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en est qui vous diront qu’il est bien fâcheux pour {{Mlle}} Taglioni de n’intéresser que comme M. Étienne ou M. Guizot ; mais que voulez-vous ? nous sommes un peuple grave. L’Opéra aujourd’hui est sur la ligne de la Chambre : l’Opéra a été si long-temps le premier foyer politique de l’État !
en est qui vous diront qu’il est bien fâcheux pour {{Mlle}} Taglioni de n’intéresser que comme {{M.|Étienne}} ou {{M.|Guizot}} ; mais que voulez-vous ? nous sommes un peuple grave. L’Opéra aujourd’hui est sur la ligne de la Chambre : l’Opéra a été si long-temps le premier foyer politique de l’État !


Quant aux théâtres vulgaires, quant à l’art dramatique de chaque jour, vous ne sauriez vous figurer combien les honnêtes théâtres sont peu en mouvement. C’est un calme à faire plaisir. Le Théâtre-Français joue des comédies en un acte, dans lesquelles il y a encore des Crispin et des tuteurs ; le Gymnase, à défaut de nouveautés, recrépit de vieilles pièces, et il en change le titre, s’inquiétant peu du reste : c’est ainsi qu’il a appelé le ''Dey d’Alger'' une pièce qui s’appelait il y a dix ans ''le Pacha de Surène'' ; mais le titre est venu trop tard : le dey d’Alger, cette révolution en cachemire, n’est plus aujourd’hui qu’un bon bourgeois que personne ne regarde plus ; le dey d’Alger, et don Pedro, cette autre révolution commencée sur un trône absolu et terminée sur une constitution libre, ne font plus d’argent nulle part. Don Pedro, cependant, et sa femme, ce noble débris de la famille Bonaparte, ont été renforcés ces jours derniers par la reine ''dona Maria da Gloria''. Pauvre jeune fille joufflue, à l’air sévère, au visage malheureux ! Il faudra une grande révolution pour lui rendre à celle-là le trône qu’elle a perdu.
Quant aux théâtres vulgaires, quant à l’art dramatique de chaque jour, vous ne sauriez vous figurer combien les honnêtes théâtres sont peu en mouvement. C’est un calme à faire plaisir. Le Théâtre-Français joue des comédies en un acte, dans lesquelles il y a encore des Crispin et des tuteurs ; le Gymnase, à défaut de nouveautés, recrépit de vieilles pièces, et il en change le titre, s’inquiétant peu du reste : c’est ainsi qu’il a appelé le ''Dey d’Alger'' une pièce qui s’appelait il y a dix ans ''le Pacha de Surène'' ; mais le titre est venu trop tard : le dey d’Alger, cette révolution en cachemire, n’est plus aujourd’hui qu’un bon bourgeois que personne ne regarde plus ; le dey d’Alger, et don Pédro, cette autre révolution commencée sur un trône absolu et terminée sur une constitution libre, ne font plus d’argent nulle part. Don Pédro, cependant, et sa femme, ce noble débris de la famille Bonaparte, ont été renforcés ces jours derniers par la reine ''dona Maria da Gloria''. Pauvre jeune fille joufflue, à l’air sévère, au visage malheureux ! Il faudra une grande révolution pour lui rendre à celle-là le trône qu’elle a perdu.


Je reviens au théâtre. La ''Porte-Saint-Martin'' a joué un ''Mirabeau'' qui est bien la chose du monde la plus stupide et la plus ridicule. Figurez-vous que les auteurs ont jeté Mirabeau au cachot ; qu’ils l’ont fait s’enivrer dans une taverne ; qu’il se vend, dans cette pièce, pour vingt mille francs, ni plus, ni moins, lesquels vingt mille francs Mirabeau envoie à un sien fils de madame de Nehra qu’il n’a jamais eu. Entre autres nouveautés, nous avons vu le Jeu de Paume préparé à l’avance pour une séance : rien n’y manque, ni la tribune, ni la sonnette, ni le verre d’eau. Que voulez-vous devenir avec de pareilles inventions ?
Je reviens au théâtre. La ''Porte-Saint-Martin'' a joué un ''Mirabeau'' qui est bien la chose du monde la plus stupide et la plus ridicule. Figurez-vous que les auteurs ont jeté Mirabeau au cachot ; qu’ils l’ont fait s’enivrer dans une taverne ; qu’il se vend, dans cette pièce, pour vingt mille francs, ni plus, ni moins, lesquels vingt mille francs Mirabeau envoie à un sien fils de madame de Nehra qu’il n’a jamais eu. Entre autres nouveautés, nous avons vu le Jeu de Paume préparé à l’avance pour une séance : rien n’y manque, ni la tribune, ni la sonnette, ni le verre d’eau. Que voulez-vous devenir avec de pareilles inventions ?


Quant à la littérature, elle est morte. ''Barnave'' a paru, jetant l’éclat de la foudre dans un nuage. ''La Peau de Chagrin'', de M. de Balzac, a reparu sous un titre nouveau, ''Contes philosophiques'', subissant ainsi une petite révolution. De ces contes, le meilleur est pris tout entier à la ''Revue des Deux Mondes'' : l’''Enfant maudit''. M. Victor Hugo est en procès avec son libraire, qui veut lui faire
Quant à la littérature, elle est morte. ''Barnave'' a paru, jetant l’éclat de la foudre dans un nuage. ''La Peau de Chagrin'', de {{M.|de}} Balzac, a reparu sous un titre nouveau, ''Contes philosophiques'', subissant ainsi une petite révolution. De ces contes, le meilleur est pris tout entier à la ''Revue des Deux Mondes'' : l’''Enfant maudit''. {{M.|Victor}} Hugo est en procès avec son libraire, qui veut lui faire