Premiers beaux jours (Verhaeren)
PREMIERS BEAUX JOURS
Où l’on s’en va avec la simple joie
D’aller, droit devant soi
Toujours,
Les champs semblent si doucement frémir à l’air
Qu’on les dirait vierges et clairs
Comme aux saisons les plus jeunes du monde.
Les fleurs bonnes, les eaux profondes
Et les mousses d’argent et d’or,
Brins, flots et pétales tremblent d’accord,
Sous les baisers luisants du vent qui glisse.
Le sol est franc, le ciel est lisse,
Les moucherons
Dans les taillis, autour des troncs,
Tourbillonnent en légères nuées
Pour secouer, de leurs ailes fines, l’hiver.
Tous les fossés sont déjà verts,
Font le tour de la Flandre
Avant de s’en aller, de méandre en méandre,
Vers l’infini.
Et les moulins, avec leur face en croix,
Et les maisons, avec les yeux de leurs fenêtres,
Ici, partout, ailleurs, regardent apparaître