Poésies badines et facétieuses/La psautier

LE PSAUTIER.

CONTE.

« Du pieux roi David, que les psaumes sont beaux !
« Ma fille, en vous couchant, faites-en la lecture ;
« Éclairez-vous de ses flambeaux ;
« Votre âme sera toujours pure.
« Je vous prête mon grand psautier ;
« Plût à Dieu, ma chère Isabelle,
« Que vous le sussiez tout entier ! »
— Oui, maman. — Voici donc la belle
Qui prend le saint livre, et le met,
Sans trop grand désir de le lire,
Très-proprement sous son chevet.
Or, elle attendait un beau sire.
Il vint ; et les tendres ébats,
Agitant draps et couverture,

Le psautier, descendu plus bas,
Se trouve au fort de l’aventure ;
Bien plus : car du prudent ami,
La reliure toute neuve,
D’un plaisir qui n’est à demi,
Reçut une abondante épreuve.
Le matin la mère arriva,
Et ne vit pas l’amant, sans doute ;
Mais son cher volume se trouva
Tout maculé, tout en déroute.
À l’œil, au tact, à l’odorat,
Elle frémit, elle soupçonne.
« Mon psautier est en bel état !
« Parlez-moi, petite friponne ? »
— Je ne sais pas d’où vient cela.
En faute, assurément, je ne suis point tombée
Sinon que j’ai rêvé que David était là
Qui me prenait pour Bethsabée !… »