Scènes de la vie du clergé/Tribulations du révérend A. Barton/Conclusion

Traduction par A.-F. d’Albert-Durade.
Librairie Hachette et Cie (Scènes de la vie du clergép. 110-112).

CONCLUSION

Une seule fois encore, Amos Barton visita la tombe de Milly. Ce fut dans la calme et douce lumière d’un après-midi d’automne, et il n’était pas seul. Il avait à son bras une personne jeune encore, dont le visage doux et grave rappelait celui de Mme Barton, mais avec moins d’élégance et d’éclat. Elle avait près de trente ans, et il y avait autour de sa bouche et de ses yeux quelques lignes prématurées, signe d’inquiétudes venues avant le temps.

Amos lui-même était très changé. Ses cheveux clairsemés étaient presque blancs et sa démarche n’était plus ferme et droite. Mais son regard calme, heureux même, et son linge blanc indiquaient les soins attentifs d’une femme. Milly, en mourant, n’avait pas emporté de la terre tout son amour. Elle en avait laissé une portion dans le cœur de Patty.

Tous les autres enfants ont grandi et pris différentes directions. Dickey, vous serez bien aise de l’apprendre, a montré de remarquables aptitudes comme mécanicien. Ses joues sont encore fraîches, malgré ses études mathématiques, et ses yeux sont encore grands et bleus ; mais, à d’autres égards, Mme Hackit, si elle le voyait, ne reconnaîtrait plus en lui le garçon dont elle aurait pu garder le souvenir ; surtout maintenant que les yeux de cette dame doivent être devenus bien troubles, sous le poids de vingt années de plus. Dickey a près de six pieds et la poitrine large en proportion ; il porte des lunettes et passe souvent sa longue main blanche dans une touffe d’épais cheveux bruns. Je suis persuadé aussi que vous ne mettez point en doute que M. Richard Barton ne soit un honnête garçon rempli de talent, et vous serez bien aise quelque jour de lui serrer la main, aussi bien pour lui-même qu’en souvenir de sa mère.

Patty seule reste auprès de son père : elle est le soleil du soir de sa vie.