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PREMIER DISCOURS PRÉLIMINAIRE.
Les prolégomènes. Première partie (1863). Traduits en Français et commentés par William MAC GUCKIN, Baron DE SLANE, membre de l’Institut. (1801-1878).
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===Préface de l’auteur.===
 
L’histoire est une branche de la philosophie et doit compter au nombre des sciences. — Des historiens et des divers plans qu’ils ont suivis. — Plan adopté par l’auteur. — Division et titre de son ouvrage.
 
===Introduction.===
 
De l’excellence de la science historique ; établissement des principes qui doivent lui servir de règle ; aperçu des erreurs et des méprises auxquelles les historiens sont exposés ; indications de quelques‑unes des causes qui produisent ces erreurs.
 
Importance de la science historique. — Erreurs commises par les historiens. — Leurs exagérations en matière de nombres. — Récits invraisemblables. — La ville d’Irem. — Cause de la chute des Barmekides. — Yahya et Abbasa. — Haroun er-­Rechîd. — El‑Mamoun et Bouran. — Origine des Fatemides. — Origine des Idricides. — Le Mehdi des Almohades. — Qualités requises dans un historien. — Chan­gements qui surviennent dans les usages des peuples. — Les jugements fondés sur des analogies sont très souvent faux. — El‑Haddjadj, maître d’école. — Des cadis qui ont commandé des armées. — Le Moroudj‑ed‑Deheb de Masoudi. — Système adopté par l’auteur afin de peindre certains sons qui n’ont pas de représentants dans l’alpha­bet arabe.
 
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===LIVRE PREMIER===
 
De la société humaine et des phénomènes qu’elle présente, tels que la vie nomade, la vie sédentaire, la domination, l’acquisition, les moyens de gagner sa subsis­tance, les sciences et les arts. Indication des causes qui ont amené ces résultats.
 
Comment les erreurs et les mensonges s’introduisent dans les récits historiques. — ­Anecdotes absurdes. — Alexandre le Grand et le coffre de verre. — La ville de cuivre. — Nouvelle science inventée par l’auteur et qui a pour objet de distinguer entre le vrai et le faux. — La fable du hibou. — Le traité de politique attribué à Aristote. — Ibn el-Mocaffa. — Tortouchi. — Les attributs de l’humanité. — Les six sections dont se compose le livre premier, c’est‑à‑dire, les Prolégomènes.
 
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===PREMIÈRE SECTION.===
 
Sur la civilisation en général
 
===PREMIER DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
 
La réunion des hommes en société est une chose nécessaire, parce qu’ils ne peuvent subsister à moins de s’entr’aider. — Nécessité d’un modérateur qui puisse maintenir les hommes dans l’ordre, et les empêcher de s’attaquer les uns les autres. — Opinion des philosophes à ce sujet.
 
===SECOND DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
Traitant de la partie habitée de la terre, des prin­cipales mers, des grands fleuves et des climats.
 
Forme de la terre. — L’Océan. — Le zodiaque. — La ligne équinoxiale. — Les climats. — La mer Romaine (la Méditerranée). — La mer de Venise (l’Adriatique). — La mer de Chine, appelée aussi mer de l’Inde et mer Abyssinienne. — La mer d’Es‑Souîs (la mer Rouge). — Le canal vert ou mer de Fars (golfe Persique). — La mer de Djordjan ou de Taberistan (la mer Caspienne). — Le Nil. — L’Euphrate. — Le Tigre. — Le Djeïhoun (Oxus).
 
===SUPPLÉMENT DU SECOND DISCOURS PRÉLIMINAIRE. ===
Pourquoi le quart septentrional de la terre a‑t‑il une population plus nombreuse que le quart méridional ?
 
Notions préliminaires. — L’équateur. — Mouvement du soleil dans l’écliptique. — ­La latitude d’un endroit. — Selon Averroès, la région équatoriale est habitée, ainsi que les contrées au delà.
 
===DESCRIPTION DU PLANISPHÈRE TERRESTRE.===
 
Quelle est la portion habitée de la terre ? — Les sept climats et leurs dimensions. — On divise chaque climat en dix sections égales.
 
Le premier climat. — Le second climat. — Le troisième climat. — Le quatrième climat. — Le cinquième climat. — Le sixième climat. — Le septième climat.
 
===TROISIÈME DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
Qui traite des climats soumis à une température moyenne ; de ceux qui s’écartent des limites où cette température domine, et de l’influence exercée par l’atmosphère sur le teint des hommes et sur leur état en général.
 
Caractère particulier de chaque climat. — Les habitants des pays du Nord et des pays du Sud. — Les Esclavons. — Les Nègres. — Les Zendj. — Sur la couleur noire de la race nègre.
 
===QUATRIÈME DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
Qui traite de l’influence exercée par l’air sur le caractère des hommes.
 
Les Nègres. — Les habitants des pays maritimes. — Opinion de Masoudi touchant le caractère léger et étourdi des Nègres.
 
===CINQUIÈME DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
Qui traite des influences diverses que l’abon­dance et la disette exercent sur la société humaine, et des impressions qu’elles laissent sur le physique et le moral de l’homme.
 
Les habitants des pays chauds et stériles sont mieux constitués physiquement et moralement que ceux des autres contrées. — Explication de ce fait. — Indication des effets produits par une nourriture trop abondante. — On peut s’habituer à vivre d’une faible quantité d’aliments. — La faim. — L’abstinence complète de toute nourriture. — Anecdotes à ce sujet. — Influence de la chair des animaux sur le corps et sur l’es­prit de ceux qui en font leur principale nourriture.
 
===SIXIÈME DISCOURS PRÉLIMINAIRE.===
Concernant les hommes qui, par une disposition innée ou par l’exercice de pratiques religieuses, ont la faculté d’apercevoir les choses du monde invisible. Ce chapitre commence par des observations sur la nature de la révélation et des songes.
 
Il y a certains hommes auxquels Dieu communique des révélations. — Comment on les reconnaît. — Parole du Prophète au sujet de la révélation. — Signes qui caracté­risent les personnages inspirés. — Les miracles. — Comment ils se produisent. — L’annonce préalable (tahaddi) du miracle. — Nature des prodiges opérés par un homme qui est favorisé de Dieu sans être prophète. — Le Coran est le miracle le plus grand. — De la divination. — Une ordonnance parfaite règne entre tous les êtres du monde sensible. — L’âme et la faculté perceptive. — Les âmes qui sont capables de s’exalter jusqu’à la perception des choses du monde invisible. — Il y en a de di­verses classes. — La révélation. — Comment elle arrive. — Les effets qu’elle produit sur celui qui la reçoit. — La divination. — Les diverses catégories de devins. — Opi­nion de certains philosophes relativement à la faculté divinatoire. — Les songes et leurs divers genres. — Elles font une partie du prophétisme. — Comment l’âme se dégage du voile des sens au moyen du sommeil. — Charme employé pour se procurer des songes. — Les sachants. — Les aruspices. — Les augures. — Comment l’âme acquiert la disposition de recueillir des perceptions dans le monde invisible. — Les divers genres de divination. — Les devins. — Les augures. — Les insensés. — Les sachants. — Des paroles qui échappent à l’homme qui est sur le point de s’endormir ou de mourir. — Des exercices magiques. — Des djoguis. — Des soufis. — Des ins­pirés (mohaddeth). — Anecdotes d’Omar et d’Abou‑Bekr. — Les idiots. — Les astro­logues. — Les géomanciens et leur manière d’opérer. — Le calcul nommé Hiçab en­-nîm. — La zaïrdja d’Es‑Sibti. — Problèmes d’arithmétique assez curieux.
 
==PREMIER DISCOURS PRÉLIMINAIRE.==
 
Ce discours préliminaire servira à démontrer que la réunion des hommes en société est une chose nécessaire. C’est ce que les philo­sophes ont exprimé par cette maxime : « L’homme, de sa nature, est citadin. » Ils veulent dire, par ces mots, que l’homme ne saurait se passer de société, terme que, dans leur langage, ils remplacent par celui de cité. Le mot civilisation 1 exprime la même idée. Voici la preuve de leur maxime : Dieu le tout‑puissant a créé l’homme et lui a donné une forme qui ne peut exister sans nourriture. Il a voulu que l’homme fût conduit à chercher cette nourriture par une impulsion innée et par le pouvoir qu’il lui a donné de se la procurer. Mais la force d’un individu isolé serait insuffisante pour obtenir la quantité d’aliments dont il a besoin, et ne saurait lui procurer ce qu’il faut pour soutenir sa vie. Admettons, par la supposition la plus modérée, que l’homme obtienne assez de blé pour se nourrir pendant un jour ; il ne pourrait s’en servir qu’à la suite de plusieurs manipu­lations, le grain devant subir la mouture, le pétrissage et la cuisson Chacune de ces opérations exige des ustensiles, des instruments, qui ne sauraient être confectionnés sans le concours de divers arts, tels que ceux du forgeron, du menuisier et du potier. Supposons même que l’homme mange le grain en nature, sans lui faire subir aucune préparation ; eh bien ! pour s’en procurer il doit se livrer à des travaux encore plus nombreux, tels que l’ensemencement, la moisson et le foulage, qui fait sortir le blé de l’épi qui le renferme. Chacune de ces opérations exige encore des instruments et des procédés d’art beau­coup plus nombreux que ceux qui, dans le premier cas, doivent être mis en usage. Or il est impossible qu’un seul individu puisse exécuter cela en totalité, ou même en partie. Il lui faut absolument les forces d’un grand nombre de ses semblables afin de se procurer la nourri­ture qui est nécessaire pour lui et pour eux, et cette aide mutuelle as­sure ainsi la subsistance d’un nombre d’individus beaucoup plus con­sidérable. Il en est de même pour la défense de la vie : chaque homme a besoin d’être soutenu par des individus de son espèce. En effet, Dieu le très haut, lorsqu’il organisa les animaux et leur distribua des forces, assigna à un grand nombre d’entre eux une part supérieure à celle de l’homme. Le cheval, par exemple, est beaucoup plus fort que l’homme ; il en est de même de l’âne et du taureau. Quant au lion et à l’éléphant, leur force surpasse prodigieusement celle de l’homme.
Comme il est dans la nature des animaux d’être toujours en guerre les uns avec les autres, Dieu a fourni à chacun un membre destiné spécialement à repousser ses ennemis. Quant à l’homme, il lui a donné, au lieu de cela, l’intelligence et la main. La main, soumise à l’intelligence, est toujours prête à travailler aux arts, et les arts four­nissent à l’homme les instruments qui remplacent, pour lui, les membres départis aux autres animaux pour leur défense. Ainsi les lances suppléent aux cornes, destinées à frapper ; les épées remplacent les griffes, qui servent à faire des blessures ; les boucliers tiennent lieu de peaux dures et épaisses, sans parler d’autres objets dont on peut voir l’énumération dans le traité de Galien sur l’usage des membres 2. Un homme isolé ne saurait résister à la force d’un seul animal, surtout de la classe des carnassiers, et il serait absolument incapable de le repousser. D’un autre côté, il n’a pas assez de moyens pour fabriquer les diverses armes offensives, tant elles sont nom­breuses, et tant il faut d’art et d’ustensiles pour les confectionner Dans toutes ces circonstances, l’homme doit nécessairement recourir p.88 à l’aide de ses semblables, et tant que leur concours lui manque, il ne saurait se procurer la nourriture ni soutenir sa vie. Dieu l’a ainsi décidé, ayant imposé à l’homme la nécessité de manger afin de vivre. Les hommes ne sauraient non plus se défendre s’ils étaient dépourvus d’armes ; ils deviendraient la proie des bêtes féroces ; une mort prématurée mettrait un terme à leur existence, et l’espèce hu­maine serait anéantie. Tant qu’existera chez les hommes la dispo­sition de s’entr’aider, la nourriture et les armes ne leur manqueront pas : c’est le moyen par lequel Dieu accomplit sa volonté en ce qui regarde la conservation et la durée de la race humaine. Les hommes sont donc obligés de vivre en société ; sans elle, ils ne pourraient pas assurer leur existence ni accomplir la volonté de Dieu, qui les a placés dans le monde pour le peupler et pour être ses lieutenants 3. Voilà ce qui constitue la civilisation, objet de la science qui nous occupe.