Imprimé au Devoir (p. 39-40).

NUIT D’ÉTÉ


Qui chantera, belle nature,
Le charme de tes nuits d’été,
Où le vent est plein de murmures,
Où le ciel est lourd de beauté !


Dans leurs lits, les hommes sommeillent,
Réjouis par leurs songes vains,
Mais, dehors, les choses s’éveillent,
Et c’est l’heure des bruns divins…

On entend les eaux cristallines
Chanter aux sources d’alentour ;
Dans l’herbe folle des collines,
L’oiseau jette son cri d’amour…



La feuille tremble et se balance,
Le vent fait craquer les buissons :
Oh ! ce réveil plein de silence !
Ce silence plein de chansons !…


Vous qui dormez, dans votre tombe,
Ô morts, n’avez-vous pas frémi,
Sous la chaude brise qui tombe,
Ce soir, du vallon endormi ?…


N’avez-vous pas — ô douce ivresse ! —
Vu renaître, tous à la fois,
Vos rêves ardents de jeunesse,
Et vos purs amours d’autrefois ?…


Écoutez ! Le chêne soupire,
La terre est prise de langueur ;
On dirait que le sol respire,
Et qu’on entend battre son cœur !…


Ô douceur étrange ! Ô délire !
Ô paix dont nous sommes grisés !
On croit voir passer des sourires !
On croit voir flotter des baisers !…