Revue Musicale de Lyon 1904-01-26/Nouvelles diverses

Nouvelles Diverses

Le Berliner Lokal Anzeiger a fait une enquête sur ce qu’un certain nombre de personnalités éminentes espèrent de l’année 1904. Parmi les réponses des musiciens nous trouvons l’opinion — qui nous semble très juste — du célèbre Joachim sur Berlioz :

« Hector Berlioz fut certainement un tempérament poétique, plein d’imprévu qui voulait montrer sa nature et ses tendances dans ses compositions, et notamment par l’éclat brillant de son orchestration. Mais son invention mélodique est si pauvre, ses combinaisons d’harmonie et de contrepoint si recherchées qu’on est forcé de dire de lui : « Jamais la musique ne fut sa langue maternelle ! » Richard Wagner l’a d’ailleurs caractérisé en l’appelant une caricature de Beethoven. »

Un comité vient de se former à Vienne pour élever un monument à la gloire de Johann Strauss, l’auteur du Beau Danube bleu et d’un grand nombre d’aimables valses qui ont fait le tour du monde.

M. Georges Moore, le romancier anglais bien connu, vient de poursuivre devant la justice deux joueurs d’orge dont les concerts trop répétés troublaient son travail. Les magistrats lui ont donné raison, estimant que ces musiciens ambulants imposent en quelque sorte la générosité du public par une véritable persécution.

On parle beaucoup en ce moment de l’ouverture d’un quatrième théâtre lyrique qui serait exploité l’hiver prochain avec le double concours d’une troupe allemande et d’une troupe italienne.

M. Camille Saint-Saëns vient de terminer un Hymne à la France, sur des paroles de M. COmbarieu, destiné à être chanté dans les établissements d’enseignement secondaire dépendant de l’Université de France.

C’est M. Liard, directeur de l’enseignement, qui avait demandé cette œuvre à M. Saint-Saëns.

À la suite du terrible désastre du théâtre Iroquois, à Chicago le directeur de l’Opéra de New-York M. Conried, le même qui s’est attiré les foudres de Mme Wagner pour avoir monté Parsifal, a imaginé une mesure assez ingénieuse pour réduire les conséquences éventuelles d’un incendie dans son théâtre. Il a fait imprimer au revers de chaque coupon l’indication de l’issue la plus proche de la place représentée par ledit coupon. Le porteur du coupon sera invité à ne pas quitter, même en temps ordinaire, le théâtre par la sortie générale, mais par celle indiquée sur son billet, de façon à en prendre l’habitude. M. Conried affirme que cette combinaison préviendra les paniques ou leur enlèvera tout caractère dangereux.

Le Théâtre royal de Munich a donné la première représentation du nouvel opéra de Humperdinck : Dornroschen (La Belle au Bois dormant), et en automne il montera un opéra populaire du même maître : Mariage contre volonté.

Dernièrement, on a représenté Messaline au théâtre de Nantes. Les étudiants de la ville ont cru devoir, à cette occasion, offrir au compositeur un « punch d’honneur », — ce qui fait que M. Isidore de Laray est allé de son petit discours ainsi terminé : « Artiste sincère, je n’ai qu’un but : écrire et chanter ce que je ressens. » Nous n’en voyons nullement la nécessité.

Nous doutons fort que M. Isidore Cohen de Lara reçoive jamais un tel accueil des étudiants lyonnais.

M. Malherbe, bibliothécaire de l’Opéra de Paris, vient de retrouver une partition inédite de Bizet, intitulée Don Procopio ; elle fut écrite alors que l’auteur de Carmen était pensionnaire de la Villa Médicis et lui avait servi d’envoi de Rome.

Le livret, d’un auteur italien, met en scène l’éternel oncle avare qui veut marier sa nièce avec un barbon, encore plus harpagon que lui. C’est de Don Procopio, ouvrage de jeunesse, que Georges Bizet a extrait la sérénade des Pêcheurs de Perles et un air de la Jolie Fille de Perth.

On est aujourd’hui pleinement rassuré sur la santé de M. Gustave Charpentier. Sa convalescence est à ce point confirmée qu’il a consenti à aller à Nice présider toute une série de représentations de ses œuvres, du 1er au 10 avril. Ce sera la semaine Charpentier.

Au Casino municipal, on donnera le Couronnement de la Muse et l’Apothéose de Victor Hugo, avec le concours de toutes les musiques et fanfares, des sociétés chorales, de tous les orchestres de la ville, des artistes et du personnel de danse des théâtres. Cette représentation sera donnée au bénéfice d’un sanatorium pour les malades de l’œuvre de « Mimi Pinson », dont M. Charpentier va entreprendre la création dans un des plus beaux sites de la Côte d’Azur.

Le Couronnement de la Muse et l’Apothéose de Victor Hugo seront ensuite représentés, en plein air, sur la place Masséna.

Puis M. Charpentier dirigera un concert de ses œuvres à l’Opéra, au bénéfice de l’Association des musiciens de Nice, dont il est président d’honneur.

Enfin, ces fêtes seront clôturées par une grande représentation de gala : Louise, dirigée par le maître ; comme protagonistes, M. Jérôme et Mlle Garden, de l’Opéra-Comique.

Les fonctions de directeur de la nouvelle Académie de musique que l’on va créer à New-York, ont été récemment offertes à M. Fuchs, qui a dirigé la mise en scène de Parsifal à l’Opéra métropolitain.

M. Fuchs est l’ancien régisseur des théâtres de Bayreuth et de Munich.