Hetzel (p. 269-280).


CHAPITRE XIV

MES DÉBUTS AU COLLÈGE DE FRANCE


Nous avons plusieurs patries. D’abord la grande, l’alma parens, celle qui réunit dans son sein tous les fils de la même race, tous les rejetons du même sol, tous les enfants qui parlent la même langue.

Vient ensuite la seconde, la ville natale. Pour moi, si je suis Français jusqu’au fond de l’âme, je me sens Parisien jusque dans la moelle des os.

Vient enfin la troisième, qui n’existe que pour quelques privilégiés, la maison. Tout civilisés qu’ils se proclament, la plupart des hommes d’aujourd’hui sont des nomades. Emportés ici et là par leurs passions par leurs intérêts, ils promènent leur vie de pays en pays, de ville en ville, de quartier en quartier, de rue en rue ; leur logis est une tente.

J’ai été plus heureux.

Je suis né en 1807, dans l’appartement que j’occupe en 1887. Mon cabinet de travail était le cabinet de travail de mon père. J’ai marché à quatre pattes dans ce salon où j’ai vu mes enfants et mes petits-enfants jouer, grandir, avoir dix ans, avoir quinze ans, avoir vingt-cinq ans, et la place où s’assied ma fille, est celle où s’asseyaient ma mère et ma femme. Il n’y a pas jusqu’à la salle à manger qui n’ait son souvenir. Le poêle est surmonté d’une statue en plâtre, de Houdon, la Frileuse, qui s’y chauffait déjà du temps de mon père et de ma mère. Du haut de son piédestal, elle a présidé, comme une sorte de divinité lare, à toutes les fêtes qu’ont données mes parents ; et ma mère avait le génie des fêtes. J’ai hérité ce goût de ma mère. J’ai réuni quelquefois à ma table, plusieurs des personnages illustres de notre temps, de façon que ma Frileuse a vue en quatre-vingts ans passer tour à tour M. de Fontanes et M. Guizot, Lemercier et Sardou, Picard et Augier, Dickens et Labiche, Mlle Contat et Mme Ristori… J’en passe, et non des moindres. Sous le nom de ma Frileuse, on pourrait écrire de jolis mémoires : les Mémoires d’une statue.

Enfin, le croirait-on ? J’ai une quatrième patrie.

En 1834, l’année de mon mariage, j’allai m’établir pour l’été, dans un jolie petit village, situé sur les bords de la Seine, entre Corbeil et Melun, et qui s’appelle Seine-Port. J’y demeure encore, je suis le plus ancien bourgeois du village. Oh ! comme Scribe a eu raison de me pousser à acheter la petite maison que j’habitais ! Depuis ce jour, ma vie s’est métamorphosée. D’abord j’ y ai fait une bien précieuse acquisition, j’y ai acquis un goût de plus, je pourrais dire une passion de plus : l’amour des fleurs. Sans doute je les aimais déjà, mais des yeux et de l’odorat, non du cœur. Depuis ce jour-là, mes rosiers, mes lilas, mes arbustes, toutes les plantes enfin, sont devenues pour moi autant d’êtres vivants, avec qui j’habite, avec qui je cause, qui me conseillent, que me consolent, qui me donnent des leçons d’harmonie, de coloris… Je disais un jour à Gounod : « Venez donc entendre chanter mes glaïeuls ! » Je suis enraciné dans mon petit jardin aussi profondément que les arbres qui y poussent ; j’y tiens par les fibres de la douleur comme par celles de la joie. Mes plus grands chagrins, c’est là que je les ai éprouvés ! Mes larmes les plus amères, c’est là que je les ai versées ! Ce petit bois est tout peuplé pour moi des chers disparus que je pleure encore ; mes travaux mêmes, livres ou pièces de théâtres, sont presque tous nés là, sous ces arbres, dans cette petite maison. Elle m’a coûté bien peu et ne vaut pas grand argent, mais on m’en offrirait un million que je le refuserais, car elle fait partie pour moi de la terre natale. Si j’en étais séparé, il me semblerait que je suis exilé.

Eh bien, c’est dans ce Seine-Port, vers 1844, vint s’établir à côté de moi, et à cause de moi, un homme dont le nom, immortel pour quelques-uns, reste à demi enveloppé d’ombre pour la plupart ; qui a laissé dans le souvenir de tous ceux qui l’ont connu, une empreinte ineffaçable d’admiration et de respect, et qui, enfin, a exercé sur moi une si puissante influence qu’elle dure encore aujourd’hui, vingt-trois ans après sa mort : c’est Jean Reynaud.

J’avais eu une grande part dans le mariage de Reynaud. Il m’était reconnaissant de son bonheur. Pour me payer de ce qu’il appelait sa dette, il voulut m’aider dans l’œuvre qui m’intéressait le plus ; il se fit avec moi, pendant trois ans, le maître de mon fils et de ma fille. Quel maître ! Ces trois ans changèrent notre amitié en intimité fraternelle. Je le consultais sur mes travaux. Il me parlait de l’Encyclopédie nouvelle, dont il était alors le directeur. Un matin il entra chez moi en me disant : « Il me faut votre collaboration. ― A moi ? ― Il faut que vous écriviez, pour mon encyclopédie, l’article Femmes. ― Eh ! mon cher ami ! m’écriai-je, vous n’y pensez pas ! Je suis un faiseur de pièces de théâtre et de vers. Le métier de philosophe n’est pas le mien. Moi, tomber comme un intrus dans votre grave dictionnaire ! Traiter le plus délicat, le plus difficile des problèmes de ce temps, la condition des femmes ! Vous n’y pensez pas ! ― J’y pense si bien, me répondit-il tranquillement, que ce n’est pas seulement pour nous que je vous demande cet article, c’est pour vous. Souvent nos amis nous connaissent mieux que nous-mêmes. Je vis avec vous toute la journée, depuis deux ans ; depuis deux ans, je vous vois avec votre femme et vos enfants. Eh bien, sans que vous vous en doutiez, vous vivez ce livre depuis que vous êtes marié. Il est en vous. Pour le faire, vous n’aurez qu’à regarder dans votre cœur et dans votre maison. ― Mais, encore une fois, je ne suis pas philosophe. ― C’est précisément parce que vous n’êtes pas philosophe que vous ferez là œuvre excellente de philosophie. Aujourd’hui, au milieu de toutes les déclamations discordantes que soulève cette question, au milieu de toutes les folles et malsaines théories de la femme libre, nous avons besoin d’entendre la voix d’un homme de famille, qui soit en même temps un homme d’art. Or, vous êtes précisément cet homme-là. Ne craignez pas que cette étude vous détourne de vos travaux de théâtre et de poésie, elle les fortifiera ; car si la question des femmes est le plus sérieux des sujets, il en est aussi le plus pathétique, le plus poétique et le plus charmant. Un dernier mot, mais décisif : vous devez ce travail à votre père ; cela fait partie de son héritage. »

Ce dernier argument me persuada ; je me mis au travail, et dès le début se révéla à moi un fait imprévu et bon à signaler.

A vingt ans j’avais fait mon droit, le l’avais même très bien fait, mais en grommelant tout bas : Quelle absurdité ! Perdre, à me barbouiller la mémoire des Pandectes, des Institutes et du Code, un temps que je pourrais employer si utilement à apprendre une langue de plus, à pénétrer dans une littérature nouvelle ! A quoi me servirons mes trois années de droit dans mon métier d’écrivain ? Or ce fut précisément l’élève en droit qui vint en aide à l’écrivain. Ce fut mon étude du code qui donna à mon livre une assise solide. C’est elle qui, au lieu d’un ouvrage simplement agréable et intéressant, me dicta, en faveur des femmes, un travail fondé sur la connaissance approfondie de leurs douleurs réelles, sociales. C’est elle enfin qui me permit, au lieu de les chanter, de les défendre. Ne maudissons jamais une étude sérieuse. Ses fruits, pour être tardifs, n’en sont pas moins certains. Un peu plus tôt, un peu plus tard, tout ce qui nous instruit, nous sert ; la Providence nous forme par toutes sortes de moyens et nous conduit au but par toutes sortes de routes. En éducation, la ligne droite n’est pas toujours la plus courte, ni surtout la plus sûre. En outre, mes qualités d’auteur dramatiques, s’appliquant à leur tour à la mise en œuvre de mes recherches, y jetèrent quelque vie, quelque intérêt, et lorsque, deux ans après, mon article parut dans l’Encyclopédie, il attira assez l’attention des lecteurs sérieux, entre autres de Béranger, pour que je me décidasse à en faire un livre. Mais tout à coup, ce livre étant achevé, imprimé, prêt à paraître, éclate la révolution de Février. Reynaud est appelé par M. Carnot au ministère de l’instruction publique comme secrétaire général. Quelques jours après, je reçois ce mot de lui : « Venez tout de suite, c’est pour affaire grave. » J’arrive. « Mon cher ami, me dit-il nettement, j’ai un service à vous demander, peut-être un sacrifice, ou plutôt l’acceptation d’un devoir. ― Qu’est-ce ? ― Il faut que vous partiez comme commissaire du Gouvernement en province. ― Commissaire de Ledru-Rollin ! ― Précisément ! » Oh ! pour le coup je me révoltai : « Mais c’est de la folie ! Vous voulez me métamorphoser en homme politique à présent ! Sachez donc que je suis le contraire d’un politique. ― Je vous répondrai, me dit-il froidement, ce que je vous ai répondu, il y a deux ans. Je vous connais mieux que vous. Je vous ai vu à l’œuvre dans nos promenades à travers champs et bois. Vous savez parler aux paysans comme aux gens du monde. Pourquoi ? Parce que vous êtes un homme de sympathie. Je suis plus républicain que vous, mais vous êtes plus démocrate que moi. Il s’agit d’apprivoiser notre pays à la République. Il nous faut des hommes comme vous. D’ailleurs, il n’y a plus à reculer. Si j’avais tiré sur vous un billet à ordre, le payeriez-vous ? ― Sans doute ! ― Alors payez, car j’ai signé. Je vous ai promis à Ledru-Rollin, il vous attend. ― Je ne puis rien vous refuser, répondis-je avec émotion, mais je ne vous donnerai jamais une plus grande preuve d’amitié. » Me voilà chez Ledru-Rollin. Accueil charmant, à bras ouvert. « La République vous remercie. Quel département voulez-vous ? ― Je crois, répondis-je, que si je peux être utile quelque part, c’est dans le Loir-et-Cher. ― Le Gouvernement se réunit ce soir. Je vous propose, on vous accepte ; et demain matin, je vous donnerai vos dernières instructions. »

Le lendemain, à dix heures, j’entrais au ministère. « M. Ledru-Rollin ? ― M. le Ministre est absent, me répond l’huissier d’un air qui me parut singulier, mais son secrétaire, M. Élias Regnault, attend Monsieur. » Je connaissais beaucoup Élias Regnault. A ma vue, il prend une figure de condoléance, et me prie de m’asseoir. « Qu’y-a-t-il donc, mon cher Élias, lui dis-je, vous paraissez contrarié ? ― Plus que contrarié, désolé, et le Ministre aussi. ― Pourquoi ? repris-je vivement, est-ce que ma nomination… ― Vous n’êtes pas nommé. ― Hein ? ― Le Ministre a fait hier tous ses efforts au Conseil, mais M. de Lamartine a proposé un autre candidat, en ajoutant que vous n’étiez pas assez républicain. ― Et l’on me refuse ! m’écriai-je. ― Le mot n’est pas juste. On ne vous refuse pas,… mais… ― Mais on ne veut pas de moi ! Je suis rayé de la liste ! Je ne suis pas Commissaire du Gouvernement ! Ah ! mon cher ami, repris-je en serrant les deux mains d’Élias Regnault, jamais on ne m’a donné une si bonne nouvelle. Jamais je n’ai ressenti une joie pareille. ― Comment reprit-il stupéfait. ― Mais j’avais accepté, la mort dans l’âme, par devoir, par amitié pour Reynaud. Et l’on me destitue… avant ! Et je suis libre ! Vous dites que c’est Lamartine qui a fait biffer mon nom ? Je vais lui mettre ma carte. » Et me voilà parti, laissant Élias Regnault absolument abasourdi. Je cours au ministère de l’Instruction publique, et entrant chez Reynaud : « Mon cher ami, lui dis-je, vous voyez le plus heureux des hommes, on me refuse ! ― Quoi ? » Je lui conte tout, et j’ajoute : « Maintenant, ma récompense. Je me suis dévoué pour vous. Il faut que vous vous employiez pour moi. ― Comment ? ― Vous êtes tout-puissant dans votre ministère, autorisez-moi à parler mon livre sur les femmes au Collège de France. ― C’est fait, » me répond-il. Et le lendemain je lus à l’Officiel : « M. Legouvé est autorisé à faire gratuitement un cours au Collège de France sur l’histoire morale des femmes. »

Mon cours s’ouvrit en avril 1848. Le matin de ce jour-là, je me levai avec une grande peur, et une grande joie. Ma joie venait de ce que la salle où je devais parler portait le numéro 8, et que c’était précisément ce numéro 8 où mon père avait professé la poésie latine, quarante ans auparavant ; j’étais son continuateur : c’était lui qui m’avait préparé le chemin, et qui me présentait au public.

Ma peur, était de trouver une salle vide, ou un public hostile. A ce moment, sous le coup de la Révolution, toutes les théories les plus folles couraient les rues, on voyait le bataillon des Vésuviennes parcourir le boulevard avec un drapeau rouge ou noir, je ne sais lequel… portant cette devise : Émancipation des femmes. A ce moment enfin, on ne pouvait parler sérieusement des femmes, sans faire rire ; J’arrive au Collège de France. La cour, le péristyle, la salle, tout était plein d’une foule bourdonnante et tourbillonnante. J’eus grand’peine à arriver jusqu’à ma chaire. J’y montai au milieu d’un tumulte indescriptible. Impossible de prononcer une parole. Les gens qui étaient dehors frappaient à la porte, jusqu’à la briser. Un de ces impatients monte sur une grande échelle, et apparaît en haut d’une des fenêtres de la cour, dont il avait cassé le dernier carreau. On s’imagine les éclats de rire de la salle ! Les plus animés du dehors criaient : Dans la cour !Dans la cour !Qu’il parle dans la cour ! D’autres disaient !A la Sorbonne !A la Sorbonne !Au grand amphithéâtre ! Le brouhaha dura vingt-cinq minutes. Ces vingt-cinq minutes me furent fort utiles. J’entrai en conversation avec mon auditoire. Comme ce tumulte n’avait rien que de sympathique, nos échanges de demandes et de réponses, étaient paroles de bonne humeur, et de gaieté. Rien de lie comme de rire ensemble. Ce cours, débutant par vingt-cinq minutes de dialogue, nous mit, mes cinq cent auditeurs et moi, en telle familiarité, que ma peur disparut du coup, et quand, au bout de vingt-cinq minutes, je pus enfin prendre la parole, j’étais absolument maître de moi, et un peu maître d’eux. Mon succès fut, j’ose le dire, très réel, même éclatant. Un petit incident m’apprit pourtant à quel auditoire ombrageux j’avais affaire. Le développement de mon sujet, m’ayant amené à parler de la séduction, je prononçai cette phrase : « On voit beaucoup de pauvres jeunes filles, séduites par des officiers, par des étudiants. » A ce mot étudiants, s’élève un tolle formidable de murmures, et de sifflets étouffés… Je me tais ; j’attends que le bruit s’apaise,… et une fois le silence rétabli,… je reprends froidement et fortement : « On voit souvent de pauvres filles, entraînées à Paris, et séduites par des officiers, surtout par des étudiants. » Tonnerre d’applaudissements ! Ce qui m’apprit une vérité dont je me suis souvent souvenu et souvent servi depuis, c’est que quand on se présente devant une foule, la première condition est d’y arriver avec une opinion assez ferme pour ne jamais reculer devant sa propre pensée. Les hommes réunis respectent toujours une conviction sincère, et on ne leur impose qu’en s’imposant. La fin fut marquée par une scène comique. J’avais fini, et je me levais au milieu des applaudissements pour m’en aller, quand tout à coup, je vois se dresser à quelques pas de moi, et se hisser sur la banquette, un petit vieillard à cheveux blancs, qui m’interpellant avec un geste d’enthousiasme, s’écria : « Bravo ! jeune homme !sic itur ad astra. » Il continua sur ce ton pendant quelques secondes. Qui était-ce ? Le vieux Tissot, cet académicien mendiant, qui fut certes le plus indépendant de tous les membres de l’Institut, car il vendait sa voix à un candidat, et il la donnait à un autre, pour se la faire payer deux fois. Son algarade d’admiration me mit au supplice ! Mais sa vieillesse, son titre de professeur au Collège de France, me défendaient de m’en aller en lui tournant le dos ; et je dus subir son discours, en me contentant de dire à mi-voix aux plus proches auditeurs… « C’est odieux !… » Débarrassé enfin de lui, je me sauve dans mon cabinet de professeur. Il y accourt, et me dit avec une naïveté touchante… « Mon cher ami, je viens de vous rendre un fier service. Prêtez-moi donc cinq cents francs ! » Je lui en donnai vingt, et il partit en me bénissant. Seulement, comme il ne trouvait probablement pas son éloquence assez bien payée, il s’en alla, du même pas, chez une de nos meilleures amies, et voici son entrée en matière. « Vous aimez beaucoup M. Legouvé ? ― Oh ! beaucoup. ― Eh bien, je viens de lui rendre un immense service. ― Lequel ? » Il lui raconte tout, et ajoute : « J’ai pensé que vous seriez heureuse de reconnaître ce que j’ai fait pour lui, et je viens, tout ingénuement, vous prier de me prêter cinq cent francs. ― Mais il me semble, lui répondit la dame, que ce serai plutôt à lui que vous devriez vous adresser. ― J’y ai bien pensé. Mais dans la position où il se trouve… ― Quelle position ? ― Il est dans le plus grand embarras. ― Lui ! ― Poursuivi par ses créanciers. ― Lui ! ― Prêt à être expulsé par son propriétaire. ― Qu’est-ce que vous m’apprenez là ? Comment, son propriétaire… ― Est résolu à le mettre dehors. ― Mais c’est un monstre qu’un pareil propriétaire, car ce propriétaire, c’est lui. Il loge dans sa propre maison. » Décidément le pauvre Tissot, n’avait pas de chance ce jour-là.

A quoi cependant tiennent les choses ! si Lamartine ne m’avait pas barré la route, j’étais commissaire de Ledru-Rollin : si j’avais été commissaire de Ledru-Rollin, ce titre me serait resté comme une marque indélébile, je n’aurais certes pas été nommé de l’Académie cinq ans après, je ne l’aurais peut-être jamais été, et en tous cas, je n’aurais pas fait mon cours. Si je n’avais pas fait mon cours, je ne serais pas entré dans la carrière, nouvelle pour moi, des conférences publiques, et je n’aurais pas popularisé mon livre par la parole. Or, c’est mon livre qui est devenu la source de mes divers travaux d’éducation, les Pères et les enfants du dix-neuvième siècle, Nos Filles et nos fils, voire même l’Art de la lecture ; et c’est encore de lui que j’ai tiré plusieurs de mes plus importants ouvrages de théâtre, Médée, le Jeune homme qui ne fait rien, Une Séparation, les Contes de la reine de Navarre. Eh bien, à qui ai-je dû le sujet du livre, le cours, et le titre du cours ? A Jean Reynaud. Voila, ce me semble, le moment de parler de lui.