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Les sources de naphte et de pétrole sont encore plus communes dans le Levant qu’en Italie ; quelques voyageurs assurent qu’on brûle plus d’huile de naphte que de chandelle à Bagdad[1]. « Sur la route de Schiras à Bender-Congon, à quelques milles de Bennaron vers l’Orient, on voit, dit Gemelli Carreri, la montagne de Darap toute de pierre noire, d’où distille le fameux baume-momie qui, s’épaississant à l’air, prend aussi une couleur noirâtre : quoiqu’il y ait beaucoup d’autres baumes en Perse, celui-ci a la plus grande réputation ; la montagne est gardée par ordre du roi ; tous les ans, les vizirs de Geaxoux, de Schiras et de Lar, vont ensemble ramasser la momie, qui coule et tombe dans une conque, où elle se coagule ; ils l’envoient au roi sous leur cachet pour éviter toute tromperie, parce que ce baume est éprouvé et très estimé en Arabie et en Europe, et qu’on n’en tire pas plus de quarante onces par chaque année[2]. » Je ne cite ce passage tout au long que pour rapporter à un bitume ce prétendu baume des momies : nous avons au Cabinet du Roi les deux boîtes d’or remplies de ce baume-momie ou mumia, que l’ambassadeur de Perse apporta et présenta à Louis XIV ; ce baume n’est que du bitume, et le présent n’avait de mérite que dans l’esprit de ceux qui l’ont offert[3]. Chardin parle de ce

    vers les terres, et qui quelquefois sort avec force et par jets ; c’est ordinairement lorsqu’on est parvenu à cent quatre-vingts pieds ou environ de profondeur qu’on obtient le pétrole : souvent, en creusant le puits, on aperçoit quelques filets de pétrole qui se perdent en continuant l’ouvrage… Les puits sont abandonnés l’hiver et dès la fin de l’automne ; mais au printemps les propriétaires envoient tous les deux ou trois jours tirer le pétrole avec des sceaux comme on tire de l’eau… L’un des trois puits de Miano donne le pétrole, joint avec l’eau sur laquelle il surnage ; cette eau est claire et limpide, et un peu salée… Le pétrole, au sortir des puits, est un peu trouble, parce qu’il est mêlé d’une terre légère, et il ne devient clair que lorsqu’il a déposé cette substance étrangère au fond des vases dans lesquels on le conserve… Les environs de Miano, où l’on tire le pétrole, ne fournissent point de vraie pierre ; la montagne voisine n’est même composée que d’une terre verdâtre, compacte et argileuse… Cette terre, appelée dans le pays cocco, mise sur des charbons, ne donne point de flamme ; elle se cuit au feu, et de verdâtre elle y devient rougeâtre : elle se fond et s’amollit dans l’eau et y devient maniable : elle n’a point un goût décidé sur la langue, elle ne fleurit point à l’air ; elle fait une vive effervescence avec l’acide nitreux. » — (Cette dernière propriété me paraît indiquer que le cocco n’est pas une terre argileuse, mais plutôt une terre limoneuse, mêlée de matière calcaire.) — « Dans le lieu appelé Salso-Maggiore, continue M. de Bondaroy, et aux environs, à dix lieues de Parme, il y a des puits d’eau salée qui donnent aussi du pétrole d’une couleur rousse très foncée… La terre de Salso-Maggiore est semblable au cocco de Miano, mais d’une couleur plus plombée… Elle devient beaucoup plus verdâtre dans les lits inférieurs, et c’est de ces derniers lits que sort l’eau salée avec le pétrole, depuis quatre-vingts jusqu’à cent cinquante brasses en profondeur. » Extrait du Mémoire de M. Fougeroux de Bondaroy, sur le pétrole, dans ceux de l’Académie des sciences, année 1770. — « À douze mille de Modène, dit Bernardino Ramazini, du côté de l’Apennin, on voit un rocher escarpé et stérile au milieu d’un vallon, et qui donne naissance à plusieurs sources d’huile de pétrole : on descend dans ce rocher par un escalier de vingt-quatre marches, au bas duquel on trouve un petit bassin rempli d’une eau blanchâtre qui sort du rocher, et sur laquelle l’huile de pétrole surnage ; il se répand à cent toises à la ronde une odeur désagréable, ce qui ferait croire que cette source a subi quelque altération, puisque François Arioste, qui l’a décrite il y a trois siècles, la vante surtout pour sa bonne odeur. On amasse l’huile de pétrole deux fois par semaine sur le bassin principal, environ six livres à chaque fois : le terrain est rempli de feux souterrains qui s’échappent de temps en temps avec violence ; quelques jours avant ces éruptions, les bestiaux fuient les pâturages des environs. » Collection académique, partie étrangère, tome VI, p. 477.

  1. Voyage de Thévenot ; Paris, 1664, t. II, p. 118.
  2. Voyage autour du monde ; Paris, 1719, t. II, p. 274.
  3. Sa Majesté Louis XIV fit demander à l’ambassadeur du roi de Perse : 1o  le nom de