Reconnaissance de la région Andine, de la République Argentine/10

X

DE 16 DE OCTUBRE À PUERTO MONTT


Quand fut arrangé le retour des expéditionnaires de la section australe, je résolus de retourner, le 12 avril, au Nahuel-Huapi. Cette nuit-là, nous campâmes à Pichileufu, et le lendemain je pris le chemin de Fofocahuallo pour passer par Cushamen ou Flatemen. En continuant ma route dans la direction de l’ouest par les sources des arroyos Chacaihueruca, Chenqueg-geyu et du rio Curruleufu, j’arrivai, le 16, à la propriété de Tauschek, prés du lac. Le lendemain, Wolff me rejoignit et me rendit compte des travaux qu’il avait exécutés.

Il commença son exploration en suivant la vallée du Caleufu, et chercha un passage au travers des bois et des coteaux jusqu’au bassin du Traful qu’il dut reconnaître au sud. Dans la vallée se trouve une habitation dont le propriétaire lui assura qu’il se rencontre des vaches sauvages dans les environs du lac. Pour reconnaître l’arroyo Cuyé-Manzana, il traversa les hauts coteaux qui le séparent du Traful dont il est un affluent. Cette rivière coule dans une vallée assez étendue et riche en pâturages ; il la suivit en partie ; puis il fit l’ascension des montagnes offrant le plus de facilité pour la marche. Le lac Manzana représenté dans la carte du colonel Rhode, représentation qui a été copiée par toutes les autres cartes de cette région qui ont paru dans la suite, n’existe pas, comme l’ont également constaté Soot et Hauthal. De la cime d’une montagne, Wolff put effectuer des observations de latitude et d’azimut, de grande importance pour relier les points topographiques avec le Lanin, centre de toutes les observations de la section. Le 14, en traversant la chaîne de montagnes, il arriva à l’Estancia Jones au Nahuel-Huapi, où il rencontra Roth avec lequel, le 16, il se dirigea au Potrero Huber, à l’extrémité nord-ouest du lac ; mais, avant d’y arriver, Roth dut retourner en arrière à cause des difficultés du chemin, qui entravaient les études qu’il avait ordre d’effectuer (planche XXIX).

Le rio Correntoso, si l’on peut appeler fleuve ce petit canal profond, n’a guère que deux cents mètres, et met le lac de ce nom en communication avec le Nahuel-Huapi ; cependant la carte de M. Fischer donne à son cours une longueur de presque vingt kilomètres. Le sentier passe par les lagunes de Las Chorguas et Pichilaguna et la lagune du Totoral ; cette dernière est très pittoresque avec trois îlots au centre, et est située au pied des monts neigeux de l’ouest. Potrero Huber, ainsi appelé d’après le nom d’un propriétaire résidant à Osorno, qui avait choisi ce parage pour l’hivernage de ses bestiaux, occupe la vallée entre la lagune Totoral et le lac Nahuel-Huapi, vallée dont la forêt a été détruite par des incendies et qui a été remplacée par d’excellents prés naturels.

Le 25, Wolff fit l’ascension du cerro Mirador, superbe point d’observations, d’où l’on voit les monts Lanin, Chapelco, Tronador, Pantoja, Puntiagudo et les volcans de Osorno, de Puyuhué et de Villarica. Le 26, il examina la lagune Constancia dont les eaux se déversent dans le lac de Puyehué, et, le lendemain, il recommença l’ascension du Mirador (planche XXX, fig. 1) du sommet duquel il parvint à effectuer des observations de latitude et d’azimut, et exécuta des visées de tous les principaux points en même temps que le panorama photographique. Le 28, il se dirigea de nouveau à la lagune Constancia, et, le 30, il était de retour au Potrero Huber. Le 31, il partit dans la direction du nord-est pour étudier le système du lac Correntoso, et arriva, le soir, au lac Espejo, près des rives duquel croissent de vigoureux mélèzes. Le lac baigne la base des montagnes neigeuses de la Cordillère, et sa plus grande extension se trouve du nord au sud. Il est étrange que ce lac ne se déverse pas dans le Nahuel-Huapi, car il n’en est séparé que par une plaine de deux kilomètres. Son écoulement se fait plus au nord, dans le lac Correntoso, en coupant des monts assez élevés sur un espace de cinq kilomètres. Un autre petit lac, celui de l’Encanto, se déverse dans le lac Espejo.

Le 6 avril, Wolff retourna au Potrero Huber, après un travail très pénible, rendu plus difficile encore par la pluie continuelle. Dans cette région, il n’est pas rare de trouver des vestiges d’établissements indigènes très anciens et il put obtenir de curieuses pièces de céramique. Il retourna à l’Estancia Jones dans le canot du brave indigène Millaqueo (planches XXXI et XXXII).

Le 23, il arriva à Junin de los Andes, et malgré la saison avancée, il se dirigea vers le lac Huechu-Lafquen, après avoir déterminé la longitude de Junin. Il continua ces travaux avec la coopération de Zwilgmeyer et Soot, malgré les pluies et les neiges, jusqu’au 8 mai. Le 13, il arriva à Quillen, et, de là, il se rendit à Chosmalal et à San Rafael, en prenant à l’est du massif du Nevado. Le 15 juin, son voyage était terminé.

M. Schiörbeck était revenu de son excursion aux lacs Gutierrez, Mascardi et Todos los Santos ; je lui laissai de nouvelles instructions ainsi qu’à Frey qui avait ordre de se rendre à Roca par le Nahuel-Huapi.

En arrivant au lac Nahuel-Huapi, le 25 février, Schiörbeck commença ses opérations par l’ascension du cerro del Carmen, de la cime duquel il aperçut le lac jusqu’à l’île Victoria, le cerro Puntiagudo, au Chili, et le Tronador, dont l’observateur ne pouvait apercevoir, de la position qu’il occupait, que deux pics, dont le plus élevé avait une altitude de 3400 mètres (moyenne de quatre observations trigonométriques), c’est-à-dire presque 400 mètres de plus que la hauteur calculée par MM. Fischer et Steffen. Le cerro Puntiagudo mesure, d’après Schiörbeck, 2430 mètres, soit 130 mètres de moins que ce qu’indiquent les mêmes explorateurs.

Du haut du cerro del Carmen, on parvenait à voir le lac jusqu’au Puerto Blest, ce qui démontre l’inexactitude du bras dessiné sur la carte de M. Fischer. Du même point de vue, Schiörbeck put constater aussi k’erreur de la position assignée par M. Krüger[1] au cerro Tronador qui, selon lui, se voit de l’embouchure du lac de l’ouest au nord.

L’explorateur remarque deux dépressions du lac, celle de Puerto Blest et celle qui forme un bras au sud ; la partie comprise entre les deux dépressions est occupée par une petite chaîne dans laquelle le cerro Capilla est le sommet le plus élevé. Au sud s’étendait la vallée du lac Gutierrez, où Schiörbeck se dirigea d’après mes instructions. À grand’peine, il put passer au travers de l’épaisse forêt, sur la rive nord du lac, où il se trouva entouré de montagnes qui suivent la direction de l’est à l’ouest ; tandis qu’au sud, on distinguait une chaîne continue dont la cime la plus remarquable est appelée La Ventana ; cette chaîne se dirige à l’ouest, côtoyant la rive sud du lac, ainsi que celle d’un autre lac situé plus à l’est, jusqu’à ce qu’elle soit coupée par la grande vallée longitudinale. C’est un chaînon de cinquante kilomètres de long, qui se dirige parallèlement au massif de la Torre de la Catedral dont la base escarpée surplombe le bord nord-ouest du lac situé à l’ouest du lac Gutierrez, et auquel on a donné le nom de lac Mascardi, en honneur du missionnaire assassiné en 1672 par les indiens. À l’ouest de ce lac s’ouvre une plaine de dix kilomètres d’extension. Cette dépression tectonique, occupée par les deux lacs et la vallée, formait autrefois un des fjords du lac Nahuel-Huapi. C’est au prix de grandes difficultés que Schiörbeck réussit à faire l’ascension d’un des pics de cette dernière montagne, et, d’une hauteur de 2300 mètres, il observa à l’ouest et au nord-ouest un massif dont les pics et les sommets neigeux sont dominés par le Tronador et le mont Puntiagudo. De l’autre côté du lac, on voyait une vallée longitudinale tout à fait dépourvue de cours d’eau, limitée par une imposante chaîne de pics élevés et neigeux, se prolongeant du nord au sud. Au nord-ouest, il distingua les nombreuses cimes qui se trouvent à l’ouest du Nahuel-Huapi et au nord et à l’est le volcan Pillan, les chaînons du Traful, des Cipreses, le Carmen, et le Trenque-Malal jusqu’au fleuve Limay.

De retour au lac Gutierrez, il traversa en radeau le lac Nahuel-Huapi, et débarqua à Puerto Blest, dont il rectifia la position géographique donnée par M. Fischer, et qui est situé quatre minutes plus au sud. S’avançant davantage dans la Cordillère, il passa par la lagune de Los Clavos, à une hauteur de 1190 mètres, tandis que le Nahuel-Huapi est à 740 mètres au-dessus de la mer. Il arriva au défilé appelé Cuesta de los Raulies (1290 m.), formant la séparation des eaux qui alimentent la lagune de Los Clavos, dont l’embouchure se trouve dans le Nahuel-Huapi, de celles qui donnent naissance aux affluents du rio Peulla. La pente des versants est très rapide, puisque de cette hauteur on descend à Casa Pangue qui n’est qu’à 320 mètres au-dessus de la mer.

De ce parage, par l’ouverture du rio Peulla, on domine le Tronador avec ses cimes immaculées, encadré à l’est par le cerro du Boquete Perez Rosales, et à l’ouest par le Monte Celoso.

Schiörbeck se dirigea à la lagune Frias par le Boquete Perez Rosales. Au nord du passage, il gravit la Cuesta de los Raulies, dominée par le mont Perez Rosales (2850 m.) situé au sud.

Pour arriver au Tronador, il suivit le cours du rio Peulla jusqu’à la confluence de ses trois bras, dont l’un vient de la gorge du Boquete Perez Rosales, et les deux autres naissent des glaciers du Tronador. Il pénétra par le revers d’une moraine encore active du glacier actuel. Puis, il atteignit le lac Todos los Santos, et, de là, il revint à Nahuel-Huapi.

Le 3 avril, suivant les instructions que je lui avais laissées, il se dirigea au sud du lac, sur les hauts coteaux, à l’ouest du chemin général qui aboutit à la vallée 16 de Octubre, près de la région du Corral de Foyel. Par un ancien sentier, il traversa de nouveau le rio Curruleufu qu’il remonta jusqu’à ses deux principaux affluents (1260 m.), en suivant celui de l’ouest qui naît dans une vallée de deux kilomètres de largeur. Le Curruleufu reçoit un affluent du mont au nord, et sur le côté ouest, le rio Manso prend ses sources à 1280 mètres de hauteur.

D’un sommet voisin du rio Manso, au sud, et à une hauteur de 1500 mètres, l’explorateur reconnut que ce fleuve va de l’est à l’ouest, en s’inclinant un peu au sud ; son principal affluent naît du mont Tristeza. À l’ouest, à une distance de cinquante à soixante-quinze kilomètres, on distinguait des cordillères élevées et couvertes de neige, continuation du chaînon neigeux situé à l’ouest de la grande vallée et qu’on aperçoit du mont Catedral. Il reconnut ensuite l’affluent est du rio Curruleufu, et il fit l’ascension d’une cime (1840 m.), d’où il prit des visées, à l’aide desquelles il rattacha à ses observations le mont Carmen, visible au nord ; mais il ne put rien distinguer à l’ouest, car l’horizon était fermé par les montagnes qui donnent naissance au rio Curruleufu.

Au sud, il remarqua une grande dépression qu’il jugea être le lit d’un affluent du Manso.

Les tourmentes d’eau et de neige ayant redoublé par suite de la saison avancée (7 mai), Schiörbeck entreprit son voyage de retour à Roca, en suivant la charrière qui, de Nahuel-Huapi, passe par le Cañadon Cumayen, et monte à celui de Pilcangeyu. Il passa le défilé entre les deux cañadones ; il suivit le premier dans tous ses détours, d’abord dans la direction de l’est, puis au nord-est, et enfin au nord-nord-est, jusqu’à arriver, après 55 kilomètres de parcours, au rio Limay ; il traversa plusieurs autres dépressions, entre autres celles de Cuy, laquelle, d’après les indiens, ne se termine qu’à l’Atlantique.

Le 12 juin, il arriva au fort General Roca.

Le 29 février, Frey quitta le campement de la colonie et suivit le chemin général de Lelej ; en recherchant ensuite à l’ouest les monts de Cholila, il traversa le parage appelé « La Puerta » par où court un ruisseau qui, avant de s’unir au Lelej, forme une petite lagune jusqu’au point où les eaux du rio Chubut se séparent de celles du Fta-Leufu. De là, s’étendait au nord la grande plaine ; au sud-sud-est, on apercevait une vallée en partie marécageuse, limitée à l’est par les monts de Lelej et Esguel, et circonscrite au couchant par des coteaux de 200 à 400 mètres de hauteur ; arrivé au sommet de ces derniers, Frey aperçut à l’ouest un des lacs de Cholila et au sud-ouest un autre lac de plus grande dimension, et plus loin encore, à la ligne occidentale de l’horizon, les monts de Cholila couverts d’une faible couche de neige.

Pour arriver à ces lacs, dont il n’a pu observer l’embouchure, il passa par la confluence de deux rivières qui naissent dans les monts de Cholila et qui coulent au Fta-Leufu par un cañadon s’ouvrant au sud. Ne pouvant atteindre la rive sud du lac le plus éloigné par suite de l’épaisseur de la forêt, il arriva au Fta-Leufu qui, à ce point, a environ quarante mètres de largeur et coule tranquille et profond.

En remontant son cours dans la direction de l’ouest, il trouva un troisième lac de plus de quinze kilomètres de long sur trois environ de large, qui va de l’ouest à l’est, et d’où sort le Fta-Leufu : c’est le lac Cholila. Dans le fond, une chaîne, dont les sommets présentent une couche de neige d’une certaine épaisseur, se dirige au sud où elle paraît liée au mont Tres Picos et terminée par le Puntiagudo, tandis que les monts de Cholila la limitent au nord. Le fleuve est guéable un peu avant sa confluence avec l’arroyo Cholila, son tributaire, qui reçoit à son tour un cours d’eau de l’est, donnant issue aux eaux d’un quatrième lac, le Misterioso, alimenté par l’eau que condensent des sommets neigeux.

Frey arriva ainsi au plus considérable des cinq lacs observés, et dont l’axe principal va du nord au sud. De là, en suivant les monts de Cholila, et s’élevant toujours davantage jusqu’au point où ceux-ci prennent la direction de l’ouest, il atteignit l’arroyo Epuyen. Ce cours d’eau a sa source dans un sixième lac de dix kilomètres de long, alimenté par les eaux qui descendent des monts de Cholila et de Pirque. S’ouvrant un chemin par le versant des monts, Frey pénétra dans la vallée formée par cette rivière, s’étendant dans la direction de l’ouest, et où il se trouve un établissement.

En suivant cette rivière, il arriva à son embouchure dans le lac Puelo. Il ne put, à cause des forêts impénétrables et des marécages, parcourir les côtés du lac, et se contenta de les observer depuis une hauteur. Il nota au sud les sommets neigeux de Tres Picos que le docteur Steffen, dans sa carte, appelle « Cerro de los Castillos ». Cette montagne est séparée de la chaîne neigeuse qui se prolonge au nord par une rivière qui vient du sud et qui s’incorpore au lac Puelo. Cette chaîne est aussi coupée par le Rio Puelo, déversoir du lac du même nom, lequel, dans la partie aperçue par Frey, s’étend d’environ quinze kilomètres du nord au sud, formant au nord deux échancrures entre lesquelles s’élève la colline Curamahuida ; dans celle de l’est, se déverse l’Epuyen, et, dans celle de l’ouest, une autre rivière qui descend du nord. Au nord s’élève le Cerro Pilquitron, continuation des hauteurs qui se prolongent depuis le Nahuel-Huapi ; du Pilquitron au sud continue une chaîne jusqu’à la montagne située en face de l’estancia Maiten.

En suivant la vallée, entre les deux montagnes, Frey se dirigea au nord afin de rattacher le Tronador à la zone de ses observations. Dans la vallée, il traversa des cours d’eau qui descendaient des deux montagnes, et qui, réunis en deux rivières, se déversent dans le second bras du lac Puelo. La rivière formée par les eaux de la chaîne de l’est arrose des terres fertiles et propres à l’élevage. Celle de l’ouest, alimentée de même par les eaux de cette direction, prend sa source dans un glacier de la Cordillère neigeuse.

Gravissant une haute colline qu’il appella « Los Baguales », il aperçut le panorama qui se déroulait au nord : en face, une montagne à forme pyramidale ; à gauche et un peu plus au nord, les divers pics du cerro Valverde ; entre celui-là et la Cordillère neigeuse de l’occident, une rivière qui coule à l’ouest, formée de deux affluents principaux qui descendent, l’un entre le cerro Piramide et Los Baguales, en longeant la chaîne de l’est, et l’autre, plus considérable, qui court au nord-ouest entre les pics du Piramide et du Valverde. La première des deux rivières reçoit toutes ses eaux de l’ouest, lesquelles en partie procèdent d’un nouveau bassin lacustre, le lac Escondido, qui s’étend apparemment de l’est à l’ouest, sur un axe de dix kilomètres et à l’extrémité duquel s’élève une montagne caractéristique avec deux pics. Ce lac paraissait avoir en cet endroit un bras dirigé vers le sud.

La vallée entre le cerro Valverde et la Cordillère de l’ouest est assez large, mais couverte de bois épais ; elle s’ouvre à l’ouest et il est probable qu’on puisse arriver par elle au Nahuel-Huapi. Dix kilomètres plus au nord, Frey découvrit les vestiges d’une localité indigène, connue sous le nom de Corral de Foyel, où le cacique réalisait autrefois ses fameuses chasses aux exemplaires de l’espéce bovine dénommés baguales. Il revint ensuite à son campement général d’où il se rendit au gué de Maiten, au nord du Piltriquitron, par le cours d’eau qui descend de la montagne de l’est. Ses sources sont situées quelque peu au nord dans le versant oriental de la même montagne. Il alla reconnaître ensuite l’origine du rio Chubut à soixante kilomètres de l’estancia Maiten.

Du haut d’une élévation, il vit que ce fleuve est formé de deux cours d’eau qui descendent de la montagne, en recueillant l’apport liquide de divers tributaires, parmi lesquels un de l’ouest qui parcourt toute la pampa de Maiten, et naît dans les montagnes au nord de l’estancia. Il visita au sud la pampa, en passant par le promontoire de Caquel-Huincul, et revenant à l’estancia Lelej, il traversa des affluents occidentaux du Chubut jusqu’au cerro Urahué à Fofocahuallo, où le fleuve tourne au sud et reçoit le Pichileufu et le Mayuleufu. Il suivit au nord jusqu’au lac Nahuel-Huapi par le chemin occidental le plus court. De là, il se dirigea lentement à Machinchau et à Roca où il arriva le 10 juin.

Considérant nécessaire ma présence à Buenos Aires, et satisfait de la manière dont s’effectuaient les reconnaissances que j’avais confiées à mes infatigables collaborateurs, je résolus de m’embarquer sur le lac dans la barque de MM. Wiederholtz pour me diriger à Puerto Montt et de là à Buenos Aires.

Le 17, à l’aube, nous commençâmes notre navigation qui ne prit fin qu’à Puerto Blest, où nous n’arrivâmes qu’à 10 heures du soir, heures sereines inoubliables, de même que le spectacle des grandes échancrures boisées, des îles pittoresques et du fjörd imposant aux parois granitiques presqu’à pic de mille mètres de haut, à l’extrémité duquel est situé ce port qui, dans un avenir prochain, sera mis à contribution par le commerce qui utilisera la nouvelle voie de communication entre Puerto Montt et Puerto San Antonio, et sera fréquenté par les touristes qui jouiront des panoramas merveilleux et variés de cette région. Après avoir passé le petit défilé qui sépare le lac de la vallée du Peulla, qui est boisée, marécageuse et escarpée au couchant, je me trouvai sur territoire chilien. Dans la vallée, M. Wiederholtz a construit des dépôts pour faciliter le transport des marchandises à Casa Pangue, d’où l’on peut visiter avec commodité les superbes glaciers du Tronador qui arrivent jusqu’au lit du Peulla. Je fis cette excursion avec un véritable plaisir.

Le 20, je dormis sur la rive du lac Todos los Santos (planche XXX. fig. 2), et j’eus la chance d’obtenir une embarcation pour le traverser le jour suivant, passant pendant la nuit et malgré la pluie torrentielle, au milieu des laves et des cendres de l’Osorno et du Calbuco, les deux magnifiques volcans qui dominent le chemin, jusqu’à ce qu’enfin je trouvai une couche abritée sur les bords du lac Llanquihué. Par des sentiers pittoresques, puis par une belle charrière qui dessert les colonies allemandes établies sur la rive sud du lac, j’arrivai à Puerto Varus d’où, dans une voiture commode, je me rendis à la ville de Puerto Montt, où prenait fin, le 22 à minuit, ma marche ininterrompue depuis San Rafael.

Je revenais satisfait des résultats obtenus, dont je vais établir la synthèse en terminant ces notes, après avoir décrit les travaux de Soot, Zwilgmeyer et Heuthal, laissant pour une autre fois ceux de Roth, réalisés avec d’excellents résultats entre Roca et Nahuel-Huapi et ceux de Morétaeu, qui s’était dédié à l’étude géologique de la région de la Vallée 16 de Octubre, comprise entre la caverne du cerro Situacion et la laguna Cronómetro.

Soot entreprit son voyage en compagnie de Hauthal, depuis le chemin que suit le rio Caleufu jusqu’un peu plus au sud de la rivière Quemquemtreu, en traversant des cañadones tapissés d’herbe tendre, tandis que sur les plateaux voisins, la végétation se compose de graminées dures.

À la confluence de la rivière Chilchiuma, il gravit au nord-ouest un mont de 2000 mètres, qui est situé au sud de la chaîne de Chapelco, et duquel on apercevait au sud les montagnes jusqu’au lac Traful et au nord-ouest jusqu’au Pillan et une partie du Chapelco qui fournit des eaux aux rivières Quemquemtreu, Chilchiuma et Chichahuay. Sur les plateaux de l’est, il observa de petites lagunes. En suivant le rio, il trouva, à douze kilomètres du lac Filohuehen, un autre bassin lacustre plus étendu qui n’était pas connu et auquel il donna le nom de lac Falkner. Ne pouvant l’explorer entièrement par voie terrestre, il construisit un radeau, et en mettant alternativement à contribution ces deux modes de locomotion, il put arriver jusqu’à son extrémité où se déverse une rivière d’un kilomètre qui donne issue aux eaux d’un autre lac situé plus à l’ouest, également nouveau pour la géographie, qu’il baptisa du nom du pilote Villarino. Ces lacs sont extrêmement pittoresques, comme on peut en avoir une faible idée avec le paysage du lac Villarino, reproduit sur la planche XXXIII.

Gravissant une colline, Soot observa qu’à quelques dix kilomètres à l’ouest de ce dernier lac s’élevaient de hauts sommets neigeux, lesquels, d’après lui, doivent former la division des eaux de la Cordillère. Il remarqua aussi qu’à l’extrémité du premier lac s’étend une gorge assez large, faiblement inclinée dans la direction nord-ouest. Il est à supposer que c’est dans cette dépression que s’effectue la réunion des eaux des lacs situés à l’ouest du lac Metiquina. Ensuite, il se dirigea par la gorge du rio Traful au lac du même nom (planche IX, fig. 3). Ne pouvant suivre ses rives par terre, il construisit un radeau, et avec Hauthal il navigua jusqu’à son extrémité par le bras nord (pl. XXXIV). Sur la rive sud de ce dernier, ils gravirent une montagne élevée de 800 mètres au-dessus du niveau du lac, découvrant de son sommet, au nord, le Pillan ; au sud, le Pantoja ; à l’ouest, les cerros Cuervo, Puntiagudo, etc., et les sommets neigeux qui, depuis ces derniers, s’étendent jusqu’au Puyehué-Falso ; le tout présentait un ensemble de sommets escarpés avec de nombreuses gorges ; au nord, on apercevait un lac.

Profitant d’un fort vent de l’ouest et utilisant la tente en guise de voile, ils revinrent au Traful. Ce lac est très profond et entouré de hauteurs considérables, couvertes d’épaisses forêts ; la température de ses eaux est de douze à treize degrés centigrades. Ses bois pourraient être amenés par eau à des endroits habités.

Soot démontra que la carte de l’explorateur Fischer est, en grande partie, erronée, surtout en ce qui concerne les issues des lacs Traful et Filohuehuen ; quant au lac Manzana, il n’existe pas.

À peu de distance du point où le rio Traful s’incorpore au Limay, le premier de ces cours d’eau reçoit du sud-ouest une rivière volumineuse : c’est l’arroyo Cuyé-Manzana.

Le voyageur traversa ensuite les collines pour arriver au Caleufu et à la vallée de Maipu, et, de la, à Junin de los Andes, en route pour le lac Huechu-Lafquen. Son itinéraire passe ensuite par les cerros de la Virgen et de Malal-Cahuallo, et, par le Malleu, il arriva à la lagune du Tromen où, sur le chemin qui va au Chili, à une distance d’environ sept kilomètres, il trouva les sources de deux rivières qui se dirigent, l’une à la lagune du Tromen, et l’autre à l’ouest pour s’incorporer à une autre lagune qui se déverse à l’ouest. Ces sources ne sont qu’à vingt ou trente mètres au-dessus du niveau des lagunes mentionnées.

La lagune du Tromen sur ses côtés nord et nord-ouest est entourée de montagnes élevées, à pic, couronnées de pointes aiguës.

Soot arriva, le 13 mai, à l’estancia Ahlenfeld, sur le Collon-Cura, qu’il traversa en ce point, continuant sa marche vers le nord, jusqu’à la descente du rio Catalin par le grand plateau et jusqu’au fortin du même nom, plateau limité à l’ouest par le cerro Euquen d’où naissent les rivières Pilchumen et Piño qui se déversent dans le Catalin. Il remarqua que ce fleuve coule jusqu’à ce point dans une vallée limitée, à l’ouest, par le plateau mentionné, et, à l’est, par l’ensemble des monts Javatacan, Corral de Piedra, Charavilla, Chalorico et Moicalan.

Depuis la rivière Piño, il remonta le Catalin jusqu’à ses sources sur les versants du cerro Chiachil ou Chaschuil qui, plus au sud, prend le nom de Jacatan jusqu’à son union avec le cerro Euquen qui s’élève peu à peu jusqu’à la confluence de l’Aluminé et du Catalin, formant ainsi une chaîne du sud au nord entre les deux fleuves, dont le point culminant est la cime du Chaschuil.

Il établit une station topographique sur le cerro Janiculo à l’est du rio Catalin, et ayant pénétré par les gorges Lapa et Honda, il descendit la rivière Picunleufu qui naît du Chachil. Il traversa cette rivière ainsi que celle de Ñireco, côtoya la petite lagune Blanca, et, dans la direction de Codihué, campa prés de la rivière Carreri qui naît au nord de Chaschuil. Il traversa ensuite Llamuco, laissant à l’ouest le cerro Palomahuida, continuation de Chaschuil au nord, pour arriver à Codihué, d’où, le 26 juin, il retourna à La Plata par le chemin de Roca.

Zwilgmeyer se dirigea du lac Lacar au cerro de Chapelco, en passant par le défilé Pil-Pil (1150 m.), d’où sort la rivière du même nom qui se jette dans le lac Lacar. À cinq kilomètres plus au sud-est, il traversa la rivière Chamanico qui naît dans l’intérieur du massif et dont les eaux vont au lac Metiquina auquel donne issue le rio Caleufu. Arrivé à la confluence de ce fleuve, il reconnut les affluents du lac, et remonta le rio Chilchiuma jusqu’à ses sources, et d’un sommet voisin (2100 mètres), prolongation du Chapelco, il aperçut le Caleufu, le Collon-Cura et le Quemquemtreu jusqu’aux fumées de Junin. Il reconnut qu’entre le Chapelco et le Collon-Cura il n’y a que des collines peu élevées. Il suivit ensuite le lit de la rivière Manzano jusqu’au Caleufu, en remontant le fleuve Metiquina, et il atteignit le lac du même nom dont il détermina la latitude par 40° 19′ 3″. Il longea son affluent le plus important qui descend de l’ouest et arriva ainsi au lac Machonico ; dans le voisinage de ce dernier, il put, du haut d’un sommet de 2060 mètres d’altitude, établir une station azimutale avec le mont Pillan. Grâce à la vue étendue dont il jouissait de là, il put observer que le Chapelco s’élève isolément, séparé de la Cordillère par les vallées de Pil-Pil et Metiquina. Les hauteurs comprises entre le lac Lacar et la vallée de Machonico sont assez élevées aux abords de ce point d’observation.

Ayant observé que dans le lac Machonico se jette une autre rivière, déversoir d’un second lac, il essaya de l’explorer sur un radeau improvisé, mais il ne put y naviguer à cause de la violence du vent ; il ne réussit, en passant au travers du bois, qu’à arriver jusqu’au fond du lac où se déverse une rivière descendant de l’ouest, probablement du mont Queñi. Il remarqua à l’ouest un troisième lac, et put arriver jusque sur ses bords ; mais comme il supposa qu’il s’agissait du lac Filohuehuen, que devait étudier Soot, il retourna sur ses pas pour arriver, le 23 mars, à Maipu, d’où il devait étudier la chaîne d’Ipela. Il visita Trompul, le lac Lacar (planche XXXV), Camalalhué, Quetchuquina, Huahuma, traversant des étendues fertiles jusqu’à son arrivée par le nord à Ipela.

En montant jusqu’au défilé, il reconnut la petite lagune Neufilieu et le campement Noalac à 1400 mètres, situé au 40° 9′ 8″ de latitude ; il fit l’ascension d’une cime voisine d’une altitude de 1970 mètres, d’où il put photographier la Cordillère d’Ipela (2100 m.) qui s’élève de l’autre côté de la vallée, située à l’ouest du défilé, et dans laquelle naît le rio Ipela (planche XXXVI).

Cette chaine s’unit à l’est au mont Queñi, et au sud à des monts atteignant 2200 mètres de hauteur. Le passage Ipela a 1470 mètres d’altitude. Au nord de la même chaîne, il remarqua des sommets recouverts de neige comme le Riñihué et qui paraissent être liés à la Cordillère d’Ipela.

Le 6 avril, il entreprit un voyage à la lagune Lolog, par un sentier qui traverse le mont Trompul, et arrivé au but de son excursion, il détermina la situation en latitude de la lagune qui est de 40° 1′ 6″. Il arriva au rio Anquilco, en continuant son chemin au nord de la lagune, par une vallée qui va au nord-ouest, et atteignit les sources de ce fleuve, qui se trouvent au nord de Lolog dans des montagnes de 2100 mètres de hauteur. Il suivit une chaîne assez élevée jusqu’à Huahuma, séparée par ce fleuve de la chaîne d’Ipela.

Par suite de l’inclémence de la saison, il dut retourner à Junin d’où il fit une excursion à la lagune Carhué (1030 m.) dont les eaux descendent des monts situés entre Lolog et Huechu-Lafquen. En compagnie de Wolff, il alla reconnaître le lac Huechu-Lafquen, dont il étudia la rive sud. À vingt-cinq kilomètres de l’embouchure, le lac se divise en deux bras. Il suivit jusqu’au bout celui de l’ouest, en traversant des étendues couvertes de scories provenant d’anciens volcans.

Les chaînes qui divisent les eaux dans le fond de Huechu-Lafquen sont basses. Les montagnes, d’une élévation plus considérable, le Pillan et ceux du sud de Huechu-Lafquen, sont situés à quinze kilomètres plus à l’est que l’extrémité ouest de la lagune ; mais, quelques lieues plus à l’ouest, il remarqua de hauts sommets neigeux parmi lesquels il crut distinguer le Quetropillan. De retour à Junin, il mit en relation par une station azimutale le cerro de la Virgen avec les monts de Pillan et du Perro, retournant à San Rafael, qui avait été son point de départ, où il arriva le 19 juin.

Le rapport de Hauthal embrasse différents thèmes qu’il serait difficile de résumer rapidement, et je n’en donnerai que quelques fragments.

Sur la géographie et l’orographie de la région comprise entre le volcan Lanin et la lagune Traful, j’en fais l’extrait suivant : Il parvint jusqu’à la cime du majestueux Lanin, pic si caractéristique et si beau, du sommet duquel la vue compensait avec usure les difficultés et les fatigues de l’ascension (planche XXXVII). Comme un immense parb s’étendait à ses pieds cette partie du Neuquen qui, par ses beautés naturelles, peut figurer parmi les paysages les plus pittoresques du monde.

Il serait trop long de décrire tous les détails qu’offrait à la vue de l’explorateur ce beau panorama. L’aspect de cet ensemble montagneux sollicitait son attention : des chaînons plus ou moins étendus, interrompus çà et là par des dépressions dont le fond est généralement occupé par des lagunes, et qui sont dominées par des monts élevés et couverts de neige, comme Polcura, Villarica, Lanin et d’autres, ou par des massifs neigeux comme celui de Zollipuli, si l’on prend ce dernier comme massif dans le sens orographique.

De la même cime, Hauthal observa que si le côté ouest est couvert de montagnes, celui de l’est est à peine accidenté ; au lieu des gorges continues en zigzag de la partie occidentale, les lignes faiblement ondulées y prédominent. Il effectua l’ascension du Lanin, volcan éteint et formé d’andésite, de tufs et de laves andésitiques, d’où l’on domine le vaste horizon ; il s’y trouve quelques accumulations assez considérables de pierre ponce. À l’ouest du volcan, s’étend un chainon granitique qui continue au nord et où s’élèvent des pics d’une certaine hauteur et de formes caractéristiques. Ce chaînon forme une partie du grand massif granitique qui, dans cette région, constitue pour ainsi dire le noyau du système de la Cordillère, couverte en partie par des détritus néovolcaniques formant en divers endroits de vrais pics élevés, comme à Lolog et Malalco, et s’accumulant en énorme quantité, surtout au-dessus du chaînon granitique, sans y former pourtant une couche continue, car parfois les pics granitiques émergent, et parfois les couches, travaillées et détruites par les éléments atmosphériques, se soulèvent en forme de monts et de pics. C’est une des raisons pour lesquelles l’ouest du Lanin présente cet aspect continu de gorges abruptes ; de plus, il faut ajouter que, dans cette même direction, le relief du sol est également formé par les volcans Villarica et le Lanin même, entre lesquels s’élève le Quetropillan, et par les massifs volcaniques, comme celui du Zollipulli.

À l’est du Lanin, son attention fut attirée par le fait suivant : à une distance de dix à vingt kilomètres du chaînon granitique déjà mentionné, au nord et au sud des cours d’eau, se trouvaient des élévations assez considérables, suivant la direction de nord-ouest à sud-est, et qui pourraient plutôt être considérées comme de courts chaînons.

Cette étude intéressante ne put être continuée par suite du manque de cartes ; mais, en revanche, Hauthal put effectuer des observations non moins intéressantes sur le glacier du Lanin (planches XXXVIII et XXXIX).

À la base de ces petits chaînons et de ces montagnes se présentent plus à l’est des plateaux formés par des débris volcaniques, des tufs surtout, et qui s’étendent horizontalement, avec une faible inclinaison vers l’est. Les eaux y ont exercé leur action, et se sont creusé des gorges profondes ; ces plateaux sont parfois couronnés par des sommités isolées, comme celle du Perro, près de Junin de los Andes. Au loin, à l’est, les plateaux s’abaissent graduellement et doucement jusqu’à la Pampa, de manière qu’on pourrait sans beaucoup de peine voyager en voiture de Roca à Junin.

De la cime du Lanin, Hauthal reconnut également le caractère orographique atlantique, caractérisé par de grands plateaux un peu inclinés vers l’est, et, à ce point de vue, le Lanin est un point extrêmement intéressant, par suite du vaste panorama qu’on découvre depuis son sommet.

À la base et vers le sud de ce volcan, s’étend le lac Huechu-Lafquen, dont il put examiner la section orientale ; il y remarqua, dans la partie inférieure, que le granit forme la base des hauteurs voisines, recouvert à son tour par des couches de tuf.

La région qui s’étend entre ce lac et le Lolog peut être considérée comme excellente pour le pâturage ; çà et la, elle est entrecoupée par de luxuriants bouquets de pommiers. Dans quelques endroits abrités de ces étendues fertiles, on cultive aussi le blé avec des résultats satisfaisants ; mais, en général, les gelées et les froids intenses qui surviennent jusqu’en janvier et février ne permettent pas la culture de cette céréale, du moins la moisson n’y est pas assurée ; on devra donc préférer, pour les futurs colons, les semailles de céréales et de plantes similaires à celles qui sont cultivées dans les contrées boréales de l’Europe. La vallée de Maipu, très rapprochée de celle de Lolog, mais moins élevée et mieux abritée, se prête davantage à l’agriculture et à l’élevage.

En poursuivant son voyage, par la rive nord du lac Lolog, Hauthal trouva du gneiss orienté du nord au sud ; cependant, la roche prédominante est toujours le granit ; le gneiss reparait dans la région du lac Lacar, d’où le voyageur poursuivit sa route au sud. Accompagné par Soot, il examina le lac Metiquina, dans les environs duquel il trouva de nouveau le granit comme roche prédominante et du porphyre dans le voisinage de la rive du lac.

La lac Metiquina est situé à une altitude plus considérable que le Lacar, et il est aussi plus large ; il est entouré de montagnes moins escarpées et moins élevées que le précédent, et la région environnante est plus gaie et plus ouverte ; on y reconnaît aisément sur tous les rochers de la côte occidentale les marques laissées par les glaciers : stries, roches disloquées, etc., tandis que du côté oriental de grandes moraines constituent les vestiges actuels de ces phénomènes antérieurs.

De là, il poursuivit son voyage vers le lac Filohuehuen, après m’avoir rencontré sur le Caleufu.

Il remarqua que la vallée du Caleufu, très fertile dans sa partie inférieure, est pierreuse dans la section supérieure, où la rivière coule parfois profondément encaissée.

Entre le lac Filohuehuen et le Caleufu, il trouva de grandes moraines semblables à celles qu’il avait observées entre ce cours d’eau et le lac Metiquina.

Le lac Filohuehuen est situé dans une dépression très allongée, occupée par trois réceptacles lacustres (y compris le Filohuehuen), qui constituent une ligne interrompue par des champs fertiles et recouverts d’herbages. Entre le Filohuehuen et le troisième lac, égal en dimension au premier, s’étendent quinze kilomètres de plaine, ondulée seulement sur quelques points par des moraines, et où l’agriculture obtiendrait des résultats plus satisfaisants que dans la vallée de Malleu, par exemple, plus élevée et moins abritée. Le lac intermédiaire entre les deux mentionnés est plus petit, arrondi et très rapproché du troisième en amont. En longeant ce dernier jusqu’à son extrémité, il trouva, deux kilomètres plus loin, un quatrième lac de forme oblongue, médiocrement large, et entouré par des montagnes élevées, mais non neigeuses : les cimes blanchies sont situées plus à l’ouest de ce point. On trouve également, entre ce quatrième et le troisième lac, une plaine herbeuse, et, à gauche, une coupure large, fertile et peu boisée ; en revanche, les versants des montagnes sont recouverts d’épaisse forêt.

Le terrain relativement si déboisé donne à supposer, d’après Hauthal, que cette coupure ou vallée a été occupée antérieurement par des colons qui mirent le feu aux arbres et semèrent des céréales ; il ne saurait expliquer autrement la pauvreté d’essences forestières, ainsi que les vestiges de chemin qui se dirige probablement au nord ; néanmoins, un chilien qui habite sur les bords du lac Filohuehuen lui affirma que « jamais un chrétien n’avait pénétré là ».

Il visita ensuite le lac Traful, joyau enchâssé au milieu des bois touffus et semé d’îlots qui lui communiquent un aspect enchanteur (planche XL). La vallée du cours supérieur du rio Traful est infiniment plus fertile que la vallée du Caleufu.

Les hauteurs qui entourent ce système lacustre sont formées de granit blanc avec de l’hornblende, soit le même granit que l’on trouve plus au sud.

Ces hauteurs granitiques ont une altitude assez considérable surtout la montagne située immédiatement à l’ouest du bras nord du lac Traful, bras qu’il navigua en compagnie de Soot. Elles sont en partie recouvertes de tuf et de lapillé, ce qui donne au géologue l’impression que cette région a subi, à une époque récente, l’action de grandes éruptions volcaniques.




  1. Expedición exploradora del Rio Palena. Santiago, 1895.