(p. 134-137).


VALSE


Allégro.


 
Comme une brise
Tiède, qui grise,
Glissent les sons
Des violons,
Des harpes frêles,
Des clavecins,
Et la chanson des flûtes grêles
Au rythme sourd des tambourins.

Valse ma mie,
J’aime, chérie,
Le lourd parfum
Des cheveux bruns.
J’aime ton âme,
J’aime tes seins
Et ton corps souple qui se pâme,
Ton beau corps pressé sur le mien.


Andante.


 
Te souvient-il du soir d’ivresse
Où je baisai ton jeune cœur ?
Te souvient-il de nos caresses
Parmi les grands jardins en fleurs ?

Las ! où sont déjà tant de choses,
Où sont-elles, ô mon Amour ?
Combien m’as-tu donné de roses,
Qui se flétrirent tour à tour ?

Entends-tu la chanson d’Automne,
La chanson des rameaux pâlis,
La plainte lente et monotone
Du vent qui brise les grands lys ?

Valse, ma mie au regard tendre,
Lève la tête et me souris.
Toi, chère, tu voulus comprendre
Et tu pleuras d’avoir compris !

 

Ah ! si quelque jour, à l’aurore,
Étouffant un cruel soupir
Bien loin de l’être qu’il adore,
L’un de nous s’en allait mourir !

Valsons, valsons toujours plus vite,
Parmi les couples éperdus ;
Abandonne-toi, Marguerite,
Au bras qui ne t’étreindra plus,

Lorsque, dans le sable des dunes,
Cendre légère de nouveau,
Au rythme plaintif des roseaux
Nous valserons au clair de lune !

Mais ralentissons,
La folle chanson
N’est plus qu’un frisson.
Est-ce le silence ?
On voit s’alanguir,
Un instant frémir,
Traîner, tressaillir…
Et puis rebondir
La danse !


Finale.


 
Valse encore, valse toujours,
Ris ton doux rire, ô mon amour,
Le Printemps vole à tire-d’ailes…
Bientôt nous chanterons des vers
En cueillant sur les rameaux verts
La moisson des roses nouvelles !

Dans la chaleur des clairs rayons,
Sur la mousse nous glisserons.
Et notre étreinte sera telle
Que, triste d’avoir trop lutté,
Tu me livreras la beauté
Qui fait les choses éternelles.