Petit dictionnaire des grands hommes de la Révolution/Dédicace
DÉDICATOIRE
Publier le Dictionnaire des grands hommes du jour, c’eſt vous offrir la liſte de vos adorateurs ; auſſi, dût-elle au premier aſpect vous effrayer, je n’ai pas balancé un inſtant à vous en faire l’hommage. Toute la France fait quelle vous doit ſes meilleurs défenſeurs, & qu’en paroiſſant ſoupirer à vos genoux, ils ne pouvoient en effet brûler que pour la patrie. Ah ! ſans doute, Madame, vous poſſédiez trop d’avantages, pour qu'un mortel oſât vous aimer pour vous-même ; il auroit fallu qu’il ſe décidât entre votre eſprit & vos charmes ; qu’il quittât ſans ceſſe vos ouvrages pour vos yeux, vos yeux pour vos ouvrages ; & le poids de tant de proddiges étoit au-deſſus des forces humaines. Tous les bons Français ont donc été réduits à ne deſirer en vous que le bien public, & à ſe ſacrifier pour lui entre vos bras. Il étoit écrit, Madame, que, juſqu’à vos amans, tout ſeroit libre en France ; & vous avez fécondé, on ne peut mieux, cette grande deſtinée ; vous avez éprouvé leur patriotiſme par vos diſcours ; vous l’avez fortifié par vos faveurs : enfin, vous avez formé des hommes au-deſſus de tous les événements. Qu’il eſt beau, Madame, d’éteindre ainſi l’amour en ſe prodiguant ſoi-même, & de faire de la jouiſſance un frein redoutable au lieu d’une vile récompenſe ! Une pareille ſcience étoit ſans doute reſervée à la fille du plus grand miniſtre de l’année paſſée, à la fille du plus profond génie de l’année paſſée ; à une fille enfin, qu’on peut regarder comme le ſeul débris de la gloire de ſon père. Mais je m’arrête, Madame ; à force de vous louer, je pourrois oublier, & qui vous êtes, & ce que je vous dois ; & je ſerois inconſolable, ſi, en recevant mon hommage, vous vous trompiez ſur ſon intention. Je l’abrège donc de peur de l’affoiblir, & je finis, Madame, par joindre au reſpect invincible & général que vous inſpirez, celui de