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J. SULLY. — LE PESSIMISME ET LA POESIE 3*9


Chez l'homme, qui a des sons bien distincts pour la joie et la dou-
Chez l’homme, qui a des sons bien distincts pour la joie et la douleur, nous pouvons également observer que les expressions de la
douleur l’emportent sur celles du plaisir. C’est une réflexion bien
leur, nous pouvons également observer que les expressions de la
ancienne que les pleurs précèdent de beaucoup le rire chez l’individu. {{M.|Darwin}} nous raconte qu’il a observé pour la première fois
douleur l'emportent sur celles du plaisir. C'est une réflexion bien
les traces non équivoques d’un sourire chez deux de ses enfants
ancienne que les pleurs précèdent de beaucoup le rire chez l'indi-
vidu. M. Darwin nous raconte qu'il a observé pour la première fois
les traces non équivoques d'un sourire chez deux de ses enfants
quand ils étaient âgés de quarante-cinq jours, tandis que — chaque
quand ils étaient âgés de quarante-cinq jours, tandis que — chaque
mère le sait— des enfants nouveau-nés saluent le monde par un vagis-
mère le sait — des enfants nouveau-nés saluent le monde par un vagissement difficile à distinguer d’un cri de douleur. Il n’est pas permis
sement difficile à distinguer d'un cri de douleur. Il n'est pas permis
aux adultes de pleurer, du moins en bonne société, et à leur égard on
aux adultes de pleurer, du moins en bonne société, et à leur égard on
peut dire avec vérité que le rire est plus fréquent que les pleurs. Mais,
peut dire avec vérité que le rire est plus fréquent que les pleurs. Mais,
bien qu'il nous soit défendu de pleurer, nous pouvons, en revanche,
bien qu’il nous soit défendu de pleurer, nous pouvons, en revanche,
grommeler, geindre et murmurer. Et certainement beaucoup de gens
grommeler, geindre et murmurer. Et certainement beaucoup de gens
de notre connaissance se plaignent plus souvent des circonstances et
de notre connaissance se plaignent plus souvent des circonstances et
des événements de leur existence qu'ils n'en témoignent leur joie ou
des événements de leur existence qu’ils n’en témoignent leur joie ou
leur satisfaction.
leur satisfaction.


Ces faits sembleraient démontrer que l'expression du chagrin, du
Ces faits sembleraient démontrer que l’expression du chagrin, du
mécontentement et de la douleur est plutôt un trait caractéristique
mécontentement et de la douleur est plutôt un trait caractéristique
du genre humain que l'expression de la joie, du contentement et du
du genre humain que l’expression de la joie, du contentement et du
plaisir. Nous prions d'observer que nous disons l'expression de ces
plaisir. Nous prions d’observer que nous disons l’''expression'' de ces
sentiments et non les sentiments eux-mêmes. De ce que la plainte
sentiments et non les sentiments eux-mêmes. De ce que la plainte
est plus fréquente et plus habituelle que la réjouissance, il ne faut pas
est plus fréquente et plus habituelle que la réjouissance, il ne faut pas
conclure que les souffrances réelles de la vie l'emportent sur les
conclure que les souffrances réelles de la vie l’emportent sur les
joies réelles. Il serait évidemment absurde de soutenir, par exemple,
joies réelles. Il serait évidemment absurde de soutenir, par exemple,
que les deux enfants de M. Darwin n'ont éprouvé aucune sensation
que les deux enfants de {{M.|Darwin}} n’ont éprouvé aucune sensation
agréable pendant les quarante-cinq jours où ils n'ont ni ri ni souri.
agréable pendant les quarante-cinq jours où ils n’ont ni ri ni souri.
Pour savoir jusqu'à quel point l'expression est la mesure exacte du
Pour savoir jusqu’à quel point l’expression est la mesure exacte du
sentiment intérieur, nous devons connaître ce qu'on peut appeler la
sentiment intérieur, nous devons connaître ce qu’on peut appeler la
force expansive du sentiment, c'est-à-dire le degré d'énergie avec
force expansive du sentiment, c’est-à-dire le degré d’énergie avec
lequel celui-ci tend à s'exprimer. Peut-être la souffrance a-t-elle cette
lequel celui-ci tend à s’exprimer. Peut-être la souffrance a-t-elle cette
force expansive à un plus haut degré que le bonheur? Si cette pro-
force expansive à un plus haut degré que le bonheur ? Si cette proposition pouvait être démontrée, il est évident que nous pourrions
position pouvait être démontrée, il est évident que nous pourrions
rendre compte de la fréquence des plaintes dans la vie journalière et
rendre compte de la fréquence des plaintes dans la vie journalière et
dans la littérature sans adopter la conclusion du pessimiste, d'après
dans la littérature sans adopter la conclusion du pessimiste, d’après
laquelle le nombre de nos chagrins est bien supérieur à celui de
laquelle le nombre de nos chagrins est bien supérieur à celui de
nos joies.
nos joies.


La doctrine de l'évolution nous enseigne que les conditions essen-
La doctrine de l’évolution nous enseigne que les conditions essentielles au maintien de la vie se développent et se fixent les premières
dans la structure organique. Ainsi, parmi toutes les fonctions du corps,
tielles au maintien de la vie se développent et se fixent les premières
dans la structure organique. Ainsi, parmi toutes les fonctions du corps,
celles de la nutrition et de la reproduction sont les plus essentielles
celles de la nutrition et de la reproduction sont les plus essentielles
à la continuation de la vie; aussi voyons-nous qu'il est amplement
à la continuation de la vie ; aussi voyons-nous qu’il est amplement
pourvu à l'exercice de ces fonctions, même dans les organismes les
pourvu à l’exercice de ces fonctions, même dans les organismes les

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