Pauvres fleurs/Fleur d’Enfance

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Pauvres fleursDumont éditeur Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 99-102).



FLEUR D’ENFANCE.


L’haleine d’une fleur sauvage,
En passant tout près de mon cœur,
Vient de m’emporter au rivage,
Où naguère aussi j’étais fleur :
Comme au fond d’un prisme où tout change,
Où tout se relève à mes yeux,
Je vois un enfant aux yeux d’ange :
C’était mon petit amoureux !


Parfum de sa neuvième année,
Je respire encor ton pouvoir ;
Fleur à mon enfance donnée,
Je t’aime ! comme son miroir.
Nos jours ont séparé leur trame,
Mais, tu me rappelles ses yeux ;
J’y regardais flotter mon âme :
C’était mon petit amoureux !

De blonds cheveux en auréole,
Un regard tout voilé d’azur,
Une brêve et tendre parole,
Voilà son portrait jeune et pur :
Au seuil de ma pauvre chaumière,
Quand il se sauvait de ses jeux,
Que ma petite âme était fière ;
C’était mon petit amoureux !

Cette ombre qui joue à ma rive
Et se rapproche au moindre bruit,
Me suit, comme un filet d’eau vive,
À travers mon sentier détruit ;

Chaste, elle me laisse autour d’elle,
Enlacer un chant douloureux ;
Hélas ! ma seule ombre fidèle,
C’est vous ! mon petit amoureux !

Femme ! à qui ses lèvres timides,
Ont dit, ce qu’il semblait penser,
Au temps où nos lèvres humides
Se rencontraient sans se presser,
Vous ! qui fûtes son doux Messie,
L’avez-vous rendu bien heureux ?
Du cœur je vous en remercie ;
C’était mon petit amoureux !