Recueil des lettres missives de Henri IV/1577/22 septembre ― À mon cousin monsieur de Damville



1577. — 22 septembre.

Orig. autographe. – Biblioth. de Toulouse. Recueil de pièces manuscrites relatives aux affaires de la Ligue. Copie de M. le bibliothécaire, transmise par M. le maire.


À MON COUSIN MONSR DE DAMVILLE,

MARESCHAL DE FRANCE.

Mon Cousin, Voyant qu’il avoit pleu à Dieu incliner le cœur du Roy mon seigneur à la paix, nous nous sommes tous disposez à y entendre, et à la recepvoir, pour le desir que nous avons de nous conformer à ses volontez, et par mesme moyen pour arrester le cours de tant de miseres, desolations, confusions et desbordemens que nos longues guerres civiles ont apporté dans ce Royaume. Tellement qu’après plusieurs longues conferences, le xvije de ce mois, estant assisté de mon cousin monsieur le prince de Condé ; par l’advis de plusieurs seigneurs et gentils-hommes et deputez de toutes les esglises de France, et demeuré d’accord avec mon oncle monsieur de Montpensier de toutes choses concernant la pacification, lequel en mesme temps a signé les articles ainsi arrestez et le lendemain les a portez au Roy mon seigneur, pour les faire publier en edict, au mesme jour, suivant le pouvoir qu’il a de Sa Majesté, il a ordonné que tous actes d’hostilité cesseroient, et que tout ce qui seroit pris et commis despuis le dict xvije, soit par voie d’hostilité ou aultrement, pour quelconque occasion que ce soit, seroit subject à restitution et reparation. Et par ce, mon Cousin, qu’il m’a semblé que je vous debvois advertir des premiers de la dicte conclusion à laquelle par toutes vos lettres vous m’avés tousjours demonstré avoir une singuliere affection, ensemble de ce qui s’est passé en ceste negociation et conference, tant pour le regard de vos qualitez et merites, que aussy pour la bonne volonté que je vous porte, qui n’est en rien diminuée, quelque alteration qu’il y ait eu[1], pourveu que de vostre part vous y respondiés, j’ai advisé de despescher vers vous monsr de la Nouë, et le pryer de faire ce voyage ; lequel, suivant l’affection qu’il a tousours deu faire paroistre vous porter, l’a volontiers accepté. Sur lequel, à ceste cause, me remettant de toutes particularitez, je vous prieray de luy adjouster foy comme à ma propre personne, et Nostre Seigneur vous vouloir, mon Cousin, maintenir en sa saincte garde et protection.

De Bergerac, le xxije septembre 1577.

Vostre affectionné cousin et parfaict amy,
HENRY.


  1. « Le maréchal de Damville de jour en jour se séparoit plus fort du parti huguenot. » (Davila, Histoire des guerres civiles de France, l. II.)