Œuvres complètes de François CoppéeLibrairie Aldre HoussiauxPoésies, tome IV (p. 132-133).

PESSISMISME


 

JE refuse l’aumône : un pauvre meurt de faim.
Je la donne : un coquin se soûle et bat sa femme.
Et le plus scrupuleux, qu’il se loue ou se blâme,
De sa moindre action ne peut prévoir la fin.

Que faire ou ne pas faire ? Hélas ! nul n’en sait rien.
Tel grand dessein, jailli du meilleur de notre âme,
Se corrompt et produit un résultat infâme.
Souvent le bien est mal, parfois le mal est bien.


Oh ! la vie ! O mystère ! Insoluble problème !
Au caprice du sort, souffre, lutte, pense, aime,
Agite-toi… Dieu seul, s’il existe, comprend.

L’homme, c’est l’imprimeur, à son travail maussade,
Qui, la pensée ailleurs et l’œil indifférent,
Compose l’Évangile ou le marquis de Sade.