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Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous présens et à venir nous avoir reçeüe l'umble supplication de Jehan Sommet, notaire, demourant à Thiart ou païs d'Auvergne, à présent prisonnier détenu en la dite ville de Thiart, ès prisons de nostre très chier frère et cousin le duc de Bourbonnois et d'Auvergne, contenant que, la nuyt du XIIe au XIIIe jour de juing derrenier passé, la femme du dit suppliant fut fort troublée de son sens et entendement, criant à haulte voix comme incensée, soy voulant getter par les fenestres en la rue, voire soy voulant précipiter et ocirre, dont icelluy suppliant fut moult doulent et courroussé et appela ses voisins, lesquelz avec lui gardèrent sa dite femme de désespoir. A l'occasion et pour le remède de laquelle maladie icellui suppliant voua sa dite femme à plusieurs sains et saintes et icelle mena en plusieurs pélerinages. Mais néanmoins d'icelle frénasie et maladie la dite femme fut tousjours tormentée parfoix. Et ce voyant, le dit suppliant, comme tousjours courroussé de ce, soy enquist à ses voisins et à autres personnes dont povoit icelle maladie et frénasie venir ne procéder et s'ils y savoient aucun remède. Partie desquelles personnes luy dirent que la dite maladie procédoit de poisons, lesquelles poisons luy avoient baillées une vielle femme de la dite ville aagée de IIII.XX.X ans, nommée Guillaume ou Guillaumete de Pigeroles alias Turletenche, tenue et répputée estre grant sorcière et mauvaise femme. Et pour ce estoit besoing que icelle Turlutenche luy ostat ou guérist les dis poisons ou maladie, car nulle autre personne ne le povoit faire que la dite Turlutenche. Et fut lors dit et conseillé au dit suppliant de admonester et dire à part doulcement à ladite Turlutenche qu'el voulsist guérir sa dite femme de la dite maladie, ou, si autrement elle ne le vouloit faire, que on luy chauffast les solles des piez et lors elle remédieroit bien à la maladie de la dite femme, car, par telles menasses et bateüres elle avoit autres foiz, en icelle ville de Thiart et païs d'environ, remédié, pourveü et guéry plusieurs personnes de telles poisons ou maladies. Et à ceste cause icelluy suppliant, la veille de la feste saint Laurens dernier passée, par ung nommé Hugues Vachon, frère de sa dite femme, manda et fist venir un ung hostel icelle femme nommée Turlutenche, faignant et lui mandant qu'il vouloit parler d'aucunes autres besongnes. Et quant icelle Turlutenche fut venue et arrivée ou dit hostel, ouquel estoient les dis Vachon, suppliant, et ung autre nommé Jehan Cavart, aussi frère de sa dite femme, environ l'eure de midi, après plusieurs autres parolles et lengaiges eüz avec ladite Turlutenche d'autres choses, le dit suppliant, en sa présence et de ses dis aliez, dist et récita la manière et comment sa dite femme estoit malade et fort débilitée de son sens et entendement, requérant et priant à la dite Turlutenche que, s'elle savoit aucun remède à icelle maladie, qu'elle y voulsist pourveoir. Laquelle respondy qu'elle n'y en savoit point. Et après plusieurs demandes et interrogatoires faictes à la dite Turlutenche du remède d'icelle maladie et qu'elle ot respondu aucunes foiz en une manière, autres foiz en ung autre, sans vouloir donner, dire ou mettre aucun remède pour la dite maladie, icellui suppliant, comme courroussié, dist au dit Cavart qu'il alast quérir ung fer chault pour chauffer à la dite Turlutenche les planctes des piez. Ce que icellui Cavart fist et d'un petit fer chault par deux ou trois fois le fist toucher à la plante des piez d'icelle Turlutenche et, en ce faisant, lui tirant ung peu le nez et la joue. Et lui tint aussi le dit Vachon ung petit baston sur le col, affin qu'elle ne se levast pas sit tost de terre, menassans par les dessus dis la dite Turlutenche de lui faire dommage, s'elle ne guarissoit ou ostoit les poisons de la femme d'icelluy suppliant. Ce fait, veans que icelle Turlutenche ne vouloit autre chose dire , la laissèrent aller, luy disant que dès lors en avant se gardast de plus tourmenter icelle femme du dit suppliant. Et ce fait, s'en allèrent chacun en son hostel et la dite femme aussi en sa maison, passant au travers du marché, qui ce dit jour estoit en icelle ville de Thiart. Et le lendemain de la dite feste de saint Laurens, icelle femme du dit suppliant de la dite maladie fut plus fort tourmentée en frénasie et incensté que devant, devint enflée, perdy le parler trois ou quatre foiz et finablement cuida morir, dont icelluy suppliant fut plus fort mal meü. Il manda en son hostel quatre de ses principaulx amis, c'est assavoir les dis Vachon, Cavart, frères de sa dite femme, ung nommé Jehan Grasset et ung autre appellé Pierre Jobert, demourant en la dite ville de Thiart. Et, eulx illec arrivez, leur dist qu'il estoit besoing et nécessaire, pour la guérison de la maladie sa dite femme, retourner par devers la dite Turlutenche de nuyt, la mener à part et illec d'ung fer chault lui chauffer la plante des piez, ou d'unes tenailles lui sarrer ou estraindre les tallons, pour lui faire donner guérison à sa dite femme, ou cas toutes voyes que la dite Turlutenche autrement ne le voulroit faire ; et que s'elle leur faisoit bonne responce, qu'ilz la laissassent en paix et ne lui feïssent aucun mal ; priant et requérant par icellui suppliant les quatre dessus dis, comme ses principaulx amis, de ce faire. Les aucuns desquelz disdrent ou faisoient difficulté de entrer en l'ostel de la dite Turlutenche à la dite heure de nuyt, de paour et doubte que les voisins d'icelle Turlutenche ne le deïssent à justice. Et lors le dit suppliant , désirant pour son vaillant la santé de sa dite femme, leur dist qu'il n'y auroit voisin qui s'en meslast, sachant la dite Turlutenche estre mauvaise femme et que, se pour la dite entrée ilz en estoient reprins en justice, que les en garentiroit de domage, jusques à cent frans, non cuidant ne pensant que les dessus dis deüssent faire autre mal ne desplaisir à la dite Turlutenche que par la manière dessus dite. Et ce fait, les dis Vachon, Cavart, Grasset et Jobert, eulx quatre ensemble, s'en allèrent environ l'eure de neuf heures
Loys, par la grâce de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous présens et à venir nous avoir reçeüe l'umble supplication de Jehan Sommet, notaire, demourant à Thiart ou païs d'Auvergne, à présent prisonnier détenu en la dite ville de Thiart, ès prisons de nostre très chier frère et cousin le duc de Bourbonnois et d'Auvergne, contenant que, la nuyt du XIIe au XIIIe jour de juing derrenier passé, la femme du dit suppliant fut fort troublée de son sens et entendement, criant à haulte voix comme incensée, soy voulant getter par les fenestres en la rue, voire soy voulant précipiter et ocirre, dont icelluy suppliant fut moult doulent et courroussé et appela ses voisins, lesquelz avec lui gardèrent sa dite femme de désespoir. A l'occasion et pour le remède de laquelle maladie icellui suppliant voua sa dite femme à plusieurs sains et saintes et icelle mena en plusieurs pélerinages. Mais néanmoins d'icelle frénasie et maladie la dite femme fut tousjours tormentée parfoix. Et ce voyant, le dit suppliant, comme tousjours courroussé de ce, soy enquist à ses voisins et à autres personnes dont povoit icelle maladie et frénasie venir ne procéder et s'ils y savoient aucun remède. Partie desquelles personnes luy dirent que la dite maladie procédoit de poisons, lesquelles poisons luy avoient baillées une vielle femme de la dite ville aagée de IIII.XX.X ans, nommée Guillaume ou Guillaumete de Pigeroles alias Turletenche, tenue et répputée estre grant sorcière et mauvaise femme. Et pour ce estoit besoing que icelle Turlutenche luy ostat ou guérist les dis poisons ou maladie, car nulle autre personne ne le povoit faire que la dite Turlutenche. Et fut lors dit et conseillé au dit suppliant de admonester et dire à part doulcement à ladite Turlutenche qu'el voulsist guérir sa dite femme de la dite maladie, ou, si autrement elle ne le vouloit faire, que on luy chauffast les solles des piez et lors elle remédieroit bien à la maladie de la dite femme, car, par telles menasses et bateüres elle avoit autres foiz, en icelle ville de Thiart et païs d'environ, remédié, pourveü et guéry plusieurs personnes de telles poisons ou maladies. Et à ceste cause icelluy suppliant, la veille de la feste saint Laurens dernier passée, par ung nommé Hugues Vachon, frère de sa dite femme, manda et fist venir un ung hostel icelle femme nommée Turlutenche, faignant et lui mandant qu'il vouloit parler d'aucunes autres besongnes. Et quant icelle Turlutenche fut venue et arrivée ou dit hostel, ouquel estoient les dis Vachon, suppliant, et ung autre nommé Jehan Cavart, aussi frère de sa dite femme, environ l'eure de midi, après plusieurs autres parolles et lengaiges eüz avec ladite Turlutenche d'autres choses, le dit suppliant, en sa présence et de ses dis aliez, dist et récita la manière et comment sa dite femme estoit malade et fort débilitée de son sens et entendement, requérant et priant à la dite Turlutenche que, s'elle savoit aucun remède à icelle maladie, qu'elle y voulsist pourveoir. Laquelle respondy qu'elle n'y en savoit point. Et après plusieurs demandes et interrogatoires faictes à la dite Turlutenche du remède d'icelle maladie et qu'elle ot respondu aucunes foiz en une manière, autres foiz en ung autre, sans vouloir donner, dire ou mettre aucun remède pour la dite maladie, icellui suppliant, comme courroussié, dist au dit Cavart qu'il alast quérir ung fer chault pour chauffer à la dite Turlutenche les planctes des piez. Ce que icellui Cavart fist et d'un petit fer chault par deux ou trois fois le fist toucher à la plante des piez d'icelle Turlutenche et, en ce faisant, lui tirant ung peu le nez et la joue. Et lui tint aussi le dit Vachon ung petit baston sur le col, affin qu'elle ne se levast pas sit tost de terre, menassans par les dessus dis la dite Turlutenche de lui faire dommage, s'elle ne guarissoit ou ostoit les poisons de la femme d'icelluy suppliant. Ce fait, veans que icelle Turlutenche ne vouloit autre chose dire , la laissèrent aller, luy disant que dès lors en avant se gardast de plus tourmenter icelle femme du dit suppliant. Et ce fait, s'en allèrent chacun en son hostel et la dite femme aussi en sa maison, passant au travers du marché, qui ce dit jour estoit en icelle ville de Thiart. Et le lendemain de la dite feste de saint Laurens, icelle femme du dit suppliant de la dite maladie fut plus fort tourmentée en frénasie et incensté que devant, devint enflée, perdy le parler trois ou quatre foiz et finablement cuida morir, dont icelluy suppliant fut plus fort mal meü. Il manda en son hostel quatre de ses principaulx amis, c'est assavoir les dis Vachon, Cavart, frères de sa dite femme, ung nommé Jehan Grasset et ung autre appellé Pierre Jobert, demourant en la dite ville de Thiart. Et, eulx illec arrivez, leur dist qu'il estoit besoing et nécessaire, pour la guérison de la maladie sa dite femme, retourner par devers la dite Turlutenche de nuyt, la mener à part et illec d'ung fer chault lui chauffer la plante des piez, ou d'unes tenailles lui sarrer ou estraindre les tallons, pour lui faire donner guérison à sa dite femme, ou cas toutes voyes que la dite Turlutenche autrement ne le voulroit faire ; et que s'elle leur faisoit bonne responce, qu'ilz la laissassent en paix et ne lui feïssent aucun mal ; priant et requérant par icellui suppliant les quatre dessus dis, comme ses principaulx amis, de ce faire. Les aucuns desquelz disdrent ou faisoient difficulté de entrer en l'ostel de la dite Turlutenche à la dite heure de nuyt, de paour et doubte que les voisins d'icelle Turlutenche ne le deïssent à justice. Et lors le dit suppliant , désirant pour son vaillant la santé de sa dite femme, leur dist qu'il n'y auroit voisin qui s'en meslast, sachant la dite Turlutenche estre mauvaise femme et que, se pour la dite entrée ilz en estoient reprins en justice, que les en garentiroit de domage, jusques à cent frans, non cuidant ne pensant que les dessus dis deüssent faire autre mal ne desplaisir à la dite Turlutenche que par la manière dessus dite. Et ce fait, les dis Vachon, Cavart, Grasset et Jobert, eulx quatre ensemble, s'en allèrent environ l'eure de neuf heures
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