Récits de voyages d’un Arabe/Sur le livre se trouvant à Carrare, en la possession du duc de Mitylène


Traduction par Olga de Lébédew.
(p. 55-56).
Sur le livre se trouvant à Carrare, en la possession du duc de Mitylène


AU NOM DU DIEU VIVANT, ÉTERNEL ET TOUT-PUISSANT, AUQUEL JE ME CONFIE ET QUI EST MON APPUI.


On nous a parlé d’un livre qui se trouve à Carrare, en la possession du duc de Mitylène et qui est inestimable, parce que ce livre est le recueil d’une quantité de livres et d’histoires anciennes et modernes.

Sa longueur est de plus d’une aune égyptienne et sa grosseur est de deux tiers d’aune. Il est composé entièrement de parchemin ; sa reliure est recouverte d’ornements d’or. Il contient la description du monde, depuis sa création jusqu’à nos jours. Le texte occupe le milieu de chaque feuillet, et les deux côtés en sont ornés de dessins en or et azur, représentant le ciel, la terre, les mers, les anges, les étoiles, le soleil et la lune, Adam et Ève, le paradis. On y parle encore de Noé et de ses faits et gestes, des fils d’Israël, de Joseph et de son histoire, de Pharaon, d’Abraham, du Prophète Moïse et de tous les prophètes, de la venue de Jésus-Christ, des saints apôtres, des martyrs, des rois d’Israël et de tout, jusqu’à nos jours. Tout le livre est fait de cette manière du commencement jusqu’à la fin. Il n’existe point sur la terre d’animaux, d’oiseaux, d’arbres ou de plantes qui ne soient décrits dans ce livre. Son poids est de dix ratl de Damas.

On nous a parlé d’une femme de cinquante ans qui habite au palais du duc, dont la taille est plus petite qu’une aune. Et l’on nous a parlé d’un pays au Nord de la France qui s’appelle Bourgogne et Flandre, où les jours, pendant l’été, ont dix-neuf heures, où les nuits ne sont que de cinq heures, et réciproquement en hiver.

Nous avons entendu dire par beaucoup de monde que dans l’île d’Angleterre la journée dure en été vingt heures et la nuit quatre heures ; et qu’en hiver c’est le contraire. On nous a dit aussi qu’en Bourgogne, il n’y a pas de nuit en été, mais qu’on y voit une sorte de crépuscule auquel on ne peut donner ni le nom de jour ni le nom de nuit, et à la lueur duquel on peut se distinguer l’un l’autre. En hiver c’est le contraire. Les chrétiens peuvent nous croire sans douter de notre véracité en ce qui concerne la nuit et le jour. Un élève en a entendu parler sans vouloir y croire ; mais lorsque j’ai visité ces pays et que j’ai vu tout cela de mes yeux de pécheur, je m’en suis persuadé.

Nous prions le Seigneur Jésus-Christ d’avoir pitié de nous et de nous pardonner nos péchés, par l’intervention de Sa Mère.