NRF (p. 67-82).
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VII

Mardi,

Encore un attentat à la pudeur ; le dernier de ceux que nous sommes appelés à juger. Celui-ci est particulièrement pénible, car l’accusé, un jeune journalier de Maromme était atteint de blennorragie et a contaminé la victime. On a sur lui les plus mauvais renseignements : insolent, ivrogne, impatient au travail ; déjà précédemment il a voulu entraîner dans un bois une fillette de dix ans à qui il offrait des sous et des bonbons.

La petite qui comparaît devant nous, n’a que six ans et demi. Il l’a attirée dans sa chambre en lui offrant “ une petite tabatière. ”

On la force à répéter devant nous, par le menu, ce qu’elle a déjà dit à l’instruction, et que le coupable a avoué, et que le médecin a constaté. Il semble qu’on prenne à tâche que cette petite se souvienne. Au reste elle n’a pas été violée ; il semble que l’accusé ait pris à son égard certaines précautions, grâce auxquelles il espérait peut-être ne pas la contaminer ; grâce auxquelles il

bénéficie des circonstances atténuantes.

L’affaire Charles que nous jugeons ensuite avait fait quelque bruit dans les journaux. La salle est comble ; c’est une affaire “ sensationnelle ”. L’assistance est très excitée. On se redit de banc en banc le nombre des coups de couteau dont a été frappée la victime : le médecin n’en a pas compté moins de cent-dix !

La victime était la maîtresse de Charles. Juliette R. n’avait que dix sept ans lorsqu’il la rencontra pour la première fois, il y a de cela trois ans. Elle vivait avec un amant dont Charles aussitôt prit la place, abandonnant pour elle femme et enfants, après onze ans de mariage. Charles a trente-quatre ans ; il est cocher, a fait déjà plusieurs places ; mais les renseignements recueillis sur lui par ses divers patrons sont bons. Sa femme non plus n’avait pas à se plaindre de lui, malgré qu’il lui faisait parfois “ des scènes ”. Après qu’il se fut installé avec cette fille, Madame Charles, à plusieurs reprises, tâcha de le ramener. de le reprendre ; mais rien n’y fît, et l’instruction dit qu’il avait la fille “ dans la peau, suivant l’expression ”. Il habite alors avec Juliette R., place de M., chez Madame Gilet. Celle-ci parfois les entendait se disputer.

— C’est vrai. Juliette me reprochait d’envoyer à mes enfants une partie de mes gages. Mais jamais je ne l’ai menacée.

Et Madame Gilet reconnaît que les querelles n’étaient ni fréquentes, ni prolongées.

La voix de Charles est grave ; son aspect n’est pas déplaisant ; il est grand, fort, bien fait de sa personne, sans pourtant rien de bellâtre ou de fat ; il me semble que rien qu’à le voir on eût deviné qu’il était cocher ; et non pas cocher de fiacre : cocher de maison.

Il ne se défend pas, ne s’excuse pas même : on le sent soucieux de présenter les faits tels qu’ils se sont passés et sans chercher à influencer le jury en sa faveur. Pourquoi le Président essaye-t-il de le faire se couper, se contredire ? Sans doute, en ancien juge d’instruction, par habitude professionnelle.

— Vous avez quelque peu varié, lui dit-il, dans la reconnaissance des mobiles du crime.

C’est aussi que Charles ne s’explique pas trop bien à lui-même comment ni pourquoi il a tué. Il aimait éperdument cette femme ; il avait besoin d’elle. Le soir du 12 mars, veille du crime, ils soupèrent ensemble.

— Après souper je me suis couché avec elle, comme de coutume ; mais elle s’est refusée. C’est comme ça que ça a commencé.

— Vous vous êtes alors disputé avec elle ?

— À cause de cela, oui.

— Voici le motif que vous donnez du crime. Vous aviez d’abord donné une autre explication.

L’accusé ne proteste pas ; son geste semble dire : c’est possible.

— La nuit ensuite a été tranquille ?

— Oui, Monsieur.

— Vous avez dit aussi que vous étiez jaloux ; c’est même là l’explication que vous aviez donnée d’abord. Est-ce que vous lui connaissiez un amant ?

— Elle n’en avait pas.

— Cependant elle était triste ; au magasin des Abeilles où elle travaillait, on a dit qu’elle était anxieuse ; elle avait peur de vous. Un jour elle a confisqué votre rasoir. Craignait-elle de vous voir vous en servir contre elle ?

— À ce moment j’étais malade. On lui avait dit de me l’enlever pour que je ne m’en serve pas contre moi.

— Arrivons au treize mars.

— Nous nous sommes dit bonjour au matin ; je suis descendu chercher le journal.

— Vous n’avez pas bu ?

— La veille, avant le souper, j’avais pris deux tasses de café à B. ; mais ce matin j’étais à jeun. En remontant près d’elle, je lui ai de nouveau demandé… Elle a encore refusé. Alors, comme elle ne voulait toujours pas, j’ai perdu la tête. J’ai pris un couteau sur la table, près de moi ; je l’ai frappée au cou. Le couteau me collait dans la main.

— Elle était encore couchée ?

— Au premier coup, oui.

— A ce moment elle a cherché à se sauver ; elle a sauté du lit. Vous vous êtes jeté sur elle ; elle est tombée.

— A la fin en effet je l’ai retrouvée à terre.

— A la fin ? N’allons pas si vite ! Nous ne sommes encore qu’au commencement. Elle est tombée à terre, disons-nous ; et alors vous avez continué à la frapper, à la frapper comme un forcené, criblant de coups de couteau son cou, son visage et ses poignets.

— Je ne me souviens que du premier coup.

— C’est trop facile. Vous lui avez donné plus de cent coups ; d’après la déclaration d’un témoin, vous la mainteniez à terre d’une main, et de l’autre vous frappiez partout.

— Quand je me suis réveillé, Juliette était morte ; j’étais penché sur elle ; il y avait du sang partout… Je n’avais pas vu venir Madame Gilet.

— Entendant les cris de la malheureuse, elle était venue à son secours. Elle vous a vu la frapper avec une telle violence et une telle rapidité que cela ressemblait, a-t-elle dit, usant d’une image frappante, au timbrage des lettres dans les bureaux de poste. Vous entendez. Messieurs les jurés, au timbrage des lettres dans les bureaux de poste !

Et, là-dessus, le Président, joignant la mimique à la parole, donne quelques grands coups de poing sur son pupitre creux, éveillant un tel tonnerre qu’un rire peu décent secoue l’auditoire. Certainement ça ne devait pas faire ce bruit-là.

— Votre maîtresse s’est écriée : “ Ah ! Madame, sauvez-moi ! Il a un couteau ! ” Alors vous avez repoussé Madame Gilet, que votre contact a ensanglantée. “ Retirez-vous ; ça ne vous regarde pas ”, lui avez-vous dit ; puis, vous remettant à frapper la malheureuse, d’un dernier coup vous lui avez tranché la cariatide (sic). (Madame Gilet dira tout à l’heure que le dernier coup était “ porté au front ”). Qu’avez-vous à dire ?

— Je ne me souviens pas de tout cela.

— Pourtant quand les agents, qu’avait été prévenir Madame Gilet, sont arrivés, ils ont été étonnés par votre sang-froid. Vous n’aviez même pas l’air ému, paraît-il. Le couteau était sur la table. Vous vous êtes laissé saisir.

— J’étais abruti d’horreur.

— Non pas ! Vous avez tranquillement dit : “ Avertissez ma femme ”, et comme les agents allaient vous emmener, vous avez demandé la permission de vous laver les mains avant de descendre dans la rue.

— Je me rappelle en effet avoir donné l’adresse de ma femme, pour qu’on la prévienne.

— Ensuite, n’avez-vous pas voulu vous pendre ?

— Jamais.

— On avait cru cela. On avait trouvé dans la chambre un piton, de force à supporter un gros poids ; on a retrouvé également une lanière. N’avez-vous pas parlé alors d’une volonté de suicide ?

— Je n’ai jamais parlé de ça.

— N’importe. En définitive vous reconnaissez tous les faits ; et vous donnez de votre crime cette explication : que Juliette vous refusait ses avantages.

— J’ai vu passer devant moi quelque chose de terrible, ce matin-là.

— Enfin… elle est morte, la pauvre fille ! Si elle ne voulait plus de vous, vous n’aviez qu’à retourner auprès de votre femme et de vos enfants. Pourquoi la tuer ?

— Je ne cherchais pas à la tuer. (Rumeur d’indignation dans l’auditoire.)

— Allons donc ! Avec cent coups de couteau !

La majorité des jurés pense avec le Président qu’on cherche plus à tuer quand on donne cent coups de couteau que lorsqu’on en donne un seul. Pourtant l’examen médical de la victime nous apprend que ces cent-dix blessures dont on a pu relever la trace sur la face, sur le cou, à la région supérieure du thorax, sur les mains, (sur le cou les plus nombreuses), étaient régulières pour la plupart, et, toutes, petites et peu pénétrantes. (En Russie on eût vu là sans doute un “ crime rituel ”.) Une seule blessure avait atteint la carotide et déterminé une hémorragie foudroyante.

N’étant pas du jury, je ne puis demander si, peut-être, il dépendait de la forme et de la dimension de l’arme qu’aucune des blessures ne fût profonde. Mais il ne paraît pas ; et le docteur dira tout à l’heure que Charles avait frappé “ d’une façon tremblante, ne faisant pas entrer son arme et comme s’il voulait seulement mutiler ”.

Les doigts étaient tailladés ; la victime avait dû essayer de se protéger.

Madame Augustine, veuve Gilet, logeuse, appelée à témoigner, dépose d’une voix monotone :

— Charles et la fille Juliette demeuraient chez moi. Je n’avais pas à me plaindre d’eux. Le 13 mars au matin, j’entendis des cris ; j’entrai chez eux ; elle était à terre et je le vis qui la frappait. Je lui saisis le bras pour le retenir. Il se retourna et me dit : “ Retirez-vous. ” Juliette n’était pas morte ; quand elle me vit chercher à le retenir, elle me dit : “ Ah ! faites attention, il a un couteau ! ” Alors il la frappa encore une fois ; il retourna le couteau dans la plaie ; ça a fait : crrac ! (Mouvement d’horreur et rumeurs dans la foule ; les jurés eux mêmes sont très impressionnés par le récit de Madame Gilet, et particulièrement par ce dernier détail. Pourtant, sur une demande de l’avocat défenseur, le docteur X. nous dira tout à l’heure : “ Aucune des blessures n’indique que le couteau ait jamais été retourné dans la plaie ”). C’est comme si le couteau avait du mal à pénétrer. J’étais stupéfiée. Il frappait vite, comme on timbre les lettres. Il a peut-être porté vingt-cinq coups devant moi. Quand j’ai voulu l’arrêter et qu’il s’est retourné, il m’a ensanglantée ; j’étais en peignoir ; j’ai retrouvé du sang par tout mon linge. J’avais si peur, que je ne remarquai pas l’état de la chambre ; ce n’est qu’ensuite que j’ai vu que le lit était plein de sang. La veille au soir je n’avais pas entendu de bruit. Il ne venait personne chez eux. Juliette était tranquille et travaillait régulièrement. On n’avait rien à lui reprocher. A lui non plus. Il se conduisait bien. Je ne l’ai jamais vu ivre.

— Est-ce tout ce que vous pouvez dire sur lui :

— L’été dernier, à la suite d’une chute, il avait été longtemps malade. Ma première idée, quand je l’ai vu frapper Juliette, c’est qu’il était devenu fou. Il paraissait l’aimer beaucoup. Ce n’est que quand Juliette m’a dit : “ Il a un couteau ” que j’ai compris qu’il avait une arme. Jusqu’à ce moment j’avais cru qu’il frappait avec le poing.

Charles. — Je n’ai pas vu Mme Gilet. J’ai idée d’elle ; c’est tout.

Mme Gilet. — Après une pareille boucherie, je comprends qu’on perde la tête. Le dernier coup a dû être porté au front. Mais il ne faisait pas clair ; il était six heures moins un quart ; et je n’y voyais guère. Rien, avant, dans la conduite de Charles, ne faisait pressentir ce drame ; s’il y avait des discussions, ils se raccommodaient à peine fâchés.

Mademoiselle Gilet, appelée à son tour, dira :

— Ils chicanaient parfois, sauf à s’embrasser cinq minutes après.

Après la déposition de la logeuse et de sa fille, nous entendons celle des gardiens de la paix :

Le chef de poste M. :

— Quand nous avons voulu conduire au poste l’accusé, il nous a dit : — “ Donnez-moi au moins le temps de me laver les mains. ” Il ne paraissait ni soûl, ni fou. Il était plutôt calme.

Et M. V., commissaire de police :

— Au bureau central, j’ai vu Charles. Il était un peu énervé ; mais pas ivre. Il m’a dit, après quelques hésitations : “ Je l’ai tuée parce qu’elle me faisait dépenser de l’argent. Du reste j’allais me jeter à l’eau quand on m’a arrêté. ”

Le Président. — Eh bien ! vous voyez, Charles, vous donniez d’abord du mobile du crime une explication qui n’est pas celle d’aujourd’hui. Voyons, parlez.

L’accusé. — Que voulez-vous que je réponde ? Je vous ai dit la vérité.

M. V. — J’avais l’impression qu’il ne la disait pas alors, et qu’il dissimulait le mobile du crime. En effet, il donne d’autres raisons aujourd’hui… Tout cela me semblait si bizarre : je lui ai pris les mains, je lui ai relevé les paupières : il était ni ivre, ni fou.

Mme Charles vient à la barre, témoigner que, pendant dix ans, c’est-à-dire jusqu’au moment où il rencontra la fille Juliette, elle n’avait rien eu à reprocher à son mari.

M. le Docteur X… est appelé à parler de Charles ; il nous le présente d’abord comme un garçon sain et bien portant ; aucune tare dans son atavisme. Mais il a six doigts à une main ; il est sujet à des vertiges, à des pertes de mémoire ; il a de la difficulté à s’orienter, des défauts de prononciation (j’avoue que je ne les ai pas remarqués), l’appréhension de faire une chute dans la rue. Le Docteur parle encore d’instabilité de jugement, d’indécision et d’absence de volonté (et n’est-ce pas là ce qui permit cette brusque transformation du désir insatisfait en énergie ?), puis conclut enfin en disant que, sans être dans un état de démence, dans le sens où l’entend l’article 64 du code pénal, “ l’examen psychiatrique et biologique, ainsi que la nature d’impulsivité spéciale de son crime, indiquent une anomalie mentale qui atténue sa responsabilité ”.

“ Son acte, avait-il dit quelques instants auparavant, a été accompli sans que l’idée de tuer ait été bien précisée dans son cerveau. On en trouve la preuve dans la distribution des coups de couteau que j’ai décrite ”.

Comment l’avocat défenseur lui-même n’ira-t-il pas plus loin et ne dira-t-il pas que, non seulement Charles ne voulait pas tuer, mais même qu’il tâchait obscurément, tout en mutilant sa victime, de ne pas la tuer ; que, sans doute, précisément pour ne pas la tuer, il avait empoigné le couteau à même la lame, et que c’est seulement ainsi que l’on peut expliquer que les coups fussent à la fois forts et causant des blessures si peu profondes, et que Charles eût des coupures aux doigts (rapport du médecin). Et n’est-ce pas aussi pour cela que Mme Gilet ne voyait pas le couteau et croyait qu’il frappait avec son poing ?

Rien de tout cela n’est dit par Me R., l’avocat défenseur de la victime. Il s’appuie sur le rapport des médecins pour demander aux jurés de ne pas aller plus loin que les experts et de reconnaître à l’accusé une responsabilité atténuée.

J’ai longuement insisté sur ce cas, car il fit éclater la lamentable incompétence des jurés. Il ressortait avec évidence de l’instruction, des témoignages, du rapport des médecins, que l’idée de tuer n’était pas nettement établie dans le cerveau de Charles ; qu’en tout cas l’on n’avait pas affaire à un professionnel du crime, et plus peut-être à un sadique qu’à un assassin, que si jamais, enfin, crime pouvait être dit passionnel…

Après une demi-heure de délibération, on les voit rentrer dans la salle, congestionnés, les yeux hagards, comme ébouillantés, furieux les uns contre les autres et chacun contre soi-même. Ils rapportent un verdict affirmatif sur la seule question de meurtre posée par la cour ; quant aux circonstances atténuantes que demandait l’accusation elle-même peu disposée pourtant à la clémence — ils les ont refusées.

En conséquence de quoi Charles est condamné aux travaux forcés à perpétuité.

De hideux applaudissements éclatent dans la salle ; on crie : “ bravo ! bravo ! ”, c’est un délire. La femme de Charles, restée dans la salle, se lève cependant, en proie à l’angoisse la plus vive ; elle crie : “ C’est trop ! ah ! c’est trop ! ” et s’évanouit. On l’emmène.

Mais, sitôt après la séance, les jurés, consternés du résultat de leur vote (n’avaient-ils pas compris que de ne pas voter l’affirmative pour la demande des circonstances atténuantes, équivaut à voter la négative ?) s’assemblaient à nouveau et, précipités dans l’autre excès, signaient un recours en grâce à l’unanimité.

Sans doute auraient-ils voté tout bonnement d’abord les circonstances atténuantes, si Madame Gilet n’avait pas dit que le couteau, en se retournant dans la plaie, avait fait : “Crrac ! ”

Expliquerai-je un peu l’affolement des jurés si je dis que, l’avant-veille, avait paru dans le journal de Rouen, en tête, un article sur “ Les jurés et la loi de sursis ” (No du 17 Mai 1912) que j’avais vu passer de main en main, de sorte que tous mes collègues, ou presque, l’avaient lu ? Prenant prétexte d’une affaire qui venait de se juger à Paris, où les réponses du jury avaient forcé la cour d’acquitter trois précoces malandrins, cet article s’élevait contre l’indulgence. On y lisait :

“ Jamais les jurés parisiens n’avaient donné une telle preuve de faiblesse que dans l’affaire où, à la stupéfaction générale, ils viennent d’acquitter trois jeunes cambrioleurs convaincus d’avoir tenté de piller un pavillon…

Cette indulgence outrée et absurde s’explique peut-être dans le cas particulier par l’attitude extraordinaire de la plaignante, qui avait demandé l’acquittement de ses agresseurs et aurait même, paraît-il, manifesté l’intention d’adopter l’un d’eux…[1] Mais est-il besoin de faire remarquer que les jurés qui, eux, doivent avoir la tête solide et posséder l’expérience de la vie, ne pouvaient subir le même accès de niaise sentimentalité (ce “ mais ” n’est pas très chrétien, Monsieur le chroniqueur) et qu’ils ont, par conséquent, manqué à leur devoir en refusant de condamner des coupables avérés, et que rien ne leur signalait comme particulièrement intéressants ?

Cet étrange verdict, que la presse a condamné de façon unanime, etc.

En ce temps, ou les crimes se multiplient, où l’audace et la férocité des malfaiteurs dépassent toutes les bornes connues (ô Flaubert !), où les jeunes gens même entrent si hardiment dans la mauvaise voie, etc… ”

Qui dira la puissance de persuasion — ou d’intimidation — d’une feuille imprimée sur des cerveaux pas bien armés pour la critique, et si consciencieux pour la plupart, si désireux de bien faire !…

— Le Président m’a dit que jusqu’à présent nous avions très bien jugé, répétait, il y a quelques jours, un des jurés ; et ce satisfecit du Président courait de bouche en bouche, et chacun des jurés s’épanouissait à le redire. Ils en rabattirent bientôt.

  1. Combien ne serait-il pas intéressant de connaître le résultat de cette rare expérience !