Poèmes suivis de Venise sauvée/Note de l’éditeur

Gallimard (collection Espoir) (p. 7-8).

NOTE DE L’ÉDITEUR

En 1940, Simone Weil commença d’écrire une tragédie, Venise sauvée, d’après le récit de Saint-Réal, Conjuration des Espagnols contre la République de Venise. Ce projet lui tenait à cœur ; ses confidences et les nombreuses ébauches qu’elle a laissées en témoignent. On a pu réunir, par exemple, une cinquantaine de versions du grand monologue de Jaffier. Pour éclairer ses intentions et compléter, dans la mesure du possible, le texte de cette tragédie restée inachevée, nous publions en préface les notes éparses dans les Cahiers de Simone Weil et qui se rapportent à Venise sauvée. C’est du reste à sa demande que ces notes furent réunies et lui furent envoyées à Londres, en même temps qu’une copie du texte de la tragédie. Son intention était alors de l’achever ; la mort seule l’en empêcha.

Avec Venise sauvée, nous publions ici les poèmes de Simone Weil, inédits pour la plupart. Certains sont des œuvres de jeunesse. Les Vers lus au goûter de la Saint-Charlemagne ont été composés en janvier 1926. Simone Weil, élève de Première Supérieure au lycée Henri-IV, avait été chargée d’écrire et de lire le poème qu’on lit traditionnellement à la fête des lycées et collèges dédiée à Charlemagne, à la fin de janvier. À une jeune fille riche remonte aussi probablement aux années d’études. Éclair fut écrit en 1929 ; Simone Weil dit, dans ses Cahiers (II, p. 329), qu’elle l’a écrit à vingt ans. Prométhée doit dater de 1937. Elle envoya ce poème à Paul Valéry qui la remercia par la lettre qu’on trouvera ci-après. À un jour est postérieur à Prométhée ; la première version en fut écrite en 1938. Le poème Les Astres fut composé dans les derniers jours de 1941 ou les tout premiers de 1942. La Mer, Nécessité, La Porte sont des œuvres écrites également à Marseille en 1941-1942.

Ces dates sont celles de la première rédaction de ces poèmes. Mais Simone Weil corrigea et remania certains d’entre eux plus d’une fois par la suite. Dans une lettre à ses parents, écrite à Londres le 22 janvier 1943, elle leur indique encore des changements à faire dans les poèmes Les Astres, Prométhée, À un jour, et dans le « chant de Violetta » qui termine Venise sauvée. Dans la même lettre, elle dit : « Ce serait gentil de reproduire quelques exemplaires du recueil de vers, sans hâte (Violetta inclus, avec, avant, les quatre derniers vers de Jaffier)J’aimerais assez que ces vers paraissent tous ensemble, d’un coup, dans l’ordre chronologique, quelque part… » (Écrits de Londres et dernières lettres, pp. 227-228.)

Éclair et Nécessité ont été publiés dans les Cahiers du Sud en 1947 (no 284, pp. 565-566). Le poème La Porte a été publié au début des Pensées sans ordre concernant l’amour de Dieu.

On a joint à Venise sauvée et aux poèmes une œuvre d’extrême jeunesse et en prose, mais dont la grâce poétique permet de l’inclure dans ce recueil : Les Lutins du feu, conte que Simone Weil écrivit à onze ans.