Quand les violons sont partis/Litanies
LITANIES
Écrin dont les joyaux tentateurs sont les vices
Constellés de rubis saignés des mains novices ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Claire fontaine, où tout venant se désaltère,
Bois sacré, qui laissas violer ton mystère ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Églantier du chemin, dont la fleur provocante
Darde sous la feuillée un regard de bacchante ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Nuée errante au bas de l’azur, triste et grise,
Qui voles au soleil un éclat qui vous grise ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Feu follet, qui parais une lueur propice
Aux égarés pour les conduire au précipice ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Ciel, qui répands à flots de lumière embrasée
Aux lis dont le calice implore la rosée ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Fruit maléfique, à la douceur pleine de fièvres,
Qui t’offres de toi-même au baiser de nos lèvres ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.
Caravelle enchantée, où s’embarquent des foules,
Qui, par un ciel limpide, en plein océan, coules ;
Salut, Reine de grâce et de perversité ;
Linceul tout constellé de fleurettes jolies,
Où tant d’âmes sont à jamais ensevelies ;
Salut, Reine de grâce et de perversité.