« Après la pluie, le beau temps/38 » : différence entre les versions
Contenu supprimé Contenu ajouté
m liens vers l'espace auteur |
|||
Ligne 1 :
{{TextQuality|100%}}<div class="text">
{{Navigateur|[[Après la pluie le beau temps - 37|37]]|[[Après la pluie le beau temps]]|[[Après la pluie le beau temps - 39|39]]}}
{{chapitre|[[Après la pluie le beau temps]]|[[Auteur:Comtesse de Ségur|Comtesse de Ségur]]|XXXVIII - Le mariage|}}
<br />
Deux jours après, Geneviève reçut une lettre de Jacques ; il avait enlevé facilement le consentement de ses parents, qui désiraient depuis longtemps que l’amitié d’enfance finît par un heureux mariage. Mais le délai de quinze jours leur parut bien court.
Ligne 9 :
« Et les papiers ! dit le père, les actes, les publications ?
{{sc|Jacques}}. —
Tout sera fait, mon père ; j’ai tout prévu.
— Et la corbeille ? dit la mère.
{{sc|Jacques}}. —
Vous la donnerez plus tard, ma mère, Geneviève a tout ce qu’il lui faut.
{{sc|Le père}}. —
Et un appartement pour nous, pour assister à ton mariage ?
{{sc|Jacques}}. —
Je m’en charge, mon père ; vous en aurez un tout prêt.
Ligne 35 ⟶ 31 :
« Jacques ! Geneviève ! » fut le seul cri qu’ils échangèrent en même temps. Mlle Primerose l’entendit, accourut et se mit à accabler Jacques de questions ; il répondit à tout de la manière la plus satisfaisante, fit part à Geneviève du bonheur de ses parents, de ses frères et sœurs, et annonça qu’il allait s’occuper, aussitôt après le déjeuner, des publications nécessaires.
{{sc|Jacques}}. —
Je rapporte mon acte de naissance ; le notaire a le tien, Geneviève ; nous serons affichés à la mairie demain samedi, publiés à l’église dimanche ; mon père en fera autant chez lui à la campagne. J’irai dans l’après-midi chez le notaire, de là à la paroisse, puis à mon bureau d’engagement de zouave ; ensuite j’irai chercher un appartement. Ils arrivent tous, même ma vieille bonne qui m’aime tant et qui veut assister au mariage de son cher Jacquot, comme elle m’appelle encore. Demain j’irai chez mes chers pères, à Vaugirard, leur annoncer mon prochain mariage ; je courrai encore pour l’appartement et pour quelques commissions de ma mère ; après quoi je reviendrai, dès que je serai libre, me reposer auprès de toi, ma Geneviève ; c’est près de toi que seront toujours mon repos et mon bonheur.
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Tu as tant de choses à faire, mon pauvre garçon, que je vais hâter le déjeuner ; et, pendant que tu seras absent, je sortirai avec Geneviève pour quelques commandes et emplettes indispensables.
{{sc|Geneviève}}. —
Quelles emplettes, chère cousine ?
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Une espèce de trousseau, ma fille ; des robes, des chapeaux…
{{sc|Geneviève}}. —
Je n’ai pas besoin de grand-chose.
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Comment ! Vas-tu te marier avec ta vieille robe de soie bleue, par hasard, ou la robe de jaconas que tu portes à présent ?
{{sc|Geneviève}}. —
Non, certainement ! La robe de noce, à la bonne heure ; mais j’ai, du reste, ce qu’il me faut.
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Ne te faut-il pas des toilettes plus élégantes que celles que tu as, une foule de choses qui te seront nécessaires à Rome et même ici ?
{{sc|Geneviève}}. —
Faites comme vous voudrez, ma cousine, pourvu que je ne perde pas une minute de Jacques.
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Tu ne perdras rien du tout ; sois tranquille. »
On déjeuna un peu à la hâte. Mlle Primerose, tout en mangeant, fit à Geneviève un inventaire si considérable de ce qu’il lui fallait pour le matin, pour l’après-midi, pour les dîners, pour les soirées, que Geneviève demanda grâce et se refusa absolument à de telles dépenses pour sa personne. Jacques riait et soutenait Mlle Primerose.
{{sc|Geneviève}}. —
Veux-tu donc, Jacques, que je sois de ces folles qui dépensent huit ou dix mille francs par an pour leur toilette ?
{{sc|Jacques}}. —
Tu ne seras jamais de ces folles, ma Geneviève, mais laisse ta bonne cousine te monter convenablement. Tu sais par une longue expérience qu’elle a beaucoup d’ordre ; elle ne t’entraînera pas dans des dépenses inutiles.
{{sc|Mademoiselle Primerose}}. —
Voilà qui est parler sagement
▲Voilà qui est parler sagement (''imitant Geneviève''), ''mon Jacques chéri''. — À la bonne heure ! tu as confiance dans la vieille cousine, toi. — Allons, sortons de table ; nous sommes tous pressés. Viens en voiture avec nous ; nous te déposerons chez le notaire. »
Ils partirent donc ensemble et se séparèrent pour se retrouver à l’heure du dîner. Ils avaient heureusement accompli leurs courses ; Jacques avait trouvé un appartement tout meublé pour ses parents ; au bureau du comité des zouaves, on lui dit que son départ devait être retardé de quinze jours, à cause de la multitude des engagements volontaires. Ce retard lui fut très agréable ainsi qu’à Geneviève et à sa cousine.
Huit jours après, M. et Mme de Belmont arrivèrent avec leurs enfants. Ce fut une grande joie pour les deux familles. Malgré le peu de temps qui restait à Mme de Belmont avant le mariage, elle offrit à Geneviève une très jolie corbeille, composée de beaux bijoux, de dentelles
À son arrivée, Jacques fut présenté au saint-père, qui lui donna sa sainte et paternelle bénédiction, accompagnée de paroles flatteuses pour lui et pour sa jeune femme. Jacques fut cantonné à Rome, et put consacrer ainsi à Geneviève tout le temps qui n’était pas employé aux manœuvres et aux devoirs du service. Ils visitaient souvent ensemble les grandes et belles curiosités chrétiennes qui font de Rome la ville par excellence, le grand foyer de la foi catholique et le point de mire de tous les voyageurs. Mlle Primerose et Geneviève allaient rarement dans le monde. Rome contenait alors peu d’étrangers ; presque tous avaient fui, dans la crainte d’un conflit sanglant et décisif entre les hordes révolutionnaires italiennes et les troupes du pape, peu nombreuses, mais animées d’une foi ardente et d’un amour profond qui en décuplaient la force.
Ligne 101 ⟶ 84 :
Geneviève avait supporté ces séparations et ces inquiétudes avec le courage d’une femme chrétienne. Mais quand, à l’automne suivant, vint l’annonce d’une campagne et de batailles en règle, et la nécessité d’une séparation immédiate, sa douleur fut plus forte que sa volonté ; elle donna libre cours à ses larmes.
« Ma Geneviève, ma bien-aimée, lui dit Jacques au moment du départ, n’affaiblis pas mon courage par la pensée de ta douleur. Ne perdons pas notre confiance dans le Dieu tout-puissant qui m’a
{{sc|Geneviève}}. —
Oh ! Jacques, mon amour, ma vie, tu seras seul dans ces terribles combats ; personne pour veiller sur toi ; personne pour te ramasser si tu tombes victime de ton courage. »
|