Répertoire national/Vol 1/Chant du Vieillard sur l’Étranger

Collectif
Texte établi par J. Huston, Imprimerie de Lovell et Gibson (Volume 1p. 193-194).

1831.

CHANT DU VIEILLARD SUR L’ÉTRANGER.

  

Air : Dis-moi, soldat, dis-moi, t’en souviens-tu ?


Près de ses fils, sur le sol de l’enfance,
Certain vieillard annonçait le danger ;
D’un ton plaintif éteint par la souffrance,
Disait souvent en voyant l’étranger :
« Veillez, mes fils, au bien de la patrie,
« Comme dépôt, ne l’abandonnez pas,
« Avec l’honneur et la paix de la vie,
« Vous le savez, ça va du même pas.

« J’ai déjà vu, du seuil du toit champêtre,
« De vils intrus vouloir donner la loi ;
« Avec mépris, je les ai vus paraître,
« À leur aspect j’éprouvais de l’effroi :
« Je ne pouvais à leur morgue me faire,
« En mon pays, je ne les voulais pas ;
« Aussi parfois je ne pouvais me taire,
« Vous le savez, ça va du même pas.

« Il fut un temps qu’ils inspiraient la crainte,
« Il fut un jour qu’ils montraient du pouvoir ;
« Mais tout cela, c’était et ruse et feinte,
« Pour vous fermer le chemin du devoir :

 
« Mes fils, en eux, vainement on se fie,
« C’est un avis, je vous le dis tout bas ;
« Comme étrangers, certes on s’en défie,
« Vous le savez, ça va du même pas.

« Des fils du sol ils combattent la cause,
« Sans toutefois vous procurer le tort,
« Peuple conquis ! voilà, dit-on, la clause
« Qui désormais empire votre sort :
« Malgré l’horreur qu’un tel destin inspire,
« Veillez, mes fils, veillez jusqu’au trépas.
« De leurs efforts osez toujours vous rire,
« Vous le savez, ça va du même pas. »