Poèmes incongrus/À Fontainebleau (ronde)

Pour les autres éditions de ce texte, voir À Fontainebleau.

Poèmes Incongrus : suite aux Poèmes mobilesLéon Vanier, bibliopole (p. 43-44).


À FONTAINEBLEAU

RONDE


Un soir, à Fontainebleau,
Une carpe centenaire,
Sortant sa tête de l’eau.
Dit : — C’est extraordinaire,
Dites-moi donc qui je vois,
Carpillons, carpillonnettes,
Dites-moi donc qui je vois
Se promener près du bois ?

— C’est peut-être un roi puissant
Qui vient près de nous, grand’mère,
Se reposer en passant
Des fatigues de la guerre !
— Si c’était un puissant roi,
Carpillons, carpillonnettes,
Si c’était un puissant roi,
Il aurait beau palefroi !


— C’est peut-être un empereur…
Voyez son regard céleste
Et son front plein de candeur,
Comme il est simple et modeste !
— Si c’était un empereur,
Carpillons, carpillonnettes,
Si c’était un empereur !
Il aurait garde d’honneur !

C’est un prince, pour le moins,
Favori de la fortune,
Il vient ici sans témoins
Rêver au clair de la lune !
— Non, car un prince du sang,
Carpillons, carpillonnettes.
Non, car un prince du sang
Serait d’or éblouissant !

— Plus de prince, d’empereur,
Ni de roi… joie éphémère !
Il est parti, quel malheur !
Le reverrons-nous, grand’mère ?
— Ne vous désolez pas tant,
Carpillons, carpillonnettes.
Ne vous désolez pas tant,
Car c’est notre président !