qui furent tués dans le
Djanasthâna, il
excepter Doûshana, ou Triçiras, ou Khara même ! Quand Râma et
Lakshmana seront occupés à suivre ta piste, quand
Sîtâ et donné à ma sœur la joie de cette vengeance, quand le rapt
de son épouse aura sans peine étouffé dans le chagrin la vigueur
Ligne 4 963 ⟶ 4 955 :
toute sécurité. »
lutte avec Râma, joignit les mains, et,
parce
Râvana ce langage salutaire, convenable, dicté par la vérité.
« Sire, il est aisé de rencontrer des hommes qui ne disent jamais que
des choses agréables : au contraire, il est difficile de trouver un
homme qui sait dire ou entendre une chose désagréable, mais utile.
Renseigné par des espions négligents, tu ne sais pas sans doute
comme est le courage, comme est la vigueur de ce Râma, semblable,
soit à Varouna, soit au grand Indra même. Si la guerre
entre vous deux, sache, roi des Rakshasas, que ton peuple entier va
flotter dans un extrême péril.
« Fasse le ciel que le salut soit pour tous les Rakshasas sur la
terre ! Fasse le ciel, mon ami, que Râma dans sa colère ne jette pas
tous les Rakshasas hors du monde ! Fasse le ciel que cette fille du roi
Djanaka ne soit pas née pour être comme la fin de ta vie ! Fasse le
ciel
« Râma
vrai, ou tu as mal entendu.
« Ayant su que ''
de qui ''toute'' parole était une vérité : « Je ferai ''ce
promis'' ! » dit ce héros, le Devoir même en personne, et là-dessus
il partit aussitôt, pour les forêts.
une chose agréable à Kêkéyî et au roi son père
son royaume et ses voluptés pour
« Comment veux-tu lui ravir sa princesse du Vidéha, quand elle est
défendue par son courage et sa vigueur ? Insensé,
voulais ravir sa lumière au soleil ! Quiconque aurait enlevé à Râma
cette épouse
Daçaratha, ne pourrait sauver sa vie, eût-il trouvé même un asile
chez les treize immortels !
« Si tu veux conserver ton royaume, ton bonheur, tes voluptés, ta
vie, garde-toi bien jamais
vigueur fut donnée sans mesure à ce héros, de qui la fille du roi
Djanaka est
chère à lui-même que sa vie. Il ne
bras vigoureux de son époux, que de prendre même la flamme du feu
allumé !
« Retourne à la ville, dépouille ta colère, sache te placer dans un
juste milieu, délibère avec tes conseillers suivant que les affaires
sont graves ou légères. Entoure-toi de tous les ministres, consulte
dans toutes les affaires Vibhîshana, le prince des Rakshasas : il
te dira toujours ce
Tridjatâ, ''la femme anachorète'', exempte de tout défaut, parvenue
à la perfection et riche
roi des rois, le plus sage conseil. Quant aux affections irritantes,
que dut naturellement verser dans ton cœur ce qui est arrivé, soit
Ligne 5 028 ⟶ 5 020 :
se refuse au médicament :
« Comment donc viens-tu me jeter ici, Mârîtcha, ces discours sans
utilité et qui ne peuvent absolument fructifier, comme le grain semé
dans une terre saline ? Il est impossible que tes paroles
la crainte de livrer une bataille à ce fils de Raghou, enchaîné à
des observances religieuses, esprit stupide, et qui
mère et son père lui-même,
des bois sur
cette ''belle'' Sîtâ, aussi chère à lui-même que sa vie !
une résolution bien arrêtée ! elle est écrite dans mon cœur : les
Asouras et tous les Dieux, Indra même à leur tête ne pourraient
effacer !
« ''Si tu ne fais pas la chose de bon gré'', je te forcerai même à la
faire malgré toi : quiconque, sache-le, se met en opposition avec
les rois ne grandit jamais en bonheur ! Mais si, ''grâces à toi'', mon
dessein réussit, Mârîtcha, je donne en récompense à ta grandeur
et
sorte, ami, que
affaire est arrêté de manière que nous devons manœuvrer ''de
concert, mais'' séparés. Si tu jettes un regard sur ma famille, mon
Ligne 5 053 ⟶ 5 045 :
redoutable dans ce Râma, de qui l'''univers'' a déserté la fortune ?
« Ni Râma, ni quelque âme que ce puisse être chez les hommes,
aussitôt que je tiendrai la Mithilienne dans mes bras. Toi, revêtu
des formes que va te prêter la magie, éloigne ces deux héros de
fuiras ensuite
de la mer immense et sans limite, que pourront te faire tous les
efforts du Kakoutsthide réunis à ceux de Lakshmana.
« Quand tu as vu Indra avec son armée, Yama et le Dieu qui préside
aux richesses, céder la victoire à mon bras, comment Râma peut-il
encore
« De sa part, ta vie est incertaine, si tu parais devant lui ; mais, de
la mienne, ta mort est sûre, si tu empêches mon dessein : ainsi pèse
comme il faut ces deux lots dans ta pensée, et fais ensuite ce qui
Ligne 5 072 ⟶ 5 064 :
Traité par le monarque des Rakshasas avec un tel mépris, Mârîtcha,
le Démon noctivague lui répondit à
« Quel artisan de méchancetés, Génie des nuits,
cette voie de perdition, où tu vas entraîner dans ta ruine, et la
ville, et ton royaume, et tes ministres ? Qui voit avec peine, qui voit
Ligne 5 079 ⟶ 5 071 :
fut-elle indiquée ? Ce sont de noctivagues Démons sans courage,
tes ennemis, bien certainement, et qui désirent te voir périr dans
« Quoi ! on ne livre pas tes conseillers à la mort
eux, à qui les Çâstras commandent, Râvana, de
penchant du précipice, où te voilà monté ''pour y tomber''.
« Tu mets plus de légèreté que la corneille à chercher une guerre
avec Râma : quelle gloire sera-ce donc pour toi
armée ?
« Tu
devant ton projet, tu
ton bien ; car les hommes, que la mort a déjà rendus semblables aux
âmes des trépassés, ne sont plus capables de recevoir les présents
qui viennent de leurs amis.
« Tue-moi ! ce sera un mal pour moi seul, mais un bien pour toi, si
ma mort peut rompre entièrement ce funeste dessein. Quand tu
tué
dans ton palais, sans que tu aies aventuré ton pied dans une faute à
ami des combats, tu ne reçois pas encore mes paroles : que dois-je
faire ?
que tu veux !
« Pour sûr, la mort est déjà près de toi, monarque des
Rakshasas !
chose
Quand le Démon Râvana entendit Mârîtcha dire : « Je ferai ''ce que
tu veux'', » il se mit à rire et lui tint joyeux ce langage : « Eût-il
une force égale à celle
Kakoutsthide, qui a perdu son royaume, qui a perdu ses richesses, que
ses amis ont abandonné et qui est relégué dans une forêt ?
« Comment ta grandeur peut-elle craindre au moment où je lui signifie
mes ordres, moi qui ai vaincu et réduit les trois mondes sous ma
puissance ?
« Tu es habile dans
la course : quand tu auras fasciné la Vidéhaine, sois prompt à
disparaître. Mes ordres accomplis et les deux Raghouides égarés
dans les bois, reviens aussitôt vers moi,
de compagnie à la ville. Satisfaits
et trompé ses deux compagnons, nous marcherons alors en pleine
sécurité et
Mârîtcha, tombé dans le plus grand des périls et persuadé
y trouverait sa mort, consterné, tremblant, pâle
troublée par la crainte, Mârîtcha, voyant Râvana déterminé :
« Marchons ! » dit-il au roi des noctivagues Démons, après
eut soupiré mainte fois. Cette parole comble de joie le monarque des
Rakshasas, qui
« On reconnaît ta grande âme dans ce mot, que tu dis là comme de
toi-même : te voilà donc revenu, Mârîtcha, à ta propre nature.
Monte promptement avec moi dans ce char aux ornements
lui-même
Dandaka, et le roi des Rakshasas bientôt aperçut avec Mârîtcha
magnifique, et Râvana tient ce langage à Mârîtcha, en prenant sa
main : « Voici
de bananiers : exécutons sans tarder, mon ami,
amène ici. » Celui-ci, à ces mots de Râvana, déploie toute sa
promptitude, rejette au même instant ses formes de Rakshasa et
devient, objet ravissant pour toutes les créatures, une gazelle
variée de cent mouchetures
le soleil, de lapis-lazuli et
autour desquelles
Le Démon, changé en gazelle, alla et vint devant la porte de Râma.
Ligne 5 153 ⟶ 5 145 :
pensées en lui-même :
« Un être, qui veut le bonheur de son maître ou qui désire le ciel,
doit exécuter sans balancer ce
il
et
Mârîtcha, qui avait conçu une idée si généreuse et fait ''sans
Ligne 5 167 ⟶ 5 159 :
À la vue de cette gazelle, ''errante'' au milieu du bois,
resplendissante du vif éclat de
variés
aux membres ornés par toutes les sortes de gemmes, toute brillante de
lumière et charmante à voir, avec des oreilles où se mariaient les
couleurs des perles et du lapis-lazuli, avec un poil, une peau, un
corps
La fille du roi Djanaka, Sîtâ au corps séduisant, tout
émerveillée de cette gazelle aux poils
perles et de corail, avec une langue rouge comme le soleil, avec
une splendeur pareille à la route étincelante des constellations,
Ligne 5 180 ⟶ 5 172 :
exorde un sourire :
« Vois, Kakoutsthide, cette gazelle toute faite
admirablement ornés de pierreries, être merveilleux, que son caprice
amène ici de lui-même ! Certes ! fils de Kakoutstha, ce
tort que tout le monde aime la forêt Dandaka, si
gazelles
« De cette gazelle, mon noble époux, que
doucement sur la peau étalée dans ma couche et brillante comme
mais cet animal ravit mon âme
''si charmant''. »
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Soumitrâ : « Vois, Lakshmana, le désir que cette gazelle fit naître
à ma Vidéhaine : la beauté supérieure de son pelage est cause,
vraiment ! que bientôt cette bête aura cessé
monarque des hommes, il te faut rester sans négligence auprès de
cette fille des rois
avec une de mes flèches. Après que je
enlevé sa peau, je reviendrai, Lakshmana,
toi, ne bouge pas, que je ne sois de retour ici !
Voyant cette gazelle
céleste[24], Lakshmana, plein de soupçon, ayant roulé plus
fois cette pensée en lui-même, tint ce langage à son frère :
« Héros, voilà cette forme prestigieuse dont se revêt souvent un
Démon appelé Mârîtcha, comme jadis il nous fut raconté par de
saints anachorètes, semblables au feu. Beaucoup de rois, armés
furent tués dans le bois par ce Rakshasa, métamorphosé en gazelle.
[Note 24 : La tête
gazelle'', qui est la forme de cette constellation dans la sphère
indienne.]
« Il
monde cette association ''contre nature'' de
Réfléchis bien à cela. Cet animal aux cornes de perle et de corail,
lui, dont les yeux sont des pierres précieuses,
gazelle :
À ces paroles du Kakoutsthide, Sîtâ, pleine de joie et
fascinée par cette métamorphose enchanteresse, interrompit Lakshmana
et dit avec son candide sourire : « Mon noble époux, elle me ravit le
cœur ! amène ici, guerrier aux longs bras, cette gazelle charmante ;
elle servira ici pour notre amusement. Ici, dans notre lieu
à voir, des vaches grognantes et des singes cynocéphales. Mais je
ni rien qui fût, pour la douceur, la vivacité et la splendeur,
comparable à celui-ci, le plus admirable des quadrupèdes.
« Si elle se laisse prendre vivante par tes mains, cette jolie bête,
elle fera naître ici
comme un être merveilleux. Et, quand, un jour, le temps de notre exil
dans les bois révolu, nous aurons été rétablis sur le trône, elle
servira encore, cette gazelle,
Mais,
à quatre pieds, ne se laisse pas saisir tout vivant, sa peau du moins
nous prêtera un brillant ''tapis''.
mon humble siége
abattu ''sous ta flèche''. »
Elle dit ; et le beau Râma, à
cette gazelle merveilleuse, adresse, fasciné lui-même, ces mots à
Lakshmana : « Si la gazelle que je vois maintenant, fils de Soumitrâ,
est une création de la magie,
la tuer, car elle est fortement
bosquets charmants du Nandana, ni dans les bocages du Tchaîtraratha,
il est impossible de voir une gazelle qui ait une beauté égale à
la beauté de cette gazelle : combien moins, fils de Soumitrâ,
pourrait-on voir sur la terre !
« Cette gazelle ressemble à de
sont de corail : des étoiles
pelage'' et deux lunes demi-pleines
En effet, de qui ne séduirait-elle point
nonpareille, cette gazelle au corps infiniment gracieux, au visage de
nacre et de perle ?
« Mais, si la gazelle que voici est la même qui a tué, comme tu me
dis, Lakshmana, des chasseurs venus
elle est ce magicien qui rôde sous une forme de gazelle dans les
forêts et qui a massacré des fils de roi et des rois vigoureux,
donnée par elle à tant de princes qui vinrent exercer dans la chasse
leur arc sans pareil !
« Je tuerai, moi ! cette reine des gazelles, on
toi, héros, veille ici
Mithila. Il ne faut pas que tu bouges
lieux ; car les Démons
mille formes ! »
Aussitôt que le rejeton et
recommandations à Lakshmana, il courut du côté où se trouvait la
gazelle, bien résolu à lui donner la mort. Son arc orné et
courbé en croissant à sa main, deux grands carquois liés ''sur les
épaules'', une épée à poignée
attachée sur la poitrine, il poursuivit la gazelle dans la forêt.
Mârîtcha courait dans le bois avec la rapidité du vent ou même
de la pensée, mais Râma suivait sa course
agité par la peur de Râma, disparaissait tout à coup dans la
forêt Dandaka ;
Raghouide plein de vitesse allait toujours, se disant : « La voici !
elle
Un moment, on voit la gazelle ; un moment, on ne la voit plus : elle
passe
le plus grand des Raghouides. Tantôt elle est visible, tantôt elle
est perdue ; tantôt elle court épouvantée tantôt, elle
tantôt elle se dérobe aux yeux, tantôt elle sort de sa cachette
avec rapidité. Mârîtcha, plongé dans une profonde terreur, allait
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Dans un moment où Râma vit cette gazelle, création de la magie,
marcher et courir devant lui, il banda son arc avec colère ; mais à
peine eût-elle vu le Raghouide
main,
laisser voir autant de fois sous les yeux du chasseur. Tantôt elle se
montrait dans son voisinage, tantôt elle apparaissait, éloignée par
Ligne 5 307 ⟶ 5 299 :
Par ce jeu de se découvrir et de se cacher, elle entraîna le
Raghouide assez loin. Voyant courir ou cessant de voir dans la grande
forêt cette gazelle, visible un moment,
toutes les régions du bois, comme le disque de la lune, qui paraît
et disparaît sous les nuages déchirés dans un ciel
Kakoutsthide, son arc à la main et se disant à lui-même : « Elle
vient !
là toutes les parties du bois immense.
Enfin le Daçarathide,
sous la voûte ombreuse
sa gazelle, environnée
la peur. À sa vue, bien résolu de la tuer, ce héros à
vigueur, ayant bandé son arc solide, encoche la meilleure de ces
flèches.
Soudain, visant la gazelle, Râma tire sa corde
son oreille, ouvre le poing et lâche ce trait acéré, brûlant,
enflammé, que Brahma lui-même avait travaillé de ses mains ; et
le dard habitué à donner la mort aux ennemis fendit le cœur de
Mârîtcha. Frappé dans ses articulations par ce trait incomparable,
flèche. Mais, le prestige une fois brisé par la sagette, il parut
ce
de toutes parures avec une guirlande de fleurs, un collier
bracelets admirables. Abattu par ce dard sur la terre, Mârîtcha de
pousser un cri épouvantable ; et la pensée de servir encore une
fois son maître ne
artisan de fourberies, une voix tout à fait semblable à celle de
Râma : « Hâ ! Lakshmana ! » exclama-t-il ;
encore dans la grande forêt.
À cet instant même arrivé de sa mort, voici quelle fut sa pensée :
« Si, à
de son mari, pouvait
serait facile à Râvana
Lakshmana ! »
Mârîtcha, quittant sa forme ''empruntée'' de gazelle et reprenant sa
forme ''naturelle'' de Rakshasa, ne montra plus, en sortant de la vie,
Sîtâ, et ses cheveux se hérissèrent
horribles formes de Rakshasa mises à découvert par la mort de ce
cruel Démon, Râma se hâta de revenir aussitôt,
par le même chemin
* * * * *
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voix de son époux, que Sîtâ dit à Lakshmana : « Va et sache ce
que devient le noble fils de Raghou ; car et mon cœur et ma vie me
semblent prêts à me quitter, depuis que
Râma, qui appelle au secours dans le plus grand des périls. Cours
vite défendre ton frère, qui a besoin de secours et qui est tombé
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toutes grandes ouvertes par la peur : « Il est impossible à mes yeux
que mon frère soit vaincu par les trois mondes, les Asouras et tous
les Dieux, Indra même à leur
mal à mon frère dans le plus petit même de ses doigts : pourquoi
donc, reine, ce trouble qui
Quoi
Djanaka, Sîtâ de lui adresser avec colère ces paroles : « Tu
Râma, toi, qui ne cours pas tendre une main à ton frère tombé dans
une telle situation ! Tu veux donc, Lakshmana, que Râma périsse à
cause de moi, puisque tu fermes ton oreille aux paroles sorties de ma
bouche ! Il est impossible que je vive un seul instant même, si mon
époux
ton frère sans tarder. Dans ce moment où sa vie est en péril, que
feras-tu ici pour moi, qui
cours aider l'''infortuné'' Raghouide ? »
Ligne 5 395 ⟶ 5 387 :
Indra. Il est impossible que Râma périsse dans un combat : il ne
sied pas que tu parles de cette manière : quant à moi, je ne puis
te laisser dans ce lieu solitaire sans Râma. On
mains, Vidéhaine, comme un précieux dépôt ; tu me fus confiée par
le magnanime Râma, dévoué à la vérité : je ne puis
ici. Ces cris entrecoupés, que tu as entendus, ne viennent point de
sa
échapper un mot
À ces mots, les yeux enflammés, de colère, la Vidéhaine répondit
en ces termes amers au discours si convenable de Lakshmana :
« Ah ! vil, cruel, honte de ta race, homme aux projets déplorables,
tu espères sans doute que tu
ainsi ! Mais il
des hommes tes pareils, qui sont toujours des rivaux ''secrets'' et des
ennemis cachés ! »
Après
semblable à une fille des Dieux, Sîtâ, versant des larmes, se mit
à battre des mains sa poitrine. À ces mots amers et terribles, que
Sîtâ lui avait jetés, Lakshmana, joignant ses deux paumes en coupe
et les sens émus, lui répliqua en ces termes : « Je ne puis
une réponse ; ta grandeur est une divinité pour moi :
Mithilienne, ce
parole injuste dans la bouche des femmes.
« Honte à toi ! péris donc, ''si tu veux'', toi, à qui ta mauvaise
nature de femme inspire de tels soupçons à mon égard, quand je me
tiens dans
Mais à peine Lakshmana eut-il jeté ce discours mordant à Sîtâ,
dit ces mots, que précédait un geste caressant : « Eh bien ! je
vais où est le Kakoutsthide : que le bonheur se tienne auprès de toi,
femme au charmant visage ! Puissent toutes les Divinités de ces
bois te protéger, dame aux grands yeux ! Car les présages qui se
manifestent à mes regards
mon retour ici te voir avec Râma ! »
Ligne 5 436 ⟶ 5 428 :
de larmes, lui répondit en ces termes : « Si je me vois privée de mon
Râma, je me noierai dans la Godâvarî, Lakshmana, ou je me pendrai,
ou
bûcher allumé de flammes ardentes ! Mais je ne toucherai jamais de
mon pied même un autre homme que Râma ! » Quand Sîtâ eut dit ces
Ligne 5 449 ⟶ 5 441 :
* * * * *
Le juste Lakshmana,
après un dernier regard jeté sur la Mithilienne et marchait, pour
ainsi dire, malgré lui.
aussitôt
Vidéhaine sous la forme empruntée
frères, comme le voile
du jour en
beauté incomparable délaissée dans ce lieu solitaire, le monstre
aux dix têtes, monarque de tous les Rakshasas, se mit à rouler cette
pensée dans son esprit en démence :
« Voilà bien le moment pour moi
visage, pendant que son époux et Lakshmana même ne sont pas auprès
Quand Râvana eut songé à profiter aussitôt de
Vidéhaine sous la métamorphose
couvert
rattachés en aigrette, une ombrelle et des sandales, un paquet lié
sur
bâton.
À
vigueur, les oiseaux et tous les êtres animés, les arbres, qui
végétaient dans le Djanasthâna et même les diverses plantes nées
pour grimper et saisir un appui, tout resta immobile et le vent
retint même son haleine. Aussitôt
des Rakshasas, venu
''ou
volatiles et tous les quadrupèdes, qui se trouvaient dans la
Pantchavatî et la forêt de pénitence ou dans le voisinage du
Djanasthâna.
Le monstre, guettant
Râma,
vers Sîtâ, qui pleurait son époux : il aborda sous des formes qui
ne lui convenaient aucunement cette âme pure incarnée dans une forme
assortie.
Il
''de corail'', aux dents brillantes, au visage rayonnant comme une
pleine-lune ; mais alors, délaissée par son époux et Lakshmana,
noyée dans le chagrin et les pleurs, assise dans sa maison de
feuillage et plongée dans la tristesse de ses pensées, elle
ressemblait à la nuit privée de son astre et couverte
obscurité.
À chaque membre
en détacher son regard, absorbé dans la contemplation
fascinant le cœur et les yeux. Percé
le Démon nocturne à
prières du Véda vers la Mithilienne au torse vêtu de soie jaune,
aux grands yeux de nymphéas épanouis. Râvana
long discours à cette femme, le corps tout resplendissant comme une
statue
les trois mondes et
la main. Le monarque des Rakshasas adressa donc ses flatteries à la
princesse aux membres tout rayonnants :
« Femme au charmant sourire, aux yeux charmants, au charmant visage,
cherchant à plaire et timide, tu brilles ici
un bocage en fleurs ! Qui es-tu, ô toi, que ta robe de soie jaune
fait ressembler au calice
portée de lotus rouges et de nymphéas bleus rend si charmante à
voir ? Es-tu la Pudeur,
ou Lakshmî ? Qui
as les dents blanches, polies, égales, bien enchâssées, femme à
la taille ravissante ! Tes gracieux sourcils sont bien disposés, ma
belle, pour
fermes, bien potelées, assorties au reste du visage : elles ont un
brillant coloris, une exquise fraîcheur, une coupe élégante,
et rien
enchanteresse. Tes oreilles charmantes, revêtues
mais ornées davantage par leur beauté naturelle, ont une courbe
dessinée suivant les ''plus justes'' proportions. Tes mains bien faites
sont azurées comme les pétales du lotus : ta taille est en harmonie
avec tes autres charmes, femme à
qui, réunis maintenant, se font ornement
beauté céleste : les plantes ont une délicatesse enfantine, et les
doigts une fraîcheur adolescente.
couleurs du lotus, ils ''ne'' sont ''ni moins'' beaux ''ni moins'' gracieux
dans leur marche : des étoiles de jais entre les angles rouges de tes
grands yeux nagent dans leur émail pur. Beauté de chevelure, taille
sur la face de la terre une femme, une Kinnarî, une Yakshî, une
Gandharvî, ni même une Déesse qui fût égale à toi pour la
beauté !
« Ce lieu est le repaire des Rakshasas féroces, qui rôdent çà et
là suivant leurs caprices. Les jardins aimables des cités aux palais
magnifiques, les belles ondes tapissées de lotus, les divins bocages
mêmes, comme le Nandana et les autres bosquets célestes, méritent
seuls
noble des vêtements, la plus noble des perles et le plus noble des
époux sont, à mon avis, les seuls dignes de toi, femme charmante aux
yeux noirs. Dame illustre, née pour jouir de tous les plaisirs de la
vie, il ne sied pas que tu habites, privée de tous plaisirs et même
dans la souffrance au milieu
que la terre, où tu
sauvages.
« Qui es-tu, femme au candide sourire ? Une fille des Roudras ou des
Maroutes : Es-tu née
toi à la taille enchanteresse ! Qui es-tu, jeune beauté, entre ces
Déesses ?
une Apsarâ, femme à la taille svelte ? Mais ici ne viennent jamais
ni les Dieux, ni les Gandharvas, ni les hommes ; ce lieu est la demeure
Ligne 5 563 ⟶ 5 555 :
Tandis que le méchant Râvana lui parlait ainsi, la fille du roi
Djanaka, sans confiance,
peur et de soupçons. Enfin cette femme à la taille charmante,
aux formes distinguées, revint à la confiance, et, se disant à
soi-même : «
caché sous
offrit tout ce qui sert à
apporta de
aliments que
sous une enveloppe amie : « La collation est prête ! » Quand il se vit
alors invité par Sîtâ avec un langage ''franc et'' sans réticences,
le Démon, ferme dans sa résolution
fille des rois, se crut déjà parvenu au comble de ses vœux.
Ligne 5 579 ⟶ 5 571 :
Râvana lui avait adressées, y répondit en ces termes : « Je suis la
fille du magnanime Djanaka, roi de Mithila : le nom de ta servante est
Sîtâ ; son mari est le sage Râma.
le palais de mon époux, jouissant avec lui des voluptés humaines
dans
le monarque, après en avoir délibéré avec ses ministres, jugea
convenable de sacrer mon époux comme associé à sa couronne. Tandis
ambitieuse au cœur vil, nommée Kêkéyî, surprit le roi, mon
beau-père, et, tout
une grâce destinée à payer des services que jadis elle avait rendus
au vieux monarque.
« Je ne dormirai, je ne boirai, je ne mangerai pas, ''disait-elle, que
je ne
Donne sa vérité à la grâce que tu
dans la guerre des Asouras contre les Dieux. Que cette même
cérémonie soit destinée à sacrer ''mon fils'' Bharata ; que Râma
quatorze années ermite, vêtu avec une peau
habit
pour les bois, et que
« À ces mots de Kêkéyî, le monarque au grand char, mon beau-père,
la conjura avec des paroles conformes au devoir ; mais elle ne voulut
pas écouter ses prières. Mon époux est un homme plein
pur, vertueux, sincère dans son langage, et qui, trouvant son
bonheur dans celui de toutes les créatures, mérite ce nom de
Râma, célèbre dans
Daçaratha, son père, ne voulut pas le sacrer de lui-même pour faire
une chose agréable à Kêkéyî.
« Quand mon époux vint trouver son père à
Kêkéyî dit à Râma, inébranlable dans ses résolutions :
« Écoute, prince de Raghou, ce qui
« Je donne à Bharata, sans que personne y puisse rien prétendre,
''
fils de Kakoutstha, que tu ailles habiter la forêt neuf ans auxquels
seront ajoutées cinq années : ainsi, pars et sauve du mensonge la
parole de ton père. »
« Mon époux, ferme en ce
répondit : « ''Je le ferai ! '' » en présence de son père. Râma est
toujours prêt à donner, jamais à recevoir ; il ne sortira point
de sa bouche une parole qui ne soit la vérité : telle est, ''saint''
brahme, la sûreté de sa promesse,
Un frère de Râma, né
éminent et plein de courage, se fit le compagnon de son exil. Aux
remontrances pleines de sens que fit celui-ci contre
son frère : « Mon âme se plaît dans la vérité ! » lui répondit
ce Raghouide à la vive splendeur. Ce frère judicieux, à la grande
vigueur et fidèle à son devoir, Lakshmana suivit avec moi, son arc
à la main, Râma, qui
« Ainsi, une ''seule'' parole de Kêkéyî nous a bannis tous les trois
du royaume, et nous errons pleins de constance, ô le plus vertueux
des brahmes, dans la forêt profonde. Nous habitons ces bois tout
remplis de bêtes féroces : rassure-toi cependant ; il
beaux fruits de la
quel est ton nom, ta famille et ta race, suivant la vérité. Pourquoi
vas-tu seul ainsi dans la forêt Dandaka ? Je ne doute pas, saint
ermite, que Râma ne
conversation et se plaît dans la compagnie des ascètes. »
À ces mots de Sîtâ, la ''charmante'' épouse de Râma, le vigoureux
Démon, blessé par une flèche de
termes : « Écoute qui je suis, de quel sang je suis né ; et, quand tu
le sauras,
métamorphose, moi, par qui furent mis en déroute et les hommes et
les Immortels avec le roi même des Immortels. Je suis celui
appelle Râvana, le fléau de tous les mondes ; celui sous les ordres
de qui, femme ravissante, Khara gouverne ici le Dandaka. Je suis le
frère et même
je suis un héros, le propre fils du magnanime Viçravas. Poulastya
était le fils de Brahma, et moi, femme, je suis le petit-fils
de Poulastya.
''incomparable'', celui de prendre à mon gré toutes les formes et
de marcher aussi vite que la pensée. Ma force est renommée dans le
monde : on
''encore plus'' célèbre, femme au candide sourire, et je le dois à la
nature de mes œuvres[26].
[Note 25 :
[Note 26 : ''Râvana'' veut dire ''qui fait pleurer''.]
« Sois donc la première de mes épouses, auguste Mithilienne, sois à
la tête de toutes ces femmes, mes nombreuses épouses, au plus haut
rang elles-mêmes de la beauté. Ma ville capitale est nommée Lankâ,
la plus belle des îles de la mer ; elle est située sur le front
montagne et
pitons faits
creusés, elle porte ''comme'' une aigrette de palais et de belles
terrasses. Non moins célèbre dans les trois mondes
la cité
imite la couleur des sombres nuages.
«
yodjanas. Là, tu pourras te promener avec moi, Sîtâ, dans ses
riants bocages ; et tu
''revenir jamais'' habiter ces bois. »
À ces mots de Râvana, la charmante fille du roi Djanaka répondit
avec colère au Démon, sans priser davantage ses discours : « Je serai
fidèle à mon époux, semblable à Mahéndra, ce Râma,
aussi impossible
vaste Océan ! Je serai fidèle à Râma, cet héroïque fils de roi,
à
ses organes des sens et de qui le visage ressemble au disque plein de
à moi est celui du chacal, qui voudrait
aussi impossible que je sois touchée par toi,
toucher les rayons du soleil !
« Ô toi, qui veux enlever de force à Râma son épouse chérie,
des gazelles, la chair
fureur même !
« La différence
différence
différence qui existe de toi à mon noble époux !
« Tant
ce vaillant Râma, de qui la puissance est égale à celle de la
divinité aux mille yeux, tu ne pourras, si tu
pourras même digérer ta conquête, comme une mouche ne peut avaler
la foudre ! »
cette femme à
lui jetant ces paroles, comme un bananier superbe
brisé.
Le monarque des Rakshasas, quittant la forme de mendiant, revint à sa
forme naturelle avec son long cou et son corps de géant. À
ce noctivague Démon, frère puîné de Kouvéra, dépouillant ses
placides apparences de religieux mendiant, rentra dans la ''hideuse''
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resplendissants, ornée des boucles noires de ses beaux cheveux, mais
qui avait comme perdu le sentiment : « Femme, si tu ne veux pas de moi
pour époux sous ma forme naturelle,
pour te soumettre à ma volonté ! Puisque la vigueur de Râma, qui
tu
tenant au sein des airs, je pourrais enlever la terre à la force
de mes bras ; je pourrais même tarir
je pourrais tuer la Mort, si elle combattait avec moi ! Je pourrais
offusquer le soleil de mes flèches aiguës ; je pourrais fendre
même la surface de la terre ! Vois donc, insensée, que je suis ''ton''
maître, que je prends à mon gré toutes les formes, et donne à qui
je veux les biens que
Quand il eut ainsi parlé, Râvana, cette âme corrompue, égaré par
la brillante Rohinî[28].
[Note 27-28 : La planète de Mercure et le 4e astérisme lunaire.]
Elle, baignée de larmes et pleine de colère : « Méchant, dit
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À ces mots de la belle Vidéhaine, la fureur du cruel Démon enflamma
Râvana irrité brûlait, pour ainsi dire, la tremblante Vidéhaine
avec ses regards flamboyants comme le feu sous des sourcils
contractés et bien épouvantables à voir. De sa main gauche, il prit
la belle Sîtâ par les cheveux ; de sa main droite, il empoigna les
deux cuisses de la princesse aux yeux de lotus. Aussitôt
vit dans les bras du vigoureux Démon, Sîtâ de jeter ces cris : « À
moi, cher époux !
moi Lakshmana ! »
À
vigueur et semblable au sommet
du bois, saisies de crainte,
fois que le robuste Démon, tourmenté par
de ses bras cette femme, les amours de Râma, il
les cieux avec elle malgré sa résistance, comme Garouda,
rapide, emporte dans les airs
Au même instant apparut de nouveau le char de Râvana, ouvrage de la
magie, vaste, céleste, au bruit éclatant, aux membres
de ses ânes ''merveilleux''. Le ravisseur, menaçant la Vidéhaine avec
une voix forte et des paroles brutales, la prit alors dans son sein et
la plaça dans son char :
et le jour se partagent le cercle diurne en deux parties égales, le
quantième du mois où la lune remplit de lumière toute la moitié de
son disque, et
sa carrière.
Le Démon ravit
appelait, bourrelée de chagrin : « À moi, criait-elle, mon époux ! »
mais son mari errait au loin dans les bois ''et ne pouvait
* * * * *
En ce moment, sur le plateau
retraites diverses, dormait, le dos tourné au soleil enflammé, le
monarque des oiseaux, ''Djatâyou'', à la grande splendeur, au grand
courage, à la grande force. Le roi des oiseaux entendit cette plainte
comme le son
entrée dans le canal de ses oreilles, vint frapper violemment son
cœur, comme la chute du tonnerre. Réveillé en sursaut par sa
''vieille'' amitié pour le roi Daçaratha, il entendit le bruit
char qui roulait avec un son pareil au fracas des nuages.
Il jette ses regards dans les cieux, il observe
tous les points cardinaux de
Djanakide poussant des cris. Voyant ce Rakshasa enlever la bru de
feu son ami, le roi des oiseaux, pénétré
tout flamboyant de colère, se tint alors devant le Rakshasa et se mit
à planer sur la route de son char :
« Démon aux dix têtes, dit-il, je suis le roi des vautours ; mon nom
est Djatâyou à la grande vigueur ; je me tiens ferme dans
devoir et je marche avec la vérité. Toi, monarque à la force
immense, tu es le plus élevé dans la race des Rakshasas et tu as
maintes fois vaincu les dieux en bataille. Je ne suis plus
oiseau vieux, affaibli dans sa vigueur ; mais tu vas connaître dans un
combat, petit-fils de Poulastya, ce qui me reste encore de vaillance,
et tu
« Comment un roi fidèle à son devoir peut-il souiller une femme
qui
protéger les femmes
de ton char magnifique comme un fruit que
« Esprit mobile avec un naturel méchant, comment se fait-il
donnerait au pécheur un siége dans le paradis ? Quand Râma, cette
âme juste et sans péché ne
dans ton royaume, pourquoi donc, toi, lui fais-tu cette offense ? Pour
venger Çoûrpanakhâ, si Khara est venu dans le Djanasthâna et
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coupable ? Quand il y vint aussi quatorze milliers de Rakshasas pour
tuer Râma et Lakshmana, si le bras du Raghouide leur fit mordre à
tous la poussière, dis, et que ta parole soit
vérité, est-ce encore une faute
noble maître du monde ? Est-ce un motif pour te hâter
épouse ?
« Lâche promptement l'''auguste'' Vidéhaine, ou je vais te consumer de
mon regard épouvantable, ''destructeur'', incendiaire, comme Vritra fut
consumé par le tonnerre de Mahéndra ! Ne vois-tu pas que tu as lié
au bout de ta robe un serpent à la dent venimeuse ? Ne vois-tu pas que
la mort a passé déjà son lacet autour de ton cou ? Insensé, il ne
faut pas entrer dans une condition où
amener sa ruine !
« Il y a soixante mille ans que je suis né, Râvana, et que je
gouverne avec justice le royaume de mon père et de mon aïeul. Je
suis vieux, et toi, héros, tu es jeune, monté sur un char, une
cuirasse devant ta poitrine, un arc à ton poing ; mais
ravisseur de la Vidéhaine, tu ne saurais
À ces mots, prononcés avec tant de justesse par le vautour
Djatâyou, les vingt yeux du Rakshasa irrité brillèrent menaçants
et pareils au feu. Avec des regards enflammés de colère, ''agitant''
ses pendeloques
furieux sur le roi des oiseaux.
Voici donc
pour troisième arme ses pattes crochues, et Râvana à la grande
force, qui luttent ''sans peur''
Le Démon fit pleuvoir sur le roi des vautours ses flots
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dans ces réseaux de flèches, reçut dans le combat ''sans bouger'' ces
dards coup sur coup de Râvana ; mais ensuite, enflammé de colère,
déployant son immense envergure telle
sur le dos de son ennemi et le déchira avec ses fortes serres.
Djatâyou, à la grande force, le souverain des oiseaux, ouvrit de
sanglantes blessures dans le corps du guerrier avec ses pattes armées
aux dix visages, perça le volatile à son tour avec ses flèches
empennées
penser ni aux dards que lui décochait Râvana, ni même à ses
blessures, le roi des oiseaux fondit sur lui tout à coup.
Le volatile aux grandes serres
les deux ailes sur la tête ''de son ennemi'', il en battit avec une
fureur acharnée le front du Rakshasa. Puis, soudain
briser dans ses pattes
il eut rompu cet arc décoré de perles et de joyaux, arme divine et
pareille au feu, le volatile à la grande splendeur
agile essor.
Le monarque ailé revint battre à coups redoublés son diadème
céleste,
le vigoureux oiseau, plein de fureur, lui jeta sa couronne à bas sur
les plaines de
du soleil. Il frappa même les ânes aux visages de vampires, aux
caparaçons
héros emplumé les eut bientôt séparés de la vie. Il brisa le
grand char aux ais variés
au timon parsemés
mouvement spontané et répandait une vaste épouvante. Il renversa
le cocher, et, quand il eut bientôt déchiré son corps
pareille au crochet aigu qui sert à conduire les éléphants, il jeta
son cadavre hors du véhicule fracassé.
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Aussitôt que Râvana se vit avec son arc rompu, son char brisé, son
attelage tué, son cocher sans vie, il prit la Vidéhaine dans ses
bras et
descendu sur la terre et veuf de son char brisé, tous les êtres
crièrent-ils.
Quand il eut exécuté ce lourd travail, Djatâyou, sur qui pesait
le poids de la vieillesse, en ressentit de la fatigue : Râvana
Djatâyou prit aussitôt son essor dans les cieux, et, suivant le
Démon, qui serrait la fille du roi Djânaka contre son flanc, il tint
ce langage au ravisseur :
« Méchant, scélérat, artisan de cruautés, depuis que, poussé au
vol par ton âme rapace, tes mains ont ravi Sîtâ, tu es comme une
victime consacrée déjà pour
dépouille, ou, percé de flèches, il reste lui-même sans vie sur le
champ de bataille ; mais le héros ne foule jamais la route où marche
le voleur ! Combats, si tu es un héros ! Arrête un instant, Râvana,
et tu vas te coucher mort sur la terre, comme ton frère le vaillant
Khara ! Plus
Dânavas ; mais le fils du roi Daçaratha, ce beau Râma, qui
oublié ses exercices de kshatrya, tout vêtu
habit
À ces mots du roi des oiseaux,
lui répondit en ces termes, les yeux rouges de colère : « Tu nous as
fait voir autant
que tu devais à Râma est largement acquitté : ne te fatigue pas
davantage ! »
Ligne 5 929 ⟶ 5 921 :
À ces paroles ''fières'', le plus éminent des oiseaux lui répondit
sans émotion : « Montre-moi donc ici tout ce que tu as de force, de
vigueur, de puissance et ton ''plus grand'' courage : cruel, tu ne
iras pas vivant ! Ravisseur des épouses
vendue au mensonge, amie de la cruauté, tu brûleras dans
À peine Djatâyou eut-il achevé ces belles paroles, que le robuste
volatile se précipita avec impétuosité sur le dos même du
Rakshasa. Il déchira tout
dix têtes avec ses ongles perçants et semblables aux aiguillons du
cornac. Le bec et les serres de
mettaient le noctivague en morceaux. Saisi par les ongles acérés,
le Démon
''avec impatience'', quand le conducteur est monté dessus ''et lui fait
sentir sa pointe''. Avec ses griffes, le roi des oiseaux lui sillonna
Ligne 5 953 ⟶ 5 945 :
côté, enflammé de colère, Djatâyou, blessant à coups redoublés
avec les serres, le bec et les ailes, fit passer Râvana dans cette
guerre à la couleur éclatante
vigoureux Daçagrîva furieux,
abandonne la Vidéhaine et fait pleuvoir une grêle de coups sur le
roi des vautours.
Ce nouveau combat entre ces deux athlètes
dura
perça le flanc, il coupa les deux pieds, il trancha les deux ailes de
ailes abattues par le Rakshasa aux féroces exploits, le vautour tomba
rapidement sur la terre,
Quand elle vit
Vidéhaine, ''profondément'' affligée, courut à lui comme elle eût
fait pour son époux. Le roi de Lankâ contemplait ce vautour à
semblable aux sombres nuages, abattu maintenant sur la terre, où
Djatâyou se débattait misérablement. Alors Sîtâ étreignit
dans ses bras
par
mouillait de pleurs son visage brillant comme
« Le voilà donc gisant inanimé sur la terre, disait-elle, celui
même qui eût dit à Râma que je vis encore, et que, tombée dans
une telle infortune, je suis encore vertueuse : ah ! cette heure sera
aussi
malheur a fondu sur nous ; et, tandis
main, le Kakoutsthide ignore sans doute quel monstre vint ici ! »
Ligne 5 985 ⟶ 5 977 :
et Lakshmana lui-même : la tremblante Vidéhaine leur jetait ''en vain''
ces appels redoublés. Le monarque des Rakshasas courut alors vers
sa captive, le visage pâle
fleurs en désordre. Elle
arbustes, elle serrait les grands arbres dans ses bras et poussait de
sa douce voix ces cris répétés : « Sauve-moi ! sauve-moi ! »
Ligne 5 995 ⟶ 5 987 :
infligée à Sîtâ, la compassion et la douleur émurent tous les
grands saints, qui habitaient dans la forêt Dandaka. Devant cet
outrage fait à Sîtâ,
animés ou non fut enveloppé
vit de son regard céleste
suprême de toutes les créatures prononça lui-même ces paroles dans
sa béatitude : « Le crime est consommé ! »
Elle eut beau crier : « Râma ! Râma !
reprit la Vidéhaine et continua sa route dans les airs. Avec ses
membres atourés de leurs bijoux
jaune, elle brillait alors, cette fille des rois, comme
milieu du ciel ! Sa robe jaune, que
jetait son éclat sur le géant et lui donnait les apparences
montagne, dont la cime est embrasée par le feu.
En voyant, sur le fond du ciel, sa figure immaculée se détacher
du sein de son ravisseur, on eût dit la lune, qui se lève, après
Un pied de la ''belle'' Vidéhaine laissa échapper son bracelet, qui
tomba sur la terre, éclatant comme le feu et pareil à un disque
d’éclairs.
Les bijoux de la Vidéhaine et tous ses joyaux couleur du feu
Ligne 6 029 ⟶ 6 021 :
les gazelles couraient après Sîtâ dans la grande forêt et
marchaient tous ''pêle-mêle'' derrière son ombre. Quand le soleil
consterné vit ce rapt de ''
son brillant réseau de lumière disparut.
« Il
Râvana emportait
ciel toutes les créatures, à la vue de cette violence infligée à
« Hâ ! Lakshmana !
en vain'', des regards multipliés sur toute la surface de la terre.
Ligne 6 046 ⟶ 6 038 :
des Rakshasas, de qui les yeux inspiraient la terreur : « Tu montres
bien ici, roi des Rakshasas, ton courage sans pareil ! Cette prouesse,
vil Démon, ne te fait-elle pas rougir, toi, qui veux
abusant de la force et sachant que je suis abandonnée !
voulant me ravir à mon époux, que tu
toi, âme corrompue, qui le fis écarter de sa chaumière avec ce
prestige
des Rakshasas, ton courage sans pareil ! Tu
dans un noble combat, où ton nom fut proclamé ''à haute voix'' ! Ce
cri, qui ressemblait à la voix de Râma, ce cri de détresse, qui
déchira mon cœur,
pas de honte, vil Démon, après que tu as commis une telle action, le
rapt
« Râma fut éloigné ainsi ''de
alors,
iras pas avec le souffle de la vie ! »
infortunée toute pantelante, baignée de larmes, plongée dans
le chagrin, horriblement tourmentée, plusieurs fois malade et qui
Ligne 6 068 ⟶ 6 060 :
Il dirigea sa marche le front tourné vers la rivière Pampâ, mais
franchi dans son vol, le roi des Rakshasas tendit vers le mont
Rishyamoûka, tenant la Mithilienne en pleurs dans ses bras ! La
princesse enlevée
sur le sommet de la montagne cinq des principaux singes. La Djanakide
aux grands yeux, à la taille charmante, jeta au milieu des cinq
quadrumanes ses brillantes parures et son vêtement supérieur, tissu
de soie avec un éclat
Râma ! » pensait-elle, ses regards attachés sur la terre et ses yeux
versant des larmes.
milieu
intérieure, le monstre aux dix têtes ne
jetait aux pieds des singes tous ses bijoux, et même que cette
femme à la taille gracieuse
pierreries ni aucune de ses parures. Les chefs des singes, tournant
vers Sîtâ les regards curieux de leurs yeux bistrés, virent alors
Ligne 6 089 ⟶ 6 081 :
Parvenu dans sa grande cité aux larges rues bien distribuées, il
déposa enfin sa victime, comme Mâya
Déesse'' Mâyâ. Le monarque aux dix têtes appela des Rakshasîs
à
surveillance de sa captive : « Consacrez, dit-il à ces furies, qui
toutes, debout et réunies devant lui, tenaient leurs deux paumes
Ligne 6 097 ⟶ 6 089 :
négligence toute votre attention à faire que personne en ces lieux,
ni homme ni femme, ne parle à cette Vidéhaine sans ma permission.
Donnez-lui tout ce
habillements, or, pierreries ou perles ; je
pas'' ! elle
sciemment ou même à son insu, une parole qui soit désagréable à
''ma'' Vidéhaine ! »
Ligne 6 106 ⟶ 6 098 :
Quand le Démon eut fait entrer sa captive dans Lankâ, Brahma joyeux
tint ce langage à Çatakratou : «
et pour le mal des Rakshasas, dit le père des créatures au roi
des Immortels, que Râvana,
ville.
« Cette dame de la plus haute noblesse, fidèle à son époux et qui a
toujours vécu dans les plaisirs, ne voyant plus son mari et consumée
de chagrins, parce
sous les yeux que des Rakshasas et harcelée sans cesse par les
menaces de leurs femmes : « Comment, se dira-t-elle, entrée dans
Lankâ, ville bâtie sur une île de la mer, souveraine des rivières
et des fleuves ; comment Râma saura-t-il que
que
« Roulant cette pensée en soi-même, captive, isolée dans sa
faiblesse, elle refusera toute nourriture, soutien de la vie,
et renoncera sans doute à
poids de sa vie. Va donc promptement, fils de Vasou, console Sîtâ,
entre chez elle et présente-lui ''de ma part'' ce vase de beurre
Ligne 6 131 ⟶ 6 123 :
à son compagnon : « Sommeil, trouble ici les paupières des femmes
Rakshasîs ! » Invité de cette manière, le Dieu qui préside au
sommeil, plein
succès du roi des Immortels.
inspirer de la sécurité : « Je suis le roi des Dieux : la félicité
descende sur toi ! lui dit-il ; jette les yeux sur moi, femme au candide
sourire ! Ton noble Raghouide, fille du roi Djanaka, jouit avec son
frère
lui-même dans cette Lankâ, soumise aux lois de Râvana. Environné
Raghou, accompagné de son frère et suivi de son armée,
dans sa ville, après
les Rakshasas, grâce à la vigueur de son bras, et tué Râvana même
dans une bataille. ''Oui'' ! Djanakide, vainqueur de Râvana et de son
armée, ce puissant guerrier
Poushpaka : étouffe le souci qui te ronge le cœur ! Pour en assurer le
succès, je vais prêter mon aide à
ainsi ne te livre pas à la douleur, fille du roi Djanaka.
« Grâces à moi, ce héros à la grande vigueur franchira
tes Rakshasîs par les enchantements de la magie.
« Prends ce vase de beurre clarifié, que je te présente ; mets le
temps à profit et mange, éminente Dame, cet aliment délicieux,
suprême, divin ! Une fois que tu auras goûté ce mets, reine
Ligne 6 163 ⟶ 6 155 :
À ces mots, toute remplie de doute : « Comment saurai-je, lui dit
Sîtâ, que
vois présent ici devant mes yeux ? Si tu es vraiment le roi même des
Immortels, montre-moi sans tarder les signes auxquels on reconnaît
un Dieu et dont
instituteur spirituel ! »
À ces mots de Sîtâ, le fils de Vasou fit ce
se tint sans toucher la terre de ses pieds et regarda sans cligner les
yeux. Reconnaissant à ces traits
roi des Dieux, la Mithilienne dit alors pleine de joie : « Je te vois
maintenant de la manière que
souverain de Mithila, mon père : tu es, divin Indra, le protecteur de
mon époux. Il vit donc heureux, mon noble Raghouide, avec son frère
sous ta céleste protection !
Dieu à la force immense. Ce lait immortel et suprême, donné par
toi, je le bois, comme tu
famille des Raghouides ! »
Ensuite, ayant pris la coupe aux mains du grand Indra, la Mithilienne
au candide sourire
Lakshmana : « Puissent longtemps vivre mon époux à la force puissante
et son frère ! » Elle dit ; et sur ces mots, la Vidéhaine mangea cet
aliment fortuné. Quand elle eut pris cette réfection, la Dame au
charmant visage sortit de
puis, Mahéndra, lui ayant raconté
venir,
* * * * *
Une fois
toutes les formes, ce Mârîtcha, qui marchait devant lui sous les
apparences
retourna chez lui.
Quand il songeait aux moyens avec lesquels Mârîtcha
de sa chaumière ; à la manière dont cette gazelle
sa flèche, avait laissé voir le Rakshasa, ''qui
ses formes'' ; au cri, que le Démon avait jeté ''en expirant'' : « À
moi, Lakshmana !
mienne'', se disait-il plein
cette favorable occasion
le ciel garder Sîtâ délaissée dans la grande forêt ; car leur
défaite dans le Djanasthâna a soulevé contre moi la haine des
Rakshasas ! »
Tandis
''inquiet'' rencontra Lakshmana accourant à sa rencontre avec une
splendeur éteinte. À ce héros triste, abattu, consterné, le visage
altéré, Râma encore plus consterné lui-même de jeter ces mots
avec tristesse et plein
une chose blâmable de venir ici, abandonnant Sîtâ dans cette forêt
déserte, infestée par les Rakshasas ! Je ne puis en douter maintenant
dévorée par les Démons, qui habitent dans ces bois. Car de
sinistres augures se montrent à nos yeux en plus grand nombre.
Puissions-nous retrouver saine et sauve notre chère Vidéhaine ! En
effet, cet animal, qui
frappé enfin
ses formes de gazelle et ne montra plus en lui
Après
de la plus vive douleur, interrogea le fils de Soumitrâ au milieu de
son ermitage : « Quand je
la belle Mithilienne à titre de dépôt dans cette forêt déserte,
infestée par les Rakshasas, comment
abandonnée pour venir me trouver ? Ton arrivée ''inattendue'' vers moi,
après ce délaissement de Sîtâ, a troublé véritablement toute mon
âme en y jetant ''soudain'' le soupçon
peine
accompagné de Sîtâ, que je sentis battre mon cœur, Lakshmana,
trembler mon œil et mon bras gauches. »
Ligne 6 238 ⟶ 6 230 :
À ces mots, le Soumitride aux signes heureux, Lakshmana, tout plongé
dans la douleur et le chagrin, fit cette réponse au noble enfant de
Raghou : « Ce
que je suis venu, abandonnant Sîtâ. Elle
elle-même, et là-dessus je suis parti. En effet, ces mots :
« Lakshmana, sauve-moi ! » ce cri, que le noble ''Démon'' avait jeté au
loin à travers une vaste expansion, est tombé dans
Mithilienne. À ce cri de détresse, elle, inquiète dans sa tendresse
pour son époux : « Va ! cours ! »
palpitante de terreur. Quand elle
ordre : « Pars ! » alors moi, qui désirais faire ce que tu avais pour
agréable, je dis à ta Mithilienne : « Je ne vois personne qui puisse
mettre, Sîtâ, ton époux en danger.
« Rassure-toi ! cette parole, à mon avis, est un prestige et non une
réalité. Comment lui, ce noble prince, qui serait le sauveur des
treize Dieux mêmes, aurait-il pu dire cette lâche et méprisable
parole : « Sauve-moi ! » Pour quelle raison et par quelle bouche,
imitant la voix de mon frère, furent jetés ces mots étranglés :
« Sauve-moi, fils de Soumitrâ ? » ''
je me défie ! '' Loin de toi ce trouble, où je te vois tombée ! Sois
tranquille !
mondes un homme qui puisse vaincre ton époux dans un combat : ''oui'' !
il est impossible à nul être, soit né, soit à naître, de gagner
sur lui une bataille ! »
« À ces mots, ta Vidéhaine
âme égarée, ces mordantes paroles : « Ton cœur est placé en moi :
tu es
reçoit la mort, ne te flatte pas encore, Lakshmana, de posséder sa
femme ! » --Ainsi invectivé par la Vidéhaine, je suis sorti indigné
de
colère. »
Au fils de Soumitrâ, qui tenait ce langage, Râma fit cette réponse,
de quitter
nécessité de réprimer les Démons qui
dans ces bois, ta grandeur
irritées de la Mithilienne. Je ne suis pas content de toi : je
voix mordante
À
les côtés, Râma dit encore, poussant des cris et levant au ciel ses
deux bras luisants : « Si cachée derrière un arbre, Sîtâ, tu veux
rire de mon ''inquiétude'', que la vive douleur, où ton absence
jeté, noble Dame, suffise à ton badinage !
avec ces faons apprivoisés de gazelle ; mais tu ne vois point ici avec
eux, Lakshmana, leur maîtresse aux grands yeux !
répandues sur la terre, ils étaient dans la parure de ma
Vidéhaine !
pareilles à de
la terre !
« Je pense, Lakshmana, que la sainte pénitente du Vidéha, déchirée
et percée de leurs dents, fut mise en pièces ou dévorée même par
ces Démons habiles à changer de formes. Vois ces traces, fils
Ligne 6 298 ⟶ 6 290 :
Vidéhaine, que deux Rakshasas ''impurs'' se disputaient. Que devint,
''hélas'' ! entre ces deux noctivagues, qui se battaient pour elle, son
visage, dont
« À qui appartient, mon ami, ce grand arc, avec des ornements
pareil à
terre ! À qui était cette armure, qui gît non loin brisée, cuirasse
le soleil dans sa jeunesse ''du matin'' ? À qui fut ce parasol zébré
de cent raies, mon ami, et rehaussé
fleurs, que tu vois là jeté sur la terre, avec un sceptre cassé ?
Héros, à quel maître furent tués dans le combat ces ânes aux
grands corps, aux formes épouvantables, aux plastrons
visages de vampires ?
« Où est allée cette femme aux beaux yeux, aux belles dents, aux
paroles toujours pleines de convenance ? Où est allée ma souveraine,
Lakshmana, après
accablante douleur, comme la splendeur abandonne
le front du couchant ? »
Quand il eut fouillé ainsi de ses regards le Djanasthâna de tous
les côtés, le fils de Raghou, bien tourmenté par le chagrin,
rencontra pas la fille du roi Djanaka.
Voyant que ses recherches ne lui avaient pas rendu son épouse, le
fils du roi Daçaratha, cet homme supérieur, que
avait plongé dans une immense et terrible douleur, ne pouvait revenir
à la quiétude, comme un grand éléphant qui ne peut sortir du vaste
bourbier où il est entré, mais qui
Animés par le désir de voir Sîtâ, les deux héros visitèrent, et
Ligne 6 333 ⟶ 6 325 :
les viviers fleuris de ce mont aux cimes nombreuses, couvert par des
centaines de métaux divers ; mais ils ne purent nulle part rencontrer
celle ''
Enfin, ils aperçurent, couché sur la terre, baigné de sang et ses
deux ailes coupées,
frère : « On ne peut en douter, ma Vidéhaine fut dévorée ici par
ce ''monstre'' ! Ce vautour est sans doute un Rakshasa qui erre dans la
Ligne 6 343 ⟶ 6 335 :
bien repu de ma Sîtâ aux grands yeux !
« Je vais le frapper
enflammée, qui volent droit au but, comme le Dieu aux mille
yeux frappe dans sa colère allumée une grande montagne avec son
Ligne 6 351 ⟶ 6 343 :
le vautour, et la terre en fut comme ébranlée sous les pieds du
héros tout ému. Alors ce volatile infortuné, qui vomissait le sang
à pleine bouche : « Râma !
Raghouide en courroux. Cette femme, que tu cherches comme une plante
salutaire dans la forêt, Sîtâ et ma vie, noble fils du roi des
hommes,
«
abandonnée par toi, vaillant Raghouide, et par Lakshmana.
au secours de Sîtâ, mon fils, et
Râvana sur le sol de la terre avec son char fracassé. Cet arc ici
rompu est à lui ;
à lui
Ici,
bataille à Râvana, et
mes ailes, de mon bec ou de mes serres. Mais, trop vite fatigué à
cause de ma vieillesse, Râvana
Vidéhaine sur le bras et
Quand Râma eut reconnu Djatâyou dans le volatile qui racontait cette
Ligne 6 375 ⟶ 6 367 :
langage à Lakshmana : « Ma déchéance du trône, mon exil dans les
bois, la perte de Sîtâ et la mort de mon père : voilà tombés sur
moi des malheurs tels
reine des rivières et des fleuves se tarir aussitôt que je viendrais
à toucher ses rives ! Il
créatures, douées ou non du mouvement, un être plus malheureux que
moi, enveloppé dans cet immense filet
père, ce roi des vautours, chargé
sur la terre, frappé lui-même par
Il dit, et Râma sur ces mots, lui montrant toute
père, caressa de sa main avec Lakshmana le malheureux vautour.
« Djatâyou, si tu as encore la force
parle-moi,
amené ta mort à toi-même.
« Pour quelle raison Sîtâ fut-elle enlevée ? Quelle offense Râvana
avait-il reçue de moi ? ou dans quel lieu avait-il vu ma bien-aimée ?
Quelle est la forme, quelle est la vigueur, quelles sont les prouesses
Ligne 6 398 ⟶ 6 390 :
Ensuite, ayant tourné ses yeux vers le héros invincible, qui se
répandait en gémissements, Djatâyou, malade
forces, dit à Râma ces mots
« Son ravisseur,
Rakshasas : il eut recours aux moyens de la grande magie, qui procède
avec les tempêtes du vent.
« Il
Vinda[29], où le maître
circonstance à laquelle Râvana ne fit alors aucune attention. »
[Note 29 :
Tandis que
repos ; le sang et la chair même sortaient à flots de sa bouche.
Enfin, promenant de tous côtés ses yeux inquiets, le vautour, dans
les convulsions extrêmes de
expirant : « Ce monarque, il règne à Lankâ dans une île de la mer,
qui est au midi ; il est, sans aucun doute, le fils de Viçravas et le
Ligne 6 421 ⟶ 6 413 :
des volatiles exhala son dernier soupir.
La tête du vautour
allongea son cou et retomba sur la face du sol.
Ligne 6 430 ⟶ 6 422 :
séjour des Rakshasas ; lui, de qui, plusieurs fois centenaire, la
vie atteignit une si longue durée, le voici maintenant qui gît
mortellement frappé ; car il est impossible
« Ce roi des oiseaux mérite de ma reconnaissance le même culte et
les mêmes honneurs que Daçaratha, le fortuné monarque
mémoire. Apporte du bois, Lakshmana ;
veux rendre les devoirs funèbres à cet Indra des oiseaux, qui reçut
la mort à cause de moi. » À ces mots, Râma, le devoir incarné, mit
Djatâyou sur la pile de bois allumé et réduisit en cendres le
roi des vautours : puis il se plongea dans
de Soumitrâ, et les deux frères à
cérémonie de
Ensuite, le héros illustre abattit un cerf ; il coupa ses chairs
en morceaux et les abandonna aux oiseaux, dans un lieu de la forêt
Ligne 6 447 ⟶ 6 439 :
brahmes ont coutume de réciter sur un homme trépassé. Cela fait,
les deux fils du plus noble des hommes descendent à la rivière
Godâvarî, et présentent de nouveau
du roi des vautours. Honoré de ces pieuses obsèques par ce ''royal
anachorète'', semblable à un grand rishi,
qui avait affronté une entreprise si glorieuse, mais si difficile,
et reçu la mort en combattant, parvint à la voie sainte, suprême et
fortunée.
Le lendemain, ils se lèvent à
aux prières du jour. Ce devoir accompli, les deux héros à la grande
force abandonnent le Djanasthâna désert et tournent leurs pas à
la recherche de Sîtâ vers la plage occidentale. De là, ces deux
Ikshwâkides, armés
un chemin non battu. Ils virent une immense forêt, impraticable,
hérissée de hautes montagnes et toute couverte de maintes lianes,
d’arbrisseaux et d’arbres.
Or, Lakshmana au cœur pur et vertueux, au langage de vérité, à la
grande splendeur, dit ces mots, les mains jointes, à son frère, de
qui
« Je sens mon bras qui tremble fortement ; le trouble agite mon cœur :
je vois, guerrier aux longs bras, des prodiges qui nous sont tous
contraires. Des augures se montrent avec des formes sinistres : assieds
ton âme, héros, sur une base inébranlable, car ces présages nous
annoncent un combat à soutenir dans
Dans ce moment
des sombres nuages, hideux, bien effrayant à voir, difforme, sans
cou, sans tête, et couvert de soies piquantes, avec une bouche armée
de longues dents au milieu du ventre.
tronc égalait pour la hauteur une grande montagne et résonnait avec
le fracas des nuées, où bondit le tonnerre. Il
très-fauve, long, vaste, large, immense, placé dans la poitrine, et
dont la vue embrassait une distance infinie. Détruisant tout et
plus grands éléphants : jetant çà et là ses deux bras horribles
et longs
quadrupèdes ou volatiles.
À peine les deux frères avaient-ils parcouru
lieue seulement,
Embrassés fortement par le monstre que tourmentait la faim, les deux
héros, entraînés vers le ''tronc difforme'', virent alors ses bras
semblables à des massues ou pareils aux trompes des plus grands
éléphants ; ses bras, couverts de poils aigus avec des mains armées
Portant leurs arcs, leurs épées et leurs flèches, nos deux
guerriers, entraînés malgré eux par ses bras et tirés déjà près
de sa bouche, eurent grande peine à
Il ne put néanmoins, en dépit de ses bras, jeter dans sa gueule
ces deux héroïques frères, Râma et Lakshmana, qui résistaient
de toute leur force. Alors ce Dânava redoutable, Kabandha aux longs
bras, dit à ce couple de frères, armés
êtes-vous, ''guerriers'' aux épaules de taureaux, qui portez des arcs
et de grandes épées ; vous, qui êtes venus dans ces bois horribles
Ligne 6 508 ⟶ 6 500 :
restez-vous là ? »
À ces mots du cruel Kabandha,
glacé ''
infortune dans un plus grand malheur ; désastre épouvantable et sûr,
où nous perdrons la vie sans avoir eu même le bonheur de recouvrer
ma bien-aimée ! »
Tandis
héros fameux, au courage inébranlable, à la vigueur infaillible,
jetant les yeux sur Lakshmana, de qui tout
fermeté
colosse.
Aussitôt ces deux Raghouides, qui savaient le prix du temps et du
lieu, dégainent leurs cimeterres et tranchent les deux membres à
à droite, coupa de son épée le bras droit et le sépara de
gauche. Le grand Asoura au corps de géant tomba, ses deux bras
coupés, remplissant de ses cris, comme un nuage orageux, la terre,
Ligne 6 533 ⟶ 6 525 :
À la question de ce torse mutilé, Lakshmana, aux signes heureux,
à la vigueur immense, répondit en ces termes : « Ce guerrier-ci est
sache que moi, je suis Lakshmana, son frère puîné. Tandis que ce
héros, égal aux Dieux pour la puissance, habitait dans la forêt
Ligne 6 541 ⟶ 6 533 :
au milieu du ventre ? »
Plein
rappelait alors ce
réponse : « Héros, soyez tous deux les bienvenus !
fortune qui vous amena dans ces lieux !
inspira de me trancher ces deux bras, semblables à des massues !
« Dévoré par la faim, dans ma vertu éteinte, je ne faisais grâce
à rien de ce qui passait à ma portée, gazelle ou buffle, ours et
tigre, éléphant ou homme ! Mais
profond chagrin où
malheur où
pas au monde un être plus heureux que moi !
« Jadis,
même à
formes-ci tout à fait contraires.
qui a changé mes attraits en cette difformité hideuse, repoussante,
qui inspire la terreur à tous les êtres et telle enfin ''que vous
voyez''.
« Ma beauté fut célèbre dans les trois mondes, elle était au
delà de toute imagination, comme si tous les charmes, partagés entre
Çoukra, la lune, le soleil et Vrihaspati étaient réunis dans une
seule personne. Je suis un Dânava, mon nom est Danou, je suis le
fils moyen de Lakshmî, ''déesse de la beauté'' : apprends que
colère
« Une terrible pénitence me rendit agréable au père des créatures :
il
''
pensai-je,
défiai Indra même au combat. Mais son bras, déchaînant sur moi sa
foudre aux cent nœuds, fit rentrer dans mon corps et ma tête et mes
jambes. Je le conjurai en vain ''de me donner la mort'', il ne voulut
pas
Brahma subsiste dans sa vérité ! »
« Alors, devenu ce que tu vois, rejeté hors de ma beauté, avec ma
splendeur éteinte, je dis au roi des Immortels, en réunissant les
paumes de mes deux mains à ''
« Transformé par la foudre, les jambes tronquées et ma bouche
rentrée dans mon corps avec ma tête, comment puis-je sans manger
vivre encore une très-longue vie ? » À ces mots, le roi des Immortels
me donna ces bras longs
cette bouche munie de ses dents acérées. Grâces à mes longs bras,
tigres, ours, gazelles, et je fais
alors : « Tu iras au ciel, quand Râma et Lakshmana
deux bras dans un combat. »
« Tu es Râma, je
me donner la mort, suivant les paroles que
ciel. Je veux me lier de société avec vous, hommes éminents, et
jurer à vos grandeurs une ''éternelle'' amitié, en prenant le feu
Ligne 6 599 ⟶ 6 591 :
Quand Danou eut achevé ces mots, le vertueux Raghouide lui tint ce
langage en présence de Lakshmana : « Sîtâ est mon illustre épouse :
Râvana me
moi nous étions sortis du Djanasthâna. Je connais le nom seulement
de ce Rakshasa, mais nous ne savons ni quelle est sa forme, ni quelle
est sa demeure, ni quelle est sa puissance.
« Parle-nous de Sîtâ, de son ravisseur et du lieu où mon épouse
fut emmenée : fais-nous ce plaisir infiniment agréable, si tu en sais
quelque chose dans la vérité. Il te sied
pour nous, errants, malheureux, accablés de chagrins et voués
nous-mêmes au secours des ''opprimés''. »
Ligne 6 612 ⟶ 6 604 :
À ces mots de Râma composés de syllabes attendrissantes, Danou,
habile à manier la parole, fit cette réponse au fils éloquent
de Raghou : « Je
ta Mithilienne ; mais je pourrai
connaître, quand, de ce corps brûlé sur le bûcher, je serai passé
dans mon ancienne forme.
« Tandis que le soleil marche encore avec son char fatigué,
creuse-moi une fosse, Râma, et brûle-moi suivant les rites. »
Ligne 6 631 ⟶ 6 623 :
de beurre clarifié, et la moelle en fut cuite dans les os.
Soudain, secouant les cendres du bûcher,
des cieux le beau Danou, joyeux, paré de tous ses membres, regardant,
''comme un Dieu'', sans cligner ses paupières et portant sur des habits
sans tache une guirlande de fleurs cueillies sur
Santâna. Autour de lui flottait sa robe lumineuse, immaculée ; et,
tout radieux, illuminant de sa vive splendeur tous les points du ciel,
il se tenait dans les airs sur un char attelé de cygnes, ravissant
''
était'' Kabandha : « Apprends, fils de Raghou, dit-il à Râma, qui
doit un jour te rendre Sîtâ. Près
Pampâ, dans son voisinage est un lac ; ensuite, une montagne appelée
Rishyamoûka : dans ses forêts habite Sougrîva, personnage à la
grande vigueur, qui peut changer de forme à sa fantaisie. Va le
trouver : il est digne de tes hommages et mérite que tu
pradakshina.
« Heureusement pour toi, Râma, ce vertueux singe, nommé Sougrîva,
fut renversé du trône par son frère en courroux, Bâli, fils du
soleil. Depuis lors, ce héros magnanime, accompagné de quatre
Ligne 6 656 ⟶ 6 648 :
ne tarde pas à faire de lui ton ami : avec lui pour allié, je vois
ton entreprise bientôt couronnée du succès. Lève-toi, homme pieux ;
mets-toi en route à
soleil est allumé,
singes. »
« Que la félicité
au glorieux Kabandha, qui planait dans le sein des airs. « Et vous
aussi, allez, répondit le Dânava, pour le succès de
''où vous êtes engagés''. » Ainsi congédiés, les deux rejetons de
Kakoutstha rendent leurs hommages à Danou et partent bien contents.
Ligne 6 670 ⟶ 6 662 :
Hâtés par le désir de voir Sougrîva, les deux voyageurs traversent
des lieux couverts de montagnes, dont les arbres étaient chargés de
fruits doux comme le miel. Après une station
le dos ''gazonné'' des montagnes, ces héros continuent leur voyage le
premier jour dès
Enfin, quand ils eurent mesuré une longue route, ornée de bois
variés, les deux Raghouides
la Pampâ.
Sous
sentit avec le Soumitride se dissiper toute sa fatigue, au spectacle
de ces arbres, les rameaux chargés de fleurs et de fruits, les
voûtes retentissantes du concert des kokilas ; à la vue de cette
terre aux surfaces tapissées
et bleu-foncé, à
enflammée par des lotus brillants à
enfance ''du matin''. En contemplant cette rivière limpide, fortunée,
charmante à voir, ces deux héros à
enivrés
où sous leurs yeux ils virent le grand fleuve du Gange sortir de la
création à la voix des rishis.
Ligne 6 694 ⟶ 6 686 :
La vue de ces deux magnanimes héros jetait dans une extrême
inquiétude Sougrîva et ceux qui suivaient sa fortune.
assiégé de ''mille'' pensées, le roi des singes résolut de quitter
la montagne. Observant que ces deux héros paraissaient
immense et porter des arcs formidables, il ne pouvait calmer son âme ;
et, le cœur assailli
points de
Le prince des quadrumanes ne pouvait rester en place un seul
Ligne 6 705 ⟶ 6 697 :
conseillers : « Voici deux espions, que Bâli même envoie dans cette
forêt impénétrable sous la forme empruntée de ces deux hommes, qui
viennent ici, vêtus
Les optimates singes passent aussitôt de leur cime dans une autre
Ligne 6 711 ⟶ 6 703 :
Quand Sougrîva eut sauté de sommet en sommet, rapide comme le
vent ou les ailes de Garouda, il
septentrionale du Malaya, où ses hommes des bois vinrent se rallier
à lui sur les pics inaccessibles de cette grande montagne ; et leur
marche effrayait alors chats-pards, antilopes et tigres. Réfugiés
sur la haute montagne, les conseillers de Sougrîva
roi des singes et se tiennent devant lui, joignant leurs paumes en
coupe à la hauteur du front. Ensuite, le sage Hanoûmat tient ce
langage plein de sens au monarque tout ému, en défiance contre
une scélératesse de Bâli : « Pourquoi,
ainsi, roi des singes ? Je ne vois point ici ton cruel frère
aîné, cet artisan de crimes, le farouche Bâli, qui
continuelle inquiétude. »
À ces paroles du singe Hanoûmat, Sougrîva lui répondit alors en
ces paroles
la crainte, à la vue de ces deux archers aux grands yeux, aux longs
bras, au courage héroïque, à la vigueur immense ?
le crains, Bâli même, qui expédie vers nous ces deux hommes
formidables. Les rois ont beaucoup
ennemis ; un être de condition vulgaire ne peut bien les connaître :
mais toi, singe, quoique tu ne sois pas un roi, tu peux néanmoins
Ligne 6 735 ⟶ 6 727 :
gestes, à leur mine, à leurs discours, à certaine altération même
dans leurs voix. Observe attentivement si leur âme est ou bonne ou
méchante, en gagnant leur confiance, en les comblant
redoublant pour eux de gestes affectueux. Demande, noble singe, à ces
deux hommes, doués pleinement de beauté, quelle chose ils désirent
ici. »
Hanoûmat eut à peine entendu ces grandes paroles de Sougrîva,
nourriture, et se porta
deux Raghouides.
Le noble singe, qui possédait la force de la vérité, ce messager
à la grande vigueur dépouilla ses formes de singe ; il revêtit les
apparences
flatter suivant
''insinuant'' : « Pénitents aux vœux parfaits, vous qui ressemblez
au roi des Immortels, comment, anachorètes des bois, vos grandeurs
sont-elles venues dans cette contrée où vos pas jettent
parmi les troupes des gazelles et les autres habitants des forêts ;
vous, ascètes, de qui les yeux contemplent de tous côtés les arbres
nés sur les rives de la Pampa, et qui
le moins bel ornement de cette rivière aux ondes fraîches ? Qui
êtes-vous donc, vous, qui, remplis de force, êtes revêtus
valkala ; vous, héros à la couleur
ressemblez encore au lion par une vigueur sans mesure et tenez à vos
longs bras des arcs pareils à
« Vous, qui possédez la beauté, la richesse des formes et la
splendeur, vous, les plus magnanimes des hommes, qui ressemblez
aux plus magnifiques éléphants, et de qui la démarche fière me
rappelle ces nobles animaux dans
« Cette reine des montagnes rayonne de votre lumière ! Comment
êtes-vous arrivés dans cette contrée, vous, qui méritez un empire
et me semblez être des Immortels ? Vous, qui avez des yeux comme les
pétales du lotus ; vous au front de qui vos cheveux en djatâ forment
un diadème ; vous, de qui
qui paraissez venir du monde des grands Dieux ?
« Quand je vous parle ainsi, pourquoi ne me regardez-vous pas ? Et
pourquoi ne me parlez-vous pas, à moi, que le désir de vous parler
a conduit auprès de vous ? Un roi du peuple singe, âme héroïque
et juste, nommé Sougrîva, erre affligé dans le monde, fuyant les
violences de son frère. Je suis un conseiller de ce monarque ; le
Vent, sachez-le, est mon père ;
lieu
servir les intérêts de Sougrîva. »
Ensuite Râma,
à son frère : «
singes. Réponds, Soumitride, en paroles flatteuses à son envoyé,
qui est venu me trouver ici, qui sait parler, à qui la vérité est
connue et de qui la bouche est
Il dit : Hanoûmat entendit avec joie ce langage de Râma, et sa
pensée lui peignit en ce moment Sougrîva,
chagrin. Le singe alors de raconter, et le nom, et la forme, et
de son maître ''sur le mont Rishyamoûka'', et de porter enfin toute
longue extension.
Ligne 6 803 ⟶ 6 795 :
devoir, tempéré, doux, trouvant son bonheur dans le bien de tous les
êtres, secourable à ceux qui ont besoin de secours, accomplissant
ici les ordres de son père. En effet, ce Raghouide à
splendeur fut renversé du trône et banni dans les bois par son père
asservi à la vérité : je
grands yeux, le suivit elle-même dans
fin du jour suit, ''dans
flamboyantes. Plongé dans une vaste mer de chagrins,
digne du bonheur, le grand monarque, père de ce héros et
même du bien pour
« Apprends, singe, que Lakshmana est mon nom ; que je suis le frère
de Râma, venu avant moi dans la condition humaine, et que ses vertus
splendeur habitait, dépouillé de sa couronne et banni, dans les bois
''déserts'', un Rakshasa mit la fraude en jeu pour lui dérober
son épouse. Mais il ne connaît pas le Démon ravisseur de sa
bien-aimée. Il est un fils de Lakshmî, nommé Danou, et tombé dans
la condition des Rakshasas par
Suivant lui, Sougrîva, le roi des singes, peut nous donner ce
renseignement. »
Hanoûmat, se tenant face à face de Lakshmana, répondit comme il
suit : « Les hommes, doués
qui ont dompté la colère, qui ont vaincu les organes des sens, qui
sont tels que vous êtes, ''méritent de'' gouverner la terre. »
Il dit ; et, quand il eut
mots : « Allons, reprit-il, où
déclarée avec son frère, en butte aux vexations répétées de
Bâli et renversé du trône, ''comme toi'', ce prince, qui
aussi ravir son épouse, tremble ''sans cesse'' au milieu des bois.
Accompagné de nous, Sougrîva, compatissant aux peines de Râma,
''ne peut manquer de''
Vidéhaine. »
Alors ce noble singe à la couleur
science bien étendue, reprit ses formes naturelles et dit tout
joyeux : « Monte, ô le meilleur des rois, monte sur mon dos avec ton
frère Lakshmana ; et viens, dompteur des ennemis, viens promptement
voir Sougrîva. » À ces mots, le fils du Vent, Hanoûmat au grand
corps
''dans
* * * * *
Ligne 6 849 ⟶ 6 841 :
Arrivé du mont Rishyamoûka aux cimes du Malaya, Hanoûmat fit
connaître les deux vaillants guerriers au magnanime Sougrîva :
« Voici le sage Râma aux longs bras, le fils du roi Daçaratha, qui
vient se réfugier sous ta protection avec son frère Lakshmana.
« Né dans la famille
magnanime père, enchaîné par la vérité,
aller vivre au milieu des forêts. Là, tandis
les bois, accomplissant les ordres paternels, un Rakshasa lui a ravi
Sîtâ, son épouse, avec le secours de la magie. Dans son infortune,
ce Râma, que sa force
comme
ton côté. »
Le roi des singes prit soudain la forme humaine, et, revêtu
extérieur admirable, tint ce langage à Râma : « Ta grandeur est
façonnée au devoir, elle est pleine de vaillance, elle est amie du
bien :
ces belles qualités. Aussi
vous recevoir est-il une riche acquisition pour moi, ô le meilleur
des êtres qui ont reçu la voix en partage. Si tu veux, sans dédain
pour ma nature de singe,
alliance, je tends mon bras vers toi, serre ma main dans la tienne, et
lions entre nous un attachement solide. »
Dès
de serrer la main du singe dans sa main ; celui-ci prit à son tour
la main de Râma dans la sienne ; puis, enflammé
pour son hôte,
formée cette union, objet de leurs mutuels désirs, Hanoûmat fit
naître le feu, suivant les rites, en frottant le bois contre le
bois. Il orna le feu allumé avec une parure de fleurs, et, joyeux, il
déposa entre les nouveaux alliés ce brasier à la flamme excitée.
Ensuite ces deux princes, qui
Sougrîva, de célébrer un pradakshina autour du feu allumé, et, se
regardant
pouvaient
Alors Sougrîva, de qui
Sougrîva à la grande splendeur tint ce langage au fils du roi
Daçaratha, à ce Râma, de qui la science tenait embrassées toutes
choses.
« Écoute, ô le plus éminent des Raghouides, écoute ma parole
véridique : dépose ta douleur, guerrier aux longs bras ! Je te le
jure, ami, par la vérité ! je sais à la ressemblance des situations
''qui enleva ton épouse'' : car
manière lamentable : « Râma !
débattant sur le sein du monstre comme
''dans les serres de Garouda''. Elle me vit elle-même sur un plateau de
montagne, où
nous jeta rapidement alors son vêtement supérieur et ses brillants
joyaux. Ces objets recueillis par nous sont ici, fils de Raghou : je
vais te les apporter ; veuille bien les reconnaître. »
« Apporte-les vite, répondit le Daçarathide à ces nouvelles
agréables, que Sougrîva lui racontait : ami, pourquoi différer ? »
Hâté par
Sougrîva
de la montagne.
Ligne 6 915 ⟶ 6 907 :
À peine le Raghouide eut-il reconnu dans ces objets le vêtement et
les joyaux de Sîtâ que ses yeux se remplirent de larmes : « Hélas !
il porta ces parures à son cœur ; plusieurs fois il poussa de longs
soupirs, comme les sifflements
« Sougrîva, dis-moi ! Vers quels lieux as-tu vu se diriger le féroce
Démon, ravisseur de ma bien-aimée, non moins chère que ma vie ? Où
habite ce Rakshasa, qui
pour
Le roi des singes alors serra le Raghouide avec amour dans ses bras,
et, vivement affligé, ses mains jointes, il tint ce langage à
« Je ne connais pas du tout ni
la puissance, ni la bravoure, ni la race de ce vil Démon. Secoue
néanmoins ton chagrin, dompteur invincible des ennemis ; car je te
promets que
« Loin de toi ce trouble
de cette fermeté, qui est la vertu des natures énergiques. Certes,
une telle légèreté
rapt
« Médite cette maxime dans ta pensée : « Un esprit ferme ne souffre
pas que rien abatte sa ''constance'' ; mais
le souffle du trouble agiter son âme est un insensé. Il est malgré
lui submergé dans le chagrin, comme un vaisseau battu par le vent. »
« Le chagrin tue la force : ne veuille donc plus
douleur ! Je ne prétends point ici, Râma,
bon, car
paroles, venues
Ainsi consolé doucement par Sougrîva,
son visage baigné de larmes avec
replacé dans sa nature même par ces bonnes paroles, il embrassa
le roi des singes et lui tint ce discours : « Toute chose digne
et convenable que doit faire un ami tendre et bon, tu
Sougrîva. Un ami tel que toi est un trésor bien rare surtout dans ce
temps-ci. Il te faut employer tes efforts à la recherche de ma chère
Mithilienne et du cruel Démon à
Trace-moi en toute confiance quelle marche je dois suivre ; et que mon
bonheur naisse de toi comme les moissons naissent
dans une terre féconde. »
Joyeux de son langage, Sougrîva le quadrumane lui répondit comme il
suit en présence de Lakshmana : « Les Dieux veulent sans doute verser
de toute manière les faveurs sur moi,
grandeur un ami digne et plein de vertus. Certes !
grandeur est mon alliée, je pourrais, secondé par ton héroïsme,
conquérir même
ami, reconquérir avec toi mon royaume ! De mes parents et de mes amis,
force,
pris le feu à témoin. »
Ligne 6 977 ⟶ 6 969 :
Lakshmana, fit tomber de tous les côtés ses regards curieux dans la
forêt, et, non loin, il aperçut un shorée robuste avec un peu de
fleurs, mais riche de feuilles et paré
cassa une branche touffue de fleurs et de feuilles,
terre et
les vit assis tous deux, ''il
branche de cet arbre, en joncha la terre et fit asseoir Lakshmana.
Alors,
ces paroles, dont sa tendresse émue lui fait bégayer quelque peu les
syllabes : « Les persécutions me forcent, Râma,
dans cette
je suis venu chercher un asile dans les ''bois du'' Rishyamoûka ; mais,
redoutant le vigoureux Bâli, en guerre déclarée avec lui, en butte
à ses vexations, mon âme tremble sans cesse au milieu des forêts.
Veuille bien me protéger, fils de Raghou ; moi, qui
protecteur, infortuné, que tourmente la crainte de Bâli, terreur du
monde entier ! »
À ces mots, le resplendissant Kakoutsthide, qui savait le devoir et
chérissait le devoir, lui répondit en souriant : « Comme
dans ta grandeur un ami capable de me prêter son aide, je donnerai
« Commence par écouter, répondit Sougrîva, quel est le courage,
qui est opportun. Avant que le soleil ne soit levé, Bâli, secouant
déjà la torpeur ''du sommeil'',
à
septentrionale. Dans sa vigueur extrême, il empoigne les sommets et
les grandes cimes des montagnes, les jette dans les cieux rapidement
Ligne 7 015 ⟶ 7 007 :
réunis aux Dieux mêmes, ne pourraient tenir en bataille contre lui,
son arc à la main ! Mais quelle action lui faudrait-il faire ici pour
te persuader
« Autrefois Bâli transperça
coup dans les sept que voici, répondit le singe à Lakshmana : ''eh
bien'' ! que Râma les perce tous à la fois
crois à
À ces mots, Râma de répondre en ces termes à Sougrîva :
« Je veux connaître dans la vérité quelle fut la cause de ton
infortune ; car je ne puis, ô toi, qui donnes
le fort avec le faible, ni arrêter comme il faut toutes mes
résolutions, sans connaître bien
vous divise à tel point. »
À ces paroles du magnanime Kakoutsthide, le roi des singes se mit
circonstances de cette rivalité fraternelle :
« Bâli, comme on appelle ce farouche immolateur des ennemis, Bâli
est mon frère aîné. Il fut toujours en grand honneur devant mon
père et dans mon estime. Quand notre père fut allé se reposer ''dans
la tombe'' : « Bâli, se dirent les ministres, est son fils aîné. Il
fut donc sacré,
peuples singes ; et moi, tandis
mon père et de mes aïeux, je lui fus toujours et dans toutes les
affaires un serviteur obéissant.
« Doundoubhi avait un frère aîné, Asoura
appelé Mâyâvi : entre celui-ci et mon frère une femme,
disputaient, alluma, comme on sait, une terrible inimitié. Un jour,
à cette heure de la nuit où chacun dort, le Démon vint à la porte
de la caverne Kishkindhyâ. Il se mit à rugir dans une violente
colère et défia Bâli au combat. Mon frère entendit au milieu des
ténèbres ce rugissement
pouvoir de la colère, il
caverne, malgré tous les efforts de ses femmes et de moi-même pour
empêcher
balancer, il sortit, poussé par son courroux, aiguillonné par sa
fureur ; et moi sur-le-champ de hâter ma course derrière le monarque
des singes, sans autre pensée que celle de mon amitié pour lui.
« Aussitôt
encore sur les traces du fuyard tout tremblant. La lune vint en se
levant éclairer nos pas dans la route. Sur ces entrefaites,
fuyant aperçoit dans la terre une caverne profonde cachée par de
hauts graminées ; il
approchant, les grandes herbes nous enveloppent ''et nous dérobent sa
vue''. Quand il vit son ennemi déjà réfugié dans la caverne, Bâli,
transporté de colère, me parla en ces termes, les sens tout émus :
« Reste ici, toi, Sougrîva ! et garde sans négligence cette porte de
tué, je sorte
« À peine mon frère eut donné cet ordre, que je tâchai par tous
mes efforts
malgré moi dans cette caverne. Une année complète
entièrement depuis son entrée, et je restai devant la porte en
faction tout le temps que dura cette révolution du soleil ; mais, ne
terrible inquiétude. Je craignais
trahison.
« Enfin, après ce long espace de temps écoulé, je vis, à
douter, je vis sortir de cette catacombe un fleuve de sang écumeux ;
et ''tout'' mon cœur en fut troublé. En même temps il vint du milieu
de la caverne à mes oreilles un grand bruit de rugissements, jetés
par des Asouras et mêlés aux cris
dans une bataille. Alors moi je crus à de tels indices que mon frère
avait succombé, et je pris enfin le parti de
assailli par le chagrin, à la caverne Kishkindhyâ, mais après que
versé, mon ami,
« En vain
parvint aux oreilles des ministres, et tous alors de me sacrer dans ce
trône ''vacant''. Mais, tandis que je gouvernais
Bâli revint, fils de Raghou, après
ennemi. Quand il me vit, le front investi du sacre, une ''soudaine''
colère enflamma ses yeux, il frappa de mort tous mes conseillers
et
respect, je
avec adresse, je comblai mon frère des bénédictions les plus
respectueuses, en observant les règles de
en vain que
repoussa tous.
« Alors ce monarque des singes convoqua
savez comment le puissant Asoura Mâyâvi, toujours altéré de
batailles et plein
au combat. À peine eus-je entendu ses rugissements furieux, je
que
Quand le Démon aux grandes forces me vit marcher dans la nuit,
accompagné
se mit à courir, sans tourner les yeux derrière lui. Et moi, voyant
furieux avec Sougrîva ; arrête ! »
« Après
crainte, il se déroba sous la terre au fond
que je vis
lieu souterrain, je dis alors, moi, qui avais des vues innocentes, à
cet ignoble frère, qui avait, lui ! des vues perfides : « Mon dessein
attends-moi donc à la porte de cette caverne. »
« Persuadé
grande caverne, et
''
« Enfin, je vis cet Asoura, de qui
Cet antre fut alors inondé par un fleuve de sang, vomi de sa bouche ;
et, râlant sur le sein de la terre, il exhala son âme dans un cri
de désespoir. Après que
Doundoubhi, je revins sur mes pas et je vis fermé
caverne.
reçu de lui nulle réponse, la colère me saisit ; je brisai à coups
de pied redoublés ma prison, et, sorti de cette manière, je revins
chez moi ''sain et sauf'', comme
enfermé là ce cruel, à qui la soif de ma couronne fit oublier
« Sur ces mots, le singe Bâli me réduit au seul vêtement, ''que
donné la nature'', et me chasse de sa cour sans ménagement. Voilà,
fils de Raghou, la cause des persécutions répétées
subir. Privé de mon épouse et dépouillé de mes honneurs, je suis
maintenant comme un oiseau, à qui furent coupées ses deux ailes.
« Résolu à me donner la mort, il sortit sur le seuil de sa caverne
et me fit trembler, en levant sur ma ''tête'' un arbre épouvantable.
Je
fils de Raghou, avec les montagnes, qui la remplissent, et les
mers, qui la revêtent de leur ''humide'' manteau. Enfin,
Rishyamoûka, et, comme une ''puissante'' cause oblige cet invincible
Bâli à laisser toujours un intervalle entre ce mont et lui, je
choisis pour mon habitation cette reine des montagnes.
« Je
mortelle inimitié : vois !
le malheur qui tomba sur moi. Daigne, héroïque enfant de Raghou,
daigne me regarder avec bienveillance, moi, qui traîne ici,
Ligne 7 168 ⟶ 7 160 :
mit à ranimer le courage de Sougrîva : « Mes dards, que tu vois,
ces flèches aiguës, qui ne sont jamais vaines, Sougrîva, et qui
brillent à
cruel Bâli. ''Oui'' ! Bâli, cette âme corrompue, le corrupteur des
bonnes mœurs,
Il prit alors son arc céleste, resplendissant à
même du ''puissant'' Indra ; il encocha une flèche, et, visant les sept
palmiers, déchaîna contre eux ce ''merveilleux projectile''. Le
trait paré
palmiers, fendit la montagne elle-même et pénétra
des enfers. Ensuite, la flèche remonta spontanée sous la forme
cygne ; et, brillante
était partie'' et rentra
Quand il vit les sept palmiers traversés
la flèche impétueuse de Râma, le roi des singes tomba dans une
admiration sans égale. À la vue de cette prouesse incomparable,
Ligne 7 188 ⟶ 7 180 :
et se mit à glorifier le noble Raghouide :
« Comme le soleil est le premier des êtres lumineux, comme
la première des vastes mers : ainsi toi, Râma, tu es le premier des
hommes pour la vigueur. Ni le Dieu, qui put immoler Vritra, ni celui
de la mort, ni
main, ni le Vent, ni le Feu même
« Quel ''être'' mâle est capable de résister à celui, de qui la main
put transpercer à la fois
cette montagne elle-même, hantée par les Dânavas ? Maintenant mon
chagrin est dissipé ; maintenant mon ''cœur'' est inondé par la joie ;
Ligne 7 203 ⟶ 7 195 :
Bâli, toujours ivre de combats ! »
À ces mots, le héros à la grande science, Râma
''noble'' singe à la parole agréable et de lui répondre en ces
termes, approuvés de Lakshmana : « Viens avec moi, Sougrîva ; je vais
à la caverne Kishkindhyâ, où règne Bâli : arrivé là, défie au
combat cet ennemi, qui a ''dépouillé'' les formes du frère ! » Sur les
paroles de Râma,
avec joie Sougrîva ; et tous deux alors ils
hâté. Ils parviennent
masqué par les djungles épais, et se cachent derrière les arbres
dans la forêt impénétrable.
ce langage à Sougrîva : « Appelle ton frère au combat, force Bâli
à sortir hors de la bouche de sa caverne, et je lui donnerai la mort
avec une flèche brillante comme la foudre. » À peine le Kakoutsthide
à la vigueur sans mesure eut-il articulé ces paroles,
grande et profonde symphonie ruissela du ciel en sons agréables. Une
guirlande céleste, au tissu
tomba du firmament sur la tête de Sougrîva ; et, dans sa chute du
ciel vers la terre, cette guirlande
resplendit au sein des airs comme une guirlande ravissante
aurait tissée avec des éclairs. Dans une pensée
habitant des cieux, le soleil même, son père, avait,
soigneuse, tressé pour lui ce beau feston égal à celui de Bâli.
Ligne 7 229 ⟶ 7 221 :
Quand le vigoureux Bâli entendit les rugissements épouvantables de
son frère, sa colère
sa caverne, comme le soleil, qui sort du milieu des nuages. Alors,
telle, dans les champs du ciel, une terrible et grande bataille entre
les deux planètes Angâraka et Bouddha[30].
[Note 30 : Mars et Mercure.]
Ils se frappaient
paumes semblables à des foudres, avec leurs poings durs comme
les diamants, avec des arbres, avec les crêtes elles-mêmes des
Ligne 7 244 ⟶ 7 236 :
En ce moment Râma prit son arc et regarda les combattants ; mais ses
yeux les virent tous deux égaux par le corps, semblables exactement
la force : il reconnut alors
du second, comme il en est pour les deux beaux Açwins. ''Dans cette
parfaite ressemblance'', le vaillant Raghouide ne pouvait discerner
Ligne 7 251 ⟶ 7 243 :
''au milieu du combat''.
Sur ces entrefaites, rompu sous la main de Bâli et voyant ce ''
à courir vers le Rishyamoûka. Épuisé, baigné de sang, accablé de
coups, frappé avec fureur, il se réfugia dans la grande forêt.
À peine le resplendissant Bâli eût-il vu que son ennemi
dérobé dans ces bois, il fit volte-face, chassé par la crainte
disant : « Tu
Le noble Raghouide, accompagné de son frère et des ministres,
vint lui-même trouver Sougrîva dans cette retraite ; et, quand le
singe infortuné vit Râma en sa présence avec Lakshmana et ses
conseillers, il tint ce langage, baissant la tête et plein de
honte : « Après que tu
« Provoque Bâli au combat ! » pourquoi donc as-tu mis ta promesse en
oubli et
« Si tu voulais, le ciel détourne ce malheur ! si tu voulais que
Bâli me donnât la mort dans ce combat, quel besoin avais-je de ''ton''
amitié pour
de vivre ? »
Le Raghouide entendit sans colère sortir de sa bouche ces paroles
affligées et beaucoup
Sougrîva ! lui dit-il. Écoute maintenant la cause, roi des singes,
qui me retint de lancer ma flèche.
« Toi, Sougrîva et Bâli, vous êtes
la guirlande, le vêtement, la démarche et la taille. Cri, lustre,
station, marche, regard ou parole, il
mes sens avec certitude. Aussi, roi des singes, troublé par une telle
ressemblance de formes, je
« Qui
« Veuille donc bien attacher sur ton corps un signe qui soit comme un
drapeau, et par lequel je puisse te reconnaître une fois engagé dans
ce combat de
« Tresse-nous, Lakshmana, une guirlande avec une branche de boswellia
parée de ses fleurs, et mets-la au cou du magnanime Sougrîva. »
« Héros, dit le singe, tu
porterait la mort : tâche que ta promesse, comme une liane en fleurs,
ne tarde point à nous donner son fruit ! »
« Maintenant que mes yeux, répondit
distinguer à cette guirlande, roi des singes, va en pleine confiance,
ami, et défie une seconde fois Bâli au combat. »
Ligne 7 309 ⟶ 7 301 :
Faisant grincer les dents longues de sa bouche et la fureur teignant
son poil
yeux tout grands ouverts, comme un lac aux lotus ''épanouis''. Le roi
des simiens sortit avec impétuosité et la marche de ses pieds fit
trembler, pour ainsi dire, toute la terre. Mais Târâ aussitôt
embrassa, pleine
hors de la caverne béante, et lui tint ce langage : « Allons, héros !
abandonne cette colère, de même que, le matin, au sortir de la
couche, tu rejettes une guirlande froissée !
« Ton frère est déjà venu, bouillant de colère, et
combat : tu es sorti ; il a succombé dans cette lutte sous ta vigueur
et
fait naître en moi des soupçons, surtout à la pensée
déjà vu tout à
sous ta main.
« Une telle arrogance dans ce vaincu, qui rugit, tant de résolution,
ce tonnerre de sa voix, tout cela
importance.
«
fraternité
éprouvée et de qui la flèche ne manque jamais le but.
« Râma est le poison qui tue
arbre, sous les branches duquel habitent les hommes de bien : il est
sur la terre un vase de gloire et de hautes perfections.
«
joyaux qui sont ici dans ton palais :
richesses à Râma et signe un traité de paix avec ce héros
splendeur égale aux clartés du feu à la fin
abandonnons cette caverne et sauvons-nous dans une solitude des bois.
Car, de concert avec Sougrîva, le Daçarathide va
nous enfermer dans un insurmontable danger. Avant que
les infortunes, sache donc employer les moyens qui doivent les
prévenir. »
Ligne 7 349 ⟶ 7 341 :
Après que sa compagne au visage radieux, comme la reine des étoiles,
eut parlé de cette manière, Bâli railla ses craintes et lui
répondit en ces termes : « Comment puis-je dans cette colère,
fit naître en moi, comment puis-je endurer, mon amie, les cris
ennemi qui vient rugir ''à ma porte'' avec une telle arrogance, et qui
qui ne reculent jamais dans les combats et qui
accoutumé à
difficile que la mort !
« Ce noble fils de Raghou ne doit pas
égard :
ne peut commettre une mauvaise action. Quitte donc ce souci ! je vais
sortir, combattre avec Sougrîva et lui arracher son arrogance, mais
je ne veux pas lui ôter la vie.
« Va-
ma ''prochaine'' victoire ; ''oui'' ! je reviendrai, moi qui te parle,
aussitôt que
Târâ embrasse alors Bâli, de qui la vue était ''bien'' chère à ses
yeux ; ''toute'' en pleurs et tremblante, elle décrit à pas lents un
pradakshina autour de son époux. Après
rites, invoqué le succès pour
''cœur'' désirait la victoire, cette reine à la taille charmante de
rentrer suivie des femmes dans son gynœcée ; et, quand Târâ eut
regagné avec elles ses appartements, Bâli sortit, poussant une
respiration aiguë, comme les sifflements
Quand le vigoureux quadrumane vit, tout fier de
en Râma, son rival impatient lui-même de combattre, déjà posté en
attitude de bataille et la cuirasse bien attachée sur la poitrine,
Ligne 7 383 ⟶ 7 375 :
colère, il jeta ces mots à Sougrîva :
« Scélérat insensé, quelle hâte, Sougrîva, te fait courir une
seconde fois à la mort ? Vois mon poing fermé, que je lève pour
la mort et qui, déchargé sur ton front, va briser ta vie ! » À ces
Ligne 7 389 ⟶ 7 381 :
Néanmoins, Sougrîva sans crainte arrache aidé de sa vigueur ''et
lève'' un grand arbre,
foudre tombe sur une haute montagne. La chute de cette masse étourdit
''un moment'' son ennemi, qui
le combat : accablé sous la pesanteur du coup, Bâli chancelle et
vacille.
''Cependant'' Râma voyait Bâli rompre la fierté de Sougrîva et lui
abattre même sa vigueur ; il en fut irrité
Il encoche soudain une flèche, qui semblait un serpent de flamme et
tissue
troublés et la route de sa vie brisée : « Ah !
mort ! » Alors, comme un éléphant plongé dans un marais fangeux,
Bâli,
ces mots à Râma,
espères-tu de cette mort, que tu
je
''lâchement'' caché et tandis que ce duel absorbait toute mon
attention ! »
Après la chute de ce héros, le monarque des singes, ''on vit'' la
face de la terre
''dans les nuages''. Mais ni la vie, ni la force, ni le courage, ni la
beauté
terre. En effet, sa guirlande céleste,
était ''comme'' attentive elle-même à soutenir dans sa fin la vie de
ce quadrumane, le plus noble des singes.
Ligne 7 419 ⟶ 7 411 :
* * * * *
La nouvelle, que Râma
renversé Bâli mortellement frappé, était déjà parvenue à
mort si horrible de son mari,
précipitant son pas, accompagnée de son fils, hors de cette caverne
de la montagne. Elle vit les singes tremblants fuir
légère comme des gazelles ''épouvantées'', quand ''un chasseur a''
tué la reine du troupeau et dispersé toute la bande : « Singes, leur
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tremblants ? »
À ces questions prononcées
âme tout émue répondent à
« Fille de Jîva, retourne chez toi et défends ton fils Angada !
La mort sous la forme de Râma emporte ''
tué ! »
Alors, voyant son mari immolé sur le champ de bataille, elle
Elle prit ce corps dans ses bras, comme
mon époux ! »
la face de la terre, elle se mit à pousser des cris. « Ah ! fit-elle,
héros aux longs bras ! je suis morte
veuve ! Si tu
Ne
des singes ! Pourquoi restes-tu couché là sur la dure ? Ne me vois-tu
pas, tourmentée par la douleur, étendue sur la terre avec ton fils ?
Rassure-moi dans ce moment comme tu fis tout à
avec ton fils, moi, désespérée, à qui ta mort enlève son
protecteur ! »
Devant le spectacle de son époux étendu par terre, le sein percé de
ce dard que
de toute pitié pour son corps, et, levant ses deux bras, cette
femme aux bras charmants se broya de coups elle-même. « Hâ !
terre et
mortellement. Ceux qui formaient la cour du ''magnifique'' Bâli et les
dames simiennes de son intérieur, tous alors de
cris de pygargue hors de la bouche de sa caverne.
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affaiblis et vit près de lui Sougrîva, son jeune frère. À la vue
du roi des singes, qui remportait sur lui cette victoire, il adressa
la parole
langage : « Sougrîva, ne veuille pas que je
par cette défaillance de
chargé
Sans doute le Destin avait décidé que la concorde
entre nous :
Destin arrangea les choses
« Saisis-toi du sceptre
car, sache-le, je pars à
une telle situation, héros, veuille bien faire exactement ce que je
vais dire, chose importante et qui retient ici ma vie. Vois, étendu
sur la terre cet enfant plein de sagesse, élevé au sein des plaisirs
et qui mérite le bonheur, mais de qui la face est baignée de larmes,
Angada, mon fils, qui
les côtés, comme
chair, lui que je laisse au monde sans protecteur !
« Pare-toi donc, Sougrîva, de cette guirlande, présent du ciel et
tissue
réside en elle se répandra sur toi ! »
Il dit, et, dès
Bâli à la haute renommée, courbant la tête,
jointes, à Râma, et tint ce langage pour lui recommander son fils :
« Le prolétaire qui, dès son commencement, a toujours vécu dans
une maigre condition,
Raghou ; mais ce nom de misérable convient plus justement à
de haute naissance précipité dans
Né dans une famille opulente, Râma, et qui peut combler de ses
largesses tous les vœux, Angada, quand
donc misérable ! Voilà ce qui fait ma douleur, à moi qui ne verrai
plus ce visage bien-aimé de mon enfant chéri, comme
pécheur
combat, je vais donc mourir, héroïque fils du plus éminent des
hommes, sans avoir pu me rassasier entièrement de voir mon fils
Angada ! Fléau des ennemis, toi, qui es la voie où marchent et
Angada, mon fils, aux bracelets
Quand il eut transmis sa guirlande à son frère et baisé Angada sur
Ligne 7 508 ⟶ 7 500 :
des âmes, dit ces mots avec amour ''au jeune quadrumane'' :
« Ménage les temps et les lieux, endure avec patience ce qui plaît
ou déplaît, supporte également la douleur et le plaisir ; sois, mon
fils, un sujet docile pour Sougrîva. Si tu
te payer de retour comme moi, qui
enfance. Fais-toi des amis, ni trop, ni trop peu, car la solitude,
mon ami, est un grand mal : sache donc garder le milieu entre les deux
extrêmes. »
Il
trait ''acéré'' que ses yeux se roulent affreusement dans leur orbite,
ses dents
exhale enfin sa vie dans un dernier soupir. Alors, toute plongée dans
un océan de chagrin, Târâ, les yeux fixés sur la face ''glacée''
de son cher époux, retomba dans la poussière, tenant Bâli embrassé
comme une liane roulée autour
Quand l'''aîné des'' Raghouides,
que Bâli avait exhalé son dernier soupir, il tint à Sougrîva ce
discours modeste : «
le chagrin, il
aille avec son fils habiter maintenant chez toi. Tu as répandu ces
larmes, qui viennent à la suite
car'', passé la mort, il ne reste plus rien à faire. La nécessité
est la cause universelle, la nécessité embrasse le monde, la
nécessité est la cause qui agit dans la séparation de tous les
êtres. Néanmoins, que
évolutions de ce Destin, le bien, sur lequel on doit toujours fixer
les yeux, car le Destin même embrasse dans sa marche le devoir,
l’utile et l’agréable.
« Bâli est rentré au sein de la nature ; il a reçu dans cette mort
donnée le fruit ''amer'' de son œuvre : que
les funérailles du roi des singes, comblé de tous les dons
funèbres. Son âme fut chassée du corps, parce
rentré dans le devoir, ''à la fin de sa vie'', le Paradis lui fut
donné pour sa récompense. Nous avons accordé ce
douleur : accomplissons maintenant ce
Les yeux troublés de larmes, Târâ et les autres dames singes,
Ligne 7 557 ⟶ 7 549 :
Les amis en bien grand nombre de Bâli construisent un bûcher
dans une île solitaire, que la rivière, descendue de la montagne,
environnait de ses ondes ; et, ''
des singes, qui portaient la bière sur leurs épaules,
déposent le cercueil et se tiennent à
le recueillement.
Ensuite Târâ, à la vue de son époux couché dans ce lit
bière, leva dans son sein la tête de son époux et gémit ces mots
dans une profonde affliction : « Ô toi, à qui tes fils étaient si
chers, tu
regardes-tu avec cet air stupéfait, lui, ''ton enfant'', accablé sous
le poids du chagrin ?
« Ton visage semble encore me sourire au sein même de la mort : je le
vois, tel que si tu étais vivant, pareil au jeune soleil du matin ! »
Ligne 7 575 ⟶ 7 567 :
fit monter sur le bûcher ce corps de son père. Il appliqua le feu
à la pile de bois, conformément aux rubriques, et, tous les sens
troublés, il décrivit un pradakshina autour de son père, qui
allait pour un long voyage. Enfin, quand les singes ont honoré
Bâli suivant les rites, ils descendent faire la cérémonie de
funèbre dans la Pampâ aux ondes fraîches et limpides. Ce devoir
accompli, ils sortent de la rivière et viennent tous avec leurs
habits mouillés revoir
grande vigueur.
* * * * *
Ensuite le sage Hanoûmat, brillant à
le corps tel
au guerrier issu de Raghou : « Grâce à toi, fléau des ennemis,
Sougrîva monte sur le trône de son père et de son aïeul : il a
conquis, grâce à toi, ce vaste empire des singes bien difficile
à conquérir.
et
Bientôt, consacré par le bain, son âme reconnaissante va
avec ses présents de pierreries diverses, de simples recueillis
en tout pays et de parfums célestes. Daigne entrer dans cette
Ligne 7 598 ⟶ 7 590 :
et que ta vue répande la joie parmi les singes. »
À ces mots
parole et plein de sens, lui répondit en ces termes : « Je
pas, bel Hanoûmat, ni dans une ville, ni dans un village, avant que
je
Entrez, vous ! et hâtez-vous de faire ce qui demande une exécution
immédiate. Ami, que le sacre, donné suivant les rites, inaugure
Ligne 7 608 ⟶ 7 600 :
que voici devant tes yeux, comme le roi de la jeunesse.
« Ce mois de Çrâvana, plongé dans la pluie, est le premier des
mois pluvieux : nous voici entrés, mon ami, dans les quatre mois de
la saison des pluies. Ce temps ne convient pas au rassemblement
armée : entre dans cette ville ; moi tenant domptés mes organes des
sens,
''Rishyamoûka'', une caverne délicieuse, vaste, protégée contre le
souffle du vent :
saison des pluies avec le fils de Soumitrâ. Mais, quand tu auras vu
aux moissons de lotus et de nymphéas, déploie alors, déploie, ami,
tes soins pour la mort de Râvana.
ce qui reste bien convenu entre nous. Va dans cette ville florissante ;
puis, une fois sacré dans ton royaume, fais-y la joie de tes amis. »
Ligne 7 625 ⟶ 7 617 :
singes pénétra dans cette aimable cité, le cœur joyeux et tous
ses chagrins dissipés. Là, devant le roi qui entre, des milliers de
quadrumanes
de tous les côtés.
Tout le ''peuple des'' sujets, la tête prosternée
salue, plein de respect, le nouveau roi des singes, en lui criant :
« Victoire ! victoire ! » Sougrîva les invite à se relever et, les
ayant honorés suivant
sérail de son frère.
Ligne 7 640 ⟶ 7 632 :
* * * * *
Le sommeil
reposer durant les nuits noyé dans les pleurs et le chagrin, il
avait que le souci dont il reçût la visite.
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sa pensée toute remplie de son épouse ravie, la saison acheva de
répandre ses pluies ; et la retraite des nuages, qui promenaient
sur leurs chars une pesante charge
l’automne.
* * * * *
Quand le fils du Vent, Hanoûmat, qui
et qui savait distinguer le moment des affaires, vit Sougrîva
empêché par
devoir ; Hanoûmat
des singes avec des paroles affectueuses et douces, il tint au roi,
qui savait goûter les qualités
vrai, convenable, et tout assaisonné de bienveillance et
« Ô roi tu as personnifié en toi-même
et la fortune de ta race ; tu as gagné
comblé
dont il ne reste plus que le nom ; mais une chose est à faire,
de secourir tes amis : que ta grandeur veuille donc y penser.
« Héros, plein de courage dans les batailles et qui domptes les
ennemis, tu laisses passer
ami ; ''tu oublies que le moment est venu'' pour aller à la recherche de
sa Vidéhaine. Tu perds le temps, et néanmoins on ne le voit pas te
presser, malgré son impatience : cet homme sage et qui sait le devoir,
ne réclame de toi le retour du plaisir
veuille donc rassembler, roi des singes, les plus vaillants de tes
guerriers. Car les héros simiens à la grande vigueur ont des routes
difficiles à parcourir : ainsi, ne laisse pas un trop long temps
À peine Sougrîva eut-il entendu ces paroles sages et dites à
Ligne 7 683 ⟶ 7 675 :
en sorte que mes armées entières et les chefs entièrement des
troupeaux simiens, et les grands capitaines de mes troupes, et les
défenseurs des frontières, à
se rendent tous dessous les drapeaux sans défaillance de cœur.
Aussitôt le rassemblement opéré, que ta grandeur elle-même passe
Ligne 7 692 ⟶ 7 684 :
* * * * *
Dès que le ciel fut débarrassé de ses nuages et
Râma, qui avait passé toute la saison des pluies sous
du chagrin que lui causait
la fille du roi Djanaka, et que Sougrîva, retenu par la volupté,
laissait échapper le temps favorable,
de sa douleur. Ensuite, revenu après un instant à la connaissance
de lui-même, le Kakoutsthide se recueillit dans ses réflexions un
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succès :
« Les rois altiers, magnanimes, ambitieux de conquérir la terre et
qui sont engagés dans une guerre
la saison du rassemblement des armées.
vois ni Sougrîva, ni rien qui annonce une levée de cette nature. Ces
quatre mois de la saison pluvieuse, bel ami, ont passé lents comme un
siècle pour moi, consumé par
« Va donc ! entre dans la caverne de Kishkindhyâ et répète ces
paroles de moi au stupide roi des singes, endormi au sein de ses
grossières voluptés : « Tu diffères le moment
fait entre nous et toi, nous, qui sommes venus réclamer ton secours
dont nous avons besoin, et qui avons commencé par te prêter notre
aide. Celui qui détruit
est un homme vil dans le monde ; mais celui qui reconnaît la parole,
soit bonne, soit mauvaise, tombée de sa bouche, et qui dit : «
la vérité ! » est dans le monde un homme supérieur.
«
donc vite au salut de ma Vidéhaine, afin que le temps ne
pas stérilement.
« Ou bien désires-tu voir, bandé par moi dans un combat ''avec toi'',
la forme de mon arc au dos plaqué
épouvantable de ma corde vibrante, quand je la tire
irritée au milieu de la guerre ? Certes ! il
par où Bâli mort
traité ! Ne suis pas la route de Bâli !
Bâli seul ; mais, si tu sors de la vérité,
avec toi ! »
Ligne 7 742 ⟶ 7 734 :
de montagnes, ceux-là de grands et vieux arbres. Quand Lakshmana les
vit tous empoigner ces armes, il en fut encore plus irrité, comme le
feu sur lequel on a jeté
Leurs chefs entrent dans le palais de Sougrîva ; ils annoncent aux
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des singes, qui tenaient des arbres à leurs mains. Alors tous les
simiens, rangés en bataille devant le jardin public de la ville,
sortirent de
arrivés près de Lakshmana, ces guerriers aux formes telles que
les grands nuages, à la voix semblable au tonnerre de la foudre,
poussèrent à
Aussitôt Sougrîva, que cette vaste clameur et la ''voix de'' Târâ
Ligne 7 762 ⟶ 7 754 :
Le plus éminent des conseillers, ''Hanoûmat'', le fils du Vent,
commence par se concilier la faveur de Sougrîva et lui tient ce
langage, comme Vrihaspati lui-même
« Râma et Lakshmana, ces deux frères à la grande vigueur et
dévoués à la vérité,
Lakshmana se tient à la porte, son arc à la main, et les singes
tremblants ont jeté ce cri
sait manier les rênes de la parole, vient ici, monté, suivant
À ces mots
de tristesse ; et, là-dessus, il ajoute ces paroles à son père
''adoptif'' : « Admets-le devant toi, ou bien arrête-le dans sa marche ;
fais ce que tu penses convenable ; il est certain que Lakshmana vient
ici
cause de sa colère. »
Sougrîva, courbant un peu la tête, réfléchit un instant ; et quand
il eut pesé le fort avec le faible des paroles
autres ministres venaient ainsi de lui adresser, le monarque, expert
à manier le discours, tint ce langage à tous ses conseillers,
grande habileté dans les délibérations : « Je ne trouve en moi nulle
faute, soit en parole, soit en action, pour
colère, qui pousse vers nous Lakshmana, ce frère du noble Raghouide.
Peut-être mes ennemis jaloux, et qui guettent sans cesse une
occasion, auront-ils fait tomber dans les oreilles de Râma les
insinuations
«
est difficile à conserver : un rien suffit à briser
suite de
au sujet du magnanime Râma, parce
''faveur''. »
Ligne 7 799 ⟶ 7 791 :
ses ministres quadrumanes :
« Il
tu
car ce fut pour le seul plaisir de
tendit son grand arc et donna la mort à Bâli
celle du ''puissant'' Indra. Le Raghouide est irrité de
que tu lui montres de toutes les manières, je
et
''la société'' ajoute à sa fortune.
« Il te faut supporter, ô le plus grand des singes, les paroles
amères du magnanime Raghouide, qui
perte de son épouse ravie abreuve de chagrin. Je ne connais pas
un moyen plus convenable pour toi que
conjurer Lakshmana. Pénétré de cet axiome, prince : « Que les
ministres doivent parler avec liberté, »
crainte et
FIN DU PREMIER VOLUME
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