Rational (Durand de Mende)/Volume 5/Huitième livre/Chapitre 09

Traduction par Charles Barthélemy.
Louis Vivès (volume 5p. 189-191).


CHAPITRE IX.
DE L’ÉPACTE.


I. Suit : De l’Epacte. L’épacte est un nombre variable donné à l’année pour trouver la lune dans les calendes de chaque mois ; et on dit épacte de epi, sur, et aucta, augmentée, parce que c’est une augmentation de l’année lunaire, fournie par l’excédant de l’année solaire. Et c’est pour cela que la première année du cycle lunaire n’a pas d’épacte, parce qu’il n’y avait pas d’année précédente d’où elle pût tirer le nombre onze. La seconde année a onze pour épacte, parce que l’épacte vient des onze jours dont l’année solaire dépasse l’année lunaire. La troisième année a vingt-deux jours, parce qu’on ajoute toujours onze jours, s’ils ne dépassent pas trente ; mais s’ils dépassent trente, c’est l’excédant de trente qui sera l’épacte de cette année. C’est pour cela que, dans la quatrième année, comme la somme (de onze) s’élève à trente-trois, on néglige le nombre trente, et c’est l’excédant trois qui est le jour de l’épacte. Le mot grec épacte se dit en latin additions lunaires annuelles qui, par le nombre onze, roulent sur elles-mêmes jusqu’au nombre trente. Les Egyptiens font ces additions, afin que la mesure lunaire devienne égale à celle du soleil ; car la lune fait sa révolution dans l’espace de vingt-neuf jours et demi, temps où elle nous donne sa lumière ; ce qui fait que l’année lunaire a trois cent cinquante-quatre jours ; restent en surplus, pour le cours de l’année solaire, onze jours, que les Egyptiens ajoutent à l’année lunaire. Sans cela tu ne pourras trouver le quantième de la lune dans l’année, le mois, le jour. Les épactes de toutes les années du cycle lunaire sont indiquées par la table suivante, de telle sorte que le mot nulla, aucune, qui indique l’absence de l’épacte, correspond à la première année, et chaque année suivante répond à chaque année du cycle, jusqu’à vingt-neuf. Sic : nulla, xi. xxii. iii. xiv. xxv. vi. xvii. ix. xxi. xii. xiii. v. xvi. xxviii. xix. xxx.

II. C’est ce qu’indiquent encore les vers suivants :

Annis adde nonos Domini ; partire per unde
Viginti lunœ cyclis, et inde patet ;


ce qui signifie que si nous voulons savoir le quantième de l’année épactale ou du cycle, nous devons diviser les années du Seigneur par dix-neuf, autant de fois que nous le pouvons, et ajouter un, parce que, quand le Christ naquit, ce cycle seulement avait paru (il n’y avait que ce cycle qui eût paru), et la somme qui restera sera l’année du cycle épactal ; par exemple, nous sommes en l’année du Seigneur mil deux cent quatre-vingt-six, dont mil deux cent soixante-treize sont exactement divisés par dix-neuf ; reste treize sur le nombre précité ; ajoutons un, nous avons quatorze ; d’où cette année est la quatorzième année du cycle lunaire ; l’année suivante sera la quinzième, et ainsi jusqu’à dix-neuf. Ensuite on revient à un ; et cela est vrai, d’après ceux qui commencent à supputer les années du Seigneur depuis la nativité du Christ, ou aux calendes de janvier, mais non pour ceux qui les changent ou les comptent dans les calendes de septembre, et y font la division ; car alors il faut ajouter deux années.

III. On peut encore trouver l’épacte d’une autre manière. On compte, au moyen des trois articulations du pouce, la somme qui reste de la division précitée. Si le nombre se termine à la première jointure, on doit retrancher un du nombre lui-même ; si c’est à la seconde, on doit ajouter neuf ; si c’est à la troisième, on doit ajouter dix-neuf, et la somme provenant de ces nombres est l’épacte, si elle ne dépasse pas trente ; sinon, on néglige les trente, et le reste est l’épacte ; d’où ce vers :

Deme unum, post adde novem ; post dena novemque.
Retranche un, puis ajoute neuf ; ensuite dix-neuf.

Quand l’épacte est trouvée, nous devons la réunir aux nombres réguliers du mois dont nous voulons trouver la lune, et la somme qui en proviendra sera la lune ou le quantième de la lune dans les calendes de ce mois, pourvu qu’elle ne dépasse pas trente ; si elle dépasse trente, l’excédant de trente sera l’âge de la lune ; et si la somme est trente dans les calendes du mois, trente sera l’âge de la lune. S’il n’y a pas d’épacte, par exemple dans la première année du cycle lunaire ; pour trouver la lune, le nombre régulier suffit ; mais comme le système épactal trompe quelquefois, à cause de l’embolisme ou saut de la lune, c’est pourquoi parlons brièvement de l’embolisme.