Petit cours d’histoire de Belgique/p03/ch1

Maison d'édition Albert De Boeck (p. 41-52).



CHAPITRE I

Le système féodal.


§ 1. — Origine et développement.


1. Féodalité. — On appelle féodalité un système de gouvernement dans lequel l’autorité souveraine était morcelée et exercée par les propriétaires du sol.

2. Alleux. — Après la conquête d’une partie de la Gaule, les chefs des Francs s’attribuèrent de magnifiques domaines. Ceux de Clovis, à la suite de ses victoires, atteignirent une valeur incalculable, car il s’empara partout : 1° des immenses propriétés qui appartenaient auparavant à l’État romain dans la Gaule ; 2° des biens très nombreux dont les propriétaires avaient disparu au milieu des guerres. Aussi avait-il des milliers de grandes fermes cultivées par des multitudes d’esclaves[1] et de serfs.

Les autres guerriers francs s’étaient partagé le nord de notre pays. Chacun avait obtenu une villa ou grande ferme, et ce domaine formait un alleu, c’est-à-dire une terre possédée en toute propriété. Le possesseur en effet en était pleinement propriétaire, il le laissait à ses enfants, le tenant seulement « de Dieu et de son épée. »

Au centre de l’alleu, s’élevait l’habitation simple et rustique du maître, protégée par de fortes haies. D’un côté était la basse-cour bien pourvue d’animaux et d’oiseaux ; de l’autre, le jardin et le verger planté de pommiers. Venaient ensuite, dispersées çà et là, les misérables huttes des esclaves et des serfs auxquels était réservée la culture des terres avoisinantes.

c) Les propriétaires des alleux formaient une véritable classe noble, une aristocratie orgueilleuse et guerrière, qui aspira bientôt à une indépendance complète vis-à-vis de la royauté. Les domaines du clergé ayant obtenu des rois mérovingiens l’immunité, c’est-à-dire la défense aux officiers du roi d’y pénétrer pour lever des impôts ou rendre justice, les seigneurs à leur tout réclamèrent la même faveur pour leurs propriétés. Cette prétention fut admise et les seigneurs devinrent, dans leurs alleux de véritables petits souverains presque indépendants du roi.

3. Bénéfices ou fiefs. — Sous Charles Martel, on vit apparaître une nouvelle espèce de propriétés : ce sont les bénéfices[2]. Lorsque les Mérovingiens furent tombés dans la misérable situation que l’on sait, les domaines royaux restèrent pour ainsi dire sans maîtres ; ceux du clergé, par leur admirable culture, par leur étendue d’ailleurs, avaient excité depuis longtemps d’ardentes convoitises. Aussi, au-milieu de la confusion qui accompagna l’avènement de Charles Martel, les nobles tout-puissants se jetèrent avidement sur cette magnifique proie, et chacun en enleva ce qu’il put. Charles, qui avait précisément les nobles pour appui, ne pouvait réprimer leurs violences ; il laissa donc aux ravisseurs ce qu’ils avaient pris, mais il y mit des conditions : les nobles durent reconnaître que les terres ainsi usurpées appartenaient au souverain ; il fut convenu qu’ils en auraient la jouissance ou le bénéfice, mais qu’en retour ils promettraient fidélité au souverain, combattraient avec lui à la guerre et lui payeraient certaines redevances ; que s’ils ne remplissaient pas ces devoirs, le souverain reprendrait ses terres ; qu’elles lui retourneraient d’ailleurs à la mort du détenteur.

Les propriétés ainsi cédées s’appelèrent des bénéfices et plus tard des fiefs.

4. Hérédité des fiefs. — Les bénéfices étaient donc donnés d’abord pour la vie seulement. Mais on conçoit aisément que les fils à la mort du père, désiraient, en jouir à leur tour ; et si le père avait fidèlement servi le prince, celui-ci ne s’y opposait pas souvent. Au besoin d’ailleurs, le fils retenait de force le bénéfice, quand le souverain manifestait l’intention de le reprendre. Cela se vit fréquemment à partir de Louis le Débonnaire. Bientôt les nobles prétendirent partout laisser leurs fiefs à leurs enfants, et les rois furent obligés d’y consentir : les fiefs devinrent héréditaires.

Le même phénomène se produisit à propos des emplois : sous Charlemagne, les comtes, gouverneurs des provinces, n’étaient pas à leur mort remplacés par leur fils. Mais, après lui, ils essayèrent naturellement de maintenir dans leurs familles la haute dignité dont ils étaient revêtus. Ici encore, les rois durent céder et les comtés devinrent ainsi des fiefs héréditaires.

5. Transformation des alleux en fiefs. — Au IXe siècle, les alleux, à leur tour, devinrent des fiefs sous l’influence de causes diverses. L’empire à cette époque, était retombé dans un désordre inexprimable : les lois étaient impunément violées ; les puissants seigneurs dépouillaient les petits propriétaires ; l’antique droit de venger soi-même ses injures avait reparu, et de nouveau se dressaient devant les portes de sinistres poteaux, sur lesquels était fichée la tête d’un ennemi tué. Bientôt enfin s’étaient montrées les bandes dévastatrices des Normands.

Plus de sécurité nulle part pour l’homme faible ! Il fallut chercher des protecteurs au milieu de ces dangers. Les petits propriétaires se recommandèrent aux grands ; le petit seigneur céda son royaume au puissant seigneur, à la condition de le reprendre comme fief : l’un donnait sa protection, l’autre faisait serment de fidélité et s’astreignait à certains devoirs, il devenait vassal.

Au reste, les grands seigneurs eurent souvent recours à la force pour obliger les petits propriétaires à se faire leurs vassaux. Ainsi firent partout les comtes envers les seigneurs de leur comté.

6. Investiture. — Le seigneur qui avait la jouissance d’un fief s’appelait vassal. Il était, sous la dépendance d’un suzerain. À la mort du vassal, son héritier ne devenait légitime possesseur du fief qu’après avoir reçu l’investiture du suzerain. Il se présentait devant celui-ci tête nue, sans épée ni éperons, revêtu d’une cotte de mailles. Mettant un genou en terre et sa main dans celle du suzerain, il lui disait : « De ce moment, je deviens votre homme ». Par là, il proclamait sa dépendance vis-à-vis du suzerain, il lui faisait hommage. — Ensuite, par un serment solennel, il jurait de remplir loyalement tous ses devoirs envers son suzerain : il lui engageait sa foi. — Enfin, le suzerain lui remettait une motte de gazon, une branche d’arbre ou une épée : c’était le symbole de l’autorité qu’il lui conférait sur le fief, c’était le signe de son investiture.

1. Féodalité. — On appelle féodalité un système de gouvernement dans lequel l’autorité était morcelée et exercée par les propriétaires du sol.

2. Alleux. — Après la conquête de la Gaule, les souverains des Francs possédèrent des biens immenses. Les simples guerriers se partagèrent le territoire septentrional de notre pays : chacun d’eux reçut un beau domaine appelé alleu, c’est-à-dire terre possédée en toute propriété.

3. Bénéfices ou fiefs. — Au temps de Charles Martel, une grande partie des domaines royaux et des biens du clergé furent envahis par les principaux seigneurs : ceux-ci n’en devinrent pas réellement propriétaires ; ils en eurent seulement la jouissance pour toute leur vie ; en retour, ils durent remplir certains devoirs envers le souverain. Ces domaines ainsi accordés prirent le nom de bénéfices et plus tard de fiefs.

4. Hérédité des fiefs. — Les faibles successeurs de Charlemagne, incapables de se faire obéir des seigneurs, durent permettre aux détenteurs des fiefs de les léguer à leurs enfants. — Les comtes qui gouvernaient les provinces obtinrent le même privilège quant à leur charge.

Les fiefs et les charges devinrent ainsi héréditaires.

5. Transformation des alleux en fiefs. — Au IXe siècle, les propriétaires des alleux, menacés de mille dangers, obtinrent la protection des grands seigneurs en se déclarant leurs vassaux. Presque tous les alleux furent ainsi changés en fiefs.

6. Investiture. — Celui qui accordait un fief était le suzerain de celui qui le recevait. Celui-ci était le vassal du premier. Avant d’entrer en possession d’un fief, le vassal devait faire hommage au suzerain ; ensuite, il lui engageait sa foi par un serment solennel : alors le suzerain lui donnait l’investiture du fief.

7. Contrat féodal. — Le vassal avait des obligations à remplir envers son suzerain :

1° Il devait le service militaire pour vingt, trente, quarante ou soixante jours, avec un nombre fixé de soldats.

2° Il fournissait des aides en argent dans quatre cas principaux :

a) Si le suzerain était prisonnier de guerre et qu’il fallût payer sa rançon ;

b) Au mariage de sa fille aînée ;

c) Quand il armait son fils aîné chevalier ;

d) Lorsqu’il partait pour aller faire la croisade au-delà des mers.

Le suzerain avait aussi ses devoirs :

1° Il devait protéger son vassal ;

2° Il ne pouvait lui enlever son fief que pour motif de félonie ou de forfaiture, c’est-à-dire s’il violait son serment de fidélité.

§ 2. — Description d’un fief.


1. Châteaux. — Pendant l’invasion normande, on vit s’élever, dans tous les fiefs, des châteaux de pierre, solides forteresses, lourdes, massives et sombres, où résidait le seigneur à l’abri des attaques des Normands.

Ces châteaux, dans les pays accidentés, couronnaient habituellement les crêtes des rochers escarpés, comme on peut le voir encore de nos jours, par les ruines pittoresques des bords de l’Amblève et de l’Ourthe.

Dans les pays de plaines, les abords du manoir féodal[3] étaient défendus par un large fossé rempli d’eau. Derrière le fossé se dressaient de fortes murailles, percées d’étroites meurtrières[4], surmontées, de créneaux[5] et de mâchicoulis[6] et flanquées de grosses tours. Enfin, au centre du château, s’élevait une tour gigantesque : c’était le donjon, du haut duquel la vigie[7] faisait le guet jour et nuit, sonnant du cor à l’approche d’un étranger.

Les communications avec le dehors étaient établies par une porte basse pratiquée dans le mur : on la fermait au moyen d’une forte grille, la herse, que l’on pouvait abaisser ou relever. Un pont-levis permettait de franchir le fossé. Il y avait aussi des sorties secrètes, des souterrains, qui allaient déboucher dans les bois, à une demi-lieue, à une lieue de distance : les issues en étaient dissimulées sous des trappes recouvertes de gazon.

2. Seigneurs. — Le seigneur dans son fief était un petit roi. Il y exerçait une autorité à peu près sans limite, car, très souvent, il avait le droit de haute justice, c’est-à-dire d’envoyer ses manants au gibet.

a) Guerres privées. — L’occupation favorite du châtelain, c’était la guerre avec les seigneurs d’alentour : de par les lois de l’époque, chacun vengeait soi-même ses injures, et, de la sorte, toute querelle amenait une prise d’armes. Monté sur son vigoureux destrier[8], défendu par son bouclier et sa bonne cuirasse d’acier trempé, le chevalier était pour ainsi dire invulnérable ; il avait pour armes offensives la lance, l’épée la hache, la masse d’armes[9] et le poignard. Tour à tour, les adversaires allaient porter la flamme et la dévastation dans leurs domaines réciproques, au désespoir des pauvres paysans qui seuls souffraient de la lutte ; le seigneur, en effet, enfermé dans son imprenable forteresse, s’y trouvait en parfaite sécurité. — Le fléau des guerres privées était si désastreux que les évêques essayèrent d’y porter remède. La trève-Dieu fut établie au XIe siècle : il y eut défense, sous peine d’excommunication, de faire la guerre privée à certains endroits et à certaines époques, par exemple du mercredi soir au lundi matin, du cinquantième jour avant Pâques au cinquantième jour après la même fête, etc. Même, en 1082, l’évêque de Liège, Henri de Verdun, établit le Tribunal de la Paix pour punir les violateurs de la trève-Dieu. Toutefois le mal ne disparut qu’au XIVe siècle.

b) Brigandage. — Longtemps aussi, des seigneurs fidèles aux coutumes barbares se livrèrent au brigandage : ils s’embusquaient dans les bois, le long des routes, assaillaient et dévalisaient les marchands des villes qui se rendaient aux foires. Il fallut sévir avec rigueur pour mettre à la raison ces pillards. Le comte de Flandre Baudouin à la Hache fit pendre un jour dans son château de Wynendael, dix chevaliers de famille illustre qui avaient détroussé des marchands allant à la foire de Thourout. Un autre jour, le sire Pierre d’Oostcamp, pour avoir enlevé deux vaches à une pauvre femme des champs, fut jeté dans une chaudière d’eau bouillante, vêtu, éperonné et l’épée encore ceinte. Mais parfois, les châtelains, du haut de leurs donjons, bravaient impunément la colère des comtes.

c) Chasse. — En temps de paix, les seigneurs se livraient avec passion au plaisir de la chasse. À cheval, précédés d’une meute[10] nombreuse de chiens bien dresssés, ils allaient poursuivre dans les bois le sanglier, le cerf et le chevreuil. C’étaient alors des courses effrénées à travers les forêts et les vallées ; on sautait les fossés, on franchissait les barrières, et la poursuite échevelée se prolongeait des heures entières, jusqu’à ce que la bête traquée tombât enfin sous la dent de la meute en fureur. Alors les joyeuses fanfares du cor sonnaient le hallali[11] ; les chasseurs dispersés accouraient de toute part, et se disputaient vivement l’honneur de donner le coup de grâce a la bête vaincue.

De leur côté, les châtelaines sur leurs haquenées[12] faisaient la chasse à l’oiseau, au moyen de faucons apprivoisés.

b) Tournois. — Parfois des fêtes brillantes nommées tournois rassemblaient la noblesse entière d’une province. Les nobles seigneurs y paraissaient sur de fringants palefrois[13], couverts de leurs plus riches armures. Ils luttaient entre eux avec des armes courtoises[14], animés de la même ardeur que sur un champ de bataille ; chacun aspirait à faire admirer sa force et son adresse. Ces jeux si recherchés n’étaient pas sans péril ; il y survenait souvent des accidents funestes.

e) Trouvères. — L’hiver enfin, quand sifflait l’âpre bise, que tourbillonnait la neige, le seigneur, sa famille et ses serviteurs se réunissaient dans la grande salle du château, autour de la vaste cheminée où flambaient des troncs d’arbres entiers. Les longues soirées se passaient à écouter des récits de prouesses guerrières. Parfois, au retour du printemps, un poète errant, un trouvère, venait demander l’hospitalité au château ; et alors, au milieu de la vive admiration des auditeurs, il chantait sur son luth[15] les exploits des guerriers célèbres, de Roland surtout et des glorieux paladins.

3. Serfs. — À l’entour des murs de la forteresse étaient éparpillées les habitations des serfs et de quelques hommes libres désignés par les appellations méprisantes de manants[16], vilains[17], ou roturiers. L’état des serfs était sans doute un peu meilleur que celui des esclaves proprement dits, mais quelle lamentable condition néanmoins !

Le serf ne jouissait pas de la liberté personnelle. Attaché en général à la glèbe[18], il devait, aux mêmes lieux, naître, gémir et mourir[19]. Il ne pouvait se marier sans l’autorisation du seigneur ; s’il épousait une serve d’une seigneurie voisine, les enfants étaient habituellement partagés entre les deux seigneurs.

Son champ était fréquemment dévasté par les ennemis de son seigneur, par le seigneur lui-même lorsqu’il était à la chasse.

D’autre part, la liste des redevances dues par le serf était interminable : il devait la dîme[20] de ses récoltes, le cens[21] de sa terre, et des tailles[22] arbitraires ; il y avait des péages nombreux le long des routes et des rivières ; il devait se servir du moulin et du four banals, moyennant une rétribution fixée par le seigneur ; il devait la corvée[23], pour les réparations au château, le curage des fossés, l’entretien des routes, la confection des meubles, des fers de cheval, des voitures, etc. ; « taillable et corvéable à merci », du moins à l’origine, le malheureux serf pouvait à peine procurer à sa famille un misérable morceau de pain noir en retour du plus pénible labeur[24].

Ajoutons que le serf était mainmortable, c’est-à-dire qu’à sa mort, le seigneur héritait de ses biens ; que le seigneur avait seul le droit de chasse et de garenne, de pêche et de colombier ; que le seigneur enfin rendait la justice[25] sans appel : la vie du serf était dans ses mains ! « Entre toi, seigneur, et toi, vilain, il n’y a de juge que Dieu », disait une vieille formule.

Observons en terminant que des famines prolongées éclataient souvent à cause de l’insuffisance des communications ; — que souvent des épidémies terribles ravageaient effroyablement le pays ; on affirme que la peste noire, vers 1350, enleva le tiers de la population de l’Europe ; que certaines maladies hideuses enfin, telles que la lèpre, étaient fort répandues, les lépreux étaient banni de la société ; ils devaient terminer leur misérable existence loin des hommes dans des hôpitaux isolés appelés maladreries ou léproseries.

1. Châteaux. — Les invasions normandes nécessitèrent la construction de nombreuses forteresses ou châteaux. Les seigneurs les bâtissaient de préférence sur le sommet des montagnes. — Dans les pays de plaines, les châteaux étaient défendus par des fossés profonds et de fortes murailles surmontées de créneaux et de mâchicoulis. Au centre s’élevait le donjon — La porte de sortie était fermée par la herse ; un pont-levis permettait de franchir le fossé. Il y avait enfin des issues souterraines.

2. Seigneurs. — Le seigneur était souvent un maître absolu dans son domaine. Il y exerçait tous les droits, même le droit de haute-justice.

Les seigneurs désolaient le pays par leurs guerres privées continuelles ; certains d’entre eux se livraient au brigandage le long des routes.

Pour diminuer le fléau des guerres privées, les évêques promulguèrent la trève-Dieu qui devait s’étendre du mercredi soir au lundi matin, du cinquantième jour avant Pâques au cinquantième jour après la même fête, etc. Le mal ne disparut toutefois qu’au XIVe siècle.

En temps de paix, les seigneurs aimaient à poursuivre dans les bois le sanglier, le cerf et le chevreuil ou bien, dans de brillants tournois, on les voyait lutter entre eux avec des armes courtoises. Ils accordaient volontiers l’hospitalité à des poètes errants ou trouvères, qui charmaient leurs loisirs en chantant sur un luth les prouesses des guerriers célèbres.

Carte pour l’étude de la période féodale et communale.
Carte pour l’étude de la période féodale et communale.

3. Serfs et vilains. — La condition du serf était misérable : attaché à la glèbe, il devait mourir aux lieux de sa naissance ; — taillable et corvéable, il devait au seigneur la dîme, la taille, les péages, les corvées, etc. ; — mainmortable, il lui laissait en mourant son pauvre mobilier[26].

Enfin, des milliers de serfs étaient souvent enlevé par des famines prolongées et des épidémies terribles.

Au milieu des serfs habitaient quelques hommes libres appelés vilains, manants ou roturiers. Ils étaient soumis à peu prés aux mêmes charges que les serfs ; mais ils pouvaient abandonner la seigneurie, se marier sans autorisation et léguer leurs biens à leurs enfants.

§ 3. — Grands fiefs de la Belgique.


Les principaux fiefs de la Belgique étaient :

1° Le comté de Flandre qui s’étendait sur la rive gauche de l’Escaut, et dépendait de la France.

2° Le duché de Lotharingie, qui était situé sur la rive droite de l’Escaut, et reconnaissait la suzeraineté de l’empereur d’Allemagne. Ce duché se divisa de bonne heure en cinq fiefs importants :

Le duché de Brabant :

Le duché de Limbourg ;

Le duché de Luxembourg ;

Le comté de Hainaut ;

Le marquisat de Namur.

3° L’évêché de Liège et l’abbaye de Stavelot-Malmédy, dont les princes étaient aussi vassaux de l’empereur d’Allemagne.





  1. L’esclavage proprement dit florissait encore sous les Mérovingiens : chaque guerre produisait des milliers d’esclaves : c’étaient des prisonniers ou des habitants arrachés violemment de leurs pays par l’armée victorieuse. Comme à Rome, la loi laissait au propriétaire de l’esclave tout droit sur la vie de celui-ci : aussi voyait-on parfois des actes d’une rare cruauté, des esclaves enterrés vivants, d’autres rôtis à petit feu, obligés d’éteindre avec leurs jambes nues, à dix reprises différentes, des torches enflammées. — Mais le christianisme s’efforça de bonne heure d’améliorer leur sort : l’Église défendit successivement de les vendre hors du pays, de les vendre à des juifs ; elle excommunia l’assassin d’un esclave ; elle prescrivit de lui laisser le repos du dimanche ; elle déclara méritoire l’affranchissement des esclaves aussi l’esclavage s’éteignit peu à peu.
  2. Voir Kurth : les Origines de la civilisation moderne. — Esmein : Histoire du droit français.
  3. Manoir (de manere, rester) : habitation, demeure.
  4. Meurtrière : ouverture étroite dans un mur pour tirer sans danger sur l’ennemi.
  5. Créneau : dentelure de pierre au sommet d’un rempart.
  6. Mâchicoulis : galerie établie à la partie supérieure des anciennes fortifications et percée d’ouvertures à travers lesquelles on laissait couler sur l’ennemi de l’huile bouillante, du plomb fondu, etc.
  7. Vigie (de vigilare, veiller) : sentinelle.
  8. Destrier : cheval de bataille.
  9. Masse d’armes : espèce de massue.
  10. Meute : troupe de chiens courants dressés pour la chasse.
  11. Hallali : cri de chasse annonçant que le cerf est aux abois.
  12. Haquenée : cheval de moyenne taille, facile à monter.
  13. Palefroi : cheval de parade.
  14. Armes courtoises : sans pointe ni tranchant. À l’origine, les tournois étaient de vrais combats avec des armes de guerre (Monod).
  15. Luth : instrument de musique à cordes, dans le genre du violon.
  16. Manant (de manere, rester) : paysan.
  17. Vilain (de villa, métairie) : paysan.
  18. Glèbe : terre.
  19. Il y avait du reste une infinie variété dans la condition du serf.
  20. Dîme : impôt du dixième des produits, prélevé par l’Église ou par les seigneurs ; elle était levée aussi par les roturiers.
  21. Cens : redevance annuelle.
  22. Taille : taxe foncière levée sur le peuple au profit du seigneur et plus tard du souverain ; la noblesse et le clergé en étaient exempts.
  23. Corvée : travail non payé.
  24. De bonne heure cependant les obligations des serfs furent fixées par la coutume.
  25. Le seigneur haut justicier.
  26. Il avait la main morte pour transmettre ses biens.