Raison et Sensibilité, ou les Deux Manières d’aimer
Traduction par Isabelle de Montolieu.
Artus-Bertrand (tome III et IVp. 239-263).

CHAPITRE XLII.


Après que le triste Edward eut fait au colonel ses remercîmens pour une faveur dont il se serait bien passé, il alla à Holborn faire part de son bonheur à Lucy. Il faut que pendant la route il ait fait sur lui-même des efforts bien extraordinaires, car Lucy assura à madame Jennings, qui vint le jour suivant la féliciter, qu’elle ne l’avait vu de sa vie aussi gai, aussi heureux qu’en lui apprenant cette nouvelle. Son propre bonheur à elle était plus certain. Elle se joignit de grand cœur à l’espoir de madame Jennings d’être établie à la Saint-Michel au presbytère de Delafort ; elle parut aussi très-disposée à croire qu’Elinor s’était intéressée pour eux auprès du colonel ; elle vanta beaucoup son amitié pour elle et pour son futur mari, et déclara qu’il n’y avait rien qu’elle ne pût en attendre, et qu’elle savait que mademoiselle Dashwood ferait tout pour ceux qu’elle aimait. Quant au colonel Brandon, elle dit qu’elle le reverrait comme un Dieu bienfaisant. Madame Jennings ne put alors s’empêcher de dire qu’elle espérait bien qu’il épouserait Elinor, et que ce serait pour eux une grande augmentation de bonheur. Certainement, dit Lucy avec dépit ; mais Edward m’a assuré que le colonel lui procurerait bientôt un meilleur bénéfice ; sans doute je regretterai beaucoup le voisinage d’Elinor, mais il faut avant tout, penser à ce qui est le plus avantageux, et deux cents pièces ne sont pas grand chose. Mais je tâcherai, ajouta-t-elle, de lui faire rendre davantage ; j’ai dit à Edward de me laisser le soin du domaine ; et il y est tout disposé. Pendant qu’il fera et débitera ses sermons, je léverai les dîmes ; j’aurai soin de la laiterie, de la basse-cour, du jardin ; je ferai vendre nos denrées, et quand j’aurai mis de côté pendant l’été une bonne petite somme, je pourrai aller m’amuser à Londres un mois ou deux après Noël. Lorsque vous n’aurez personne pour vous tenir compagnie, ma chère cousine Jennings, je serai fort à votre service. Edward restera à Delafort ; il ne s’ennuie jamais seul. Oh ! comme nous allons être heureux ! c’est dommage seulement qu’il n’ait pas un peu de la gaîté et de la gentillesse de son frère, qui est toujours prêt à rire et à causer, au lieu qu’Edward peut être des heures entières à lire. Moi je ne connais rien de plus ennuyeux ; mais à présent j’aurai assez à faire de mon côté quand je serai là, et je n’y serai pas toujours, etc. etc. Madame Jennings revint à la maison en assurant que Lucy était la plus aimable des filles, et serait la plus heureuse des femmes.

Il y avait au moins une semaine qu’on n’avait aperçu John Dashwood, ni entendu parler de lui. Elinor n’avait point vu sa belle-sœur depuis son indisposition, et jugea qu’elle devait lui faire une visite. Cette obligation n’était rien moins qu’un plaisir ; et elle n’y fut point encouragée par ses deux compagnes. Non-seulement Maria refusa absolument d’y aller, en disant qu’elle était plus malade que Fanny, mais elle fit aussi tout ce qu’elle put pour qu’Elinor n’y allât pas. Madame Jennings lui dit que son carrosse était à son service ; mais qu’elle ne l’accompagnerait pas chez une femme dont les airs et la hauteur lui étaient insupportables. J’aurais cependant eu du plaisir, dit-elle, à la voir humiliée et piquée du choix de son frère, à lui dire combien je l’approuve, et à lui apprendre qu’Edward va se marier et n’aura plus besoin d’eux. Mais qui sait si je la trouverais encore aussi fâchée qu’elle veut le paraître ; son orgueil et son avarice doivent se livrer un combat. Elle est blessée que sa belle-sœur ne soit pas la fille d’un lord ; mais elle est bien aise peut-être de l’espoir d’avoir sa part de l’héritage de son frère. Oh ! l’odieuse femme, et que je vous plains de vous croire obligée de la voir.

La bonne Elinor pensait peut-être de même, mais ne voulut pas en convenir ; elle prit le parti de Fanny autant qu’il lui fut possible, et toujours prête à remplir les devoirs mêmes qui lui coûtaient le plus, elle se mit en chemin pour Harley-Street.

Madame Dashwood fit dire qu’elle n’était pas encore assez bien pour recevoir qui que ce fût. Mais avant que le carrosse eût tourné pour revenir à Berkeley-Street, John Dashwood sortit de la maison et vint à la portière avec sa manière accoutumée. Il fit un bon accueil à sa sœur ; il lui dit qu’il allait dans ce moment à Berkeley-Street pour la voir, et lui assura que Fanny ne savait sûrement pas que ce fût elle et qu’elle lui ferait grand plaisir ; il l’invita donc à descendre de voiture et à passer quelques momens avec eux. Elinor qui dans le fond aimait son frère se laissait toujours prendre à son air de bonhomie et elle consentit à entrer avec lui. Il la conduisit au salon, où il n’y avait personne. — Fanny est dans sa chambre, je crois, dit John ; la pauvre femme n’est point bien encore ; un si rude coup ! mais elle n’aura aucune raison pour ne point recevoir votre visite, j’en suis sûr. Je vais la prévenir que vous avez voulu entrer malgré son refus ; elle en sera très-flattée. À présent, Elinor, elle n’a plus aucun motif de vous craindre ; vous comprenez ce que je veux dire, et vous allez être sa grande favorite, et Maria aussi. Pourquoi n’est-elle pas venue avec vous ? toujours malade, je parie ; c’est fort triste en vérité. L’air de la campagne la remettra : point d’autres remèdes surtout, celui-là ne lui coûtera rien ; et les médecins et les remèdes sont si chers ! Je sais ce qu’il nous en coûte pour ce mal de Fanny, et c’est pourtant la faute d’Edward… Enfin chère Elinor, je ne suis point fâché de vous voir seule, car j’ai beaucoup de choses à vous dire. Est-il vrai d’abord que le colonel Brandon ait donné son bénéfice de Delafort à Edward ? Je l’appris hier par hasard, et j’allais chez vous exprès pour m’en informer. Je ne le crois pas du tout, et je fus sur le point de proposer un pari ; cela n’est pas vrai, n’est-ce pas ? Combien je me repens de n’avoir pas parié !

— Vous avez très-bien fait, car rien n’est plus vrai. Le colonel Brandon a donné son bénéfice de Delafort à Edward.

— Réellement ! eh bien ! y a-t-il rien de plus étonnant ! Ni parenté, ni liaison, et lui donner (car il l’a donné, dites-vous) un bénéfice dont il pouvait tirer beaucoup, beaucoup d’argent. De quelle valeur est-il ?

— Environ de deux cents pièces de revenu.

— Très-bien, très-joli revenu ; et pour commencer avoir un bénéfice de cette valeur ! Edward n’est pas malheureux. Le colonel aurait pu le vendre quinze cents pièces, peut-être deux mille. Je suis confondu : un homme de sens comme le paraît le colonel ! On a bien raison de dire qu’il y a chez tous les humains un grain de folie. Il est possible cependant en y pensant bien qu’il y ait quelque chose là-dessous ; je crois que je le devine. Le colonel l’aura vendu à quelque jeune homme de famille riche, qui n’a pas encore l’âge requis, et Edward l’occupe jusqu’à ce temps-là, et tirera la moitié du revenu. Cent pièces pour quelqu’un qui n’a rien, c’est très-honnête. Je parie que j’ai mis le doigt dessus : cela explique tout.

Elinor assura que non très-positivement. Elle raconta qu’elle avait été employée elle-même à faire à Edward l’offre du colonel ; qu’elle était sans aucune réserve, et que le seul regret du colonel était que son bénéfice ne fût pas plus considérable.

— Je ne puis en revenir, s’écria John ; c’est vraiment étonnant ! Quel peut être le motif du colonel ?

— Un très-simple, le désir d’être utile à M. Ferrars.

— En vérité, chère Elinor, je croirais plutôt que c’est le désir de vous plaire, si vous pouviez encore vous intéresser le moins du monde à Edward ; mais après ce qu’il vous a fait ! Vous courtiser, laisser croire à tout le monde qu’il vous était attaché, indisposer votre belle-sœur contre vous à cette occasion, et puis être engagé à une autre, qui ne vous vaut pas ; c’est mal cela, très-mal, et vous devez le détester plus que personne ; mais vous avez un si bon cœur ! Écoutez, ne parlez pas à Fanny de ce bénéfice. Je lui en ai dit un mot, et elle l’a très-bien pris ; mais elle n’aime pas à entendre parler de son frère.

Elinor eut peine à s’empêcher de lui dire que Fanny pouvait supporter avec calme une acquisition de fortune à son frère, qui ne lui ôtait rien à elle-même.

Madame Ferrars, ajouta John en baissant la voix et d’un air important, ne sait rien de cela, et nous voulons le lui cacher autant qu’il sera possible. Quand le mariage d’Edward aura lieu, nous tâcherons aussi qu’elle l’ignore, au moins quelque temps.

— Mais pourquoi toutes ces précautions ? dit Elinor ; il n’est pas à supposer que madame Ferrars puisse avoir la moindre satisfaction ou la moindre peine en apprenant que son fils a de quoi vivre. Elle a prouvé par sa conduite avec lui qu’elle n’y prenait plus nul intérêt ; elle ne le regarde plus comme son fils puisqu’elle l’a repoussé pour toujours. Sûrement on ne peut imaginer qu’elle éprouve à son égard quelque impression de chagrin ou de joie ; qu’elle s’intéresse à ce qui lui arrive. Elle n’a pas privé volontairement son enfant de tout secours pour conserver la sollicitude d’une mère.

— Oh ! Elinor dit John, n’ayant pas trop l’air de comprendre dans quel sens elle parlait, votre raisonnement est très-bon ; mais il n’est pas dans la nature. Madame Ferrars a repoussé loin d’elle un fils ingrat et désobéissant ; mais elle ne peut pas oublier qu’il est son fils.

— Vous me surprenez ; je croyais que cela était sorti de sa mémoire.

— Vous parlez en femme piquée contre Edward, et je le comprends ; mais cela n’empêche pas que madame Ferrars ne soit une des plus tendres mères qu’il y ait au monde.

Elinor garda le silence.

— Nous espérons à présent, continua-t-il, que Robert épousera mademoiselle Morton.

Elinor sourit de la grave importance de son frère. — Je suppose, dit-elle, que cette jeune dame n’a pas de choix dans cette affaire.

— De choix ! qu’entendez-vous par-là ?

— J’entends que d’après ce que vous me dites, on peut supposer qu’il est indifférent à mademoiselle Morton d’épouser Edward ou Robert.

— Certainement ! il ne peut y avoir aucune différence, à présent que Robert est comme un fils unique ; c’est d’ailleurs un jeune homme très agréable, et très-supérieur à son frère.

Elinor ne dit plus rien. John fut aussi silencieux quelques momens ; il avait l’air de réfléchir.

— Encore une chose, ma chère sœur, dit-il très-bas en lui prenant la main ; j’étais à penser si je devais vous le dire, mais le plaisir de vous en faire part l’emporte sur la prudence ; et quoique Fanny de qui je le tiens m’ait bien recommandé le secret, je ne puis le garder avec vous ; vous ne me trahirez pas. Eh bien ! j’ai de fortes raisons de penser que madame Ferrars a dit à sa fille, que quelques objections qu’elle eût sur une certaine liaison, que nous avions tous soupçonnée, vous m’entendez, Elinor, elle l’aurait beaucoup préférée à ce qui est, et elle n’en aurait pas eu la moitié tant de peine. J’ai été enchanté d’entendre que madame Ferrars pensât ainsi ; c’est une circonstance très-avantageuse pour vous, et pour nous tous. C’eût été, a-t-elle dit à Fanny, beaucoup moins fâcheux sans comparaison, qu’il se fût vraiment attaché à l’une de vos belles sœurs ; et elle voudrait bien à présent qu’il en fût ainsi. Mais il n’en est plus question, puisqu’il n’y a jamais songé, et qu’il n’avait nul attachement pour vous. Seulement j’ai voulu vous le dire, parce que cette préférence de la mère de ma femme doit vous flatter infiniment. Mais vous, ma chère Elinor, vous ne devez avoir aucun regret ; il n’y a pas de doute que vous serez très-bien établie, et tout considéré, mieux qu’avec Edward. Delafort est à ce que je crois une plus belle terre que celle que madame Ferrars destinait à son fils. Avez-vous vu le colonel Brandon dernièrement ? Quand vous serez sa femme, j’espère que vous l’engagerez à mieux veiller à ses intérêts, et à ne pas donner au premier venu, ce qui peut lui rapporter beaucoup à lui-même.

Elinor était indignée. Elle en avait assez entendu, non pas pour satisfaire sa vanité ou pour flatter son amour-propre, mais pour irriter ses nerfs et la faire repentir de sa visite. Elle fut charmée d’être dispensée de répondre, ou d’entendre encore quelques sots propos, par l’arrivée de M. Robert Ferrars, qui vint étaler ses grâces et sa parure devant la grande glace du salon de sa sœur. Après quelques mots insignifians John Dashwood se rappela que Fanny ne savait pas encore qu’Elinor était là. Il sortit pour l’en informer, et laissa sa sœur tête à tête avec le beau Robert, qui par sa gaîté, son contentement de lui-même, sa suffisance et son air important, semblait jouir de n’avoir plus à partager avec son frère, l’amour et les libéralités de leur mère, et donnait à Elinor une aussi mauvaise opinion de son cœur que de sa tête. Elle espérait au moins qu’il ne lui parlerait point d’Edward ; mais elle était dans l’erreur. Deux minutes ne furent pas écoulées, qu’après un éclat de rire assez long, il lui demanda en riant toujours, s’il était vrai qu’Edward allât prendre les ordres et dût être pasteur au village de Delafort ? Elinor le confirma, et lui répéta ce qu’elle avait appris à John. Alors ses éclats de rire immodérés recommencèrent ; l’idée de voir Edward en surplis et dans une chaire, publiant les bans de mariage des villageois, leur donnant la bénédiction nuptiale, baptisant leurs petits-enfans, le divertissait outre mesure. — Au surplus, disait-il, je lui ai toujours trouvé la tournure d’un vrai curé de village ; si sérieux, si modeste, si peu élégant. Pauvre Edward ! la nature l’avait fait pour cela, et son éducation l’a achevé. Se douterait-on que nous sommes frères ? Jamais vous ne l’auriez pensé, j’en suis bien sûr : et il se regardait encore dans la glace et recommençait à rire.

— Non en vérité, monsieur, dit Elinor en jetant sur lui un coup-d’œil méprisant ; il n’y a entre vous deux nul rapport. Elle attendit avec une immuable gravité que son accès de gaîté folle fût passé. Tout-à-coup il cessa de rire. — Mais qu’avez-vous donc, mademoiselle Dashwood, lui dit-il, vous êtes aussi sérieuse qu’Edward ; vous lui auriez cent fois mieux convenu que cette petite fille si gaie, si animée. Savez-vous qu’elle me fait grande pitié, cette pauvre petite Lucy ? Il y avait de l’étoffe pour en faire une élégante, une femme à la mode ; et devenir la femme d’un grave pasteur, être enterrée dans un presbytère, en bonnet rond, un grand chapeau de paille, au lieu de cette délicieuse coiffure, de ces plumes flottantes ! elle est vraiment très à plaindre. Et ce pauvre Edward ! je plaisante ; mais sur mon ame, je suis très-touché de son malheur ; le voilà ruiné pour toujours. On peut faire une folie d’amour quand on est riche, à la bonne heure. Épouser une jolie fille, braver tous ses parens, suivre sa tête, faire parler de soi : tout cela peut être assez plaisant ; mais il faut avoir une fortune indépendante, et ne pas risquer de tout perdre. Pauvre garçon ! c’est la meilleure créature qui existe. Ses manières, sa figure, tout cela est misérable ; mais tout le monde n’est pas né avec les mêmes avantages. C’est le plus honnête garçon des trois royaumes ; au reste, à quoi cela sert-il dans le monde ? Vous le voyez, à se rendre ridicule, à faire des folies par excès de vertu. Tient-on tout ce qu’on promet ? À sa place j’aurais épousé mademoiselle Morton et ses trente mille livres, et comme Lucy Stéeles est beaucoup plus jolie, je l’aurais priée de m’aimer toujours. Il ne serait pas au point où il en est. Pauvre Edward ! il s’est ruiné lui-même complètement, le voilà séquestré de toute société décente. Pour moi je l’ai dit d’abord à madame Ferrars. Ma chère mère, je ne sais ce que vous ferez dans cette occasion ; mais si Edward épouse cette jeune fille, je suis décidé à ne plus le voir. Je lui offris de lui parler, de le dissuader de ce mariage ; mais c’était trop tard, la rupture avait eu lieu. Ma mère me promit ce qu’elle aurait donné à Edward. Je ne pouvais pas en conscience agir contre mes propres intérêts ; mais j’en suis fâché, très-fâché ! Je pouvais mieux me passer que lui de fortune, ne le trouvez-vous pas, mademoiselle Mais cependant elle ne gâte rien aux autres avantages. Pour le pauvre Edward, il n’aura qu’une jolie femme, dont il sera bientôt las, et une cure de deux cents livres qui ne le nourrira pas la moitié de l’année : et voilà le beau sort qu’il s’est fait.

Robert aurait parlé sur ce ton la journée entière ; Elinor ne l’écoutait plus du tout. L’entrée de madame John Dashwood fit taire l’un et sortir l’autre de sa profonde rêverie. Fanny avait une nuance d’embarras avec Elinor, comme se reprochant de l’avoir accusée à tort d’aimer Edward et d’en être aimée. Celle-là du moins ne lui en parla point, et tâcha d’être plus cordiale qu’à l’ordinaire ; elle poussa la bonté jusqu’à dire qu’elle était fâchée qu’elles quittassent la ville, et qu’elle espérait les voir l’été à Norland. Son mari était extasié de sa politesse et de ses grâces ; en accompagnant Elinor à sa voiture, il lui dit qu’elle devait être bien contente de sa belle-sœur et de sa visite. Je vous promets, ajouta-t-il, pour elle comme pour moi, que nous serons des premiers à vous visiter à Delafort, car je vois que tout s’achemine là, puisque le colonel doit vous aller joindre à Cléveland. Il la loua beaucoup aussi avec sa parcimonie ordinaire d’un arrangement qui les faisait retourner à Barton sans rien dépenser.

Comme Edward n’était plus à Londres et qu’elle ne craignait pas de le rencontrer, elle prit le parti d’aller faire une courte visite à Lucy, qui la reçut, avec transport, ne lui parla que de son bonheur, et lui fit une invitation pressante de venir la voir dans son presbytère à Delafort. Elinor riait de ce que tout le monde l’envoyait à Delafort, endroit dans l’univers qu’elle désirait le moins d’habiter ; son unique désir étant actuellement d’éviter toutes les occasions de revoir Edward.