Pensées d’août/Sonnet à M. Justin Maurice
SONNET
À M. JUSTIN MAURICE
Dans le Jura.
Nous gravissions de nuit une route sévère,
Une côte escarpée aux rochers les plus hauts ;
L’orage avait cessé ; chaque nue en lambeaux
Flottait, laissant des jours où brillait quelque sphère.
Une raie un peu blanche au loin parut se faire :
C’est l’aube, dit quelqu’un ; — et sur ces monts si beaux,
Si beaux de ligne sombre, et pour moi si nouveaux,
Je chantais en mon cœur : Voyons l’aube légère !
Mais, à peine à mon siège où j’étais remonté,
Le sommeil du matin, pesant, précipité,
Ferma de plomb mes yeux. — Quand déjà l’aube errante
Luit du bord éternel, ainsi l’autre sommeil,
Le sommeil de la mort saisit l’âme espérante,
Et nous nous réveillons au grand et plein soleil !