Les Ailes d’or : poésies nouvelles, 1878-1880Bibliothèque-Charpentier (p. 180-181).
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SOLEIL COUCHÉ

De sa tente nocturne ouvrant les rouges toiles,
Comme un roi magnifique au diadème ardent,
En franchissant le seuil pourpré de l’occident,
Le soleil, dans l’air vide, a jeté les étoiles.

Vers cette aumône d’or chaque monde tendu
Recueille avidement la lumière sacrée !
De vagues hozannas montent vers l’empyrée,
Chantant l’astre vainqueur sous la mer descendu.

Le soleil est parti de mes cieux avec celle
Dont la beauté versait la lumière à mes yeux :
Des souvenirs tombés de son front glorieux
La constellation dans ma nuit étincelle.

Derrière l’horizon des couchants sans réveil,
Elle a fui pour jamais et je la chante encore,
Et j’espère tout bas, comme si quelque aurore
Devait la ramener avec le jour vermeil !