Rational (Durand de Mende)/Volume 2/Cinquième livre/Chapitre 06

Traduction par Charles Barthélemy.
Louis Vivès (volume 3p. 112-114).


CHAPITRE VI.
DE TIERCE.


I. A l’heure de tierce, nous adressons des louanges à Dieu parce qu’à cette heure, d’après saint Marc, Jésus fut condamné à mort par les cris des Juifs, puis attaché par Pilate à la colonne et flagellé. C’est donc avec raison que nous prions à cett heure, afin que, comme le Saint-Esprit a été séparé d’Adam par les suggestions du diable, ainsi il daigne à la même heure se répandre dans nos cœurs par la vertu du crucifiement du Christ. Ce fut encore à cette même heure que le Saint-Esprit, promis aux apôtres, leur fut conféré, et qu’ils parlaient ouver tement des grandeurs de Dieu. C’est pourquoi on disait d’eux, comme on le voit dans les Actes des apôtres : « Ces gens-là ne sont-ils pas ivres ? » C’est pour cela que, lorsque l’heure de tierce est arrivée, on dit l’hymne Nunc sancte nobis Spiritus ; on dit aussi le psaume Legem pone, parce que c’est alors que la loi nouvelle a été donnée aux apôtres ; mais comme l’homme, par la loi de Dieu, est guéri de la maladie du péché, d’après ces paroles de la Sagesse : « Ni les herbes, ni les cataplasmes ne les guérissaient, mais seulement tes paroles, Seigneur, etc., » c’est pour cela que dans certaines églises on dit ce capitule : Sana me, Domine, etc., « Guéris-moi, Seigneur, etc. » (Hiero, c. xvii), et le répons Sana animam meam, etc., « Guéris mon ame, etc. » On dit aussi quelquefois : Charitas Dei diffusa est (Rom., c. v), et quelquefois celui-ci : Obsecro vos fratres, per misericordiam Dei (Rom., c. xii) ; et comme l’ame ne peut être guérie si elle n’est conservée, c’est pourquoi suit le verset Adjutor meus esto, etc., comme si l’on disait : « Quoique j’aie été établi dans un état de liberté et de santé dans ta voie, cependant je ne suis pas capable, sans ton aide, d’arriver à ce midi dont il est dit : « Indique-moi le lieu où tu te repais et où tu te reposes à l’heure de midi. » C’est pourquoi l’on dit : « Seigneur, sois mon aide et ma protection. » Et on ajoute : « Ne m’abandonne pas, » c’est-à-dire ne laisse pas mon entreprise imparfaite, parce que sans toi mes efforts ne sont rien ; ne me regarde pas d’en haut, c’est-à-dire ne me méprise point à cause de ce que moi, qui ne suis qu’un faible » mortel, j’ose te rechercher, toi l’Eternel, parce que tu es mon Dieu, qui m’as créé, et mon Sauveur, qui m’as réparé, c’est-à-dire, toi qui guéris les plaies que fait le péché. Ensuite tous se prosternent pour la prière, et le prêtre poursuit le mode d’oraison qu’indique l’Apôtre, en disant : « Avant toutes choses, que l’on fasse des supplications, des prières, des vœux et des actions de grâces pour tous les hommes et pour ceux qui sont élevés en dignité. »

II. Les supplications se font avec adjuration (serment), pour éloigner le mal ; la prière se fait pour obtenir le bien ou pour vaincre le mal ; les vœux, pour acquérir ou pour accumuler le bien ; les actions de grâces, pour conserver le bien déjà conféré. La supplication se trouve ici : Ego dixi, Domine, etc., où l’on demande à être guéri de ses blessures et à recevoir un remède. Voici la prière : Fiat misericordia tua, Domine, ou ceci : Ostende nobis, Domine, etc. Les vœux sont : Convertere, Domine, usquequo, où nous demandons à être délivrés de tout ce qui nous est contraire, par l’assistance divine. Voici les actions de grâces : Sacerdotes tui induantur, etc., et ceci s’adresse à nous tous. On prie ensuite pour les rois et pour ceux qui sont élevés en dignité, en disant : Salvum fac regem, etc. ; et nous prions pour notre pontife ; et nous disons le Salvum fac populum tuum pour les vivants et pour les défunts, l’Oremus pour les fidèles défunts ; suit le Miserere mei, Deus, pour ceux qui sont en état de péchés plus graves, comme on a fait précéder l’oraison dominicale pour ceux qui n’ont que des fautes vénielles. Ensuite le pasteur ou le prêtre se lève, et, pendant que tous les assistants restent prosternés, il prie pour tous, ce dont on a parlé à Prime.