Procès des grands criminels de guerre/Vol 1/Section 10

ACTE D’ACCUSATION[1].
TRIBUNAL MILITAIRE INTERNATIONAL.


La République Française,
Les États-Unis d’Amérique,
Le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord,
L’Union des Républiques Socialistes Soviétiques,

contre

Hermann Wilhelm Goring, Rudolf Hess, Joachim von Ribbentrop, Robert Ley, Wilhelm Keitel, Ernst Kaltenbrunner, Alfred Rosenberg, Hans Frank, Wilhelm Frick, Julius Streicher, Walter Funk, Hjalmar Schacht, Gustav Krupp von Bohlen und Halbach, Karl Dönitz, Erich Raeder, Baldur von Schirach, Fritz Sauckel, Alfred Jodl, Martin Bormann, Franz von Papen, Arthur Seyss-Inquart, Albert Speer, Constantin von Neurath et Hans Fritzsche, individuellement et en tant que membres de l’un des groupements ou organisations ci-après énumérés auxquels ils ont appartenu, à savoir :

La Reichsregierung (Cabinet du Reich), le Korps der Politischen Leiter der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei (Corps des chefs politiques du parti nazi), les Schutzstaffeln der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei (généralement dénommées SS), comprenant le Sicherheitsdienst (généralement dénommé SD) ; la Geheime Staatspolizei (Police secrète d’État, généralement dénommée Gestapo) ; les Sturmabteilungen der NSDAP (généralement dénommées SA) ; et l’État-Major général ainsi que le Haut Commandement des Forces armées allemandes, tels qu’ils sont tous définis à l’appendice B,


accusés


I

La République Française, les États-Unis d’Amérique, le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et L’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, agissant par les soussignés François de Menthon, Robert H. Jackson, Hartley Shawcross et R. A. Rudenko dûment désignés pour représenter leurs gouvernements respectifs dans l’examen des chefs d’accusation contre les grands criminels de guerre et dans la poursuite de ces derniers, conformément à l’Accord de Londres en date du 8 août 1945 et du Statut de ce Tribunal annexé audit Accord, accusent par les présentes, en raison des motifs exposés ci-après, de s’être rendus coupables de crimes contre la Paix, de crimes de guerre et de crimes contre l’Humanité, ainsi que d’un plan concerté ou complot en vue de commettre ces crimes, tels qu’ils sont définis dans le Statut du Tribunal, et désignent, en conséquence, comme accusés dans ce Procès et prévenus des chefs d’accusation ci-dessous énumérés :

Hermann Wilhelm Göring, Rudolf Hess, Joachim von Ribbentrop, Robert Ley, Wilhelm Keitel, Ernst Kaltenbrunner, Alfred Rosenberg, Hans Frank, Wilhelm Frick, Julius Streicher, Walter Funk, Hjalmar Schacht, Gustav Krupp von Bohlen und Halbach, Karl Dönitz, Erich Raeder, Baldur von Schirach, Fritz Sauckel, Alfred Jodl, Martin Bormann, Franz von Papen, Arthur Seyss-Inquart, Albert Speer, Constantin von Neurath et Hans Fritzsche.

Individuellement et en tant que membres de l’un des groupements ou organisations énumérés immédiatement ci-après.


II

Sont désignés comme groupements ou organisations (dissous depuis lors), devant être déclarés criminels en raison de leurs buts et des moyens utilisés pour les atteindre et en relation avec la culpabilité de tels des susnommés qui en ont été membres :

La Reichsregierung (Cabinet du Reich), le Korps der Politischen Leiter der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei (Corps des chefs politiques du parti nazi), les Schutzstaffeln der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei (généralement dénommées SS) comprenant le Sicherheitsdienst (généralement dénommé SD), la Geheime Staatspolizei (Police secrète d’État, généralement dénommée Gestapo), les Sturmabteilungen der NSDAP (généralement dénommées SA) et l’État-Major général ainsi que le Haut Commandement des Forces armées allemandes, tels qu’ils sont tous définis à l’appendice B.


CHEF D’ACCUSATION No 1

PLAN CONCERTÉ OU COMPLOT

(Statut, article 6, plus spécialement 6 a.)

III

Qualification de l’infraction.

Tous les accusés, de concert avec diverses autres personnes, ont, pendant un certain nombre d’années antérieurement au 8 mai 1945, participé en qualité de chefs, d’organisateurs, d’instigateurs ou de complices, à la conception ou à l’exécution d’un plan concerté ou complot ayant pour objet de commettre des crimes contre la Paix, des crimes de guerre et des crimes contre l’Humanité, ou impliquant la perpétration de ces crimes, tels qu’ils sont définis dans le Statut de ce Tribunal ; ils sont, aux termes de ce Statut, individuellement responsables de leurs propres actes et de tous les actes commis par des personnes quelconques dans l’exécution de ce complot. Ce plan concerté ou complot a comporté ou entraîné la perpétration de crimes contre la Paix, du fait que les accusés conçurent, préparèrent, déclenchèrent et menèrent des guerres d’agression qui furent aussi des guerres faites en violation de traités, d’accords ou d’engagements internationaux. Le développement et la mise à exécution du plan concerté ou complot entraînèrent la perpétration de crimes de guerre, du fait qu’ils impliquaient des guerres sans merci contre les pays et les populations, et du fait que les accusés les décidèrent et les menèrent en violation des règles et coutumes de la guerre ; ces guerres furent caractérisées par l’emploi systématique de moyens tels que l’assassinat, les mauvais traitements, la déportation en vue d’un travail obligatoire, ou dans d’autres buts, des populations civiles des territoires occupés, l’assassinat et les mauvais traitements de prisonniers de guerre ou de personnes en haute mer, la prise d’otages et leur exécution, le pillage de biens publics et privés, la destruction sans raison de villes, bourgades et villages et des dévastations non justifiées par les nécessités militaires. Le plan concerté ou complot pour la préparation et la poursuite des guerres injustes d’agression, envisageait et comporta, en fait, l’emploi systématique de crimes contre l’Humanité, que les accusés décidèrent et commirent à la fois à l’intérieur de l’Allemagne et dans les territoires occupés, notamment l’assassinat, l’extermination, l’asservissement, la déportation et autres actes inhumains commis contre les populations civiles, avant et pendant la guerre, et des persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux. Beaucoup de ces actes et de ces persécutions constituent des violations de lois internes des pays où ils ont été perpétrés.


IV

Détails de la nature et du développement du plan concerté ou complot.

a. le parti nazi, noyau central du complot.

En 1921, Adolf Hitler devint le chef suprême ou « Führer » de la Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei (parti ouvrier national-socialiste allemand), connue aussi sous le nom de parti nazi, lequel avait été fondé en Allemagne en 1920. Il l’est demeuré pendant toute la période visée par le présent Acte d’accusation. Le parti nazi, avec certaines de ses organisations annexes, devint l’instrument de liaison entre les accusés et les co-auteurs de la conspiration, ainsi qu’un instrument pour la réalisation des buts et desseins de leur complot. Chacun des accusés devint un membre du parti nazi et un co-auteur du complot, en pleine connaissance de ses buts et desseins ou bien, avec la même connaissance, il en devint le complice, au cours de l’une des phases du développement du complot.


b. objectifs et méthodes générales du complot.

Le parti nazi, les accusés et d’autres personnes associées à diverses reprises au parti nazi en tant que chefs, membres, partisans ou adhérents (dénommés ci-après collectivement « conspirateurs nazis »), avaient ou en sont arrivés à avoir pour buts et desseins d’obtenir par tous moyens jugés opportuns, y compris des moyens illégaux et, en dernier ressort, la menace, l’emploi de la force ou la guerre d’agression, les résultats suivants :

1. Destruction du Traité de Versailles et des restrictions qu’il comportait quant à l’armement et à l’activité militaire de l’Allemagne ;

2. Acquisition des territoires perdus par l’Allemagne à la suite de la guerre mondiale de 1914-1918, ainsi que d’autres territoires en Europe, dont les conspirateurs nazis affirmaient qu’ils étaient occupés principalement par des prétendus « Allemands de race » ;

3. Acquisition encore en Europe continentale et ailleurs, aux dépens des pays voisins ou autres, de nouveaux territoires que les conspirateurs nazis réclamaient comme nécessaires aux « Allemands de race » en tant que « Lebensraum » ou espace vital. Les buts et les desseins des conspirateurs nazis n’étaient pas fixés ou immuables, mais ils ont évolué et se sont élargis à mesure que s’accroissaient leur puissance et leur capacité de réaliser leurs menaces de contrainte ou de guerre d’agression. Leurs buts et leurs desseins prirent finalement une telle ampleur qu’ils suscitèrent une résistance qui ne pouvait plus être brisée que par la force armée et la guerre d’agression, et non plus simplement par l’application des méthodes variant selon les circonstances, qui avaient été jusque-là employées telles que le dol, la duplicité, les menaces, l’intimidation, les activités de la propagande de la Cinquième colonne : alors les conspirateurs nazis conçurent délibérément, décidèrent et déclenchèrent leurs guerres d’agression et leurs guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux, en passant par les étapes et degrés ci-après précisés.


c. utilisation de la doctrine au service du plan concerté ou complot.

Pour inciter d’autres personnes à se joindre au plan concerté ou complot et afin d’assurer aux conspirateurs nazis le maximum de contrôle sur la communauté allemande, les nazis créèrent, diffusèrent et exploitèrent certaines doctrines parmi lesquelles se trouvent les suivantes :

1. Les personnes de prétendu « sang allemand » (tel qu’il est défini par les conspirateurs nazis) constituent « une race de seigneurs » et sont, par conséquent, en droit de subjuguer, de dominer ou d’exterminer d’autres « races » et peuples ;

2. Le peuple allemand doit être gouverné en vertu du « Führerprinzip » (principe du chef), selon lequel le pouvoir est aux mains d’un « Führer » dont des subordonnés doivent tirer leur autorité par ordre hiérarchique, chacun d’eux devant obéissance, sans conditions à son supérieur immédiat, mais étant investi d’un pouvoir absolu dans son propre ressort. Le pouvoir des chefs doit être illimité et s’étendre à tous les aspects de la vie publique et privée ;

3. La guerre constitue pour l’Allemand une activité noble et nécessaire ;

4. La haute direction du parti nazi, seule dépositaire des doctrines du parti précitées ou autres, a le droit de modeler la structure, la politique et les actes de l’État allemand et de toutes les institutions y afférentes, de diriger ou de surveiller les agissements de tous les individus dans le cadre de l’État, et de détruire tous les opposants.


d. acquisition du contrôle totalitaire de l’allemagne au point de vue politique.

1. Premiers pas dans l’acquisition du contrôle des rouages de l’État. — Afin de réaliser leurs buts et desseins, les conspirateurs nazis se préparèrent à saisir le contrôle totalitaire de l’Allemagne, de façon à rendre impossible la naissance d’une résistance efficace contre eux à l’intérieur de l’Allemagne même. Après l’échec du putsch de Munich en 1923, qui visait à renverser la République de Weimar par l’action directe, les conspirateurs nazis s’appliquèrent, par le truchement du parti nazi, à miner le Gouvernement allemand et à s’en emparer par des formes « légales » en s’appuyant sur le terrorisme. Ils créèrent et utilisèrent comme une formation du parti les Sturmabteilungen (SA), organisation semi-militaire et volontaire de jeunes gens qui étaient entraînés à se servir de la violence et s’étaient engagés à y recourir et dont la mission était de rendre le parti maître des rues.

2. Le contrôle est acquis. — Le 30 janvier 1933, Hitler devint le Chancelier de la République allemande. Après l’incendie du Reichstag, le 28 février 1933, les articles de la Constitution de Weimar, qui garantissaient la liberté individuelle, la liberté de la parole, de la presse, d’association et de réunion furent suspendus. Les conspirateurs nazis s’assurèrent du vote par le Reichstag d’une « Loi pour la protection du peuple et du Reich », qui donnait à Hitler et à son cabinet d’alors les pleins pouvoirs législatifs. Les conspirateurs gardèrent ces pouvoirs après avoir changé la composition du cabinet. Ils firent interdire tous les partis politiques, excepté le parti nazi. Ils firent de ce dernier une organisation paragouvernementale, jouissant de privilèges étendus et extraordinaires.

3. Consolidation du contrôle. — S’étant ainsi emparés des rouages de l’État allemand, les conspirateurs nazis se mirent en devoir de consolider leur puissance à l’intérieur de l’Allemagne, en étouffant toute velléité de résistance intérieure et en militarisant la nation allemande.

a) Les conspirateurs nazis réduisirent le Reichstag à une assemblée de leurs créatures et ils portèrent atteinte à la liberté des élections populaires dans l’ensemble du pays. Ils transformèrent les divers États, provinces ou municipalités, investis auparavant de pouvoirs semi-autonomes, en organes qui n’étaient guère plus que des rouages administratifs du gouvernement central. Ils réunirent les fonctions de Président et de Chancelier dans la personne de Hitler ; ils procédèrent à une large épuration du corps des fonctionnaires ; ils restreignirent sévèrement l’indépendance du pouvoir judiciaire et le mirent au service des buts nazis. Ils étendirent largement les organisations déjà existantes de l’État et du parti et en établirent de nouvelles ; ils « coordonnèrent » les organismes de l’État avec le parti nazi, ses ramifications et ses filiales. En conséquence, la vie allemande fut dominée par la doctrine et les pratiques nazies et ainsi progressivement mobilisée en vue de l’accomplissement des buts nazis.

b) Afin de protéger leur pouvoir contre toute attaque et de semer la crainte dans le cœur du peuple allemand, les conspirateurs nazis établirent et étendirent un système de terreur à l’égard de ceux qui s’opposaient au régime et de ceux que l’on soupçonnait de s’y opposer. Ils emprisonnèrent lesdites personnes sans procédure judiciaire, les plaçant en « détention de protection » et dans des camps de concentration ; ils les soumirent à des persécutions, en les avilissant, en les dépouillant, en les asservissant, en les torturant et en les assassinant.

Ces camps de concentration, créés au début de 1933 sous la direction de l’accusé Göring, prirent de plus en plus d’importance et devinrent comme un aspect permanent de la politique terroriste des conspirateurs. Ils s’en servirent pour commettre les crimes contre l’Humanité qui leur sont ci-dessous imputés. Parmi les principaux organismes utilisés pour la perpétration de ces crimes contre l’Humanité, se trouvent les SS et la Gestapo qui, avec d’autres services ou organismes privilégiés de l’État et du Parti, étaient habilités à opérer, sans aucun contrôle légal.

c) Les conspirateurs nazis pensèrent qu’outre la suppression d’une opposition politique proprement dite, il était nécessaire de supprimer ou d’exterminer certains autres mouvements ou groupes qu’ils regardaient comme des obstacles à l’exercice continu de leur contrôle total en Allemagne et aux desseins agressifs du complot hors d’Allemagne. En conséquence :

1o Les conspirateurs nazis détruisirent en Allemagne les syndicats libres en confisquant leurs biens, meubles et immeubles, en poursuivant leurs chefs, en interdisant leur activité et en les supplantant par des organisations affiliées au Parti. Le principe du chef fut introduit dans les relations industrielles, le chef d’entreprise devenant le Führer que suivent les travailleurs. Ainsi, toute velléité de résistance de la part des travailleurs se trouva étouffée, et toute la capacité de travail productif de la nation allemande fut placée sous le contrôle effectif des conspirateurs.

2o Les conspirateurs nazis, en encourageant des croyances et des pratiques incompatibles avec l’enseignement chrétien, tentèrent de saper l’influence des églises sur le peuple et en particulier sur la jeunesse d’Allemagne. Ils avouèrent leur dessein d’éliminer les églises chrétiennes d’Allemagne et de tenter d’y substituer les institutions et les croyances nazies, et ils poursuivirent un programme de persécution des prêtres, du clergé et des membres des ordres monastiques, qu’ils considéraient comme opposés à leurs desseins. Ils confisquèrent les biens ecclésiastiques.

3o La persécution par les conspirateurs nazis des groupes pacifistes, y compris les mouvements religieux pacifistes, fut particulièrement implacable et cruelle.

d) Mettant en pratique leur politique de la « race des seigneurs », les conspirateurs exécutèrent en commun un programme de persécution implacable des Juifs, afin de les exterminer. L’anéantissement des Juifs devint une politique officielle réalisée à la fois par des mesures légales et par l’appel à l’émeute et à la violence individuelle. Les conspirateurs avouèrent ouvertement leur but. L’accusé Rosenberg déclarait, par exemple : « L’antisémitisme est l’élément d’unification de la reconstruction allemande ». À une autre occasion, il déclarait également : « L’Allemagne considérera la question juive comme résolue le jour où le dernier des Juifs aura quitté l’espace vital de la Plus Grande Allemagne… L’Europe ne résoudra la question juive que le jour où le dernier Juif aura quitté le continent ». L’accusé Ley déclarait : « Nous jurons que nous n’abandonnerons pas la lutte jusqu’à ce que le dernier Juif en Europe ait été exterminé et soit bien mort. Il ne suffit pas d’isoler l’ennemi juif du reste de l’humanité, il faut exterminer le Juif ». À une autre occasion il déclarait encore : « La seconde arme secrète allemande, c’est l’antisémitisme ; en effet, si l’Allemagne poursuit cette politique de façon constante, l’antisémitisme deviendra un problème universel dont toutes les nations seront forcées de tenir compte ». L’accusé Streicher déclarait : « Le soleil ne brillera pas sur les nations du monde tant que le dernier Juif ne sera pas mort ». Ces aveux et ces excitations sont caractéristiques des déclarations faites par les conspirateurs nazis, pendant toute la durée de leur complot. Le programme d’action contre les Juifs comprenait la perte du droit de vote, la mise à l’index, le refus des droits civils, l’exercice de la violence contre leur personne et leurs biens, la déportation, l’asservissement, le travail forcé, la famine, l’assassinat et l’extermination en masse. On ne peut préciser exactement dans quelle mesure le plan général des conspirateurs a réussi, mais l’anéantissement fut à peu près total dans beaucoup de localités de l’Europe. Sur les 9.600.000 Juifs qui vivaient dans les régions d’Europe, placées sous la domination nazie, des évaluations modérées indiquent, que 5.700.000 ont disparu, dont la plupart ont été délibérément mis à mort par les conspirateurs nazis. Il ne subsiste que des vestiges de la population juive de l’Europe.

e) Afin de faire accepter leur volonté par le peuple, et pour le préparer psychologiquement à la guerre, les conspirateurs nazis donnèrent une forme nouvelle au système d’éducation et particulièrement à la formation et à l’entrainement de la jeunesse allemande. Le principe du chef fut introduit dans les écoles, le Parti ainsi que les organisations affiliées reçurent de larges pouvoirs de contrôle sur l’éducation. Les conspirateurs nazis imposèrent une surveillance de toutes les activités culturelles, contrôlèrent à la fois la diffusion des informations et l’expression de l’opinion à l’intérieur de l’Allemagne, ainsi que l’échange des nouvelles de toute espèce en provenance et à destination de l’Allemagne ; ils créèrent d’énormes instruments de propagande.

f) Les conspirateurs nazis militarisèrent progressivement un nombre considérable des organisations qu’ils contrôlaient en vue de leur rapide transformation et de leur emploi comme instrument de guerre en cas de nécessité.


e. acquisition du contrôle totalitaire en allemagne dans le domaine économique, et plan économique de mobilisation en vue d’une guerre d’agression.

Ayant obtenu le pouvoir politique, les conspirateurs organisèrent l’économie allemande de façon à réaliser leurs desseins politiques :

1. Afin d’éliminer la possibilité d’une résistance sur le plan économique, ils enlevèrent aux travailleurs le droit de libre association professionnelle et politique, ainsi qu’il est dit au paragraphe D, 3, c, 1 des présentes ;

2. Ils employèrent des organisations commerciales allemandes comme instruments d’une mobilisation économique en vue de la guerre ;

3. Ils orientèrent l’économie allemande vers la préparation et l’équipement de la machine de guerre. C’est vers ce but qu’ils orientèrent la finance, le placement des capitaux et le commerce extérieur ;

4. Les conspirateurs nazis et plus particulièrement, parmi eux, les industriels, entreprirent la réalisation d’un très vaste programme de réarmement et se mirent à organiser et à développer la production d’énormes quantités de matériel de guerre de façon à créer un puissant potentiel militaire ;

5. Afin de mener à bien la préparation à la guerre, les conspirateurs nazis créèrent une série d’organismes et d’autorités d’ordre administratif. En 1936, par exemple, ils créèrent, dans ce but, sous la direction générale de l’accusé Göring, l’organisme du Plan de quatre ans, qui était investi d’un contrôle absolu sur toute l’économie allemande. De plus, le 28 août 1939, immédiatement avant leur agression contre la Pologne, ils nommèrent l’accusé Funk délégué à l’Économie. Le 30 août 1939, ils créèrent le Conseil des ministres pour la Défense du Reich, appelé à agir en tant que Cabinet de guerre.


f. utilisation du contrôle nazi en vue de l’agression contre l’étranger.
1. État du complot vers le milieu de l’année 1933 et projets existants.

Vers le milieu de l’année 1933, les conspirateurs nazis, ayant conquis le contrôle gouvernemental sur l’Allemagne, étaient à même d’établir des plans plus détaillés en ce qui concernait la politique étrangère. Leur dessein était de réarmer, puis de réoccuper et de fortifier la Rhénanie en violation du Traité de Versailles et d’autres traités, de façon à acquérir la puissance militaire et la possibilité de marchandages politiques à l’égard d’autres nations.

2. Les conspirateurs nazis décidèrent que, pour réaliser leurs desseins, le Traité de Versailles devait être définitivement abrogé et ils établirent des plans appropriés qu’ils mirent en application à partir du 7 mars 1936. Ces plans préparaient les futures agressions de grand style énumérées ci-dessous. Au cours de l’exécution de cette phase du complot, les conspirateurs nazis accomplirent les actes suivants :

a) Ils entraînèrent l’Allemagne dans une politique de réarmement secret de 1933 à mars 1935. Cette politique comprenait notamment, l’entraînement du personnel militaire, la production de munitions de guerre et la création d’une force aérienne ;

b) Le 14 octobre 1933, ils provoquèrent le retrait de l’Allemagne de la Conférence internationale du Désarmement et de la Société des Nations ;

c) Le 10 mars 1935, l’accusé Göring annonça que l’Allemagne créait une force aérienne militaire ;

d) Le 16 mars 1935, les conspirateurs nazis promulguèrent une loi instituant le service militaire obligatoire ; il fut précisé par eux que l’effectif de l’armée allemande en temps de paix serait fixé à 500.000 hommes ;

e) Le 21 mai 1935, ils déclarèrent au monde, dans le but de le tromper et d’endormir ses craintes au sujet de leurs intentions d’agression, qu’ils respecteraient les limites territoriales arrêtées par le Traité de Versailles et se conformeraient aux stipulations du Pacte de Locarno ;

f) Le 7 mars 1936, ils réoccupèrent et fortifièrent la Rhénanie, en violation du Traité de Versailles et du Pacte rhénan de Locarno du 16 octobre 1925, et annoncèrent fallacieusement au monde : « Nous n’avons pas de demandes territoriales à présenter en Europe ».


3. Action agressive contre l’Autriche et la Tchécoslovaquie.
a) Phase du plan s’étendant de 1936 à 1938 : Établissement des plans pour la conquête de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie.

Les conspirateurs nazis dressèrent ensuite un plan spécial pour conquérir l’Autriche et la Tchécoslovaquie, se rendant compte qu’il serait nécessaire pour des raisons militaires de se saisir de l’Autriche avant d’assaillir la Tchécoslovaquie. Le 21 mai 1935, dans un discours adressé au Reichstag, Hitler déclarait : « L’Allemagne n’a ni l’intention ni le désir de se mêler aux affaires intérieures de l’Autriche, d’annexer l’Autriche ou de réaliser l’Anschluss ». Le 1er mai 1936, dans les deux mois qui suivirent la réoccupation de la Rhénanie, Hitler déclara : « Le mensonge se propage à nouveau que l’Allemagne, demain ou après-demain, tombera sur l’Autriche ou sur la Tchécoslovaquie ». Ensuite, les conspirateurs nazis conclurent entre l’Autriche et l’Allemagne, le 11 juillet 1936, un traité dont l’article premier stipulait que : « Le Gouvernement allemand reconnaît la pleine souveraineté de l’État fédéral autrichien dans l’esprit des déclarations faites le 21 mai 1935 par le Führer et Chancelier allemand ». Dès ce moment, des plans s’élaborèrent en vue d’une agression, violant ledit traité. Vers l’automne 1937, toute opposition notable à l’intérieur du Reich avait été écrasée. La préparation militaire pour une intervention en Autriche était virtuellement achevée. Un groupe influent de conspirateurs nazis rencontra le Führer le 5 novembre 1937 pour examiner la situation. Ils affirmèrent à nouveau que l’Allemagne nazie devait avoir son « Lebensraum » en Europe centrale. Ils reconnurent que pareille conquête rencontrerait probablement une résistance qu’il faudrait écraser par la force et que leur décision pourrait conduire à une guerre générale, mais ils acceptèrent cette éventualité comme un risque qui valait la peine d’être couru. De cette réunion sortirent trois plans possibles pour la conquête de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie. L’évolution de la situation politique et militaire en Europe déterminerait lequel des trois devait être appliqué. Ils considéraient que la conquête de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie procurerait au Reich, grâce à l’émigration obligatoire de deux millions de personnes de Tchécoslovaquie et d’un million de personnes d’Autriche, des ressources alimentaires pour cinq à six millions de personnes supplémentaires, qu’elle accroîtrait la puissance militaire du Reich en lui donnant des frontières plus courtes et plus faciles à défendre et qu’elle permettrait la constitution de douze nouvelles divisions. Ainsi, le plan dirigé contre l’Autriche et la Tchécoslovaquie ne constituait pas une fin en soi, dans l’esprit de ses auteurs, mais bien une mesure préparatoire en vue de nouvelles agressions prévues par la conspiration nazie.


b) Exécution du plan d’invasion de l’Autriche
(novembre 1937 - mars 1938).

Le 8 février 1938, Hitler convoqua le chancelier Schuschnigg à une conférence à Berchtesgaden. Au cours de leur réunion du 12 février 1938, sous la menace de l’invasion, Schuschnigg dut se résoudre à promettre une amnistie au profit de tous les nazis emprisonnés et à nommer des nazis comme ministres. Il s’engagea à observer le silence jusqu’au discours de Hitler en date du 20 février, au cours duquel l’indépendance de l’Autriche devait être réaffirmée. Mais Hitler, dans son discours, au lieu d’affirmer l’indépendance de l’Autriche, se proclama protecteur de tous les Allemands. Entre temps, en Autriche, les activités subversives des nazis s’amplifiaient. Le 9 mars 1938, Schuschnigg annonça pour le dimanche suivant un plébiscite sur la question de l’indépendance autrichienne. Le 11 mars, Hitler exigea par un ultimatum que le plébiscite fût supprimé, sinon, l’Allemagne envahirait l’Autriche. Plus tard, dans la même journée, un deuxième ultimatum comportait une menace d’invasion si Schuschnigg ne démissionnait pas dans les trois heures. Schuschnigg démissionna. L’accusé Seyss-Inquart, nommé Chancelier, invita aussitôt Hitler à envoyer des troupes en Autriche pour « maintenir l’ordre ». L’invasion commença le 12 mars 1938. Le 13 mars, Hitler, dans une proclamation, assuma le poste de chef de l’État autrichien et prit le commandement de ses Forces armées. Par une loi de la même date, l’Autriche fut annexée à l’Allemagne.


c) Exécution du plan d’invasion de la Tchécoslovaquie
(avril 1938 - mars 1939).

1. Simultanément avec l’annexion de l’Autriche, les conspirateurs nazis donnèrent au Gouvernement tchécoslovaque l’assurance fallacieuse, qu’ils n’avaient pas l’intention d’attaquer le pays. Mais, dans le même mois, ils se réunirent pour préparer l’attaque contre la Tchécoslovaquie et pour reviser, à la lumière de l’expérience autrichienne, leur plan précédent en vue d’une agression contre la Tchécoslovaquie.

2. Le 21 avril 1938, les conspirateurs nazi se réunirent pour préparer une attaque contre la Tchécoslovaquie pour le 1er octobre 1938 au plus tard. Ils envisagèrent particulièrement de créer un « incident » pour « justifier » l’attaque. Ils décidèrent de ne lancer une opération militaire qu’après une période de querelles diplomatiques qui, en s’aggravant, fourniraient un prétexte pour la guerre, ou encore de déclencher une attaque-éclair qui serait la conséquence d’un « incident » créé par eux-mêmes. On envisagea l’assassinat de l’ambassadeur d’Allemagne à Prague comme susceptible de créer l’incident nécessaire. À partir du 21 avril, les conspirateurs nazis firent préparer des plans militaires précis et détaillés en vue de procéder à cette attaque à tout moment opportun et ils calculèrent d’écraser dans les quatre jours toute résistance tchécoslovaque, mettant ainsi tout le monde devant le fait accompli et prévenant, de ce fait, une résistance extérieure. Au cours des mois de mai, juin, juillet, août et septembre, ces plans furent encore précisés et approfondis et, le 3 septembre 1938, il fut décidé que toutes les troupes devaient se tenir prêtes à l’action pour le 28 septembre 1938.

3. Pendant toute cette période, les conspirateurs nazis menèrent campagne autour de la question des minorités en Tchécoslovaquie, particulièrement dans le pays des Sudètes ; cette campagne aboutit à une crise diplomatique en août et en septembre 1938. Après que les conspirateurs nazis eurent menacé de recourir à la guerre, le Royaume-Uni et la France conclurent à Munich, le 29 septembre 1938, un pacte avec l’Allemagne et l’Italie, lequel impliquait la cession du pays des Sudètes par la Tchécoslovaquie à l’Allemagne. La Tchécoslovaquie fut mise en demeure d’y acquiescer. Le 1er octobre 1938, les Forces allemandes occupaient le pays des Sudètes.

4. Le 15 mars 1939, contrairement aux stipulations du Pacte de Munich lui-même, les conspirateurs nazis parachevèrent la réalisation de leur plan jusqu’au bout, en saisissant et en occupant la plus grande partie du territoire de la Tchécoslovaquie qui n’avait pas été cédé à l’Allemagne par le Pacte de Munich.


4. Conception du plan d’attaque contre la Pologne : Préparation et déclenchement de la guerre d’agression
(mars 1939 - septembre 1939).

a) Grâce à la réussite de ces agressions, les conspirateurs avaient obtenu les ressources et les bases qu’ils avaient ardemment convoitées et se trouvaient en mesure d’entreprendre de nouvelles guerres d’agression. Après avoir donné au monde des assurances de leurs intentions pacifiques, un groupe influent des conspirateurs se réunit le 23 mai 1939 pour examiner la réalisation ultérieure de leur plan. Ils passèrent en revue la situation et notèrent que les « six années qui venaient de s’écouler avaient été bien employées et que toutes les mesures avaient été prises dans l’ordre convenable et en conformité avec leur but ; que l’unité nationale politique des Allemands avait été, en substance, réalisée, mais qu’il était impossible d’obtenir de nouvelles réussites sans guerre et sans effusion de sang ». Ils décidèrent néanmoins d’attaquer d’abord la Pologne à la première occasion favorable. Ils admirent que les questions concernant Dantzig qui formaient l’objet des discussions avec la Pologne n’étaient point le vrai problème, mais qu’il s’agissait plutôt d’une expansion et d’une agression pour acquérir des vivres et du « Lebensraum ». Ils reconnurent que la Pologne se battrait si elle était attaquée et qu’il ne fallait pas s’attendre à une répétition des succès nazis remportés sans guerre contre la Tchécoslovaquie. En conséquence, le problème consistait à isoler la Pologne et à prévenir, si possible, un conflit simultané avec les Puissances occidentales. Néanmoins, les conspirateurs tombèrent d’accord sur le fait que l’Angleterre était hostile à leurs aspirations, qu’une guerre avec l’Angleterre et son alliée la France en résulterait fatalement et que, par conséquent, tout effort dans cette guerre devrait viser à écraser l’Angleterre par un « Blitzkrieg ». Il fut décidé de préparer immédiatement des plans détaillés pour une attaque contre la Pologne à exécuter à la première occasion favorable, et ensuite, pour une attaque contre l’Angleterre et la France, concurremment avec des plans pour une occupation simultanée de bases aériennes par les Forces allemandes dans les Pays-Bas et en Belgique.

b) Après avoir dénoncé sous de faux prétextes le pacte germano-polonais de 1934, les conspirateurs nazis agitèrent la question de Dantzig, préparèrent les « incidents de frontière » afin de « justifier » leur attaque et de formuler des revendications tendant à la cession de territoires polonais. La Pologne ayant refusé de céder, les conspirateurs firent envahir son territoire par les Forces armées allemandes le 1er septembre 1939, déclenchant ainsi également la guerre avec le Royaume-Uni et la France.


5. Extension de la guerre en une guerre générale d’agression : Conception et exécution des attaques contre le Danemark, la Norvège, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Yougoslavie et la Grèce (1939-avril 1941).

Ainsi, la guerre d’agression préparée par les conspirateurs nazis, au moyen de leurs attaques contre l’Autriche et la Tchécoslovaquie, fut déclenchée, en fait, au moment de leur attaque contre la Pologne, en violation des termes du Pacte Briand-Kellogg de 1928. Après la défaite totale de la Pologne, afin de faciliter la conduite de leurs opérations militaires contre la France et le Royaume-Uni, les conspirateurs nazis firent des préparatifs actifs pour une extension de la guerre en Europe. Conformément à leurs plans, ils firent envahir par les Forces armées allemandes le Danemark et la Norvège le 9 avril 1940, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg le 10 mai 1940, la Yougoslavie et la Grèce le 6 avril 1941. Toutes ces invasions avaient été arrêtées à l’avance dans tous leurs détails.


6. Invasion du territoire soviétique par les Allemands le 22 juin 1941, en violation du pacte de non-agression du 23 août 1939.

Le 22 juin 1941, les conspirateurs nazis dénoncèrent traîtreusement le pacte de non-agression entre l’Allemagne et l’URSS et, sans déclaration de guerre, envahirent le territoire soviétique, commençant ainsi une guerre d’agression contre l’URSS.

Dès le tout premier jour de leur attaque contre le territoire soviétique, les conspirateurs nazis, en conformité avec leurs plans précis, commencèrent à effectuer la destruction de cités, de villes et de villages, la démolition de manufactures et d’usines, de fermes collectives, de stations électriques et de chemins de fer, le pillage et la dévastation barbare des institutions culturelles nationales des peuples de l’URSS ; la dévastation de musées, d’écoles, d’hôpitaux, d’églises, de monuments historiques ; la déportation massive en Allemagne de citoyens soviétiques en vue d’un travail forcé, ainsi que l’anéantissement de populations : adultes, vieillards, femmes et enfants, spécialement Russes, Blancs-Russiens, Ukrainiens ; enfin, l’extermination des Juifs. Ces crimes furent commis sur toute l’étendue du territoire soviétique envahi.

Les infractions criminelles susmentionnées furent perpétrées par les troupes allemandes en conformité avec les ordres du Gouvernement nazi, de l’État-Major général et du Haut Commandement des Forces Armées allemandes.


7. Collaboration avec l’Italie et le Japon et guerre d’agression contre les États-Unis (novembre 1936 - décembre 1941).

Après le commencement de leurs guerres d’agression, les conspirateurs nazis préparèrent une alliance militaire et économique de dix ans entre l’Allemagne, l’Italie et le Japon, alliance conclue à Berlin le 27 septembre 1940. Cet accord, représentant un renforcement des liens établis entre ces trois nations par le pacte antérieur mais plus limité du 25 novembre 1936, stipulait : « Les Gouvernements de l’Allemagne, de l’Italie et du Japon, considérant comme une condition nécessaire de toute paix durable que toutes les nations du monde se voient attribuer à chacune sa propre place, ont décidé de se soutenir et de coopérer ensemble en ce qui concerne leurs efforts respectifs dans la Plus Grande Asie orientale et dans les régions d’Europe où leur premier objectif est d’établir et de maintenir un nouvel ordre de choses destiné à favoriser la prospérité et le bien-être des peuples intéressés ». Les conspirateurs nazis pensaient que l’agression japonaise affaiblirait et gênerait les nations avec lesquelles ils étaient en guerre et celles contre lesquelles ils projetaient d’entrer en guerre. En conséquence, ils exhortèrent le Japon à chercher un « nouvel ordre de choses ». Profitant des guerres d’agression alors menées par les conspirateurs nazis, le Japon attaqua, le 7 décembre 1941, les États-Unis d’Amérique à Pearl Harbor et dans les Philippines et le Commonwealth des nations britanniques, l’Indochine française et les Pays-Bas dans le Pacifique Sud-Ouest. L’Allemagne déclara la guerre aux États-Unis le 11 décembre 1941.


g. crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en cours d’exécution du complot dont les conspirateurs sont responsables.

1. Dès le début de la guerre d’agression, le 1er septembre 1939, et au cours de son extension dans des guerres qui englobèrent à peu près le monde entier, les conspirateurs nazis exécutèrent leur plan concerté ou complot de conduire la guerre avec un mépris impitoyable et total des lois et coutumes de la guerre, et en violation de ces lois et coutumes. Au cours de l’exécution de ce plan concerté ou complot, furent commis les crimes de guerre énumérés ci-après dans le chef d’accusation no 3 du présent Acte.

2. Dès le début de la réalisation de leur plan pour saisir et conserver le contrôle total de l’État allemand, et ensuite dans l’usage qu’ils faisaient de ce contrôle, pour leurs desseins d’agression à l’extérieur, les conspirateurs nazis exécutèrent leur plan concerté ou complot avec un mépris impitoyable et total des lois de l’humanité et en violation de ces lois. Au cours de l’exécution de ce plan, furent commis les crimes contre l’Humanité énumérés ci-après dans le chef d’accusation no 4 du présent Acte.

3. En raison de tout ce qui précède, les accusés (avec divers autres) sont coupables d’un complot pour l’accomplissement de crimes contre la Paix ; d’un complot pour commettre des crimes contre l’Humanité au cours de la préparation à la guerre et de la poursuite de la guerre et d’un complot en vue de commettre des crimes de guerre, non seulement contre les forces armées de leurs ennemis, mais aussi contre les populations civiles non belligérantes.


h. responsabilité des individus, des groupements et des organisations en ce qui concerne le crime indiqué dans le chef d’accusation no 1.

Il y a lieu de se référer à l’appendice A du présent Acte d’accusation pour l’établissement de la responsabilité des individus accusés du crime traité dans le chef d’accusation no 1 du présent Acte. Il y a lieu de se référer à l’appendice B de cet Acte d’accusation, pour l’établissement de la responsabilité des groupements et organisations mentionnés dans ce document comme groupements et organisations criminels, coupables du crime dont il a été traité dans le chef d’accusation no 1 du présent Acte.


CHEF D’ACCUSATION No 2.

CRIMES CONTRE LA PAIX.

(Statut, article 6, a).


V.

Qualification de l’infraction.

Tous les accusés, avec diverses autres personnes, ont pendant plusieurs années antérieures au 8 mai 1945, participé à la conception, à la préparation, au déclenchement et à la conduite de guerres d’agression qui furent aussi des guerres en violation de traités, accords et engagements internationaux.


VI.

Détail des guerres conçues, préparées, déclenchées et conduites.

A. Les guerres dont il est question dans l’exposé du crime compris dans le présent chef d’accusation et les dates de leur déclenchement furent les suivantes : contre la Pologne, 1er septembre 1939, contre le Royaume-Uni et la France, 3 septembre 1939 ; contre le Danemark et la Norvège, 9 avril 1940, contre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, 10 mai 1940, contre la Yougoslavie et la Grèce, 6 avril 1941, contre l’URSS, 22 juin 1941 et contre les États-Unis d’Amérique, 11 décembre 1941.

B. Il y a lieu de se référer au chef no 1 du présent Acte pour les accusations établissant que ces guerres furent des guerres d’agression de la part des accusés.

C. Il y a lieu de se référer à l’appendice C annexé au présent Acte d’accusation pour l’établissement des détails des accusations de violations des traités, accords et engagements internationaux, commises par les accusés lors de la conception, de la préparation et du déclenchement de ces guerres.


VII.

Responsabilité des individus, des groupements et des organisations pour le crime invoqué dans le chef d’accusation no 2.

Il y a lieu de se référer à l’appendice A du présent Acte d’accusation pour l’établissement de la responsabilité des individus accusés du crime traité dans le chef d’accusation no 2 du présent Acte et à l’appendice B de l’Acte d’accusation pour l’établissement de la responsabilité des groupements et organisations mentionnés comme groupements et organisations criminels coupables du crime dont il a été traité dans le chef d’accusation no 2 du présent Acte.


CHEF D’ACCUSATION No 3.

CRIMES DE GUERRE.

(Statut, article 6, spécialement 6, b).


VIII.

Qualification de l’infraction.

Tous les accusés ont commis des crimes de guerre entre le 1er septembre 1939 et le 8 mai 1945 en Allemagne et dans tous les pays et territoires occupés par les Forces armées allemandes depuis le 1er septembre 1939 ainsi qu’en Autriche, Tchécoslovaquie, Italie et en haute mer.

Tous les accusés, agissant de concert avec d’autres, conçurent et exécutèrent un plan concerté ou complot pour commettre des crimes de guerre tels qu’ils sont définis dans l’article 6, b du Statut. Ce plan impliquait, entre autres choses, la pratique de la « guerre totale », qui comporte des méthodes de combat et d’occupation militaire en opposition directe avec les lois et coutumes de la guerre, la perpétration de crimes commis : sur le champ de bataille, au cours des rencontres avec des armées ennemies, contre des prisonniers de guerre et contre la population civile des territoires occupés.

Lesdits crimes de guerre furent commis par les accusés et par d’autres personnes. Les accusés, ayant participé en tant que dirigeants, organisateurs, instigateurs et complices à l’élaboration et à l’exécution du plan concerté des crimes, doivent être tenus comme responsables (art. 6 du Statut).

Ces méthodes et ces crimes constituaient des violations des conventions internationales, du droit pénal interne et des principes généraux du droit criminel tels qu’ils dérivent du droit criminel de toutes les nations civilisées, et faisaient partie implicite ou intégrante d’une ligne de conduite systématique.


a. meurtres et mauvais traitements des civils originaires ou habitants des territoires occupés et en haute mer.

Pendant toute la période d’occupation des territoires envahis par leurs forces armées, les accusés, dans le but de terroriser systématiquement les habitants, maltraitèrent et assassinèrent des civils.

Les meurtres et mauvais traitements étaient accomplis par des moyens variés, tels que fusillades, pendaisons, chambres à gaz, mort par inanition, promiscuité inhumaine, sous-alimentation systématique, imposition systématique de travaux dépassant les forces de ceux qui y étaient astreints, insuffisance des services chirurgicaux et médicaux, coups de pieds, de poings, brutalités et tortures de toutes sortes, notamment usage de fers rougis, arrachage des ongles et expériences chirurgicales ou autres, faites sur des êtres humains vivants. Dans certains territoires occupés, les accusés firent obstacle aux services religieux, persécutèrent des membres du clergé et des ordres monastiques, et confisquèrent les biens ecclésiastiques. Ils se livrèrent au génocide délibéré et systématique, c’est-à-dire à l’extermination de groupes raciaux et nationaux parmi la population civile de certains territoires occupés, afin de détruire des races ou classes déterminées de population et de groupes nationaux, raciaux ou religieux, particulièrement les Juifs, les Polonais, les Tziganes,

Ils soumirent systématiquement des civils à des tortures de toutes sortes, dans le but de leur arracher des renseignements.

Des civils des pays occupés furent systématiquement soumis à des « arrestations de protection », c’est-à-dire qu’ils furent arrêtés et emprisonnés sans le moindre jugement et sans les moindres garanties habituelles de la loi, dans les conditions les plus malsaines et les plus inhumaines.

Dans les camps de concentration, beaucoup de prisonniers furent classés « Nacht und Nebel ». Ils furent entièrement retranchés du monde et ne purent ni recevoir ni envoyer de lettres. Ils disparurent sans laisser de trace, et les autorités allemandes ne firent jamais mention de leur sort.

De tels crimes et mauvais traitements sont contraires aux conventions internationales, en particulier à l’article 46 du Règlement de La Haye de 1907, aux lois et coutumes de la guerre, aux principes généraux du droit criminel, tels qu’ils dérivent du droit criminel de toutes les nations civilisées, aux lois pénales internes des pays où furent commis ces crimes, et à l’article 6, b du Statut.

Les détails qui suivent et tous ceux qu’on trouvera plus loin sous ce chef d’accusation ne sont donnés qu’à titre d’exemple et sont exposés sans préjudice du droit, pour le Ministère Public, d’apporter la preuve d’autres cas de meurtres et mauvais traitements sur des civils.

1. En France, en Belgique, en Hollande, au Danemark, en Norvège, au Luxembourg, en Italie et dans les Îles Normandes (pays désignés ci-après comme pays de l’Ouest) et dans la partie de l’Allemagne qui se trouve à l’ouest d’une ligne tracée du Nord au Sud, passant par le centre de Berlin (désigné ci-après sous le nom « d’Allemagne occidentale »).

Ces meurtres et ces mauvais traitements eurent lieu dans des camps de concentration ou autres établissements semblables, créés par les accusés, en particulier dans les camps de concentration de Belsen, Buchenwald, Dachau, Breendonck, Crini, Natzweiler, Ravensbrück, Vught et Amersfoort, et dans de nombreuses cités, villes et villages : par exemple Oradour-sur-Glane, Trondheim et Oslo.

Les crimes commis en France ou contre les citoyens français ont revêtu les formes suivantes : des arrestations arbitraires ont été opérées sous des prétextes politiques et raciaux ; elles furent, soit individuelles, soit collectives ; notamment à Paris (rafle du 18e arrondissement par la Feldgendarmerie, rafle de la population juive du 11e arrondissement au mois d’août 1941, rafle de la population intellectuelle juive de décembre 1941, rafle de juillet 1942) ; à Clermont-Ferrand (rafle des professeurs et des étudiants de l’Université de Strasbourg, repliée à Clermont-Ferrand, le 25 novembre 1943) ; à Lyon, à Marseille (rafle de 40.000 personnes au mois de janvier 1943) ; à Grenoble (rafle du 24 décembre 1943) ; à Cluny (rafle du 24 décembre 1944) ; à Figeac (rafle de mai 1944) ; à Saint-Pol-de-Léon (rafle de juillet 1944) ; à Locminé (rafle du 3 juillet 1944) ; à Eysieux (rafle de mai 1944), et à Moussey (rafle de septembre 1944). Ces arrestations ont été suivies de brutalités et de tortures réalisées par les moyens les plus divers, à savoir : l’immersion dans l’eau glacée, l’asphyxie, la torture des membres et l’emploi d’instruments tels que le casque de fer et le courant électrique, pratiquées dans toutes les prisons de France, notamment à Paris, Lyon, Marseille, Rennes, Metz, Clermont-Ferrand, Toulouse, Nice, Grenoble, Annecy, Arras, Béthune, Lille, Loos, Valenciennes, Nancy, Troyes et Caen, et dans les chambres de torture aménagées dans les immeubles de la Gestapo.

Dans les camps de concentration, le régime sanitaire et le régime du travail étaient tels que la mortalité (prétendue naturelle), atteignait d’énormes proportions, par exemple :

1o Sur un convoi de 250 Françaises déportées de Compiègne pour Auschwitz en janvier 1943, 180 étaient mortes de faiblesse au bout de quatre mois ;

2o 143 Français sont morts de faiblesse du 23 mars au 6 mai 1943, au block 8 de Dachau ;

3o 1.797 Français sont morts de faiblesse, du 21 novembre 1943 au 15 mars 1945, au block de Dora ;

4o 465 Français sont morts de cachexie, en novembre 1944, à Dora ;

5o 22.761 déportés sont morts de faiblesse à Buchenwald, du 1er janvier 1943 au 15 avril 1945 ;

6o 11.560 détenus sont morts de faiblesse au camp de Dachau, et plus particulièrement au block 30, réservé aux malades et aux invalides, du 1er janvier au 15 avril 1945 ;

7o 780 prêtres sont morts de faiblesse à Mauthausen ;

8o Sur 2.200 Français immatriculés au camp de Flossenburg, 1.600 sont décédés de mort prétendue naturelle.

L’extermination dans les camps de concentration se poursuivit par mauvais traitement sous le prétexte d’expérimentations pseudo-scientifiques (stérilisation des femmes à Auschwitz et à Ravensbrück, étude de l’évolution du cancer de l’utérus à Auschwitz, du typhus à Buchenwald, recherches anatomiques à Natzweiler, piqûres au cœur à Buchenwald, greffes osseuses et ablations musculaires à Ravensbrück, etc.), et par l’envoi dans les chambres à gaz, dans les wagons à gaz et dans les fours crématoires. Sur au moins 228.000 Français déportés pour des raisons politiques et raciales dans les camps de concentration, seuls 28.000 d’entre eux ont survécu.

En France même, des exterminations systématiques ont été opérées, notamment à Asq le 1er avril 1944, à Colpo le 22 juillet 1944, à Buzet-sur-Tarn le 6 juillet 1944 et le 17 août 1944, à Pluvignier le 8 juillet 1944, à Rennes le 8 juin 1944, à Grenoble le 8 juillet 1944, à Saint-Flour le 10 juin 1944, à Ruisnes le 10 juin 1944, à Nîmes, à Tulle, à Nice, où, en juillet 1944, les suppliciés ont été exposés à la population, et à Oradour-sur-Glane, où la population entière du village a été fusillée ou brûlée vive dans l’église,

De nombreux charniers témoignent de massacres anonymes. Tels sont notamment les charniers de Paris (cascade du Bois de Boulogne), Lyon, Saint-Genis-Laval, Besançon, Petit-Saint-Bernard, Aulnat, Caen, Port-Louis, Charleval, Fontainebleau, Bouconne, Gabaudet, Lhermitage-Lorges, Morlaas, Bordelongue, Signe.

Au cours d’une campagne préméditée de terrorisme inaugurée au Danemark par les Allemands vers la fin de 1943, 600 sujets danois furent assassinés, et en outre, au cours de l’occupation allemande de ce pays, un grand nombre de sujets danois furent soumis à la torture et à des mauvais traitements de toutes sortes ; de plus, environ 500 sujets danois furent mis à mort par tortures ou autrement, dans les prisons et les camps de concentration allemands.

En Belgique, entre 1940 et 1944, des tortures diverses, mais partout semblables, furent exécutées à Bruxelles, Liège, Mons, Gand, Namur, Anvers, Tournai, Arlon, Charleroi et Dinant.

À Vught, en Hollande, quand le camp fut évacué, environ 400 personnes furent fusillées. Au Luxembourg, pendant l’occupation allemande, 500 personnes furent assassinées et, de plus, 521 autres furent exécutées illégalement, par ordre de tribunaux spéciaux tels que le « Sondergericht ». Beaucoup d’autres personnes, au Luxembourg, furent soumises par la Gestapo à la torture et aux mauvais traitements, 4.000 Luxembourgeois au moins furent emprisonnés pendant la période d’occupation allemande et, sur ce nombre, 400 au moins furent assassinés.

Entre mars 1944 et avril 1945, en Italie, au moins 7.500 hommes, femmes et enfants, s’échelonnant de l’enfance à l’extrême vieillesse, furent assassinés par la soldatesque allemande, à Civitella, dans les grottes ardeatines de Rome et en d’autres endroits.

2. Dans les Républiques Socialistes Soviétiques, c’est-à-dire en Biélorussie, Ukraine, Esthonie, Lettonie, Lithuanie, Karelo-Finlande et Moldavie, dans dix-neuf régions de la République Socialiste Soviétique fédérée de Russie, et en Pologne, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Grèce et Balkans (territoires désignés ci-après comme pays de l’Est), et dans la partie de l’Allemagne qui s’étend à l’Est d’une ligne Nord-Sud passant par le centre de Berlin, (désignée ci-après comme « Allemagne orientale »).

À partir du 1er septembre 1939, quand les Forces armées allemandes envahirent la Pologne, et à partir du 22 juin 1941, quand elles envahirent l’URSS, le Gouvernement et le Haut Commandement allemands adoptèrent une politique systématique de massacres et de mauvais traitements des populations civiles originaires des pays de l’Est ou y habitant, au fur et à mesure de l’occupation de ces pays par les Forces allemandes. Ces meurtres et ces mauvais traitements continuèrent jusqu’à ce que les Allemands fussent chassés desdits pays.

Les meurtres et mauvais traitements comprirent :

a) Meurtres et mauvais traitements dans les camps de concentration ou autres établissements similaires créés par les Allemands dans les pays de l’Est et dans l’Allemagne orientale, y compris ceux de Maidanek et Auschwitz.

Lesdits meurtres et mauvais traitements furent réalisés par des moyens divers, y compris tous ceux qui ont été exposés plus haut.

Environ 1.500.000 personnes furent exterminées à Maidanek, et environ 4.000.000 exterminées à Auschwitz ; parmi elles se trouvaient des citoyens de Pologne, de l’URSS, des États-Unis d’Amérique, de Grande-Bretagne, de Tchécoslovaquie, de France et d’autres pays.

Dans la région de Lwow et dans la ville de Lwow, les Allemands exterminèrent environ 700.000 citoyens soviétiques, y compris 70 personnalités du monde de l’art de la science, de la technologie, ainsi que des citoyens des États-Unis, de Grande-Bretagne, de Tchécoslovaquie, de Yougoslavie et de Hollande, amenés d’autres camps de concentration dans cette région.

Dans le ghetto juif, du 7 septembre 1941 au 6 juillet 1943, plus de 133.000 personnes furent torturées et fusillées.

Des fusillades en masse de la population eurent lieu dans les faubourgs de la ville et dans la forêt de Livenitz.

Dans le camp de Ganov, 200.000 citoyens paisibles furent exterminés. Les méthodes les plus raffinées de cruauté furent employées à cette extermination, telles que l’éventration et la congélation d’êtres humains dans les barils d’eau. Des exécutions en masse eurent lieu, accompagnées de la musique d’un orchestre recruté parmi les internés.

À partir de juin 1943, les Allemands prirent des mesures pour cacher les preuves de leurs crimes. Ils exhumèrent et brûlèrent les cadavres, broyèrent les os avec des machines et les utilisèrent comme engrais.

Au début de 1944, dans la région d’Ozarichi et de la République Socialiste Bielorussienne, avant sa libération par l’Armée Rouge, les Allemands installèrent trois camps de concentration sans abri, où ils internèrent des dizaines de milliers de personnes des territoires voisins. Ils amenèrent intentionnellement dans ces camps beaucoup de malades des hôpitaux de typhiques, pour contaminer les autres internés et répandre la maladie dans les territoires dont ils étaient chassés par l’Armée Rouge. Il y eut dans ces camps, beaucoup de meurtres et de crimes.

Dans la République Socialiste Soviétique d’Esthonie, ils fusillèrent des dizaines de milliers de personnes et, en un seul jour, le 19 septembre 1944, au camp Kloga, les Allemands fusillèrent 2.000 citoyens paisibles. Ils brûlèrent les corps dans des feux de joie.

Dans la République Socialiste Soviétique de Lithuanie, il y eut des exécutions en masse de citoyens soviétiques, notamment à Panerai au moins 100.000 ; à Kaunas, plus de 70.000 ; à Alitus, environ 60.000 ; à Prenai, plus de 3.000 ; à Villiampol, environ 8,000 ; à Mariampol, environ 7.000 ; à Trakai et dans les villes avoisinantes, 37.640.

Dans la République Socialiste Soviétique de Lettonie, 577.000 personnes furent massacrées.

Le régime intérieur imposé dans tous les camps condamnait les personnes internées à mourir.

Dans des instructions secrètes, intitulées « Régime intérieur des camps de concentration », et signées personnellement par Himmler, en 1941, de sévères mesures de punition furent prévues pour les internés. Des masses de prisonniers de guerre furent fusillées ou moururent de froid et de tortures.

b) Les meurtres et mauvais traitements dans les pays de l’Est et de l’Union Soviétique, dans des lieux autres que les camps mentionnés au paragraphe a ci-dessus, comprirent, pendant l’occupation des Forces armées allemandes, à des dates variées :

La destruction, dans la région de Smolensk, de plus de 135.000 citoyens soviétiques.

Près du village de Kholmetz, de la région de Sychev, quand les autorités militaires allemandes reçurent l’ordre, du major-général Fisler, commandant la 101e division d’infanterie allemande, de déminer le secteur, les soldats allemands rassemblèrent les habitants du village de Kholmetz et les forcèrent à enlever les mines de la route. Toutes ces personnes furent tuées par l’explosion des mines.

Dans la région de Léningrad, plus de 172.000 personnes furent fusillées et torturées, y compris plus de 20.000 personnes tuées dans la ville de Léningrad par les barrages d’artillerie et les bombardements sauvages.

Dans la région de Stavropol, dans une tranchée antitanks voisine de la gare de Mineralny-Vody, et dans d’autres villes, des dizaines de milliers de personnes furent exterminées.

À Pyatigorsk, un grand nombre de personnes furent soumises à la torture et à des traitements criminels, entre autres suspension au plafond ; de nombreuses victimes de ces tortures furent ensuite fusillées.

À Krasnodar, 6.700 civils environ furent tués par des gaz toxiques, dans des fourgons à gaz, ou furent torturés et fusillés.

Dans la région de Stalingrad, plus de 40.000 personnes furent torturées et tuées. Après que les Allemands eurent été expulsés de Stalingrad, plus d’un millier de corps mutilés d’habitants furent trouvés portant des marques de tortures ; 139 femmes avaient les bras douloureusement ramenés derrière le dos et liés par des fils de fer. À certaines d’entre elles on avait coupé les seins, les oreilles, les doigts et les orteils. Les corps portaient des marques de brûlures. Sur les corps des hommes, l’étoile à cinq branches était marquée au fer rouge ou taillée au couteau, certains étaient éventrés.

À Orel, plus de 5.000 personnes furent assassinées.

À Novgorod et dans la région de Novgorod, des milliers de citoyens moururent de faim, de tortures, ou furent fusillés.

À Minsk, des dizaines de milliers de citoyens furent tués de semblable manière.

En Crimée, des citoyens paisibles furent réunis sur des péniches, emmenés en mer et noyés. Plus de 144.000 personnes périrent ainsi.

Dans l’Ukraine soviétique, les conspirateurs nazis commirent des crimes monstrueux. À Babi-Yar, près de Kiev, ils fusillèrent plus de 100.000 hommes, femmes, enfants et vieillards. Dans cette ville, en janvier 1942, après l’explosion du Quartier Général allemand, rue Dzerzhinsky, les Allemands arrêtèrent comme otages 1.250 personnes : vieillards, enfants et femmes avec leurs nourrissons ; à Kiev, ils tuèrent plus de 195.000 personnes.

À Rovno et dans la région de Rovno, ils tuèrent et torturèrent plus de 100.000 citoyens paisibles.

À Dniepropetrovsk, près de l’Institut des transports, ils fusillèrent ou jetèrent vivants dans un grand ravin 11.000 femmes, vieillards et enfants.

Dans la région de Kamenetz-Podolsk, 31.000 Juifs furent fusillés et exterminés, y compris 13.000 personnes amenées de Hongrie.

Dans la région d’Odessa, au moins 200.000 citoyens soviétiques furent tués.

À Kharkov, environ 195.000 personnes furent torturées jusqu’à la mort, fusillées ou gazées dans des fourgons à gaz.

À Gomel, les Allemands rassemblèrent les habitants, dans des prisons, les torturèrent, les tourmentèrent et les emmenèrent ensuite au centre de la ville, pour les exécuter en public.

À Lyda, dans la région de Grodnen, le 8 mai 1942, 5.670 personnes furent complètement dévêtues, conduites dans des enclos par groupes de 100 et abattues à la mitrailleuse ; bon nombre d’entre elles furent jetées vivantes dans des fosses.

En même temps que des adultes, les envahisseurs fascistes allemands détruisirent sans pitié même des enfants. Ils les tuèrent avec leurs parents, en groupes ou isolément. Ils les tuèrent dans les maisons d’enfants et les hôpitaux, les enterrant vivants, les jetant dans les flammes, les transperçant de leurs baïonnettes, les empoisonnant, faisant des expériences sur eux, tirant leur sang pour l’usage de l’armée allemande, les jetant en prison, dans les chambres de tortures de la Gestapo et dans les camps de concentration, où ils mouraient de faim, de tortures, d’épidémies.

Du 6 septembre au 24 novembre 1942, dans la région de Brest, Pinsk, Kobren, Dyvina, Malority et Berezy-Kartuzsky, environ 400 enfants furent fusillés par les unités de représailles allemandes.

Dans le camp de Yanov, à Lwow, les Allemands tuèrent 8.000 enfants en deux mois.

Dans la station de Tiberda, ils tuèrent 500 enfants atteints de tuberculose osseuse, qui étaient en traitement au sanatorium. Sur le territoire de la République Socialiste Soviétique Lettone, les envahisseurs allemands tuèrent des milliers d’enfants qu’ils avaient amenés avec leurs parents de la République Socialiste Soviétique de Biélorussie, de Kalinin, de Kaluga et d’autres régions de la RSFSR.

En Tchécoslovaquie, à Brno, Seim, et autres lieux, à la suite de tortures, mauvais traitements, pendaisons, fusillades, plus de 20.000 personnes furent exterminées dans les prisons de la Gestapo. En outre, des milliers d’internés furent soumis à des traitements criminels, coups, tortures.

Avant, comme pendant la guerre, des milliers de patriotes tchèques, en particulier protestants et catholiques, avocats, médecins, professeurs, etc., furent arrêtés comme otages et emprisonnés. Un grand nombre de ces otages furent tués par les Allemands.

En Grèce, en octobre 1941, la population mâle de 16 à 60 ans des villages grecs d’Amelofito, Kliston, Kisonia, Mesovunos, Selli, Ano-Kerzilion et Kato-Kerzilion, fut fusillée ; en tout 416 personnes.

En Yougoslavie, des milliers de civils furent massacrés. D’autres exemples sont donnés plus loin au paragraphe D (exécution d’otages).


b. déportation pour travail forcé, et dans d’autres buts, des civils originaires des pays occupés et y habitant.

Pendant toute la période d’occupation par les Allemands des pays de l’Ouest et de l’Est, la politique du Gouvernement et du Haut Commandement allemands fut de déporter les citoyens valides d’un territoire occupé, soit en Allemagne, soit dans d’autres pays occupés, pour les obliger à travailler à des ouvrages de fortifications, dans des usines, et à d’autres tâches ayant trait à l’effort de guerre allemand.

Conformément à cette politique, il y eut des déportations en masse de tous les pays de l’Ouest et de l’Est pendant toute la période de l’occupation.

Ces déportations étaient contraires aux conventions internationales en particulier à l’article 46 du Règlement de La Haye de 1907, aux lois et coutumes de la guerre, aux principes du droit criminel, tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, du droit pénal interne des pays dans lesquels ces crimes ont été commis, et à l’article 6, b du Statut.


Détail des déportations à titre d’exemple seulement
et sans préjudice de la production des preuves d’autres cas.

1. En provenance des pays de l’Ouest :

En France eurent lieu les « déportations » suivantes de personnes, pour raisons politiques ou raciales, chaque transport étant de 1.500 à 2.500 déportés :

1940 ............…..........................….......….......… 3 transports
1941 ............…..........................….......….......… 14
1942 ............…..........................….......….......… 104
1943 ............…..........................….......….......… 257
1944 ............…..........................….......….......… 326

Ces déportés étaient entassés de la manière la plus barbare. Les vêtements qui leur étaient fournis étaient tout à fait insuffisants, et on ne leur donnait que peu ou pas du tout de nourriture pour plusieurs jours de trajet.

Les conditions de transport furent telles que de nombreux déportés périrent au cours du voyage. Par exemple :

Dans l’un des wagons du train qui quitta Compiègne pour Buchenwald, le 17 septembre 1943, 80 personnes sur 130 périrent. Le 4 juin 1944, 484 cadavres furent retirés d’un train à Sarrebourg.

Dans un train qui quitta Compiègne le 2 juillet 1944 pour Dachau, plus de 600 morts furent constatées à l’arrivée, soit un tiers du nombre total.

Dans un train qui quitta Compiègne le 16 janvier 1944 pour Buchenwald, plus de 100 personnes étaient enfermées dans chaque wagon ; les morts et les blessés furent entassés dans le dernier wagon au cours du voyage.

En avril 1945, sur 12.000 internés évacués de Buchenwald, 4.000 seulement étaient vivants quand la colonne en marche arriva près de Ratisbonne.

Pendant l’occupation allemande du Danemark, 5.200 sujets danois furent déportés en Allemagne, et là, emprisonnés dans des camps de concentration et autres lieux.

En 1942 et postérieurement, 6.000 ressortissants du Luxembourg furent déportés de leur pays dans des conditions lamentables, et nombre d’entre eux périrent.

De Belgique, entre 1940 et 1944, au moins 190.000 civils furent déportés en Allemagne et astreints au travail forcé. Ces déportés étaient soumis aux mauvais traitements, et nombre d’entre eux étaient contraints de travailler dans des usines d’armement.

De Hollande, entre 1940 et 1944, près d’un demi-million de civils furent déportés en Allemagne ou dans d’autres territoires occupés.

2. Des pays de l’Est :

Les autorités allemandes d’occupation déportèrent de l’Union Soviétique, pour les réduire à la condition d’esclaves, environ 4.978.000 citoyens soviétiques,

750.000 citoyens tchécoslovaques furent déportés pour le travail forcé, hors des frontières tchécoslovaques, à l’intérieur de la machine de guerre allemande.

Le 4 juin 1941, dans la ville de Zagreb (Yougoslavie), une réunion de représentants allemands se tint sous la présidence du conseiller von Troll. Le but était d’arrêter les moyens pour déporter de Slovénie la population yougoslave.

10.000 personnes furent déportées en exécution de ce plan.


c. meurtres et mauvais traitements de prisonniers de guerre et autres membres des forces armées des pays avec lesquels l’allemagne était en guerre, et des personnes en haute mer.

Les accusés maltraitèrent et tuèrent des prisonniers de guerre en leur refusant une nourriture appropriée, un abri, des vêtements, des soins médicaux et autres ; en les obligeant à travailler dans des conditions inhumaines ; en les humiliant, en les torturant, en les massacrant. Le Gouvernement et le Haut Commandement allemands enfermèrent des prisonniers de guerre dans différents camps de concentration, ou ils furent tués ou soumis à des traitements inhumains, au moyen des différentes méthodes exposées au paragraphe VIII, A. Il arrivait fréquemment que des membres des forces armées des pays avec lesquels l’Allemagne était en guerre fussent exécutés au moment où ils se rendaient. Ces meurtres et ces mauvais traitements étaient contraires aux conventions internationales, particulièrement aux articles 4, 5, 6 et 7 du Règlement de La Haye de 1907, et aux articles 2, 3, 4 et 6 de la Convention sur les prisonniers de guerre (Genève 1929), aux lois et coutumes de la guerre, aux principes généraux du droit criminel tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, au droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes furent commis, et à l’article 6, b du Statut,

Des précisions, à titre d’exemple et sans préjudice de la production de preuves d’autres faits, sont données ci-après :


1. Dans les pays de l’Ouest :

Des officiers français qui s’étaient échappés de l’Oflag X C furent remis à la Gestapo et disparurent, d’autres furent assassinés par leurs gardes, d’autres furent envoyés dans des camps de concentration et exterminés. Notamment, les hommes du Stalag VI C furent envoyés à Buchenwald.

Dans de nombreux cas, des prisonniers capturés sur le front de l’Ouest furent obligés, pour se rendre dans leur camp, de marcher jusqu’à complet épuisement. Quelques-uns d’entre eux parcoururent plus de 600 kilomètres sans presque recevoir d’aliments. Ils marchèrent d’une traite pendant 48 heures sans nourriture ; parmi eux, un certain nombre moururent d’épuisement ou de faim. Les traînards étaient systématiquement exécutés.

Les mêmes crimes ont été commis en 1943, 1944 et 1945, quand les internés furent obligés de se replier devant l’avance alliée, en particulier lors du repli des prisonniers de Sagan, le 8 février 1945.

Des châtiments corporels étaient infligés aux sous-officiers ainsi qu’aux aspirants qui refusaient de travailler. Le 24 décembre 1943, trois sous-officiers français furent exécutés pour ce motif au Stalag IV A. De nombreux mauvais traitements étaient infligés à des militaires d’autres grades : blessures à la baïonnette, coups bas avec la crosse du fusil, et le fouet. Au Stalag XX B, les malades eux-mêmes étaient fréquemment battus par les sentinelles. Au Stalag IIIB et au Stalag III C, les prisonniers épuisés étaient exécutés ou gravement blessés. Dans les prisons militaires, à Graudenz par exemple, dans les camps de représailles comme le camp de Rava-Ruska, la nourriture était si insuffisante que les hommes perdaient plus de 15 kilos en quelques semaines. En mai 1942, à Rava-Ruska, une seule miche de pain était distribuée pour chaque groupe de 35 hommes.

Des ordres furent donnés de transférer enchaînés des officiers français au camp de Mauthausen, après leur tentative d’évasion. Quand ils arrivèrent au camp, ils furent exécutés, soit par fusillade soit par les gaz, et leurs corps furent détruits dans le four crématoire.

Des prisonniers américains, officiers et hommes de troupe, furent exécutés en Normandie pendant l’été 1944 et dans les Ardennes en décembre 1944. Des prisonniers américains furent affamés, frappés, et diversement mutilés dans de nombreux stalags en Allemagne ou dans les pays occupés, particulièrement en 1943, 1944 et 1945.


2. Dans les pays de l’Est :

À Orel, les prisonniers de guerre furent exterminés par famine, fusillade, exposition aux intempéries et empoisonnement.

Des prisonniers de guerre soviétiques furent exécutés en masse sur les ordres du Haut Commandement et du Quartier Général de la SIPO et du SD.

Des dizaines de milliers de prisonniers de guerre soviétiques furent torturés et exécutés au « Gross Lazaret », à Slavuta.

En outre, des milliers de personnes mentionnées au paragraphe VIII, A, 2 ci-dessus étaient des prisonniers de guerre soviétiques.

Des prisonniers de guerre qui s’échappèrent et furent repris, furent remis à la SIPO et au SD pour être fusillés.

Des Français combattant dans les rangs soviétiques furent, après leur capture, livrés au Gouvernement de Vichy aux fins de « poursuites ».

En mars 1944, 50 officiers de la RAF qui s’étaient évadés du Stalag Luft III, à Sagan, et qui avaient été repris, furent exécutés.

En septembre 1941, 11.000 officiers polonais, prisonniers de guerre, furent tués dans la forêt de Katyn près de Smolensk.

En Yougoslavie, dans la période de 1941-1943, le Commandement allemand et les autorités d’occupation représentés par les chefs supérieurs de la Police, les troupes SS (lieutenant-général de Police Rosener) et le commandement du groupe divisionnaire (le général Kübler et autres) ordonnèrent la fusillade des prisonniers de guerre,


d. meurtres d’otages.

Dans les territoires occupés par les Forces armées allemandes, au cours de leur guerre d’agression, les accusés firent arrêter et exécuter de nombreux otages pris dans la population civile. Ces actes étaient contraires aux conventions internationales, particulièrement à l’article 50 du Règlement de La Haye de 1907, aux lois et coutumes de la guerre, aux principes généraux du droit criminel tels qu’ils dérivent des lois criminelles de toutes les nations civilisées, au droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes furent commis, et à l’article 6, b du Statut.

Des précisions à titre d’exemple (et sans préjudice de la production de la preuve d’autres cas) sont énumérées ci-après.

1. Dans les pays de l’Ouest :

En France, les otages ont été exécutés soit individuellement, soit collectivement. Ces exécutions ont eu lieu dans toutes les grandes villes de France, entre autres Paris, Bordeaux et Nantes, aussi bien qu’à Châteaubriant.

En Hollande, des centaines d’otages furent fusillés notamment dans les villes de Rotterdam, Apeldoorn, Amsterdam, Benschop et Haarlem.

En Belgique, des centaines d’otages furent fusillés dans la période de 1940 à 1944.

2. Dans les pays de l’Est :

À Kragnevatz, en Yougoslavie, 2.300 otages furent fusillés en octobre 1941.

À Kralevo, en Yougoslavie, 5.000 otages furent fusillés.


e. pillage des biens publics et privés.

Les accusés exploitèrent impitoyablement les populations et les ressources matérielles des pays qu’ils occupaient, dans le but de renforcer la machine de guerre nazie, de dépeupler et appauvrir le reste de l’Europe, de s’enrichir et d’enrichir leurs adeptes et d’établir la suprématie économique de l’Allemagne sur l’Europe.

Les accusés, entre autres actes et pratiques, exécutèrent ce qui suit :

1. Ils abaissèrent le niveau d’existence des pays occupés et provoquèrent la famine en les dépouillant de produits alimentaires qu’ils transportaient en Allemagne.

2. Ils saisirent dans tous les pays occupés matières premières et outillage industriel, les transportèrent en Allemagne et les utilisèrent au profit de l’effort de guerre et de l’économie allemands.

3. Dans tous les pays occupés, à des degrés différents, ils confisquèrent les entreprises commerciales et industrielles et autres biens.

4. Pour tenter de donner une apparence légale aux acquisitions irrégulières de propriété, ils obligèrent les propriétaires de ces biens à se prêter à des formes de transfert « volontaire » et « légal ».

5. Ils établirent un contrôle étendu sur l’économie de tous les territoires occupés et dirigèrent leurs ressources, leur production et leur main-d’œuvre dans l’intérêt de l’économie de guerre allemande, privant les populations locales des produits d’industrie essentiels.

6. Par toute une série de mécanismes financiers, ils dépouillèrent tous les pays occupés de tous les produits essentiels et de toutes les réserves accumulées. Ils dévaluèrent les systèmes monétaires et désorganisèrent les économies locales. Ils financèrent des achats considérables dans les territoires occupés au moyen d’accords de clearing, grâce auxquels ils leur extorquèrent des emprunts.

Ils exigèrent des tributs d’occupation, imposèrent des contributions financières et émirent une monnaie d’occupation dont le volume dépassait de beaucoup le coût réel de l’occupation. Ils se servirent de cet excédent de fonds pour financer l’achat de propriétés industrielles et de fournitures, dans les territoires occupés.

7. Dans les régions occupées en URSS et en Pologne, et dans d’autres pays, ils privèrent la population locale du droit de développer ou diriger des propriétés industrielles ou agricoles et réservèrent ces zones aux Allemands et à leurs prétendus frères de race, qui eurent seuls le droit de s’y établir, de cultiver et de posséder la terre.

8. Allant plus loin encore dans leur plan d’exploitation criminelle, dans certains pays occupés ils détruisirent des villes industrielles, des monuments culturels, des instituts scientifiques et des biens de tous ordres pour éliminer toute possibilité de concurrence avec l’Allemagne.

9. De leur programme de terreur, d’esclavage, de spoliation et de crimes organisés, les conspirateurs nazis firent un instrument de profit personnel, d’enrichissement pour eux et pour leurs adeptes. Ils s’assurèrent pour eux-mêmes et ces derniers : a) des situations dans l’administration des affaires qui leur conférèrent le pouvoir, l’influence et des avantages lucratifs ; b) l’emploi d’une main-d’œuvre forcée à bon marché ; c) l’acquisition à des conditions avantageuses de biens étrangers, de matières premières et d’intérêts dans des affaires de tous ordres ; d) les bases de la suprématie industrielle de l’Allemagne.

Ces actes étaient contraires aux conventions internationales, particulièrement aux articles 46 à 56 inclus du Règlement de La Haye de 1907, aux lois et coutumes de la guerre et aux principes généraux du droit criminel, tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, au droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes furent commis et à l’article 6, b du Statut.

Des précisions (à titre d’exemple et sans préjudice de la production de la preuve d’autres faits) sont énumérées ci-après :

1o Dans les pays de l’Ouest :

De 1940 à 1944, des œuvres d’art, objets artistiques, peintures, statues, mobiliers, textiles, antiquités et autres objets de très grande valeur, au nombre de 21.903, ont été enlevés dans les pays de l’Ouest.

Pour la France, les statistiques font ressortir ce qui suit :


Prélèvements de matières premières.
Charbon ............…..........................….......…...…..…..…...… 63.000.000 tonnes
Énergie électrique ............…..........................….......….......… 20.976 Mkwh.
Pétrole et carburants ............…..........................…..........… 1.943.750 tonnes
Minerai de fer ............…..........................…......…...….......… 74.848.000
Produits sidérurgiques ............…...................….......….......… 3.822.000
Bauxite ............…..........................….........….....….......… 1.211.800
Ciment ............…..........................…................….….......… 5.984.000
Chaux ............…..........................….......…...............…...… 1.888.000
Produits de carrière ............…..........................…..........… 25.872.000

et différents autres produits d’une valeur totale de : 79.961.423.000 francs.


Prélèvements d’équipement industriel.

Total : 9.759.861.000 francs, dont 2.626.479.000 francs de machines-outils.


Prélèvements de produits agricoles.

Total : 126.655.852.000 francs.

Froment ............…..........................….......…...............… 2.947.337 tonnes
Avoine ............…..........................….......….........…..….....… 2.354.080
Lait ............…..........................….......….................….…...… 790.000 hectol.
Lait concentré et en poudre ............…............…......…...… 460.000
Beurre ............…....................….......…............…….......… 76.000 tonnes
Fromage ............…..........................…...................….......… 49.000
Pommes de terre ............….................…....…….….….....… 725.975
Légumes variés .............................…........….......….......… 575.000
Vin ............….................................……........….....….......… 7.647.000 hectol.
Champagne ............…..........................…...…....….…......… 87.000.000 de bout.
Bière ............…..........................….......….......….............… 3.821.520 hect
Différentes sortes d’alcool ............…................…..….......… 1.830.000 hectol.


Prélèvements de produits manufacturés.

Au total : 184.640.000.000 de francs.


Pillage.

Francs : 257.020.024.000 au détriment des entreprises privées.

Francs : 55.000.100.000 au détriment de l’État.


Exploitation financière.

De juin 1940 à septembre 1944, le Trésor Français a été contraint de payer à l’Allemagne : 631.866.000.000 de francs.


Destruction et pillage d’œuvres d’art.

Les musées de Nantes, de Nancy, du Vieux-Marseille furent pillés. Des collections privées de grande valeur furent dérobées. C’est ainsi que des œuvres de Raphaël, Vermeer, Van Dyck, Rubens, Holbein, Rembrandt, Watteau et Boucher disparurent. L’Allemagne força la France à livrer l’Agneau Mystique de Van Eyck que la Belgique lui avait confié.

En Norvège et dans d’autres pays occupés la confiscation de la propriété de nombreux civils, de sociétés, etc., fut ordonnée par décrets. Un nombre considérable de biens de toutes sortes fut volé en France, Belgique, Norvège, Hollande et au Luxembourg. Les dommages résultant du pillage subi par la Belgique entre 1940 et 1944 s’élevèrent à 175 billions de francs belges.


2o Dans les pays de l’Est :

Pendant l’occupation des pays de l’Est, le Gouvernement et le Haut Commandement allemands procédèrent à l’application systématique d’un programme de pillage et de destruction ;

Sur le territoire soviétique, les conspirateurs nazis détruisirent ou endommagèrent sérieusement 1.710 villes et plus de 70.000 villages et hameaux, plus de 6.000.000 de bâtiments et laissèrent environ 25.000.000 de personnes sans toit.

Parmi les villes qui ont le plus souffert de la destruction, se trouvent Stalingrad, Sébastopol, Kiev, Minsk, Odessa, Smolensk, Novgorod, Pskov, Orel, Karkow, Voronej, Rostov-sur-le-Don, Stalino et Leningrad.

Comme le démontre un mémorandum officiel du Commandement allemand, les conspirateurs allemands envisagèrent dans leur plan, l’anéantissement complet de villes soviétiques entières. Dans un ordre très secret du chef de l’État-Major naval no 1601/41, daté du 29 septembre 1941 et adressé seulement aux officiers d’État-Major, il est dit :

« Le Führer a décidé d’effacer de la surface de la terre Saint-Pétersbourg ; l’existence de cette grande ville n’aura plus aucun intérêt après la destruction de la Russie soviétique. La Finlande a dit, elle aussi, que l’existence de cette ville sur ses nouvelles frontières n’était pas désirable. La demande primitive formulée par la Marine de Guerre pour que les docks, les ports, etc., nécessaires à la flotte soient conservés est connue du Commandement suprême des Forces militaires, mais les principes essentiels relatifs à la conduite des opérations contre Saint-Pétersbourg ne permettent pas qu’il soit tenu compte de cette demande. On se propose de s’approcher de la ville et de la détruire à l’aide de barrages d’artillerie, avec des canons de tous calibres, ainsi que par des bombardements aériens prolongés…

« Le problème de la vie de la population et de son approvisionnement est un problème qui ne peut et ne doit pas être réglé par nous. Dans cette guerre… nous n’avons pas d’intérêt à préserver même une partie de la population de cette grande ville. »

Les Allemands détruisirent 427 musées. Parmi eux, les riches musées de Leningrad, de Smolensk, de Stalingrad, Novgorod, Poltava et autres villes.

Les œuvres d’art provenant du musée de Rostov, qui avaient été transportées à Pyatygorsk, furent saisies.

Les pertes subies par l’industrie minière rien que dans la région de Stalino se montent à 2 milliards de roubles. Il y eut des destructions colossales d’établissements industriels à Makerewka, Carlovka, Yenakievo, Constantinovka, Marioupol, d’où la plupart des machines et fabriques furent enlevées.

Kiev présente un cas typique de vol à une grande échelle et de destruction de biens industriels, culturels et autres. Plus de quatre millions de livres, de périodiques et manuscrits (dont beaucoup étaient extrêmement précieux et même uniques) ainsi qu’un grand nombre d’œuvres d’art et de valeurs de toutes sortes furent volés et emportés.

De nombreuses œuvres d’art de valeur furent enlevées de Riga.

L’étendue du pillage dans le domaine culturel est attestée par le fait que cent mille volumes de valeur et soixante-dix caisses de périodiques anciens et de monographies précieuses furent enlevées rien que par le personnel de Rosenberg.

Entre autres exemples de ces crimes figurent :

Dévastation sans motif de la ville de Novgorod et de nombreux monuments historiques et artistiques. Dévastation sans motif et pillage de la ville de Rovno et de sa province. Destructions de biens industriels, culturels et autres à Odessa, destruction de villes et villages en Karélie Soviétique, destruction de bâtiments culturels, industriels et autres en Esthonie.

Destruction d’instituts médicaux et prophylactiques, destruction de l’agriculture et de l’industrie en Lithuanie, destruction de villes en Lettonie.

Les Allemands s’attaquèrent avec une haine particulière aux monuments culturels chers au peuple soviétique. Ils morcelèrent le domaine du poète Pouchkine à Mikhailovskköye, profanant sa tombe et détruisant les villages voisins ainsi que le monastère de Svyatogor.

Ils détruisirent la propriété et le musée de Léon Tolstoï « Yasnaya Polyana » et profanèrent la tombe du grand écrivain. Ils détruisirent à Klin le musée de Tchaïkovsky et à Penaty le musée du peintre Repine et beaucoup d’autres.

Les conspirateurs nazis détruisirent 1.670 églises orthodoxes, 237 églises catholiques, 67 chapelles et 532 synagogues, etc.

Ils profanèrent et détruisirent sans raison les monuments les plus précieux de l’église chrétienne, tels que Kievo, Pecherskaya, Lavra, Novi-Jerusalem dans la région d’Istrine et les plus anciens monastères et églises.

Destruction, en Esthonie, d’établissements culturels, industriels et autres, incendie de plusieurs milliers de maisons d’habitation, enlèvement de dix mille œuvres d’art, destruction d’instituts médicaux et prophylactiques. Pillage et transfert en Allemagne d’immenses quantités de ressources agricoles, comprenant chevaux, vaches, porcs, volailles, ruches et machines agricoles de toute nature.

Destruction d’exploitations agricoles, asservissement des paysans, pillages de marchandises et de produits en Lithuanie. En République Lettone, destruction d’exploitations agricoles d’où tous les animaux, l’outillage et les produits furent enlevés.

Cette politique de pillage et de destruction entraîna la dévastation du territoire et sa ruine complète.

La valeur totale des pertes matérielles que l’URSS a subies est estimée à 679 milliards de roubles selon les prix officiels de 1941.

Après l’occupation de la Tchécoslovaquie le 15 mars 1939, les accusés saisirent et volèrent une énorme quantité de matières premières : cuivre, étain, fer, coton et produits alimentaires, acheminèrent sur l’Allemagne un stock important de matériel roulant, de nombreuses locomotives, wagons, bateaux à vapeur et trolleybus, dépouillèrent des bibliothèques, laboratoires et musées d’art, de livres, de peintures, d’objets d’art, d’appareils scientifiques et de mobilier. Ils volèrent toutes les réserves d’or et devises étrangères de la Tchécoslovaquie, y compris 23.000 kilos d’or d’une valeur nominale de 5.265.000 livres sterling et acquirent frauduleusement le contrôle des banques tchèques et de nombreuses entreprises industrielles qu’ils pillèrent ensuite. Ils volèrent et détournèrent des biens publics et privés tchécoslovaques. La somme totale des spoliations économiques effectuées en Tchécoslovaquie, de 1938 à 1945, par les accusés, est estimée à 200 milliards de couronnes tchécoslovaques.


f. sanctions collectives.

Dans tous les pays occupés, les Allemands infligèrent systématiquement des sanctions collectives, pécuniaires ou autres, aux populations, pour réprimer des actes individuels dont on ne pouvait les considérer comme collectivement responsables. C’est ce qui eut lieu dans de nombreuses localités, notamment à Oslo, Stavanger, Trondheim et Rogaland,

Les mêmes faits se produisirent en France, notamment à Dijon, Nantes, et dans tout le territoire occupé, à l’égard de la population juive.

Le montant total des amendes imposées aux communautés françaises s’élève à 1.157.179.484 francs et se décompose comme suit :

Amendes à la population juive : un milliard de francs.

Amendes diverses : 157.179.484 francs.

Ces actes violaient l’article 50 du Règlement de La Haye de 1907, les lois et coutumes de la guerre, les principes généraux du droit pénal tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, le droit pénal interne des pays dans lesquels ces crimes furent commis et l’article 6, b du Statut.


g. destruction sans raison des cités, villes et villages et dévastations non justifiées par les nécessités militaires.

Les accusés détruisirent sans raison des cités, villes et villages et commirent d’autres actes de dévastation sans justification ni nécessité militaire. Ces actes violaient les articles 46 et 50 du Règlement de La Haye (1907), les lois et les coutumes de la guerre, les principes généraux du droit pénal tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, le droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes ont été commis et l’article 6, b du Statut.

Des détails, à titre d’exemple et sans préjudice de la production de preuves en ce qui concerne d’autres cas, sont donnés ci-dessous.

1o Dans les pays de l’Ouest :

En mars 1941, une partie de Lofoten (Norvège) fut détruite.

En avril 1942, la ville de Telerag (Norvège) fut détruite.

Des villages entiers furent détruits en France, entre autres : Oradour-sur-Glane, Saint-Nizier, et dans le Vercors : La Mure, Vassieux, la Chapelle-en-Vercors. La ville de Saint-Dié fut brûlée et détruite, le quartier du Vieux-Port à Marseille fut dynamité au début de l’année 1943, des stations balnéaires le long de la côte atlantique et méditerranéenne, notamment la ville de Sanary, furent démolies.

En Hollande, il fut procédé à des destructions extrêmement étendues, qui n’étaient pas justifiées par les nécessités militaires, notamment la destruction de ports, d’écluses, de digues et de ponts ; d’immenses dévastations furent aussi causées par des inondations qui étaient tout aussi peu justifiées par des nécessités militaires,

2o Dans les pays de l’Est :

Dans les pays de l’Est, les accusés poursuivirent une politique de destruction sans motif et de dévastation ; quelques exemples, à cet égard (sans préjudice de la production des preuves en ce qui concerne d’autres cas) ont été indiqués plus haut sous la rubrique « pillage de biens publics et privés ».

En Grèce, en 1941, les villages d’Amelofito, Kliston, Kizonia, Mesovunos, Selli, Ano-Kerzilion et Kato-Kerzilion furent entièrement détruits.

En Yougoslavie, le 15 août 1941, le Commandement Militaire allemand annonça officiellement que le village de Skela avait été entièrement brûlé et les habitants tués par son ordre.

En Serbie, sur l’ordre du Feldkommandant Hoersterberg, une expédition punitive de troupes SS et de la Feldgendarmerie détruisit les villages de Machkovats et Kriva-Reka, ou tous les habitants furent tués.

Le général Fritz Neidhold (369e division d’infanterie) donna, le 11 septembre 1944, l’ordre de détruire les villages de Zagniezde et Udora, de pendre tous les hommes et de chasser les femmes et les enfants.

En Tchécoslovaquie, les conspirateurs nazis détruisirent aussi sans raison des lieux habités : Lezaky et Lidice furent complètement incendiés et les habitants tués.


h. mobilisation de travailleurs civils.

Dans tous les territoires occupés, les accusés procédèrent au recensement des habitants et les obligèrent à travailler ; ils furent requis en vue de travaux qui n’étaient pas indispensables à l’armée d’occupation ; cette réquisition dépassait largement les ressources des pays en cause. Tous les civils ainsi enrôlés furent obligés de travailler pour l’effort de guerre allemand. Ils furent astreints au recensement et beaucoup d’entre eux furent mis dans l’obligation de rejoindre l’organisation Todt et la légion Speer ; toutes les deux étaient des organisations semi-militaires comportant une certaine instruction militaire. Ces actes violaient les articles 46 et 52 du Règlement de La Haye de 1907, les lois et coutumes de la guerre, les principes généraux du droit pénal tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, le droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes furent commis et l’article 6, b du Statut.

Ci-après, des détails présentés à titre d’exemple sans préjudice de preuves en ce qui concerne d’autres cas :

1o Dans les pays de l’Ouest :

En France, de 1942 à 1944, 963.813 personnes furent contraintes de travailler en Allemagne et 737.000 en France pour l’armée allemande.

Au Luxembourg, rien qu’en 1944, 2.500 hommes et 500 femmes furent astreints au travail forcé.

2o Dans les pays de l’Est :

Parmi les nombreux ressortissants de l’URSS et de la Tchécoslovaquie mentionnés au troisième chef d’accusation, VIII, B, 2 ci-dessus, beaucoup furent enrôlés pour le travail forcé.


i. obligation imposée à des civils des territoires occupés de prêter un serment de fidélité à une puissance ennemie.

Les civils qui rejoignirent la légion Speer, ainsi qu’il est indiqué au paragraphe H ci-dessus, étaient contraints, sous la menace d’être privés de nourriture, d’argent et de papiers d’identité, de prêter un serment solennel, reconnaissant leur obéissance inconditionnelle à Adolf Hitler, Führer de l’Allemagne, qui était cependant pour eux une puissance ennemie.

En Lorraine, les fonctionnaires furent obligés pour conserver leur place, de signer une déclaration par laquelle ils reconnaissaient « le retour de leur pays au Reich », s’engageaient à obéir sans réserve aux ordres de leurs chefs et se mettaient « au service actif du Führer et de la Grande Allemagne nationale-socialiste ».

Un engagement similaire fut imposé aux fonctionnaires alsaciens sous la menace de déportation ou d’internement.

Ces actes violaient l’article 45 du Règlement de La Haye (1907), les lois et coutumes de la guerre, les principes généraux du Droit international et l’article 6, b du Statut.


j. germanisation des territoires occupés.

Les accusés déployèrent des efforts méthodiques et systématiques pour intégrer au Reich allemand, sur les plans politique, culturel, social et économique, certains territoires occupés qu’ils prétendaient annexés à l’Allemagne. Ils s’efforcèrent de faire disparaître l’ancien caractère national de ces territoires. Pour l’exécution de ces plans, les accusés déportèrent de force les habitants qui étaient en majorité non-Allemands et les remplacèrent par des milliers de colons allemands.

Leur plan comportait la domination économique, la conquête physique, l’installation de gouvernements à leur discrétion, la prétendue annexion de jure et le service obligatoire dans les Forces militaires allemandes.

Il fut appliqué dans la plupart des pays occupés, notamment en Norvège, en France (en particulier dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, de la Moselle, des Ardennes, de l’Aisne, du Nord, de la Meurthe-et-Moselle), au Luxembourg, dans l’Union Soviétique, au Danemark, en Belgique et en Hollande.

En France, dans les départements de l’Aisne, du Nord, de la Meurthe-et-Moselle, et en particulier dans celui des Ardennes, les propriétés rurales furent confisquées par une organisation d’État allemande, qui essaya de les exploiter sous une direction allemande. Les propriétaires de ces exploitations furent dépossédés et transformés en ouvriers agricoles.

Dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, les méthodes de germanisation furent celles de l’annexion suivie de la conscription.

1o Dès le mois d’août 1940, les fonctionnaires qui refusèrent de prêter le serment de fidélité au Reich furent expulsés. Le 21 septembre, les expulsions et déportations des populations commencèrent et le 22 novembre 1940, plus de 70.000 Lorrains et Alsaciens furent refoulés en zone sud. À partir du 31 juillet 1941, plus de 100.000 personnes furent déportées dans les régions de l’est de l’Allemagne ou en Pologne. Tous les biens des déportés ou des expulsés furent confisqués. En même temps, 80.000 Allemands venant de la Sarre ou de la Westphalie furent installés en Lorraine et 2.000 fermes appartenant à des Français furent transférées à des Allemands.

2o À partir du 2 janvier 1942, toute la jeunesse des départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, de 10 à 18 ans, fut incorporée dans la Jeunesse hitlérienne. Les mêmes mesures furent prises en Moselle à dater du 4 août 1942. À partir de 1940, toutes les écoles françaises furent fermées, les maîtres expulsés et le système scolaire allemand fut introduit dans les trois départements.

3o Le 28 septembre 1940, une ordonnance applicable au département de la Moselle imposait la germanisation de tous les noms et prénoms de consonance française. Une mesure identique fut prise, le 15 janvier 1943, pour les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin.

4o Deux ordonnances des 23 et 24 août 1942 imposèrent d’autorité la nationalité allemande à des citoyens français.

5o Des ordonnances furent promulguées le 8 mai 1941 pour le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, et le 23 avril 1941 pour la Moselle, astreignant au travail obligatoire tous les citoyens français des deux sexes, âgés de 17 à 25 ans. À partir du 1er janvier 1942, en ce qui concerne les jeunes hommes et du 26 janvier 1942 en ce qui concerne les jeunes filles, fut organisé effectivement en Moselle le Service national du travail. Cette mesure fut appliquée le 27 août 1942, dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, mais seulement pour les jeunes gens. Les classes 1940, 1941, 1942 furent appelées.

6o Ces classes furent incorporées dans la Wehrmacht, à l’expiration de leur temps de travail obligatoire. Le 19 août 1942, une ordonnance institua le service militaire obligatoire en Moselle et le 25 août 1942 les classes 1940 à 1944 furent appelées dans les trois départements. La conscription fut appliquée par les autorités allemandes, conformément aux dispositions de la législation allemande. Le premier conseil de révision eut lieu le 3 septembre 1942. Ultérieurement, dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin, il fut procédé à de nouveaux enrôlements visant les classes 1928 à 1939 inclus. Les Français qui refusèrent de se soumettre à ces lois furent considérés comme déserteurs ; leur famille fut déportée et leurs biens confisqués. Ces actes violaient les articles 43, 46, 55 et 56 du Règlement de La Haye (1907), les lois et coutumes de la guerre, les principes généraux du droit pénal tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées, le droit pénal interne des pays dans lesquels de tels crimes furent commis et l’article 6, b du Statut.


IX.

Responsabilités d’individus, de groupements ou d’organisations dans les crimes indiqués dans le chef d’accusation no 3.

Il y a lieu de se référer à l’appendice A du présent Acte d’accusation pour fixer la responsabilité de chaque accusé en ce qui concerne l’inculpation figurant au chef d’accusation no 3 de l’Acte d’accusation. Il y a lieu de se référer à l’appendice B du présent Acte d’accusation pour fixer la responsabilité de groupements ou organisations désignés dans le présent document comme groupements et organisations criminels dans le crime exposé au présent chef no 3 de l’Acte d’accusation.


CHEF D’ACCUSATION No 4

CRIME CONTRE L’HUMANITÉ.

(Statut, article 6, plus spécialement 6 c.)

X.

Qualification de l’infraction.


Tous les accusés ont commis des crimes contre l’Humanité, au cours des années précédant le 8 mai 1945 en Allemagne, et dans tous les pays et territoires occupés par les Forces armées allemandes depuis le 1er septembre 1939, ainsi qu’en Autriche, Tchécoslovaquie, Italie et en haute mer.

Tous les accusés ont élaboré et exécuté, de concert avec d’autres, un plan concerté ou complot pour commettre des crimes contre l’Humanité, tels qu’ils sont définis à l’article 6, c du Statut. Ce plan comprenait entre autres le meurtre et la persécution de tous ceux qui étaient ou que l’on soupçonnait être hostiles au parti nazi, et de tous ceux qui étaient, ou que l’on soupçonnait être opposés au plan concerté mentionné au chef d’accusation no 1 de l’Acte.

Lesdits crimes contre l’Humanité furent commis par les accusés et par d’autres personnes, dont ils étaient responsables (art. 6 du Statut). Les accusés ayant participé, en tant que dirigeants, organisateurs, instigateurs ou complices à l’élaboration et à l’exécution du plan concerté de crimes doivent être tenus comme responsables.

Ces méthodes et ces crimes constituaient des infractions aux conventions internationales, au droit pénal interne, aux principes généraux du droit pénal tels qu’ils dérivent du droit pénal de toutes les nations civilisées et ces méthodes et crimes faisaient partie implicite ou intégrante d’une ligne de conduite systématique. Ces actes étaient contraires à l’article 6 du Statut, Le Ministère Public se basera sur les faits exposés au chef d’accusation no 3 qui constituent également des crimes contre l’Humanité.


a. meurtres, exterminations, asservissements, déportation et autres actes inhumains commis contre les populations civiles avant et pendant la guerre.

Pour atteindre les buts exposés plus haut, les accusés adoptèrent en Allemagne une politique de persécution, de répression, d’extermination de tous les civils qui étaient ou que l’on croyait susceptibles de devenir hostiles au Gouvernement nazi et au plan concerté ou complot dont il a été fait mention au chef d’accusation no 1. Ils les emprisonnèrent sans procédure judiciaire les plaçant en « internement de protection » et dans des camps de concentration où ils les soumirent à des persécutions et à des humiliations, les dépouillèrent, les asservirent, les torturèrent, les assassinèrent.

Pour exécuter la volonté des conspirateurs, des tribunaux spéciaux furent institués, des services et des organismes privilégiés de l’État et du Parti furent habilités à opérer au delà même des limites de la loi nazie, à écraser toutes tendances ou éléments considérés comme « indésirables ». Les différents camps de concentration comprenaient Buchenwald qui fut établi en 1933 et Dachau qui fut établi en 1934. Dans ces camps et dans d’autres, les civils étaient soumis à un régime d’esclavage, maltraités ou assassinés par divers moyens, y compris ceux qui sont indiqués au chef d’accusation no 3 ci-dessus. Ces actes et cette politique se prolongèrent et s’étendirent aux territoires occupés après le 1er septembre 1939 et jusqu’au 8 mai 1945.


b. persécution pour raisons politiques, raciales et religieuses, en exécution directe ou indirecte du plan concerté exposé au chef d’accusation no 1 de l’acte.

Ainsi qu’il a été dit plus haut, en exécution directe ou indirecte du plan concerté traité au chef d’accusation no 1 ceux qui s’opposaient au Gouvernement allemand furent persécutés et exterminés. Ces persécutions furent dirigées contre les Juifs et aussi contre les personnes dont les opinions politiques ou les aspirations spirituelles passaient pour être en opposition avec les buts nazis.

Les Juifs furent systématiquement persécutés depuis 1933 ; ils furent privés de leur liberté, jetés dans les camps de concentration où ils furent maltraités et assassinés ; leurs biens furent confisqués. Des centaines de milliers de Juifs subirent ce sort avant le 1er septembre 1939.

À partir du 1er septembre 1939, la persécution des Juifs redoubla. Des millions de Juifs d’Allemagne et des pays occupés furent envoyés vers l’Est pour être exterminés.

Voici des cas particuliers à titre d’exemple sans préjudice de la production de preuves relatives à d’autres faits :

Les nazis assassinèrent entre autres le Chancelier Dollfuss, le social-démocrate Breitscheid et le communiste Thälmann. Ils internèrent dans des camps de concentration de nombreuses personnalités politiques et religieuses par exemple : le Chancelier Schuschnigg et le pasteur Niemöller.

En novembre 1938, sur ordre du chef de la Gestapo, des démonstrations antisémites eurent lieu dans toute l’Allemagne ; des biens juifs furent détruits, 30.000 Juifs furent arrêtés et envoyés dans des camps de concentration et leurs biens furent confisqués.

Des millions de Juifs figuraient parmi les personnes maltraitées et mises à mort au paragraphe VIII, A ci-dessus.

Parmi les autres exécutions en masse de Juifs, figurent les suivantes :

À Kislovdosk, tous les Juifs furent contraints de renoncer à leurs biens ; 2.000 furent fusillés dans un fossé anti-tank à Minéraliye Vodi, 4.300 autres Juifs furent fusillés dans le même fossé ;

60.000 Juifs furent fusillés dans une île de la Dvina près de Riga ;

20.000 Juifs furent fusillés à Lutsk ;

32.000 Juifs furent fusillés à Sarny ;

60.000 Juifs furent fusillés à Kiev et Dniepropetrovsk.

Des milliers de Juifs étaient gazés chaque semaine dans des wagons à gaz qui se détériorèrent à la suite d’une utilisation trop intense.

Quand les Allemands se retirèrent devant l’armée soviétique, ils exterminèrent les Juifs plutôt que de permettre leur libération. Ils installèrent un grand nombre de camps de concentration et ghettos dans lesquels les Juifs furent incarcérés et torturés, affamés, soumis à des atrocités sans merci et finalement exterminés.

Environ 70.000 Juifs furent exterminés en Yougoslavie.


XI.

Responsabilités des individus, groupements et organisations dans les crimes mentionnés au chef d’accusation no 4.

Il y a lieu de se référer à l’appendice A du présent Acte d’accusation pour fixer la responsabilité des accusés pris individuellement dans le crime figurant sous le chef d’accusation no 4. Il y a lieu de se référer à l’appendice B de l’Acte d’accusation pour fixer la responsabilité des groupements et organisations appelés ici groupements et organisations criminels dont fait mention le chef d’accusation no 4.

En conséquence, le présent Acte d’accusation est déposé au Tribunal en langue anglaise, française et russe, chaque texte faisant également foi, et les charges retenues contre les accusés précités sont par les présentes soumises au Tribunal.

Signé : François de Menthon,
agissant au nom du Gouvernement Provisoire
de la République Française.


Signé : Robert H. Jackson,
agissant au nom des États-Unis d’Amérique.


Signé : Hartley Shawcross,
agissant au nom du Royaume Uni
de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.


Signé : R. Rudenko,
agissant au nom de l’Union
des Républiques Socialistes Soviétiques,

Berlin, le 6 octobre 1945.


APPENDICE A.
Exposé de la responsabilité pour les crimes mentionnés
aux chefs d’accusation nos 1, 2, 3 et 4.

Les exposés ci-dessous constituent les bases sur lesquelles s’appuiera inter alia l’Accusation pour établir la responsabilité individuelle des accusés ci-après désignés, selon l’article 6 du Statut du Tribunal.

Göring. — L’accusé Göring, entre 1932 et 1945, fut membre du parti nazi, chef suprême des SA, général des SS, membre et président du Reichstag, ministre de l’Intérieur de Prusse, chef de la Police prussienne et de la Police secrète d’État prussienne, chef du Conseil d’État prussien, directeur du Plan de quatre ans, ministre de l’Air du Reich, commandant en chef des Forces aériennes, président du Conseil des ministres pour la Défense du Reich, membre du Conseil de Cabinet secret, chef du trust industriel Hermann-Göring, et désigné comme successeur de Hitler. L’accusé Göring profita des situations précitées, de son influence personnelle et de ses relations d’étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et raffermissement de leur mainmise sur l’Allemagne, ainsi qu’il est exposé, au chef d’accusation no 1, il favorisa la préparation militaire et économique de la guerre exposée au chef d’accusation no 1, il participa au plan et aux préparatifs des conspirateurs nazis en vue des guerres d’agression et des guerres faites en violation de traités, accords et engagements internationaux, exposés aux chefs d’accusation nos 1 et 2, il autorisa et dirigea en y participant, les crimes de guerre exposés au chef d’accusation no 3, et les crimes contre l’Humanité exposés au chef d’accusation no 4, notamment une grande variété de crimes contre les personnes et les biens.

Ribbentrop. — L’accusé Ribbentrop, entre 1932 et 1945, fut membre du parti nazi, membre du Reichstag nazi, conseiller du Führer en matière de politique étrangère, représentant du parti nazi en matière de politique étrangère, délégué allemand pour les questions de désarmement, ambassadeur extraordinaire, ambassadeur à Londres, organisateur et directeur du Service « Dienststelle Ribbentrop », ministre des Affaires étrangères du Reich, membre du Conseil de Cabinet secret, membre de l’État-major politique du Führer au Grand Quartier général et général des SS. L’accusé Ribbentrop profita des postes énumérés ci-dessus, de son influence personnelle et de ses relations d’étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis, relatée au chef d’accusation no 1, il favorisa la préparation de la guerre exposée au chef d’accusation no 1, il prit part à l’établissement du plan politique et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres qui violèrent les traités, accords et engagements internationaux, comme il est exposé aux chefs d’accusation nos 1 et 2, conformément au « principe du Chef » il participa à l’exécution des plans de politique étrangère des conspirateurs nazis mentionnés au chef d’accusation no 1 et assuma la responsabilité de leur exécution. Il autorisa et dirigea en y participant les crimes de guerre énoncés au chef d’accusation no 3, et les crimes contre l’Humanité énoncés au chef d’accusation no 4, tout particulièrement les crimes contre les personnes et les biens en territoires occupés.

Hess. — Entre 1921 et 1941 l’accusé Hess fut membre du parti nazi, adjoint du Führer, ministre du Reich sans portefeuille, membre du Reichstag, membre du Conseil des ministres de la Défense du Reich, membre du Conseil de Cabinet secret, successeur désigné du Führer après l’accusé Göring, général des SS et général des SA. L’accusé Hess a profité des situations précitées, de son influence personnelle et de ses relations d’étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur mainmise sur l’Allemagne, dont il est fait mention au chef d’accusation no 1. Il favorisa la préparation militaire, économique et psychologique de la guerre indiquée au chef d’accusation no 1. Il participa aux plans et préparations politiques des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux, ainsi qu’il est exposé aux chefs d’accusation nos 1 et 2. Il participa aux plans de politique étrangère des conspirateurs nazis, comme il est dit au chef d’accusation no 1. Il autorisa et dirigea en y participant, les crimes de guerre énoncés au chef d’accusation no 3 de l’Acte, et les crimes contre l’Humanité exposés au chef d’accusation no 4, comportant une grande variété de crimes contre les personnes et les biens.

Kaltenbrunner. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Kaltenbrunner fut membre du parti nazi, général des SS, membre du Reichstag, général de Police, secrétaire d’État à la Sûreté en Autriche chargé de la Police autrichienne, chef de la Police autrichienne, chef de Police à Vienne, dans la Basse et la Haute Autriche, chef du Service central de sûreté du Reich et chef de la Police de sûreté et du Service de sécurité. L’accusé Kaltenbrunner exploita ces titres et son influence personnelle de la manière suivante : il favorisa la consolidation du contrôle sur l’Autriche dont s’étaient emparés les conspirateurs nazis, ainsi que l’expose le chef d’accusation no 1, il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énoncés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité énoncés au chef d’accusation no 4, notamment les crimes contre l’Humanité, que constitue le système des camps de concentration.

Rosenberg. — Entre 1920 et 1945, l’accusé Rosenberg fut membre du parti nazi, membre du Parti au Reichstag, Reichsleiter dans le parti nazi pour l’idéologie et la politique étrangère, éditeur du journal nazi Völkischer Beobachter et des NS Monatshefte, chef des Services de politique étrangère du parti nazi, délégué spécial pour toute la formation spirituelle et idéologique du parti nazi, ministre du Reich pour les territoires occupés de l’Est, organisateur de « l’Einsatzstab Rosenberg », général des SS, et général des SA. L’accusé Rosenberg exploita les titres susmentionnés, son influence personnelle et ses relations d’étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il propagea et exploita les techniques doctrinales des conspirateurs nazis énoncés au chef d’accusation no 1. Il facilita l’accès au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur mainmise sur l’Allemagne comme il est dit au chef d’accusation no 1. Il facilita la préparation psychologique de la guerre, comme l’expose le chef d’accusation no 1, il participa aux plans et à la préparation des guerres d’agression et des guerres faites en violation des accords et engagements internationaux, ainsi que l’exposent les chefs d’accusation nos 1 et 2, et il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énoncés au chef d’accusation no 3 de l’Acte et les crimes contre l’Humanité énoncés au chef d’accusation no 4, comportant une grande variété de crimes contre les personnes et les biens.

Frank. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Frank fut membre du parti nazi, général des SS, membre du Reichstag, ministre sans portefeuille du Reich, commissaire du Reich pour la coordination de la Justice, président de la Chambre internationale de Droit et de l’Académie allemande de droit, chef de l’Administration civile de Lodz, chef administratif suprême du district militaire de la Prusse occidentale, Poznan, Lodz et Cracovie, et Gouverneur général des territoires polonais occupés. L’accusé Frank exploita ces titres, son influence personnelle et son intimité avec le Führer de la manière suivante : il facilita l’accès au pouvoir des conspirateurs nazis et le renforcement de leur contrôle sur l’Allemagne, comme il est exposé au chef d’accusation no 1 ; il autorisa et dirigea en y participant les crimes de guerre exposés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité exposés au chef d’accusation no 4, spécialement les crimes de guerre et crimes contre l’Humanité commis par l’administration des territoires occupés.

Bormann. — Entre 1925 et 1945, l’accusé Bormann fut membre du parti nazi, membre du Reichstag, membre de l’État-Major du Commandement Suprême des SA ; fondateur et chef de la « Hilfskasse der NSDAP », Reichsleiter, chef du Cabinet de l’adjoint du Führer, membre du Conseil des ministres pour la Défense du Reich, chef de la Chancellerie du Parti, secrétaire du Führer, organisateur et chef du Hilfskasse, général de SS et général de SA. L’accusé Bormann utilisa ces fonctions, son influence personnelle et ses relations d’étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et renforça leur mainmise sur l’Allemagne, comme il est indiqué au chef d’accusation no 1 du présent Acte, il favorisa la préparation de la guerre, chef d’accusation no 1, il favorisa et dirigea en y participant les crimes de guerre visés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité visés au chef d’accusation no 4, comportant une grande variété de crimes contre les personnes et les biens.

Frick. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Frick fut membre du parti nazi, Reichsleiter, général des SS, membre du Reichstag, ministre de l’Intérieur du Reich, ministre de l’Intérieur de Prusse, directeur des Élections pour le Reich, plénipotentiaire général pour l’Administration du Reich, chef du Service central pour la réunion de l’Autriche et du Reich allemand, directeur de l’Office central d’incorporation des Sudètes, de Memel, Dantzig, des territoires annexés de l’Est, d’Eupen, Malmédy et Moresnet, directeur du Bureau central pour le Protectorat de Bohême et de Moravie, du Gouvernement général, de la Styrie inférieure, de la Haute-Carinthie, de la Norvège, de l’Alsace, de la Lorraine et de tous les autres territoires occupés et protecteur du Reich pour la Bohême et la Moravie. L’accusé Frick exploita ces titres, son influence personnelle et son étroite amitié avec le Führer de la manière suivante : il facilita l’accès au pouvoir des conspirateurs nazis et le renforcement de leur contrôle sur l’Allemagne, comme il est exposé au chef d’accusation no 1 de l’Acte ; il participa à la préparation systématique par les nazis de guerres d’agression et de guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux dont il est fait mention aux chefs d’accusation nos 1 et 2 ; il autorisa et dirigea en y participant les crimes de guerre exposés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité exposés au chef d’accusation no 4 de l’Acte, comportant en particulier les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité commis par l’administration des territoires occupés.

Ley. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Ley fut membre du parti nazi, Reichsleiter, chef de l’organisation du parti nazi, membre du Reichstag, chef du Front allemand du Travail, général des SA et co-organisateur de l’Inspection centrale des services de la main-d’œuvre étrangère. L’accusé Ley profita de ces titres, de son influence personnelle et de son intimité avec le Führer de la manière suivante : il facilita l’accès au pouvoir des conspirateurs nazis et le renforcement de leur contrôle sur l’Allemagne, comme il est exposé au chef d’accusation no 1 de l’Acte ; il favorisa la préparation à la guerre, chef d’accusation no 1 ; il autorisa, dirigea et participa aux crimes de guerre exposés au chef d’accusation no 3 et aux crimes contre l’Humanité exposés au chef d’accusation no 4 de l’Acte, comportant en particulier les crimes de guerre et crimes contre l’Humanité, résultant de l’utilisation abusive d’êtres humains à des travaux ayant trait à la conduite des guerres d’agression.

Sauckel. — Entre 1921 et 1945, l’accusé Sauckel fut membre du parti nazi, Gauleiter et Reichsstatthalter en Thuringe, membre du Reichstag, plénipotentiaire général pour l’emploi de la main-d’œuvre dans le Plan de quatre ans, co-organisateur, avec l’accusé Ley, de l’inspection centrale des services de la main-d’œuvre étrangère, général des SS, et général des SA. L’accusé Sauckel utilisa les situations énumérées ci-dessus et son influence personnelle de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis comme l’expose le chef d’accusation no 1 de l’Acte, il participa à la préparation économique de guerres d’agression et de guerre faites en violation des traités, accords et engagements internationaux, énumérés dans les chefs d’accusation nos 1 et 2 de l’Acte, il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés dans le chef d’accusation no 3 et des crimes contre l’Humanité, énumérés dans le chef d’accusation no 4, notamment les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité, résultant de la contrainte des habitants des territoires occupés à travailler comme des esclaves dans les territoires occupés et en Allemagne.

Speer. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Speer fut membre du parti nazi, Reichsleiter, membre du Reichstag, ministre du Reich pour l’armement et les munitions, chef de l’Organisation Todt, plénipotentiaire général pour les armements dans le service central du Plan de quatre ans, et président du Conseil de l’Armement. L’accusé Speer utilisa les situations énumérées ci-dessus et son influence personnelle de la manière suivante : il participa au plan militaire et économique et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux énumérés dans les chefs d’accusation nos 1 et 2 ; il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés dans le chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité énumérés dans le chef d’accusation no 4 de l’Acte, comprenant, plus particulièrement, l’abus et l’exploitation des êtres humains pour le travail forcé dans la conduite de la guerre d’agression.

Funk. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Funk fut membre du parti nazi, conseiller économique de Hitler, député national-socialiste du Reichstag, directeur de la presse dans le Gouvernement du Reich, secrétaire d’État du ministère de l’Information et de la Propagande, ministre de l’Économie du Reich, ministre de l’Économie de Prusse, président de la Reichsbank, plénipotentiaire pour l’Économie et membre du Conseil des ministres pour la défense du Reich. L’accusé Funk utilisa les situations énumérées ci-dessus et ses relations étroites avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne, ainsi que l’expose le chef d’accusation no 1, il favorisa la préparation à la guerre, exposée dans le chef d’accusation no 1 ; il participa au plan militaire et économique, et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux, ainsi que l’exposent les chefs d’accusation nos 1 et 2. Il autorisa, dirigea en y participant, les crimes de guerre énumérés dans le chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité, énumérés au chef d’accusation no 4, comportant particulièrement des crimes contre les personnes ou les biens ayant trait à l’exploitation économique des territoires occupés.

Schacht. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Schacht fut membre du parti nazi, membre du Reichstag, ministre de l’Économie du Reich, ministre sans portefeuille et président de la Reichsbank. L’accusé Schacht utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accès au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur mainmise sur l’Allemagne, ainsi qu’il est dit au chef d’accusation no 1 ; il favorisa les préparatifs de guerre dont il est fait mention au chef d’accusation no 1 et il participa au plan militaire et économique et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres faites en violation de traités, accords et engagements internationaux, chefs d’accusation nos 1 et 2 de l’Acte.

Papen. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Papen fut membre du parti nazi, membre du Reichstag, chancelier du Reich, vice-chancelier sous Hitler, plénipotentiaire spécial pour la Sarre, négociateur du Concordat avec le Vatican, ambassadeur à Vienne et ambassadeur en Turquie. L’accusé Papen utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations étroites avec le Führer, de la façon suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et participa à la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne, chef d’accusation no 1 de l’Acte ; il favorisa les préparatifs de guerre, chef d’accusation no 1 de l’Acte. Il participa au plan politique et à la préparation par les conspirateurs nazis, des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2 de l’Acte).

Krupp. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Krupp fut chef de la Société générale Friedrich Krupp A. G., membre du Conseil économique général, président de l’Union nationale des Industriels allemands et chef du groupe de production pour les mines de fer et les métaux, relevant du Ministère du Reich. L’accusé Krupp utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne (chef d’accusation no 1), il favorisa la préparation à la guerre exposée dans le chef d’accusation no 1, il participa au plan militaire et économique et à la préparation, par les conspirateurs nazis, des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2) ; il autorisa, dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3, et les crimes contre l’Humanité (chef d’accusation no 4), comprenant plus particulièrement l’exploitation des êtres humains pour le travail forcé dans la conduite de la guerre d’agression.

Neurath. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Neurath fut membre du parti nazi, général des SS, membre du Reichstag, ministre du Reich et ministre des Affaires étrangères du Reich, président du Conseil de Cabinet secret, protecteur du Reich pour la Bohême et la Moravie. L’accusé Neurath utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations étroites avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis (chef d’accusation no 1), il favorisa la préparation à la guerre (chef d’accusation no 1), il participa au plan politique et à la préparation, par les conspirateurs nazis, des guerres d’agression et des guerres en violation de traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2), en application du « Führerprinzip », il exécuta ou fit exécuter, sous sa responsabilité, les plans de politique étrangère des conspirateurs nazis (chef d’accusation no 1), il autorisa, dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité énumérés au chef d’accusation no 4 comportant particulièrement les crimes contre les personnes et la propriété dans les territoires occupés.

Schirach. — Entre 1924 et 1945, l’accusé Schirach fut membre du parti nazi, membre du Reichstag, chef de la jeunesse du Reich auprès de l’État-Major du Commandement suprême des SA, Reichsleiter du parti nazi pour l’éducation de la jeunesse, chef de la jeunesse allemande du Reich, chef des Jeunesses hitlériennes, commissaire à la Défense du Reich, Reichsstatthalter et Gauleiter de Vienne. L’accusé Schirach utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations étroites avec le Führer, de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne (chef d’accusation no 1), il favorisa les préparatifs psychologiques et pédagogiques de la guerre et la militarisation des organisations d’inspiration nazie (chef d’accusation no 1) et il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes contre l’Humanité, énoncés au chef d’accusation no 4, comportant en particulier des mesures contre les Juifs.

Seyss-Inquart. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Seyss-Inquart fut membre du parti nazi, général de SS, conseiller d’État en Autriche, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité en Autriche, chancelier d’Autriche, membre du Reichstag, membre du Cabinet du Reich ; ministre du Reich sans portefeuille, directeur de l’Administration civile dans la Pologne du sud, gouverneur général des territoires occupés de la Pologne et commissaire du Reich pour les Pays-Bas occupés. L’accusé Seyss-Inquart utilisa les situations énumérées ci-dessus et son influence personnelle de la manière suivante : il favorisa la prise de possession et la consolidation du contrôle sur l’Autriche par les conspirateurs nazis (chef d’accusation no 1), il participa au plan politique et à la préparation, par les conspirateurs nazis, de guerres d’agression et de guerres faites en violation de traités, accords et engagements internationaux, (chefs d’accusation nos 1 et 2), enfin il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre, énumérés au chef d’accusation no 3 de l’Acte et les crimes contre l’Humanité énumérés au chef d’accusation no 4 comportant une grande variété de crimes contre les personnes et la propriété.

Streicher. — Entre 1932 et 1945, l’accusé Streicher fut membre du parti nazi, membre du Reichstag, général des SA, Gauleiter de Franconie, éditeur du journal antisémite Der Stürmer. L’accusé Streicher utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations étroites avec le Führer de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne (chef d’accusation no 1) ; il autorisa et dirigea en y participant les crimes contre l’Humanité énoncés au chef d’accusation no 4 comportant en particulier l’excitation à la persécution des Juifs (chefs d’accusation no 1 et 4).

Keitel. — Entre 1938 et 1945, l’accusé Keitel fut chef du Haut Commandement des Forces armées allemandes, membre du Conseil de Cabinet secret, membre du Conseil des ministres pour la défense du Reich et Feldmarschall. L’accusé Keitel utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses relations étroites avec le Führer, de la manière suivante : il favorisa les préparatifs militaires de la guerre (chef d’accusation no 1) ; il participa à l’établissement du plan politique et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2), il participa à l’exécution de ces plans et en assuma la responsabilité ; il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité traités au chef d’accusation no 4, comportant particulièrement les crimes de guerre et les crimes contre l’Humanité, tels que mauvais traitements des prisonniers de guerre et des populations civiles des territoires occupés.

Jodl. — De 1932 à 1945, l’accusé Jodl fut lieutenant-colonel au Service des opérations militaires de la Wehrmacht, colonel, chef du Service des opérations de l’OKW, Generalmajor, chef de l’État-Major de l’OKW, et Generaloberst. L’accusé Jodl utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses rapports étroits avec le Führer, de la manière suivante : il favorisa l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis et la consolidation de leur contrôle sur l’Allemagne (chef d’accusation no 1), il favorisa la préparation à la guerre (chef d’accusation no 1), il participa au plan militaire et à la préparation par les conspirateurs nazis des guerres d’agression et des guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2) ; enfin, il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3 et les crimes contre l’Humanité énumérés au chef d’accusation no 4, comportant une grande variété de crimes contre les personnes et la propriété.

Raeder. — L’accusé Raeder fut, entre 1928 et 1945, commandant en chef de la Flotte allemande, Generaladmiral, grand amiral, amiral inspecteur de la Flotte allemande et membre du Conseil de Cabinet secret. L’accusé Raeder utilisa les situations énumérées ci-dessus et son influence personnelle de la manière suivante : il favorisa la préparation à la guerre (chef d’accusation no 1), il participa à l’établissement des plans politiques et à la préparation par les conspirateurs nazis de guerres d’agression et de guerres faites en violation des traités, accords et engagements internationaux (chefs d’accusation nos 1 et 2) ; il participa à l’exécution de ces plans et en assuma la responsabilité. Enfin, il autorisa et dirigea en y participant les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3 comportant particulièrement les crimes de guerre résultant de la conduite de la guerre sur mer.

Dönitz. — L’accusé Dönitz fut, entre 1932 et 1945, commandant de la flottille de sous-marins Weddigen, commandant en chef de l’armée sous-marine, vice-amiral, amiral, grand-amiral et commandant en chef de la Marine allemande, conseiller de Hitler et successeur de Hitler à la tête du Gouvernement allemand. L’accusé Dönitz utilisa les situations énumérées ci-dessus, son influence personnelle et ses rapports étroits avec le Führer de la manière suivante : il favorisa la préparation de la guerre (chef d’accusation no 1), il participa à l’établissement des plans militaires et à la préparation, par les conspirateurs nazis, de guerres d’agression et de guerres faites en violation de traités, accords et engagements internationaux, (chefs d’accusation nos 1 et 2), enfin il autorisa et dirigea, en y participant, les crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3, comprenant particulièrement les crimes contre les personnes et les biens en haute mer.

Fritzsche. — Entre 1933 et 1945, l’accusé Fritzsche fut membre du parti nazi, directeur de l’agence de presse officielle allemande (Deutsches Nachrichten Büro), chef du Service de l’information radiophonique et du Service de la presse métropolitaine au ministère de la Propagande du Reich, directeur au ministère de la Propagande du Reich, chef de la division de la Radio au département de la propagande du parti, et chargé des pleins pouvoirs pour l’organisation politique de la Radio de la Grande Allemagne. L’accusé Fritzsche utilisa les situations énumérées ci-dessus et son influence personnelle pour répandre et exploiter les principales doctrines des conspirateurs nazis, énoncées au chef d’accusation no 1 pour conseiller, encourager et provoquer l’exécution des crimes de guerre énumérés au chef d’accusation no 3 et des crimes contre l’Humanité énumérés au chef d’accusation no 4 comportant particulièrement des mesures anti-juives et l’exploitation impitoyable des territoires occupés.


APPENDICE B.
Exposé du caractère criminel des groupements et organisations.

Les définitions données ci-après de chaque groupement ou organisation que l’Acte d’accusation désigne comme devant être déclarés criminels, constituent les bases sur lesquelles la poursuite se fondera, entre autres, pour établir la criminalité desdits groupements et organisations.


Die Reichsregierung
(Cabinet du Reich)

La « Reichsregierung » (cabinet du Reich) à laquelle se réfère l’Acte d’accusation se compose des personnes qui furent :

1. Membres du Cabinet ordinaire après le 30 janvier 1933, date à laquelle Hitler devint chancelier de la République allemande. Le terme « Cabinet ordinaire » qui est employé ici, désigne les ministres du Reich, c’est-à-dire les chefs des départements du Gouvernement central, les ministres sans portefeuille, les ministres d’État agissant comme ministres du Reich, et les autres fonctionnaires habilités à prendre part aux réunions de ce cabinet.

2. Les membres du « Ministerrat für die Reichsverteidigung » (Conseil des ministres pour la Défense du Reich).

3. Les membres du « Geheimer Kabinettsrat » (Conseil de Cabinet secret).

Au-dessous du Führer, ces personnages dans les fonctions désignées ci-après, possédaient et exerçaient individuellement ou collectivement des attributions législatives, exécutives, administratives et politiques d’une très haute importance dans le système gouvernemental allemand. En conséquence, ils portent la responsabilité de la politique adoptée et appliquée par le Gouvernement y compris celle qui comportait l’exécution des crimes mentionnés aux chefs d’accusation nos 1, 2, 3, et 4.


Das Korps der politischen Leiter der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei
(Corps des chefs politiques du parti nazi).

Le « Korps der politischen Leiter der nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei » (Corps des chefs politiques du parti nazi), mentionné dans l’Acte d’accusation se compose de personnes qui furent, à un moment quelconque suivant la terminologie nazie « Politische Leiter » (chefs politiques) de tout grade ou de tout rang.

Les « Politische Leiter » comprenaient les chefs des différents services essentiels du Parti (par exemple, la Reichsleitung ou Directoire du Parti pour le Reich, et la Gauleitung ou « Directoire du Parti pour le Gau », aussi bien que les chefs territoriaux du Parti (par exemple : le Gauleiter).

Les « Politische Leiter » constituaient un groupe d’élite distinct à l’intérieur du parti nazi proprement dit et, comme tels, étaient investis de prérogatives spéciales. Ils étaient organisés suivant le « Führerprinzip » et chargés de concevoir les plans, de développer et d’imposer à leurs partisans la politique du parti nazi. Ainsi entre eux, les chefs territoriaux étaient appelés Hoheitsträger, c’est-à-dire investis de souveraineté, et étaient habilités à mobiliser et à utiliser les différentes formations du Parti quand l’exécution de la politique du Parti le nécessitait.

Il y a lieu de se référer ici aux allégations du chef d’accusation no 1 de l’Acte démontrant que le parti nazi était le noyau central du plan concerté ou complot dont l’existence a été établie. Les Politische Leiter, en tant qu’autorité majeure au sein du parti nazi remplissant les fonctions décrites ci-dessus et, d’une façon collective, en tant que groupement ont participé au plan concerté ou complot, prenant en conséquence leur part dans la responsabilité des crimes exposés aux chefs d’accusation nos 1, 2, 3 et 4 de l’Acte.

Le Ministère Public se réserve expressément le droit de requérir à tout moment jusqu’au prononcé du jugement, contre les Politische Leiter de grades inférieurs ou de catégories différentes, qui seront précisés, ne figurant pas au procès actuel, sans préjudice d’autres poursuites ou actions à intenter contre eux.


Die Schutzstaffeln der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei
(dénommées communément SS) y compris der Sicherheitsdienst (dénommé communément SD).

Les « Schutzstaffeln der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiterpartei » (communément dénommées SS), comprenant le Sicher- heitsdienst (dénommé communément SD) mentionné dans l’Acte d’accusation, sont constituées par le corps entier des SS et de tous les offices, départements, services, agences, ramifications, formations, organisations et groupes qui les ont composées à l’origine ou ont été intégrés à un moment quelconque, y compris les Allgemeine SS, les Waffen-SS, les SS-Totenkopf Verbande, les SS Polizei Regimente, et le Sicherheitsdienst des Reichsführers SS (communément dénommé SD), sans que cette énumération soit limitative.

Les SS, établies à l’origine par Hitler en 1925, comme une section d’élite de SA pour fournir une garde de protection au Führer et aux chefs du parti nazi, devinrent une formation indépendante du parti nazi en 1934, sous la direction du Reichsführer SS Heinrich Himmler. Elles se composaient de membres volontaires choisis suivant les théories biologique, raciale et politique nazies, profondément pénétrés de l’idéologie nazie et tenus à une obéissance absolue au Führer. Après l’accession au pouvoir des conspirateurs nazis, les SS créèrent de nombreux départements, agences, formations et ramifications et étendirent leur influence et leur contrôle à de nombreux secteurs des activités du Gouvernement et du Parti. Sous l’action de Heinrich Himmler, Reichsführer SS, et chef de la Police allemande, des agences et des unités SS se joignirent à celles du Reich pour former, en vue de leurs opérations, une force de police répressive unifiée. Le Service de sécurité du Reichsführer SS (dénommé communément SD), section des SS, fut développé en un vaste réseau d’espionnage et de contre-espionnage, travaillant en liaison avec la Gestapo et la Police criminelle pour la recherche, la suppression et l’élimination de tendances, de groupes ou d’individus jugés hostiles ou susceptibles d’être hostiles au parti nazi, à ses chefs, à ses principes et à ses objectifs. Ce service fut finalement fondu avec la Gestapo et la Police criminelle en un seul département de Police de sûreté : le Service principal de sécurité du Reich.

D’autres branches des SS se transformèrent en une force armée et servirent dans les guerres d’agression visées sous les chefs d’accusation nos 1 et 2 de l’Acte. Par l’intermédiaire d’autres services et ramifications, les SS contrôlèrent l’administration des camps de concentration et l’application de la politique nazie raciale, biologique et de colonisation des nazis. Par leurs nombreuses fonctions et activités, elles servirent d’instrument à l’établissement de la domination de l’idéologie nazie, à la protection et à l’extension du régime nazi en Allemagne et dans les territoires occupés. Elles participèrent ainsi aux crimes visés par les chefs d’accusation nos 1, 2, 3 et 4 de l’Acte et en sont responsables.


Die Geheime Staatspolizei
(Police secrète d’État, dénommée communément « Gestapo »).

La « Geheime Staatspolizei » (Police secrète d’État, dénommée communément Gestapo), visée dans l’Acte d’accusation, comprend l’état-major, les services, bureaux, branches et toutes les forces et le personnel de la Geheime Staatspolizei, organisés ou existant après le 30 janvier 1933, y compris la Geheime Staatspolizei de Prusse et les forces de police secrètes ou politiques équivalentes du Reich avec les groupements qui en font partie.

La Gestapo fut créée par les conspirateurs nazis immédiatement après leur accession au pouvoir, tout d’abord en Prusse par l’accusé Göring et, peu après, dans tous les autres États du Reich. Ces forces autonomes de police secrètes et politiques furent transformées en une organisation centralisée et uniforme opérant par l’intermédiaire d’un état-major central et au moyen d’un réseau de bureaux régionaux en Allemagne et dans les territoires occupés ; ses fonctionnaires et agents furent choisis sur la base d’une adhésion inconditionnelle à l’idéologie nazie. Ils furent largement recrutés parmi les membres des SS et formés dans les écoles de SS et de SD. La Gestapo a travaillé à supprimer et à éliminer les tendances, les groupes et les individus supposés hostiles ou susceptibles d’être hostiles au parti nazi, à ses chefs, à ses principes, à ses buts. Elle réprima la résistance et la possibilité de résistance au contrôle allemand dans les territoires occupés. Dans l’accomplissement de ces fonctions, elle opéra, libre de tout contrôle légal, prenant toutes les mesures qui lui semblèrent nécessaires à l’accomplissement de ses missions.

Sa participation aux crimes visés aux chefs d’accusation nos 1, 2, 3, et 4 de l’Acte d’accusation et sa responsabilité résultent de ses buts, de ses activités et des moyens par elle utilisés.


Die Sturmabteilungen der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiter Partei
(dénommées communément SA).

Les « Sturmabteilungen der Nationalsozialistischen Deutschen Arbeiter Partei » (dénommées communément SA) visées par l’Acte d’accusation furent une formation du parti nazi dépendant directement du Führer, organisée en formation militaire et composée de volontaires servant comme soldats politiques du Parti. C’était une des plus anciennes formations du parti nazi et la première garde du mouvement national-socialiste. Fondée en 1921, en tant que formation de militants volontaires, elle fut érigée par les conspirateurs nazis avant leur accession au pouvoir en une vaste armée privée, utilisée pour créer le désordre, terroriser et éliminer les adversaires politiques. Elle continua à servir d’instrument de formation physique, idéologique et militaire aux membres du Parti et de réserve aux Forces armées allemandes. Après le déclenchement des guerres d’agression, visées aux chefs d’accusation nos 1 et 2 de l’Acte, les SA servirent non seulement d’organisation d’entraînement militaire, mais formèrent une police auxiliaire et des forces de sécurité dans les territoires occupés, gardèrent les camps de prisonniers de guerre et les camps de concentration, surveillèrent et contrôlèrent les personnes contraintes au travail en Allemagne et dans les territoires occupés.

Leur participation aux crimes, visés aux chefs nos 1, 2, 3 et 4 de l’Acte d’accusation et leur responsabilité, résultent de leurs buts, de leurs activités et des moyens utilisés par elles.


État-Major général et Haut Commandement des Forces armées allemandes.

« L’État-Major général et le Haut Commandement des Forces armées allemandes» visés dans l’Acte d’accusation comprennent les individus qui, entre février 1938 et mai 1945, furent les chefs suprêmes de la Wehrmacht, de l’Armée, de la Marine et des Forces aériennes. Ce groupe fut composé des personnes qui eurent les postes suivants ;

Oberbefehlshaber der Kriegsmarine (commandant en chef de la Flotte) ;

Chef (et à l’origine, Chef des Stabes) der Seekriegsleitung (chef de l’État-Major naval) ;

Oberbefehlshaber des Heeres (commandant en chef de l’Armée) ;

Chef des Generalstabes des Heeres (chef de l’État-Major de l’Armée) ;

Oberbefehlshaber der Luftwaffe (commandant en chef des Forces aériennes) ;

Chef des Generalstabes der Luftwaffe (chef de l’État-Major général des Forces aériennes) ;

Chef des Oberkommandos der Wehrmacht (chef du Haut Commandement des Forces armées) ;

Chef des Führungsstabes des Oberkommandos der Wehrmacht (chef de l’État-Major des opérations du Haut Commandement des Forces armées) ;

Stellvertretender Chef des Führungsstabes des Oberkommandos der Wehrmacht (représentant principal du Bureau des opérations du Haut Commandement des Forces armées) ;

Commandant en chef, avec le statut de Oberbefehlshaber de la Wehrmacht Marine, Armée, Forces aériennes.

En exerçant ces fonctions à titre individuel, et en agissant à titre collectif en qualité de membres d’un groupe placé à l’échelon suprême de l’organisation des Forces armées allemandes, ces personnes ont assumé une part prépondérante de responsabilité dans l’élaboration, la préparation, le déclenchement et la conduite de guerres contraires aux lois dont il est fait mention aux chefs d’accusation nos 1 et 2 du présent Acte et dans les crimes de guerre et crimes contre l’Humanité qu’a entraînés la mise à exécution du plan concerté ou complot mentionné dans les chefs d’accusation nos 3 et 4.


APPENDICE C.
Inculpations et exposé des faits concernant les violations des traités,
accords et engagements internationaux, commises par les accusés
dans l’élaboration, les préparatifs et le déclenchement des guerres.


I

Inculpation.— Violation de la Convention pour le règlement pacifique des différends internationaux signée à La Haye le 29 juillet 1899.

Faits, — Aux dates spécifiées dans la colonne 1, l’Allemagne a envahi par la force et les armes, les territoires des États souverains spécifiés dans la colonne 2, sans avoir au préalable essayé de régler ses différends avec lesdits États souverains par des moyens pacifiques :

Colonne 1 Colonne 2
6 avril 1941 ............…..........................…....….......… Royaume de Grèce
6 avril 1941 .........…..........................….......….......… Royaume de Yougoslavie


II

Inculpation, — Violation de la Convention pour le règlement pacifique des différends internationaux signée à La Haye le 18 octobre 1907.

Faits. — L’Allemagne a envahi par la force et les armes, aux dates ou vers les dates spécifiées dans la colonne 1, les territoires des États souverains spécifiés dans la colonne 2, sans avoir au préalable essayé de régler ces différends avec lesdits États souverains par des moyens pacifiques :

Colonne 1 Colonne 2
1er septembre 1939 ............…..................…....… République de Pologne
9 avril 1940 ..............................….......……......… Royaume de Norvège
9 avril 1940 ............…....................…....….......… Royaume de Danemark
10 mai 1940 .........…...................….......….......… Grand-Duché de Luxembourg
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume de Belgique
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume des Pays-Bas
22 juin 1941 .........…...................…..…..….......… URSS


III

Inculpation. — Violation de la Convention no III de La Haye, relative à l’ouverture des hostilités, signée le 18 octobre 1907.

Faits. — Aux dates ou vers les dates spécifiées dans la colonne 1 l’Allemagne a engagé les hostilités contre les Pays spécifiés dans la colonne 2, sans préavis donné sous forme d’une déclaration de guerre motivée ou d’un ultimatum comportant une déclaration de guerre sous certaines conditions :

Colonne 1 Colonne 2
1er septembre 1939 ............…..................…....… République de Pologne
9 avril 1940 ..............................….......……......… Royaume de Norvège
9 avril 1940 ............…....................…....….......… Royaume de Danemark
10 mai 1940 .........…...................….......….......… Grand-Duché de Luxembourg
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume de Belgique
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume des Pays-Bas
22 juin 1941 .........…...................…..…..….......… URSS


IV

Inculpation — Violation de la Convention no V de La Haye concernant les droits et devoirs des Puissances et des Personnes neutres en cas de guerre sur terre, signée le 18 octobre 1907.

Faits, — Aux dates ou vers les dates spécifiées dans la colonne 1, par la force et les armes, l’Allemagne a envahi et occupé les territoires des États souverains spécifiés dans la colonne 2 en violant de ce fait la neutralité des dits États souverains.

Colonne 1 Colonne 2
1er septembre 1939 ............…..................…....… République de Pologne
9 avril 1940 ..............................….......……......… Royaume de Norvège
9 avril 1940 ............…....................…....….......… Royaume de Danemark
10 mai 1940 .........…...................….......….......… Grand-Duché de Luxembourg
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume de Belgique
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume des Pays-Bas
22 juin 1941 .........…...................…..…..….......… URSS


V

Inculpation. — Violation du Traité de Paix entre les Alliés, les Puissances associées et l’Allemagne, signé à Versailles le 28 juin 1919, connu sous le nom de Traité de Versailles.

Faits. — 1. L’Allemagne, à la date du 7 mars 1936 et par la suite, a maintenu et assemblé des forces armées, entretenu et construit des fortifications militaires dans la zone démilitarisée de Rhénanie, en violation des dispositions des articles 42 à 44 du Traité de Versailles,

2. Le 13 mars 1938 ou vers cette date, l’Allemagne a annexé l’Autriche au Reich allemand, en violation des dispositions de l’article 80 du Traité de Versailles.

3. Le 22 mars 1939 ou vers cette date, l’Allemagne a incorporé le district de Memel au Reich allemand en violation des dispositions de l’article 99 du Traité de Versailles.

4. Le 1er septembre 1939 ou vers cette date, l’Allemagne a incorporé la ville libre de Dantzig au Reich allemand, en violation des dispositions de l’article 100 du Traité de Versailles.

5. Le 16 mars 1939 ou vers cette date, l’Allemagne a incorporé au Reich allemand les provinces de Bohème et de Moravie, qui faisaient partie de la Tchécoslovaquie, en violation des dispositions de l’article 81 du Traité de Versailles.

6. À diverses reprises, en mars 1935 et ultérieurement, l’Allemagne a répudié différentes parties du Titre V du Traité de Versailles (clauses militaires, navales et aériennes) en créant une force aérienne, en instituant le service militaire obligatoire, en augmentant l’importance de son armée et de sa marine au delà des limites fixées par le Traité.


VI

Inculpation. — Violation du Traité entre les États-Unis et l’Allemagne rétablissant les relations amicales, signé à Berlin le 25 août 1921.

Faits. — À diverses reprises, en mars 1935 et ultérieurement, l’Allemagne a répudié différentes clauses du Titre V du Traité entre les États-Unis et l’Allemagne qui instaurait des relations amicales (clauses militaires, navales et aériennes) en créant une force aérienne, en instituant le service militaire obligatoire, en augmentant l’importance de son armée et de sa marine au delà des limites fixées par le Traité.


VII

Inculpation. — Violation du Traité de garantie mutuelle entre l’Allemagne, la Belgique, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie, signé à Locarno le 16 octobre 1925.

Faits. — 1. Le 7 mars 1936 ou vers cette date, l’Allemagne a envoyé illégalement des forces armées dans la zone rhénane démilitarisée, en violation de l’article premier du Traité de garantie mutuelle.

2. En mars 1936 ou vers cette date et ultérieurement, l’Allemagne a illégalement maintenu des forces armées dans la zone rhénane démilitarisée en violation de l’article premier du Traité de garantie mutuelle.

3. Le 7 mars 1936 ou vers cette date et ultérieurement, l’Allemagne a illégalement construit et entretenu des fortifications dans la zone rhénane démilitarisée en violation de l’article premier du Traité de garantie mutuelle.

4. Le 10 mai 1940 ou vers cette date, l’Allemagne a illégalement attaqué et envahi la Belgique, en violation de l’article 2 du Traité de garantie mutuelle.

5. Le 10 mai 1940 ou vers cette date, l’Allemagne a illégalement attaqué et envahi la Belgique sans avoir au préalable cherché à régler ses différends avec ce pays par des moyens pacifiques, en violation de l’article 3 du Traité de garantie mutuelle.


VIII

Inculpation. — Violation du Traité d’arbitrage entre l’Allemagne et la Tchécoslovaquie signé à Locarno le 16 octobre 1925.

Faits. — Le 15 mars 1939 ou vers cette date, l’Allemagne a illégalement, par la contrainte et la menace de forces armées, contraint la Tchécoslovaquie à se livrer ainsi que ses habitants aux mains du Führer, Chancelier du Reich, sans avoir cherché à régler ses différends avec ce pays par des moyens pacifiques.


IX

Inculpation. — Violation de la Convention d’arbitrage entre l’Allemagne et la Belgique, signée à Locarno le 16 octobre 1925.

Faits. — L’Allemagne a, le 10 mai 1940 ou vers cette date, illégalement attaqué et envahi la Belgique sans avoir au préalable cherché à régler son différend avec ce pays par des moyens pacifiques.


X

Inculpation. — Violation du Traité d’arbitrage entre l’Allemagne et la Pologne signé à Locarno le 16 octobre 1925.

Faits. — Le 1er septembre 1939 ou vers cette date, l’Allemagne a illégalement attaqué et envahi la Pologne sans avoir au préalable cherché à régler son différend avec ce pays par des moyens pacifiques.


XI

Inculpation. — Violation de la Convention d’arbitrage et de conciliation intervenue entre l’Allemagne et les Pays-Bas le 20 mai 1926.

Faits. — L’Allemagne s’étant engagée solennellement à régler par des moyens pacifiques les différends de toute nature qui pourraient surgir entre elle et les Pays-Bas si d’un commun accord les parties ne les avaient pas déférés à la Cour Permanente de Justice Internationale et s’ils ne pouvaient être réglés par la voie diplomatique. Le 10 mai 1940 ou vers cette date, au mépris de cet engagement et sans avertissement, l’Allemagne a attaqué, envahi et occupé les Pays-Bas avec une force militaire, violant ainsi leur neutralité et leur intégrité territoriale et détruisant leur indépendance souveraine.


XII

Inculpation. — Violation de la Convention d’arbitrage de conciliation intervenue entre l’Allemagne et le Danemark le 2 juin 1926.

Faits. — L’Allemagne s’était engagée solennellement à régler par des moyens pacifiques les différends de toute nature qui pourraient surgir entre elle et le Danemark, si d’un commun accord les parties ne les avaient pas déférés à la Cour Permanente de Justice Internationale et s’ils ne pouvaient être réglés par la voie diplomatique. Le 9 avril 1940 ou vers cette date, l’Allemagne a attaqué, envahi et occupé le Danemark avec une force militaire, violant ainsi sa neutralité et son intégrité territoriale et détruisant son indépendance souveraine.


XIII

Inculpation. — Violation du Traité entre l’Allemagne et d’autres puissances prévoyant la renonciation à la guerre en tant qu’instrument de politique nationale, signé à Paris le 27 août 1928 et connu sous le nom de Pacte Briand-Kellogg.

Faits. — L’Allemagne a, aux dates spécifiées dans la colonne 1 ou vers ces dates, attaqué par les armes les États souverains spécifiés dans la colonne 2 et engagé la guerre contre ces États souverains, violant par là sa déclaration solennelle condamnant le recours à la guerre pour la solution des litiges internationaux, sa renonciation solennelle à la guerre en tant qu’instrument de politique nationale dans ses relations avec de tels États souverains et son engagement solennel de ne régler ou ne résoudre que par des moyens pacifiques les différends ou conflits de toute nature ou origine qui s’élèveraient entre elle et de tels États souverains.

Colonne 1 Colonne 2
1er septembre 1939 ............…..................…....… République de Pologne
9 avril 1940 ..............................….......……......… Royaume de Norvège
9 avril 1940 ............…....................…....….......… Royaume de Danemark
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume de Belgique
10 mai 1940 .........…...................….......….......… Grand-Duché de Luxembourg
10 mai 1940 .........….......................…....….......… Royaume des Pays-Bas
6 avril 1941 .........….......................…....….......… Royaume de Grèce
6 avril 1941 .........….......................…....….......… Royaume de Yougoslavie
22 juin 1941 .........…...................…..…..…........… URSS
11 décembre 1941 .........…...............…...….......… États-Unis d’Amérique


XIV

Inculpation. — Violation du Traité d’arbitrage et de conciliation intervenu entre l’Allemagne et le Luxembourg le 11 septembre 1929.

Faits. — Le 10 mai 1940 ou vers cette date, sans avertissement, au mépris de son engagement solennel de régler par des moyens pacifiques tous les différends qui pourraient s’élever entre elle et le Luxembourg, violant ainsi sa neutralité et son intégrité territoriale, l’Allemagne, avec une force armée, a attaqué, envahi et occupé le Luxembourg, violant ainsi sa neutralité, son intégrité territoriale, et détruisant son indépendance souveraine.


XV

Inculpation. — Violation de la Déclaration de non-agression intervenue entre l’Allemagne et la Pologne le 26 janvier 1934.

Faits. — Le 1er septembre 1939 ou vers cette date, en différents points de la frontière germano-polonaise, l’Allemagne, recourant à la force armée dans le but d’obtenir une décision, a employé des forces armées pour attaquer et envahir ce pays ou commettre tous autres actes d’agression à son égard.


XVI

Inculpation. — Violation de l’assurance donnée par l’Allemagne le 21 mai 1935 que l’inviolabilité et l’intégrité de l’État fédéral d’Autriche seraient reconnues.

Faits. — Le 11 mars 1938 ou vers cette date, en différents points de la frontière germano-autrichienne, l’Allemagne a, en violation de ses solennelles déclarations et assurances, envahi avec ses forces militaires le territoire fédéral de l’Autriche et l’a annexé à l’Allemagne.


XVII

Inculpation. — Violation de l’Accord austro-allemand du 11 juillet 1936.

Faits. — Entre le 12 février et le 13 mars 1938, par pression et différents actes d’agression comprenant le recours à la force armée, l’Allemagne a obligé l’État fédéral d’Autriche à renoncer à sa souveraineté en faveur de l’État allemand, en violation de l’engagement pris par elle de reconnaître la pleine souveraineté de l’État fédéral autrichien.


XVIII

Inculpation. — Violation des assurances allemandes données le 30 janvier 1937, le 28 avril 1939, le 26 août 1939 et le 6 octobre 1939 de respecter la neutralité et l’inviolabilité territoriale des Pays-Bas.

Faits. — Le 10 mai 1940 ou vers cette date, sans avertissement et sans recours à des moyens pacifiques de règlement de tous les différends en cause, l’Allemagne, avec une force armée et en violation de ses assurances solennelles, a envahi, occupé et tenté d’annexer le territoire souverain des Pays-Bas.


XIX

Inculpation. — Violation des assurances données par l’Allemagne le 30 janvier 1937, le 13 octobre 1937, le 28 avril 1939, le 26 août 1939 et le 6 octobre 1939 de respecter la neutralité, l’intégrité territoriale et l’inviolabilité de la Belgique.

Faits. — Le 10 mai 1940 ou vers cette date, sans avertissement, l’Allemagne, avec une force armée et en violation de ses assurances et déclarations solennelles, a attaqué, envahi et occupé le territoire souverain de la Belgique.


XX

Inculpation. — Violation des assurances données le 11 mars 1938 et le 26 septembre 1938 à la Tchécoslovaquie.

Faits. — Le 15 mars 1939 ou vers cette date, en établissant un protectorat de Bohême-Moravie, sous pression et par menace de violence, l’Allemagne a rompu l’assurance donnée le 11 mars 1938 de respecter l’intégrité territoriale de la République tchécoslovaque, ainsi que l’assurance donnée le 28 septembre 1938 que, si les territoires dits des Sudètes lui étaient cédés, l’Allemagne ne présenterait pas à la Tchécoslovaquie d’autres revendications territoriales.


XXI

Inculpation. — Violation de l’Accord de Munich et annexes du 29 septembre 1938,

Faits. — 1. Le 15 mars 1939 ou vers cette date, sous pression et par la menace d’une intervention militaire, l’Allemagne a obligé la République de Tchécoslovaquie à livrer le sort du peuple et du pays tchèques aux mains du Führer du Reich allemand ;

2. L’Allemagne a refusé de participer à la garantie internationale des nouvelles frontières de l’État tchécoslovaque prévues à l’annexe I de l’Accord de Munich.


XXII

Inculpation. — Violation des assurances solennelles données par l’Allemagne le 3 septembre 1939, le 28 avril 1939 et le 6 octobre 1939 qu’elle respecterait la souveraineté et l’indépendance du Royaume de Norvège.

Faits. — Le 9 avril 1940 ou vers cette date, sans avertissement, l’Allemagne, avec ses forces militaires et navales, a attaqué et envahi le Royaume de Norvège et commis à son égard d’autres actes d’agression.


XXIII

Inculpation. — Violation des assurances données par l’Allemagne le 28 avril 1939 et le 26 août 1939 au sujet de la neutralité et de l’inviolabilité du territoire du Luxembourg.

Faits. — Le 10 mai 1940 ou vers cette date, sans avertissement et sans recours aux moyens pacifiques pour régler tout différend en cause, l’Allemagne, avec une force militaire et en violation de ses assurances solennelles, a envahi, occupé et annexé le territoire souverain du Luxembourg.


XXIV

Inculpation. — Violation du Traité de non-agression entre l’Allemagne et le Danemark, signé à Berlin le 31 mai 1939.

Faits. — Le 9 avril 1940 ou vers cette date, sans avertissement préalable, l’Allemagne, avec des forces militaires, a attaqué, envahi le Royaume de Danemark et commis à son égard d’autres actes d’agression.


XXV

Inculpation. — Violation du Traité de non-agression signé entre l’Allemagne et l’URSS le 23 août 1939.

Faits. — 1. Le 22 juin 1941 ou vers cette date, l’Allemagne, à l’aide de forces militaires, a attaqué l’URSS et commis à l’égard de ce pays des actes d’agression.

2. Le 22 juin 1941 ou vers cette date, sans avertissement ni recours à un échange de vues amicales ou à l’arbitrage, l’Allemagne a employé des forces militaires pour attaquer l’URSS et commettre des actes d’agression contre ce pays.


XXVI

Inculpation. — Violation des assurances données par l’Allemagne le 6 octobre 1939 concernant le respect de la neutralité et de l’intégrité territoriales de la Yougoslavie.

Faits. — Le 6 avril 1941 ou vers cette date, sans avertissement préalable, l’Allemagne, avec des forces militaires, a attaqué, envahi le Royaume de Yougoslavie et commis d’autres actes d’agression à l’égard de ce pays.

  1. Ce texte de l’Acte d’accusation a été corrigé conformément à la requête du Ministère Public en date du 4 juin 1946, adoptée par le Tribunal le 7 juin 1946, qui tendait à rectifier certains désaccords entre le texte allemand et les autres textes.