Séances de la Société agricole et scientifique de la Haute-Loire/2 février 1882

SÉANCE DU 2 FÉVRIER 1882.


Présidence de M. le Dr Langlois.

M. le Président donne lecture d’un article de M. Rieffel, insérée dans le Journal de l’agriculture de M. Barral, (no du 24 janvier 1882) sur l’organisation des pépinières de plantes fourragères, choux, rutabagas et betteraves.

La culture des choux joue un grand rôle dans l’alimentation humaine et dans celle des animaux. Pratiquée sur une vaste échelle aux environs du Puy, elle est pour les maraichers une source importante de revenu, et les cultivateurs de la montagne viennent dans notre ville s’approvisionner de jeunes plants qu’ils sèment ensuite à des altitudes très élevées.

Pour établir une pépinière de plants de choux, il faut préparer le terrain dès l’automne, donner un premier labour suivi d’un hersage, dès les mois d’octobre ou de novembre, une bonne fumure au bout de trois semaines, puis un deuxième labour suivi d’un hersage. En janvier ou février, nouvelle fumure accompagnée d’un ou deux labours. En mars, on prépare à la main de petites planches d’une longueur de 10 à 15 mètres chacune et d’une largeur de 1 m. 20 ; puis, on tire sur chaque planche trois rayons espacés de 0, 40 centimètres. La graine de choux semée dans les rayons est recouverte au râteau. Répandre sur les planches du phosphate de chaux est un excellent moyen de hâter la levée et de favoriser la première végétation de la plante.

À l’apparition des premières feuilles, il faut, pour détruire les pucerons, répandre sur les feuilles des cendres de chaux, recommencer cette opération tous les matins, à la rosée, biner et sarcler en même temps, et, durant la durée de la pépinière, faire un défoncement de 10 à 15 centimètres entre les lignes.

M. Langlois informe la Société qu’il a fait pratiquer des sondages dans un champ situé à l’Arbouisset, commune d’Espaly, d’où le propriétaire, M. Gauthier Bonhomme, avait exhumé, peu de temps avant, des blocs de grés de Blavosy, portant des trous de louve et des traces de moulures. Les fouilles ont mis à jour des tuiles à rebords, du ciment romain, des débris de vases, de verres irrisés et de marbres de diverses couleurs, des cubes de mosaïque, des fragments de bronze et de fer, et enfin les fondations d’un mur reposant sur des pierres de libage, d’une dimension et d’une épaisseur considérables. Ces pierres de libage placées sur le sol bout à bout, à une profondeur d’un mètre environ, sont visibles sur une étendue de 20 mètres et dénotent un édifice ancien très important dont la destination est encore inconnue.

M. Aymard corroborant les renseignements fournis par M. Langlois, dit qu’il s’est rendu plusieurs fois sur le champ des fouilles, qu’il en dressera le plan et fera à la prochaine séance une communication sur la trouvaille de l’Arbouisset.

Sur la proposition de M. Hérisson, professeur départemental d’agriculture, tendant à la création d’un champ pour les expériences agricoles au Puy, la Société nomme une commission composée de MM. Mauras, Couderchet, Dussau et Nicolas, qui aura pour mission de choisir et de louer au besoin un emplacement convenable à ces expériences. M. Antoine Jacotin annonce qu’il sera heureux d’offrir, comme champ d’expérimentation, dans sa propriété de Beaurepaire, commune du Monteil, la surface de terrain nécessaire à ces essais. La Société, acceptant avec reconnaissance l’offre gracieuse de M. Jacotin, décide que la commission ira le plus tôt possible reconnaître le terrain.

M. Milne Edwards, directeur du Muséum d’histoire naturelle à Paris, a informé M. Jacotin de l’envoi au musée du Puy d’un certain nombre d’oiseaux provenant du Muséum. Grâce à la bienveillance de M. le Ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, notre musée s’est également enrichi d’un beau moulage représentant l’esclave de Michel-Ange.

M. Alix lit un mémoire sur l’industrie sucrière à la Plata que lui a transmis M. de Surrel, attaché au consulat francais de Buénos-Ayres.

M. Lascombe, à propos d’une publication faite par M. l’abbé Arsac, professeur à la Chartreuse et qui a pour titre : Notes chronologiques sur les abbés de Saint-Chaffre s’exprime ainsi :


Indépendamment de l’intérêt que peuvent offrir à leurs lecteurs les articles politiques et les faits divers, les journaux de notre cité renferment parfois des notices historiques locales d’une grande valeur, car elles nous font mieux connaître la petite patrie que nous habitons.

C’est ainsi qu’ont paru dans les colonnes de la Haute-Loire, il y a peu de temps, les monographies de Viaye, par M. Charles Rocher et du Théâtre du Puy, par M. Henry Mosnier.

M. l’abbé Arsac, professeur au petit séminaire de la Chartreuse, auquel nous devons déjà la copie d’un remarquable titre sur le château de Chapteuil, a publié, lui aussi, dans l’Echo du Velay, à l’aide de renseignements inédits puisés aux archives nationales et départementales, des Notes chronologiques sur les abbés de Saint-Chaffre. Il a eu la bonne pensée de faire un tirage à part de son travail, et de reproduire, dans une brochure in-18 de 72 pages, le dernier sceau de l’abbaye du Monastier.

Le Gallia Christiana fournit, il est vrai, une chronologie des abbés de Saint-Chaffre ; mais elle présente des lacunes, des dates incertaines et souvent erronées. Après une longue et patiente étude, en contrôlant tous les titres connus, en prenant pour base des documents échappés à la sagacité des frères de Sainte-Marthe, ou même inconnus d’eux, M. l’abbé Arsac nous a donné la chronologie la plus complète, jusqu’à ce jour, des abbés de cet important monastère et a rendu ainsi à l’histoire de notre pays un immense service.


La Société apprend avec le plus grand plaisir que M. le Ministre de l’agriculture a souscrit pour un certain nombre d’exemplaires à l’ouvrage de notre confrère, M. Nicolas, publié sous le titre de : Notions d’Agriculture à la portée des écoles primaires et des fermes-écoles.

M. Langlois communique à la Société un corollaire du travail qu’il lui a lu, l’année dernière, sur la destruction de la bruche des lentilles, par le chaulage de cette plante au moment de la floraison.

Deux planches contiguës ont été ensemencées avec des criblures contenant des quantités considérables d’insectes, ce qui, d’après lui, est la condition la plus favorable pour la reproduction. L’une a été chaulée au moment de la fleur, l’autre a été laissée à elle-même. La récolte des deux planches a été examinée à la fin de janvier seulement. Les graines de la planche chaulée étaient plus développées, plus vertes : les bruches ne s’y trouvaient que dans la proportion d’un quart par rapport à celles de la planche non traitée.

M. Langlois explique que l’application de la chaux faite à la volée, comme le plâtre sur le trèfle, doit avoir lieu, autant que possible, par une matinée humide favorisant l’adhérence de la chaux sur la fleur. Il engage à renouveler ce traitement fort peu couteux, à deux reprises, tout à fait au début de la floraison, et lors de l’épanouissement des dernières fleurs.


A. Lascombe.