Panthéon égyptien, collection des personnages mythologiques de l'ancienne Égypte, d'après les monuments
Firmin Didot (p. 91-92).

ATHÔR ou HATHÔR.

(athôr, athyr, atar, aphrodite, vénus.)
Planche 17 (A)

On a vu que le nom égyptien de cette déesse signifiait demeure, ou habitation d’Horus, et que, dans les inscriptions hiéroglyphiques, ce nom divin est exprimé par la coupe ou le plan abrégé d’un édifice, dans lequel est inscrit un épervier, le symbole d’Horus, mais les bas-reliefs et les sculptures de grande proportion nous offrent la déesse Athor, portant sur sa tête, et pour signe distinctif, l’image parfaite d’un édifice dont il est facile de distinguer la frise, la corniche et la porte. L’épervier disparaît, soit pour faire place à un simple uræus, soit à un petit bas-relief représentant l’Allaitement d’Horus, scène parfaitement en rapport avec la signification connue du nom propre de la déesse.

L’édifice complet, coiffure symbolique d’Athor, l’Aphrodite égyptienne, est parfois entouré de fleurs de lotus épanouies, ainsi qu’on peut le voir sur cette planche ; une figure semblable est sculptée sur la grande porte du sud à Karnac : la déesse est debout, à la suite de Phtha, son époux. La tête humaine d’Athor, surmontée de l’édifice, est reproduite isolément sur une foule de bas-reliefs ; mais elle a des oreilles de vache, parce qu’une vache sacrée était son symbole vivant ; la déesse emprunte même souvent la tête de cet animal[1].

Il exista en Égypte beaucoup de temples spécialement consacrés à l’Aphrodite égyptienne ; et de ce nombre furent un petit temple, dans l’île de Philæ ; le petit temple d’Ombos ; le temple de Contralato ; le temple de l’Ouest au Memmonium ; enfin le grand temple de Dendéra, l’ancienne Tentyris ; et tous ces monuments portent, dans leurs décorations architecturales, les emblèmes d’Athor, au culte de laquelle ils étaient destinés.

Le petit temple de Philæ a été construit sous les rois Lagides, et fut dédié par Ptolémée-Évergète II, et les deux reines Cléopâtre, sa sœur et sa femme, à Aphrodite, ΑΦΡΟΔΙΤΗΙ, comme porte la dédicace, en langue grecque. Le temple de l’Ouest, dans la même île, et qui offre les légendes royales hiéroglyphiques de ce même Évergète, ainsi que celles de plusieurs empereurs romains, était également consacré à l’Aphrodite égyptienne ; car les chapiteaux de ce temple sont surmontés de têtes d’Athôr, à oreilles de vache, et portent l’édifice emblématique[2]. Il en est de même du petit temple d’Ombos, et à Thèbes, du temple à l’ouest au Memmonium. Les pilastres de ce dernier monument, formés de la tête d’Athôr, contiennent, dans l’inscription hiéroglyphique dont ils sont ornés, la légende de Ptolemée-Évergète II, et le nom même d’Athôr[3].

Mais c’est principalement dans les magnifiques ruines de Dendéra, que les emblèmes et les images d’Athôr se montrent avec une extrême profusion ; Strabon nous dit que le grand temple de cette ville était dédié à l’Aphrodite égyptienne ; et la dédicace, en langue grecque, inscrite sur le listel de la corniche du Pronaos, atteste aussi que cette portion de l’édifice avait été également consacrée à la même divinité : ΑΦΡΟΔΙΤΗΙ ΘΕΑΙ ΜΕΓΙϹΤΗΙ, À Aphrodite, Déesse Très-Grande, par les habitants du Nome et de sa Métropole, sous le règne de Tibère, le 21 d’Athyr, mois qui portait précisément, en égyptien, le nom même de la déesse.

Les vingt-quatre chapiteaux du portique sont formés, comme ceux de toutes les colonnes du temple, par quatre énormes têtes d’Athôr. Cet emblème occupe le milieu de la porte du nord et le centre de la frise du Pronaos. À droite et à gauche de cette tête symbolique, sont les images, en pied, d’Athôr et de son époux Phtah-Socari, adorées par soixante-deux personnages qui occupent sans interruption le reste de la frise de la façade[4], et portent, pour la plupart, d’une main, la tête emblématique d’Athôr, et, de l’autre, l’hiéroglyphe recourbé, première lettre du mot Socari, surnom de Phtah. Une tête colossale d’Athôr occupe encore le centre de la partie postérieure du temple : enfin les décorations des frises et des corniches de cette vaste construction, présentent de tout côté la tête d’Athôr à oreilles de vache, et surmontée de l’édifice emblématique.

On a pris jusqu’ici les images de Néphthys, déesse sœur d’Isis et d’Athôr, pour Athôr même ou la Vénus égyptienne ; mais les monuments, qui seuls font autorité dans cette matière, distinguent spécialement ces deux divinités, et ne permettent point de les prendre l’une pour l’autre.


Notes
  1. Voyez l’explication de notre planche 17 (C), et la planche 17 (A), no 3.
  2. Descript. de l’Égypte, Ant., I, pl. 21.
  3. Idem, pl. 36.
  4. Idem, Ant., IV, pl. 15.

——— Planche 17 (A) ———