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conduits ; ils ont vu les Contes, traduits de l’allemand, du chanoine Schmid, formant une quarantaine de petits volumes, vendus par un seul éditeur, et malgré la concurrence de trois autres traductions, au nombre de 15,000 exemplaires ! Ce prodigieux succès les a émerveillés : ils se sont mis en quête d’ouvrages faits avec soin, d’une morale éprouvée, et de nature à éveiller les sympathies du jeune âge. On ne peut pas encore apprécier les résultats de cette émulation.
conduits ; ils ont vu les Contes, traduits de l’allemand, du chanoine Schmid, formant une quarantaine de petits volumes, vendus par un seul éditeur, et malgré la concurrence de trois autres traductions, au nombre de 15,000{{lié}}exemplaires ! Ce prodigieux succès les a émerveillés : ils se sont mis en quête d’ouvrages faits avec soin, d’une morale éprouvée, et de nature à éveiller les sympathies du jeune âge. On ne peut pas encore apprécier les résultats de cette émulation.



II. ''Éducation des adultes''. — Il y a encore de grands enfans, que la fortune a gâtés, et que la moindre fatigue épouvante. Un travail qu’on leur a méchamment signalé comme élevé, savant, devient aussitôt sacré pour eux. Ils citeront volontiers le livre, et se diront fiers de connaître l’auteur ; mais lire son livre, ils s’en garderont bien, très humblement persuadés qu’ils ne le sauraient comprendre. Pour cette classe nombreuse, on a imaginé des ouvrages qu’il est difficile de caractériser. Ils remuent toutes les thèses de métaphysique et de morale, et ne sont point de la philosophie ; ils abordent toutes les sciences, et ne sont pas de la science ; ils étalent un grand luxe d’imagerie, emploient la langue de tous les arts, sans obtenir un regard des artistes véritables. On a souvent rangé ces livres parmi les grandes familles nées de l’intelligence humaine ; ils ont cependant une physionomie particulière qui leur assigne une place à part. Les libraires ne s’y trompent pas, et ils en ont fait un genre, qu’ils désignent ainsi sur leurs catalogues : ''à l’usage des gens du monde''.

{{rom-maj|ii|2}}. ''Éducation des adultes''. — Il y a encore de grands enfans, que la fortune a gâtés, et que la moindre fatigue épouvante. Un travail qu’on leur a méchamment signalé comme élevé, savant, devient aussitôt sacré pour eux. Ils citeront volontiers le livre, et se diront fiers de connaître l’auteur ; mais lire son livre, ils s’en garderont bien, très humblement persuadés qu’ils ne le sauraient comprendre. Pour cette classe nombreuse, on a imaginé des ouvrages qu’il est difficile de caractériser. Ils remuent toutes les thèses de métaphysique et de morale, et ne sont point de la philosophie ; ils abordent toutes les sciences, et ne sont pas de la science ; ils étalent un grand luxe d’imagerie, emploient la langue de tous les arts, sans obtenir un regard des artistes véritables. On a souvent rangé ces livres parmi les grandes familles nées de l’intelligence humaine ; ils ont cependant une physionomie particulière qui leur assigne une place à part. Les libraires ne s’y trompent pas, et ils en ont fait un genre, qu’ils désignent ainsi sur leurs catalogues : ''à l’usage des gens du monde''.


Quand on a fait son éducation dans les livres de cette nature, on peut parler peinture avec les amateurs, parler musique avec les faiseurs de variations, parler pittoresque avec les dames qui reviennent de voyage, parler vapeur avec l’industriel qui a des filles à marier.
Quand on a fait son éducation dans les livres de cette nature, on peut parler peinture avec les amateurs, parler musique avec les faiseurs de variations, parler pittoresque avec les dames qui reviennent de voyage, parler vapeur avec l’industriel qui a des filles à marier.
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Le fond de l’étoffe ne change pas : elle sort depuis un demi-siècle du magasin de l’Encyclopédie ; mais de temps en temps la forme en est renouvelée, et la nuance rafraîchie. La dernière mode, le ''pittoresque'', commence à vieillir, et la spéculation est aujourd’hui dans cet état de vague souffrance, qui se manifeste pendant les interrègnes.
Le fond de l’étoffe ne change pas : elle sort depuis un demi-siècle du magasin de l’Encyclopédie ; mais de temps en temps la forme en est renouvelée, et la nuance rafraîchie. La dernière mode, le ''pittoresque'', commence à vieillir, et la spéculation est aujourd’hui dans cet état de vague souffrance, qui se manifeste pendant les interrègnes.


131 publications ont produit 2,302 feuilles typographiques. Grace au nouveau système des livraisons dites ''à bon marché'', le tirage s’est souvent élevé à un chiffre que les plus légitimes succès de la librairie n’atteignaient pas autrefois. En première ligne se présentent 4 encyclopédies, dont 2 sur le vaste plan du ''Dictionnaire de la Conversation'', célèbre en Allemagne. Aucun titre ne convenait mieux à des recueils dont le seul mérité est de fournir aux gens légers du parlage sur toutes sortes de sujets. La négligence des éditeurs me semble démontrée par un fait matériel. Le cadre de ces compilations est tracé à l’aventure, au point que l’une d’elles, la plus ancienne en date, mais la plus indigeste (le ''Dictionnaire de lecture et de''
131{{lié}}publications ont produit 2,302{{lié}}feuilles typographiques. Grace au nouveau système des livraisons dites ''à bon marché'', le tirage s’est souvent élevé à un chiffre que les plus légitimes succès de la librairie n’atteignaient pas autrefois. En première ligne se présentent 4{{lié}}encyclopédies, dont 2 sur le vaste plan du ''Dictionnaire de la Conversation'', célèbre en Allemagne. Aucun titre ne convenait mieux à des recueils dont le seul mérite est de fournir aux gens légers du parlage sur toutes sortes de sujets. La négligence des éditeurs me semble démontrée par un fait matériel. Le cadre de ces compilations est tracé à l’aventure, au point que l’une d’elles, la plus ancienne en date, mais la plus indigeste (le ''Dictionnaire de lecture et de''